Les Rohingyas, persécutés en silence (09_11_2012)

  • il y a 11 ans
Chassés de leurs terres, refoulés à la frontière avec le Bangladesh, des milliers de musulmans de l’Etat de Rakhine en Birmanie prennent les routes de l’exil. Ils s’entassent dans des camps de fortune, sur des plages ou dans des rizières, à ciel ouvert. Selon l’ONU, 28 000 personnes ont fui en une semaine les affrontements entre bouddhistes et Rohingyas, la communauté musulmane minoritaire en Arakan.

Cette région de l’ouest birman s’embrase à nouveau depuis le 21 octobre. Les autorités birmanes annoncent 88 morts, mais pour les ONG le bilan est beaucoup plus lourd. En juin déjà, des heurts intercommunautaires avaient fait officiellement 80 morts et poussé 75 000 personnes à fuir. Le viol et le meurtre d’une jeune femme bouddhiste de l’Arakan le 28 mai, attribué à trois hommes musulmans, avait déclenché une vague de vengeance meurtrière à l’encontre de la communauté Rohingyas et poussé le gouvernement à déclarer l’état d’urgence dans l’Etat de Rakhine.

Ces jours, les informations font état de meurtres et de viols, de populations chassées de leurs villages, de maisons pillées et brûlées. Tout cela sous le regard des forces de l’ordre birmanes, quand ce n’est pas avec leur participation.

Les témoignages recueillis par Nurul Islam abondent dans ce sens. Président de l’Arakan National Organisation (ARNO), il raconte que trois bateaux dans lesquels des musulmans tentaient de fuir ont été attaqués «par des Arakanais, de concert avec des membres des forces de l’ordre», qui se seraient rendus coupables de meurtres et de viols. «Les forces de sécurité sont devenues des forces meurtrières. L’intention du gouvernement est claire: il veut exterminer notre communauté», dénonce ce Rohingyas exilé à Londres. Impossible de vérifier ces informations de manière indépendante, mais, en juillet déjà, dans un rapport intitulé «les forces gouvernementales s’en prennent aux musulmans Rohingyas», l’ONG Human Rights Watch dénonçait exactions commises par les autorités contre les musulmans de l’Arakan. Plus récemment, HRW a documenté à l’aide d’images satellitaires la destruction de maisons dans la ville de Kyaukpyu, à majorité musulmane.

Pour Anna Roberts, directrice de Burma Campaign UK, «Cette fois, il apparaît clairement que la violence est systématique et organisée.
La réaction du président Thein Sein n’a fait qu’exacerber les craintes des Rohingyas. Pour lui, la seule solution, c’est la déportation. «Nous les enverrons dans n’importe quel pays tiers qui les acceptera», a déclaré devant l’ONU l’homme qui a engagé le pays sur la voie des réformes depuis 2011. Pourtant, le chef de l’Etat a mis en place une commission d’enquête chargée de déterminer les causes des violences et de trouver des solutions pour la «coexistence pacifique» des populations. Abu Tahay, représentant de la communauté rohingya à Rangoon, n’y croit pas: «Plusieurs membres de cette commission sont directement impliqués dans des violences envers les musulmans.»

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