Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 2 jours
La directive européenne sur la transparence des rémunérations impose un tournant : charge de la preuve inversée, dialogue social renforcé, managers exposés… Comment accompagner ce changement culturel profond dans les entreprises ?

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Bonjour à tous sur Bsmart, émission spéciale aux victoires du capital humain.
00:10On va se focaliser dans cette émission sur la transparence salariale.
00:14Un choc culturel ou pas, un choix vertueux aussi peut-être pour certaines entreprises.
00:20Je vais en parler avec deux spécialistes. François Dillemann, bonjour.
00:23Bonjour.
00:23Donc vous êtes directeur épargne groupe chez Malakoff Humanis.
00:27On va présenter Malakoff Humanis, tout le monde connaît.
00:32Et à côté de vous, Philippe Ancard, bonjour.
00:34Bonjour.
00:35Alors l'intitulé du poste, il est long.
00:36Directeur offre transformation et transition professionnelle chez Semaphore.
00:41Donc un cabinet de conseil RH et un petit peu plus que ça également, c'est ça ?
00:46Tout à fait. On travaille, nous sommes un cabinet de conseil en ressources humaines
00:50et nous travaillons beaucoup sur les transformations d'entreprises
00:53et la directive de transparence sur les rémunérations est une transformation.
00:58C'est un des gros dossiers sur la table.
01:00Là, selon le calendrier qui est prévu, la directive européenne est transposée dans le droit français au plus tard,
01:08donc le 7 juin 2026.
01:10Première question pour vous.
01:11En tant qu'entreprise française, pourquoi attendre juin ?
01:14Pourquoi ne pas essayer d'aller dessus tout de suite ?
01:18Alors les entreprises qui attendent risquent d'être un peu dans l'urgence
01:23et on fait le reproche aux entreprises françaises d'être en retard.
01:28Toutes ne le sont pas, mais en effet, il reste 6 mois et il va falloir se dépêcher un petit peu maintenant.
01:34Et en réalité, oui, le calendrier c'est en juin, mais François Dillemann, en fait,
01:38en réalité, pour les gens qui travaillent dessus, les services RH ou les services payent,
01:42la transparence, c'est dès maintenant qu'on travaille dessus ?
01:45C'est dès maintenant, elles sont déjà dessus, effectivement.
01:47Et puis surtout, beaucoup d'entreprises l'avaient déjà fait.
01:50Je vais prendre l'exemple du groupe Malakoff Humanis dont vous parlez,
01:53enfin chez qui je travaille, qui pour le coup, cette transparence existe déjà.
01:57Il y a un gros travail qui est fait depuis de nombreuses années sur notamment l'égalité hommes-femmes.
02:02Et cette directive en parle.
02:04Si vous avez un écart de 5% entre des postes équivalents ou hommes-femmes,
02:08effectivement, il y a une explication à donner auprès des salariés.
02:13C'est quelque chose qu'on a fait.
02:14Et en plus de l'explication, on est venu corriger ces disparités déjà.
02:19Aujourd'hui, est-ce qu'on a un visuel, une vision du nombre d'entreprises,
02:24de la proportion d'entreprises en France qui sont déjà plus ou moins raccordes
02:28ou en tout cas qui seront dans les temps en juin et celles qui sont plus en difficulté ?
02:32Est-ce qu'on a moyen de savoir à peu près où on en est ?
02:35Alors, je ne pense pas parce que c'est très lié à l'entreprise.
02:39En revanche, dans un monde où on est beaucoup axé sur le RSE,
02:44l'égalité hommes-femmes, l'égalité professionnelle existait déjà.
02:47Donc, je pense que beaucoup de grands groupes sont déjà sur le sujet,
02:51se sont déjà posé les questions.
02:53Beaucoup de belles entreprises ETI et d'entreprises RSE vertueuses sont déjà au carré.
02:59Mais il y en a quand même beaucoup pour le coup où ce n'est pas le cas.
03:01Alors, la transparence salariale, c'est aussi un peu de fantasme.
03:05Par exemple, connaître le salaire du collègue à côté.
03:08J'ai envie de vous demander, monsieur Anka, la transparence salariale,
03:12qu'est-ce que c'est et surtout, qu'est-ce que ce n'est pas ?
03:15Alors, la transparence salariale, c'est un droit à l'information pour chaque salarié
03:20de pouvoir connaître dans sa catégorie d'emploi la rémunération moyenne.
03:25Sur le poste.
03:26Sur le poste, hommes et femmes.
03:29C'est ça, la directive.
03:31Ce n'est pas une loi ou une faite pour connaître les salaires du voisin.
03:38Néanmoins, la directive précise que les contrats de travail ne pourront pas empêcher
03:44les salariés de divulguer leur rémunération.
03:47Donc, en effet...
03:48C'est humain.
03:49Donc, en effet, la directive ouvre quand même une certaine transparence.
03:54Mais on ne va pas divulguer les salaires individuels.
03:56En tout cas, ce n'est pas l'entreprise qui sera obligée de le faire.
03:58Exactement.
04:00Au niveau des motivations de la philosophie, vous aviez commencé à en parler.
04:04Essayez de tendre vers l'égalité salariale femmes-hommes.
04:08Dans quelle mesure la directive peut vraiment être efficace pour aller dans cette direction-là ?
04:14Elle s'appliquera de manière obligatoire.
04:16Donc, ça va générer automatiquement de l'efficacité.
04:19Mais chez nous, ce sera une continuité.
04:21C'est-à-dire qu'on l'a fait à notre manière.
04:23Et notamment, on a lancé dans le cadre de nos nouvelles marques un programme qui s'appelle Parlons Clair.
04:29Donc, Parlons Clair, c'était au départ s'adresser à nos clients et aux utilisateurs de nos produits assurés et ou épargnants
04:37des contrats, des documents lisibles et compréhensibles.
04:41Mais on a décidé de l'appliquer en interne aussi.
04:42C'est-à-dire d'expliquer à l'ensemble des salariés comment fonctionne la rémunération, ce que propose l'entreprise.
04:47Donc, c'est en ça que la rémunération a été expliquée et qu'on est déjà dans le sujet.
04:52En revanche, est-ce qu'on s'est mis des fourchettes et des barrières qui sont celles de la réglementation à venir ?
04:59J'en sais rien.
04:59On aura peut-être à s'aligner.
05:01Mais le mouvement était déjà lancé chez Malakoff Humanis.
05:04Monsieur Ancar, petite question.
05:07Imaginons, je suis le patron d'une entreprise qui n'est pas du tout raccord, qui n'est pas du tout dans les temps,
05:12qui a beaucoup de travail en euphémisant pour être raccord avec la directive.
05:18Vous seriez le conseil, enfin quelqu'un de sémaphore viendrait faire un audit de cette entreprise.
05:23Quels seraient les premières choses, les premiers conseils pour une entreprise qui n'est pas dans les clous ?
05:29On commence par auditer les rémunérations et regarder quel est le système de rémunération qui est en place dans l'entreprise.
05:38Il y a deux options, soit une convention collective applicable et appliquée à la lettre ou pas.
05:47En tout cas, s'il y a des écarts, il faudra les justifier.
05:50Soit un système de classification interne que l'entreprise doit aussi justifier.
05:55Donc la première chose à faire, c'est de faire cette audite.
05:57Ensuite, on crée ce qu'on appelle une base de données salariale, c'est-à-dire la fameuse rémunération moyenne annuelle homme-femme.
06:07Pour inclure au-delà du pur salaire ?
06:09Pour un poste donné, c'est-à-dire un emploi réputé de valeur équivalente.
06:16Une fois que vous avez fait ça, vous avez des écarts.
06:18Comme l'a dit François, ils ne doivent pas dépasser plus ou moins 5%.
06:22S'ils dépassent, à ce moment-là, on utilise les critères de la directive pour justifier et l'entreprise devra justifier.
06:31Et le conseil que nous donnons, c'est que s'il y avait des écarts importants, il est nécessaire de les corriger et l'entreprise aura jusqu'au 7 juin pour les corriger, voire après.
06:42Mais en tout cas, on pourra lui demander de les justifier à partir du 7 juin.
06:48Au niveau des justifications, d'ailleurs, ça peut être quoi ? Parce qu'il y a des éléments qui paraissent très tangibles.
06:53Les résultats, par exemple, un commercial fait tant de chiffres d'affaires, mais tous les résultats ne sont pas quantifiables avec des chiffres.
07:02Donc comment on fait quand ce n'est pas chiffrable ?
07:04Vous prenez un exemple extrêmement tangible, celui du commercial, mais la directive le précise de manière très claire.
07:11Ce qui peut être posé comme axe de différenciation, vous avez l'ancienneté, vous avez l'ancienneté du poste, il y a pas mal de sujets.
07:21Le diplôme aussi est quelque chose qui rentre en ligne de compte.
07:25Et vous avez des choses qui sont illicites, sur lesquelles on ne pourrait pas se baser.
07:27En tout cas, la directive le précise. Et encore une fois, l'entreprise, on ne lui demande pas d'aligner la totalité des salaires, ce qui ne serait pas faisable.
07:36On lui demande de faire un constat et d'être transparente vis-à-vis des salariés qui le demanderaient.
07:42Et en plus, elle a un délai dans cette directive pour répondre aux salariés qui le demanderaient, pour qu'ils voient comment il se situe, lui, en plus ou moins 5%.
07:49Et on ne lui demandera pas, du coup, de remonter le salaire de cette personne si c'était sa problématique.
07:54On lui dira, il faut le lui justifier par des critères objectifs licits ou attention aux critères illicites qui ne seraient pas prévus.
08:02Mais encore une fois, c'est rappelé dans la circulaire.
08:04Ça veut dire aussi peut-être qu'il y a des augmentations qui vont devoir être consenties pour les personnes qui sont moins payées à valeur de travail ou niveau de responsabilité égale.
08:14On pense pas mal aux femmes. Est-ce qu'il y a un risque, parce que beaucoup d'entreprises y pensent, est-ce qu'il y a un risque d'explosion de la masse salariale à cause de la directive ou pas ?
08:22Il y a un risque d'inflation salariale pour les entreprises qui auraient basé la différence de salaire sur une différence de genre.
08:32Pour les entreprises, et François l'a rappelé, qui ne font pas cela, la directive va surtout introduire un travail, entraîner un travail de justification, de documentation.
08:46Donc vous parliez des critères, il y en a aujourd'hui quatre qui sont les compétences, les responsabilités, l'effort au travail et les conditions de travail.
08:54Donc ces quatre critères vont déjà pouvoir permettre à l'entreprise de justifier pourquoi elle a rémunéré plus un homme qu'une femme.
09:03Là on voit par exemple le risque de l'inflation salariale. Malgré tout, François Dillemann, même en cas d'inflation salariale, l'entreprise a à y gagner en fait un réajustement.
09:14Parce qu'il y a des bénéfices entre guillemets non financiers derrière. Quels sont-ils ?
09:21Bien sûr, mais c'est le sentiment d'appartenance et d'adhésion à une politique transparente. Je pense que dans l'énorme majorité des cas, ça va faire beaucoup de bien à la marque employeur et à la politique sociale de l'entreprise.
09:33Et c'est attendu par tout le monde. Et on le voit aujourd'hui, les entreprises les plus en avant sur ce sujet ont plus de facilité à attirer des talents que les autres.
09:41Ou à ne pas en perdre. Ou à ne pas en voir partir aussi.
09:45Et ne soit pas en perdre. Et on était sur un plateau tout à l'heure avec des DRH qui expliquaient justement que quand on n'était pas transparent sur la rémunération qu'on allait proposer dans un poste lors d'un entretien d'embauche,
09:56eh bien c'était suspect et un candidat pouvait dire c'est à la tête du client. Donc la DRH rappelait qu'il était impératif dans une annonce ou dans une embauche de préciser la fourchette proposée qui rentrait dans un cadre.
10:09Sinon ça rendait l'annonce...
10:12Philippe Ancard, là on met le doigt sur un point qui est avant la politique salariale, c'est la politique de recrutement.
10:18Et la transparence des salaires, ça commence déjà par la transparence dans les offres d'emploi.
10:22Tout à fait. Les offres d'emploi devront contenir soit la rémunération proposée, soit une fourchette de rémunération.
10:30Et lors du recrutement, il sera dorénavant interdit de demander l'historique de salaire, c'est à dire la rémunération de l'emploi précédent.
10:39Exactement. Et ça, à mon sens, ça va éviter, et c'est dans le préambule de cette directive, ce qu'on appelle les biais de négociation, c'est à dire une minoration de l'offre de salaire proposée par le nouvel employeur basé sur le montant perçu dans l'ancien poste et l'ancienne entreprise.
10:56Et ça, ça pèse encore plus en défaveur des femmes dans les études sociales qui sont menées.
11:02Donc en effet, la directive, elle va avoir un caractère vertueux bien avant le droit à l'information.
11:09Une dernière question pour finir, et je vais vous la poser à tous les deux. Dans 30 ans, même peut-être dans 20 ans, est-ce que quand on regardera en arrière, on se dira comment on a fait pour vivre sans la directive ?
11:22Est-ce que vous pensez qu'on se demandera comment on a pu supporter l'opacité sur les politiques salariales pendant si longtemps ?
11:29Alors, je pense que même avant 30 ans, on peut se la poser aujourd'hui, cette question. Je vois comment notre groupe évolue là-dedans.
11:36Et je pense qu'aujourd'hui, effectivement, sur l'ensemble des salariés à la même fonction, ils vous diraient, j'aurais du mal à partir dans un groupe où je ne sais absolument pas où je me situe, ni si je suis en égalité.
11:47Enfin, alors juste avant, j'ai juste parlé d'un point complémentaire que j'évoquais tout à l'heure, c'est tout ce qui est rémunération collective.
11:54Elle existe aussi, tout ce qui est périphérique de rémunération, épargne salariale, épargne retraite, actionnariat salarié.
11:59Donc, il faut aussi valoriser dans la transparence le revenu individuel qui peut générer des disparités.
12:04Mais vous avez quand même un socle qui peut aller chercher plus de 20% de la rémunération.
12:07Les mécanismes de partage de valeur aussi collectif.
12:09Et tout ça, c'est à présenter et à valoriser dans l'entreprise aussi.
12:12Un dernier mot à Philippe Ancard par rapport à ça.
12:15D'ici 20-30 ans, on se dira qu'en fait, c'était tellement normal d'avoir cette transparence.
12:21Je pense que d'ici 20-30 ans, on se dira en effet que nous avons mis du temps et que c'est aujourd'hui vertueux d'avoir une équité dans les rémunérations et une égalité pour un même poste entre les hommes et les femmes.
12:34Merci beaucoup, messieurs. François Dillemann, je le rappelle, directeur épargne groupe chez Malakoff Humanis et Philippe Ancard, directeur offre transformation et transition professionnelle chez Semaphore.
12:44Merci à vous. A bientôt sur l'enseignement de Bismarck.
12:46Merci pour votre accueil.
12:48L'émission spéciale aux victoires du capital humain, c'est terminé.
12:51On se retrouve très prochainement sur Bismarck, dans nos locaux, dans nos studios, avec nos présentateurs habituels.
12:57A très bientôt.
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations