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17 avril 1944. Un procès retentissent pour sédition s'ouvre à Washington. Des dizaines d'individus - parmi lesquels des membres du Congrès - sont accusés d'avoir coopéré avec les forces allemandes, d'avoir participé à des mouvements pronazis et comploté pour renversé le gouvernement des Etats-Unis. Comment a-t-on pu en arriver là dans la plus grande démocratie du monde ? Et pourquoi personne ne se souvient de cet épisode majeur de l'histoire américaine ?
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00:00L'Amérique des années 1930 et 1940 connaît une flambée du nazisme.
00:10Haine du juif, haine du communisme, haine de la présidence Roosevelt.
00:16Pendant plus de dix ans, plusieurs mouvements extrémistes tentent de renverser par les armes la démocratie américaine.
00:23En parallèle, l'Allemagne nazie finance une vaste opération de propagande visant à empêcher les États-Unis d'entrer en guerre.
00:34Des dizaines d'élus du Congrès et des figures publiques y participent.
00:40Comment ces mouvements ont-ils pu naître et prospérer dans la plus grande démocratie du monde ?
00:53Octobre 1929.
01:07La Grande Dépression frappe les États-Unis de plein fouet, plongeant des millions d'Américains dans la pauvreté.
01:12Les États-Unis sont plongés dans la dépression.
01:21Le pays est absorbé par ses propres malheurs.
01:26Le taux de chômage avoisine les 25%.
01:31On estime à 6 millions le nombre de sans-abris.
01:37Des camps de fortune sont installés dans les parcs des villes.
01:39La situation était donc désespérée.
01:44On pouvait s'attendre à ce que l'ensemble du système bancaire américain s'effondre.
01:50La peur et le désespoir s'emparent de la population.
02:00La plupart des Américains ne comprenaient pas les causes de la dépression économique.
02:06La question de l'origine de la dépression se posait donc avec acuité.
02:09« Et ce sont les Juifs qui sont désignés coupables.
02:14C'est l'explication qu'ils trouvent pour comprendre les malheurs qui touchent la nation. »
02:23Derrière ces accusations se profilent toutes les théories antisémites des années 30.
02:28Les Juifs seraient derrière la prise de pouvoir par les bolcheviques en 1917
02:32et les véritables dirigeants de l'URSS.
02:37Fantasme d'un complot juif mondial.
02:40Aux Etats-Unis comme en Europe, ces idées trouvent un écho grandissant.
02:43« Le communisme et le judaïsme sont les deux faces d'une même pièce. »
02:51« En fait, pour eux, la naissance du communisme en 1917 et la révolution léniniste
02:56étaient aussi bien une construction juive qu'une construction politique. »
03:04Aux Etats-Unis, un homme va bientôt cristalliser ses fantasmes,
03:07Franklin Delano Roosevelt.
03:09« La seule chose que nous devons craindre, c'est le craindre soi-même. »
03:17Démocrate élu en 1932, il met en place un ambitieux programme de relance économique
03:22pour sortir le pays de la crise.
03:25Roosevelt n'est pas juif, mais pour ses détracteurs,
03:28il incarne le fameux judéo-bolchevisme.
03:31« Roosevelt, on l'appelle Rosenfeld.
03:33Le New Deal, le mouvement politique et social de Roosevelt,
03:37on l'a appelé le Jew Deal, Jew comme juif.
03:40Et donc c'est ce moment-là où il y a tout à coup toute cette longue histoire
03:44et ce moment particulier de l'arrivée au pouvoir de Roosevelt
03:47avec un nombre très important de complots qui visent à renverser Roosevelt. »
03:54L'un des plus grands détracteurs de Roosevelt
03:56est un prêtre canadien installé dans une paroisse de Détroit, dans le Michigan.
04:01Le père Charles Coughlin est le chantre d'une Amérique blanche, nationaliste et chrétienne.
04:07Charismatique, il a fait de ses talents d'orateur un redoutable outil de propagande.
04:12« Il y a un média tout jeune à l'époque qui est la radio.
04:16Et il va commencer à proposer des sermons à la radio avec un effet important.
04:20Et il va être à peu près dans son espèce d'une sorte d'hubris.
04:24Tout d'un coup, il a l'impression de pouvoir changer le monde. »
04:27« Ses 30 millions d'auditeurs représentent une audience considérable,
04:33car les États-Unis ne comptent alors que 120 millions d'habitants.
04:36C'est sans doute le plus grand média américain entre 1930 et 1938.
04:49Il est intouchable. »
04:51« À partir du moment où un père, qui avait quand même 30 millions d'auditeurs chaque semaine,
04:57qui a l'époque, est considérable, il n'y a pas tous les réseaux sociaux, etc.
05:01C'est-à-dire qu'on a quand même une uniformité de la source d'informations,
05:04et donc la même information qui est délivrée à 30 millions de personnes,
05:07et puis les différents relais, les obliges, etc. à Boston et compagnie.
05:12Donc je pense que l'impact était considérable. »
05:14Tous les dimanches, il prend l'antenne pour vilipender
05:18ceux qu'il considère comme les ennemis de l'Amérique.
05:21« Les gens l'écoutent, les gens le suivent,
05:48et ils suscitent un mouvement rempli de colère,
05:52un mouvement rempli de haine qui blâme les Juifs, les banquiers et les communistes. »
06:02« Coughlin, qui va effectivement commencer à avoir des propos antisémites,
06:06considérer que Roosevelt est en train de détruire l'Amérique,
06:09qu'il est l'anti-Amérique,
06:11qu'il a autour de lui des gens qui n'aiment pas le pays,
06:13qu'il ne représente pas la vérité du pays,
06:15comment s'appeler Rosenfeld,
06:16« Il n'est pas juif Roosevelt, mais il est considéré comme l'égal des Juifs. »
06:20Et ça, c'est un discours qui va prendre énormément d'ampleur.
06:24Et Coughlin est une personnalité importante,
06:27qui est vraiment suivie par des millions et des millions de personnes.
06:30D'autant que les discours de Coughlin
06:32résonnent avec une longue tradition américaine.
06:36« Le grand mouvement nativiste du début du 18e siècle,
06:40avec l'idée que les descendants des Pilgrim Fathers,
06:43des pèlerins qui sont les premiers à être rentrés sur le sol américain,
06:47comptent plus que tous les migrants qui arriveront ensuite,
06:50avec l'idée qu'ils sont des vrais Américains
06:51et que les autres ne sont pas des vrais Américains. »
06:55« L'Amérique avait un système de quotas pour freiner l'immigration.
06:58L'Amérique a toujours été en quelque sorte anti-immigration.
07:01Le pays a adopté des lois dès la fin du 19e siècle
07:04et les Américains ne voulaient pas laisser entrer dans leur pays
07:07les réfugiés d'Europe de l'Est ou les réfugiés juifs allemands.
07:10Je pense que cela a créé une énorme tension. »
07:15Dans une Amérique en crise, marquée par l'antisémitisme,
07:19l'anticommunisme et le rejet de Roosevelt,
07:22les nazis trouvent un terreau fertile pour répandre leurs idées.
07:27« À cette époque, les Américains regardent à l'étranger
07:31et voient d'autres pays qui semblent aller mieux,
07:33en particulier des pays dirigés par des dictateurs.
07:38La question qui se pose est alors de savoir
07:41quelle est la meilleure forme de gouvernement. »
07:44Aux yeux de certains Américains,
07:46l'Italie de Mussolini a déjà amplement fait ses preuves.
07:50Il a relancé l'économie en éliminant communistes,
07:53parlements et partis politiques.
07:55Mais c'est la prise du pouvoir en Allemagne
07:57par Adolf Hitler en janvier 1933
07:59qui a un impact le plus puissant aux États-Unis.
08:03Les nazis l'ont bien compris.
08:04Alors que la tension monte en Europe,
08:06ils rêvent de gagner un puissant allié.
08:09Ils activent un réseau d'agents d'influence aux États-Unis.
08:11Georges Sylvester Virek est l'un d'entre eux.
08:15C'est un nazi convaincu qui a rencontré Hitler à de nombreuses reprises.
08:20Il est doté de moyens considérables pour diffuser les idées nazies.
08:23« Georges Sylvester Virek travaille comme une sorte d'agent de liaison
08:30au consulat allemand à Washington,
08:32où Hans Thompson est le chargé d'affaires.
08:39Virek rencontre des hommes d'affaires américains
08:42à qui il explique.
08:43Vous savez, Hitler va gagner
08:47et il sera reconnaissant envers les entreprises
08:51qui ont contribué à entretenir de bonnes relations avec l'Allemagne nazie. »
08:57Il prononce des discours devant des Américains pro-allemands
09:00dans lesquels il affirme qu'il est un Américain loyal
09:02qui ne voit aucun conflit idéologique avec Hitler,
09:05bien qu'il prenne soin de préciser qu'il n'est pas non plus partisan d'Hitler.
09:09Il essaye de démontrer que l'Allemagne et les États-Unis
09:11ne sont pas en conflit l'un avec l'autre.
09:13Les nazis financent également la création aux États-Unis
09:16d'un groupe pro-nazi,
09:18l'Organisation des Amis de la Nouvelle-Allemagne.
09:24Son objectif ?
09:25Propager les idées nazies sur le sol américain.
09:33Ce mouvement est très massivement financé par l'Allemagne nazie
09:36et il est lié à un antisémitisme profondément enraciné
09:40dans une nation anti-immigré
09:42faisant partie de notre histoire nationale
09:44et il est devenu un vaste réseau invisible
09:47de sympathisants pro-allemands et pro-nazis.
09:54L'organisation est dissoute en 1934
09:56en raison de ses liens trop visibles avec le Reich.
10:00Elle renaît sous une nouvelle forme en 1936,
10:03le Bund germano-américain,
10:05qui s'implante et se développe grâce à l'importante communauté
10:08germano-américaine.
10:12À sa tête, sur ordre secret d'Hitler,
10:15Fritz Kuhn,
10:16un vétéran de la Première Guerre mondiale
10:18installé aux États-Unis depuis dix ans.
10:21Il établit son quartier général
10:22dans le nord-est de Manhattan, à New York.
10:25Une véritable petite Allemagne.
10:27L'idée du Bund au départ
10:33est de créer un lieu
10:34où les immigrés allemands aux États-Unis
10:36peuvent se réunir,
10:38parler allemand,
10:39boire de la bière
10:40et se souvenir de leur héritage culturel commun.
10:45C'est ainsi que le Bund se présente,
10:47du moins au grand public.
10:49Le Bund s'est aussi lancé dans les affaires.
10:51A New York,
10:53il possède un important réseau de brasseries
10:55où ses membres se réunissent.
11:13Le Bund est soucieux
11:15d'offrir un visage folklorique aux Américains.
11:18Mais derrière cette façade
11:19de gentille associations germaniques,
11:21il ne cache pas son ancrage idéologique.
11:39Il est très clair qu'après 1936,
11:42lorsque le Bund commence vraiment
11:44à s'appuyer sur des bases formelles,
11:46il a un fondement idéologique.
11:48Ses rassemblements sont ponctués
11:49de salut nazi,
11:50son symbolisme inclut la croix gammée.
11:53Son chef commence à porter des uniformes
11:55et à les imposer à ses partisans.
11:57Il rêve de devenir le chef absolu
11:59de cette organisation
11:59qui entend prendre le contrôle des États-Unis.
12:01sous couvert de patriotisme,
12:27Kuhn présente les idées nazies
12:29comme la solution pour sauver l'Amérique.
12:31Il y a le modèle allemand,
12:35on va suivre le modèle allemand.
12:36Parce que c'est un modèle qui protège la race,
12:39c'est un modèle militariste
12:41qui soude un peuple
12:43et qui exclut des corps étrangers
12:46qui peuvent affaiblir ce propre corps.
12:47Le nazisme, en somme.
12:49Le nazisme, en somme.
12:50Il est certain que les États-Unis,
12:53en raison de leur diversité,
12:54de leur héritage et de leur histoire,
12:57devaient l'appliquer différemment
12:58de ce qui se passe en Europe.
13:00Mais en fin de compte,
13:02l'objectif était de créer
13:04un nouvel ordre mondial,
13:06un ordre mondial fasciste.
13:08Pour ancrer ces idées
13:12dans le paysage politique,
13:13le Bund multiplie les parades publiques
13:15dans les grandes villes.
13:17Encadré par la police,
13:19le mouvement défile
13:20dans les avenues de Manhattan.
13:23Pour l'heure,
13:24les autorités américaines
13:25restent de marbre.
13:27Le premier amendement
13:28de la Constitution des États-Unis
13:30accorde aux citoyens
13:31une liberté d'expression totale.
13:33Rien ne leur interdit
13:35de brandir le drapeau nazi.
13:40C'est une organisation
13:41qui n'a pas peur
13:43de s'afficher publiquement
13:44comme imitant les nazis.
13:46Ce que beaucoup d'autres groupes
13:48extrémistes de cette mouvance
13:49n'étaient pas prêts à faire.
13:53Très vite,
13:55l'organisation prend de l'ampleur.
13:58Le Bund établit des antennes
14:00à travers tout le pays,
14:01divisé en trois administrations,
14:04strictement hiérarchisées.
14:11Nous pensons que le nombre de membres
14:13était de l'ordre
14:14de quelques dizaines de milliers.
14:16Même si Kuhn affirmait
14:17qu'ils étaient plus de 100 000,
14:19cela semble peu probable,
14:21compte tenu du fait
14:21qu'il fallait être d'origine allemande
14:23et avoir envie de participer
14:25à ce type d'événements
14:25pour devenir membre.
14:29Mais il s'agit vraiment
14:30d'un groupe
14:30qui avait beaucoup d'adeptes
14:31dans ces bastions de New York
14:32et du Midwest,
14:33où il était principalement basé.
14:41Pour essaimer plus largement,
14:43le Bund s'appuie
14:44sur les communautés allemandes
14:46implantées sur tout le territoire.
14:49Il organise
14:49de grandes manifestations populaires
14:51sous forme de camps d'été
14:52qui remportent un immense succès.
14:56Le 18 juillet 1937,
14:59il inaugure en grande pompe
15:00le camp Nordland.
15:02Les nazis germano-américains
15:04prennent même la peine
15:05de se filmer en couleur.
15:07L'événement rassemble
15:0910 000 personnes
15:10et se déroule
15:11dans l'état de New Jersey,
15:13à une centaine de kilomètres
15:14de Manhattan.
15:15Fritz Kuhn
15:17y fait un discours retentissant.
15:19Le Bund développe
15:38un important portefeuille immobilier
15:40dans tout le pays.
15:41Fritz Kuhn collecte les cotisations
15:43et utilise cet argent
15:44pour acheter des terrains
15:45qui deviennent des camps
15:46où les membres peuvent se réunir,
15:48boire de la bière
15:49et célébrer ensemble
15:50les fêtes américaines
15:51et allemandes.
15:56Les enfants sont essentiels
15:58pour l'avenir du mouvement.
16:00Ils doivent être préparés
16:01physiquement à devenir
16:02les leaders de ce Reich nazi.
16:05Il y avait donc des camps
16:06dans le nord de l'état
16:07de New York,
16:08à Milwaukee,
16:08à Chicago,
16:09à Los Angeles,
16:10à San Francisco,
16:11dans le nord-ouest du Pacifique.
16:13Il y en avait
16:13dans tout le pays.
16:18Près de Manhattan,
16:41à Long Island,
16:42le Bund voit les choses en grand.
16:45Tous les vendredis,
16:47le Siegfried spécial
16:48est affrété pour transporter
16:49les sympathisants pro-nazis
16:51vers un camp du même nom
16:52qui connaît un succès fulgurant.
16:56Fort de cette popularité,
16:58le Bund acquiert des terres
17:00sur Long Island
17:00et transforme le camp
17:02en une colonie germano-américaine.
17:04Une véritable ville nazie
17:07baptisée
17:08German Gardens,
17:10les jardins allemands.
17:15Les maisons y sont décorées
17:16de la croix gammée
17:17et les rues portent
17:19les noms de Goering,
17:20Goebbels
17:20ou Adolf Hitler.
17:26Le Bund devient donc,
17:28et tous les historiens
17:29sont d'accord là-dessus,
17:30le groupe pro-nazi
17:31le plus important
17:32et le plus connu
17:33de cette période.
17:34Le nazisme reste minoritaire
17:37aux Etats-Unis,
17:39mais il trouve un vaste écho
17:40dans une société en crise.
17:43A l'instar du Bund,
17:45de nombreux groupes
17:45d'extrême droite se forment,
17:47s'organisent
17:47et se radicalisent.
17:50Derrière les camps d'été
17:51et les parades,
17:52une autre réalité
17:53plus inquiétante se dessine.
17:55Des groupes paramilitaires
17:56grandissent dans l'ombre.
17:59Au sein du Bund,
18:02il existe une division
18:03appelée Ordnansdienst,
18:05littéralement division de l'ordre
18:07calquée sur le modèle DSS.
18:10Pour devenir membre de l'OD,
18:11il fallait respecter
18:12une certaine période d'attente,
18:14être membre du Bund
18:15et faire une demande spéciale.
18:18Ce système permettait de montrer
18:24son engagement idéologique
18:25envers l'organisation.
18:27Ainsi, pour les hommes,
18:28et ce sont seulement les hommes
18:29qui étaient admis
18:30au sein de l'Ordnansdienst,
18:32il s'agissait d'un groupe
18:33qui portait des armes non létales.
18:36Nous pensons qu'ils ne portaient
18:36pas d'armes à feu,
18:38mais ils portaient certainement
18:39des gourdins.
18:40Ils ont été vus en train de protéger
18:41les dirigeants de l'organisation.
18:44Ils portaient des uniformes
18:45très distincts.
18:46Il y a un aspect paramilitaire
18:47au sein du Bund
18:48et de l'OD en particulier.
18:51D'autres groupes entendent
18:52implanter le nazisme
18:53aux Etats-Unis par les armes.
18:56Aux Etats-Unis,
18:59de nombreuses organisations
19:00différentes défendent
19:03ce que nous appelons
19:04l'idéologie nazie.
19:07Elles partagent
19:09toutes le même objectif,
19:12à savoir tenter
19:14d'introduire cette idéologie
19:15sur la scène américaine.
19:19L'une de ces organisations
19:20est fondée par un ancien
19:21scénariste d'Hollywood,
19:24profondément antisémite
19:25et anticommuniste,
19:26William Dudley Pelé.
19:31Dès son plus jeune âge,
19:33Pelé est un anticommuniste
19:34convaincu.
19:36Il part en Sibérie
19:37pendant la Première Guerre mondiale
19:38et là-bas,
19:39pendant la guerre civile russe,
19:41il est témoin des atrocités
19:42commises contre la population
19:43par les communistes
19:44qui se battent aux côtés
19:45de l'armée rouge.
19:48Pelé revient donc aux Etats-Unis
19:50avec un anticommunisme
19:51et un antisémitisme farouche.
19:54Il associe les Juifs
19:55au communisme
19:56et à la propagation du communisme.
19:59L'arrivée d'Hitler au pouvoir
20:03a été une révélation quasi divine
20:06pour William Pelé.
20:07Il affirme qu'à travers
20:09ses contacts spirituels
20:10en tant que mystique,
20:11ce qu'il est devenu
20:12après sa période
20:13de scénariste à Hollywood,
20:15certains prophètes de l'au-delà
20:16lui ont dit
20:17qu'il devait fonder aux Etats-Unis
20:18un mouvement similaire
20:19à celui qu'il voit
20:20dans l'Allemagne nazie.
20:21Dès 1933,
20:26Pelé fonde les Silver Shirts,
20:28les chemises d'argent.
20:30Il recrute des hommes
20:31qui l'équipent d'uniformes
20:32semblables à ceux
20:33des milices nazis.
20:34Leurs chemises grises
20:35sont brodées du L de Légion.
20:39Il crée un journal,
20:41le Silver Ranger,
20:42dont la propagande
20:43s'en prend aux Juifs
20:44et aux communistes.
20:47En parallèle,
20:48sa Légion puissamment armée
20:50s'entraîne
20:51en vue du Grand Soir.
20:54Ce qui distingue
20:56la Légion
20:56de tant de ces groupes,
20:58y compris le German-American Boone,
21:00c'est qu'il y a
21:00des membres de la Légion,
21:02souvent sans la permission
21:03directe de Pelé,
21:05qui commencent à s'impliquer
21:06dans des tentatives
21:06de renversement
21:07du gouvernement.
21:10Leur plan
21:11était d'être capable
21:12d'avoir un impact militaire
21:14conséquent
21:14au moment voulu.
21:16Et le moment voulu
21:17serait lorsqu'il y aurait
21:19un danger imminent
21:20d'une révolution communiste
21:22aux États-Unis.
21:25Alors que Roosevelt
21:26vient de remporter
21:27un deuxième mandat,
21:28l'opposition
21:29est de plus en plus radicale.
21:31Pour les Silver Shirts,
21:32mais aussi pour le père
21:33Charles Coffling,
21:34qui fonde secrètement
21:35le mouvement extrémiste
21:36du Front Chrétien
21:37en 1938,
21:38l'heure de passer
21:39à l'action armée
21:40à sonner.
21:41Le Front Chrétien
21:42qui va se fédérer
21:43autour de Coffling
21:45par des gens
21:46qui ne sont pas liés
21:46directement à lui,
21:47mais qui l'ont écouté,
21:47et qui vont considérer
21:49qu'ils sont une sorte
21:50d'avant-garde
21:50de la défense
21:53de l'Amérique
21:53contre les Juifs,
21:55contre l'administration
21:56Roosevelt
21:56qui est en train
21:57de détruire
21:58les bases idéologiques
22:00et les bases
22:00presque raciales
22:02de ce pays.
22:04Le Front Chrétien
22:06recrute rapidement
22:06des dizaines de milliers
22:08de militants.
22:09À la fin des années 30,
22:11le FBI les estime
22:12à près de 30 000.
22:15Basé à Boston,
22:16le mouvement SM
22:17sur la côte Est,
22:19les militants
22:19mettent rapidement
22:20en œuvre
22:20la doctrine du Front.
22:21Des adeptes
22:27qui ont juré
22:28de ne jamais faire
22:29leurs achats
22:29chez les commerçants
22:30juifs,
22:30de ne jamais soutenir
22:32un candidat
22:33qui ne suivrait pas
22:34la foi chrétienne.
22:37Ils faisaient
22:38des descentes
22:38dans les rues.
22:39Ils avaient un journal
22:40appelé
22:40Social Justice.
22:43Il était rempli
22:44de choses
22:45telles que
22:45le protocole
22:46des sages de Sion.
22:49Ils s'en prenaient
22:50également aux personnes
22:51d'apparence juive.
23:01Beaucoup plus inquiétant,
23:03en vue de renverser
23:04le gouvernement
23:04des États-Unis,
23:05le Front chrétien
23:06crée plusieurs cellules
23:08clandestines
23:08appelées
23:09comités d'action.
23:12Ils sont composés
23:12d'hommes jeunes
23:13qui ont déjà,
23:14pour la plupart,
23:15une expérience militaire.
23:16Ils utilisaient
23:20des mitrailleuses,
23:21des mitrailleuses
23:22semi-automatiques,
23:23de l'armement militaire
23:24pour s'entraîner
23:25en vue de ce qu'ils
23:26voyaient venir,
23:27c'est-à-dire
23:27une révolution communiste
23:29aux États-Unis
23:30qui serait provoquée
23:31par l'infiltration
23:32des communistes
23:33au sein de
23:34l'administration Roosevelt.
23:37Et quand ils voyaient
23:38des communistes,
23:39ils voyaient aussi
23:39des juifs.
23:40Et quand ils voyaient
23:41des juifs,
23:42ils voyaient
23:43des communistes.
23:43En 1940,
23:48le groupe basé
23:48à Brooklyn
23:49dans l'État
23:49de New York
23:50passe à une phase active.
23:56Les agents
23:57du front chrétien
23:58apprenaient
23:59à fabriquer
23:59des bombes.
24:00Ils fabriquaient
24:01des bombes
24:01dans les sous-sols
24:02de leurs appartements
24:03à Brooklyn
24:04et ils allaient
24:05au-delà
24:06de la fabrication
24:06artisanale
24:07pour passer
24:08à des types
24:09de bombes
24:09plus dangereuses
24:10en utilisant
24:11des obus
24:12d'artillerie
24:12de la Première Guerre mondiale.
24:18Ça a vraiment donné
24:22une image
24:23de violence
24:23et le risque
24:24de quelque chose
24:25de beaucoup plus important.
24:29Peut-être même
24:30un renversement
24:31violent
24:32du gouvernement
24:33américain.
24:38Face à la menace
24:39grandissante,
24:40un journal décide
24:41d'alerter
24:41le grand public.
24:43En 1937,
24:45le Chicago Daily Times
24:46envoie en immersion
24:47deux de ses journalistes
24:49au sein du Bund.
24:51John et James Metcalfe,
24:52son deux frère
24:53nés en Allemagne,
24:54naturalisé américain.
24:56Après plusieurs mois,
24:58la publication
24:58de leur reportage
24:59provoque
25:00une immense
25:00sonde de choc.
25:02En réponse,
25:03un comité d'enquête
25:04sur les activités
25:05anti-américaines
25:06est créé en 1938.
25:07Le Bund décide de répliquer.
25:25Il veut montrer
25:26qu'il est populaire
25:26et pertinent
25:27dans cette Amérique
25:28où ses idées
25:29n'ont cessé
25:29de gagner du terrain.
25:30Le 20 février 1939,
25:34il organise à New York
25:35un immense rassemblement
25:36au Madison Square Garden.
25:39Le maire de la ville
25:39l'autorise au nom
25:40du premier amendement
25:41de la Constitution
25:42qui garantit
25:43la liberté d'expression.
25:44New York compte pourtant
25:50la plus grande
25:51population juive
25:52des États-Unis.
25:53Le rassemblement
25:54est une véritable provocation.
25:57Plus de 20 000
25:58Bundistes
25:58y participent.
26:00À l'extérieur,
26:01plusieurs dizaines
26:02de milliers
26:02de manifestants
26:03tentent aussi
26:04d'entrer
26:04dans l'immense
26:05salle de spectacle.
26:14Baudet, attention!
26:41Comme c'était
27:09un événement
27:10très visible,
27:10on a pensé
27:11que les orateurs
27:12du Bund
27:12réfrénaient
27:13leurs discours
27:13les plus haineux,
27:15au sujet des Juifs
27:15notamment.
27:17Mais ce ne fut pas
27:18le cas.
27:19La soirée est électrique.
27:30Un premier incident
27:30éclate
27:31quand au milieu
27:32de la foule,
27:33Dorothy Thompson,
27:34journaliste
27:34anti-nazi,
27:36crie sa colère.
27:40son évacuation
27:42manu militari
27:42au milieu
27:43d'une foule hostile
27:44est filmée.
27:50Devant un public
27:51survolté,
27:52Fritz Kuhn
27:53monte enfin
27:54sur scène.
27:54Nous l'amourons
27:56pour les ennemis
27:58qu'il a fait.
27:59Mesdames et messieurs,
28:00fritz Kuhn,
28:02rappelons,
28:11s'il vous plaît,
28:12Sous-titrage Société Radio-Canada
28:42Sous-titrage Société Radio-Canada
29:12Sous-titrage Société Radio-Canada
29:42Sous-titrage Société Radio-Canada
30:12Sous-titrage Société Radio-Canada
30:42Fritz Kuhn est finalement jugé pour détournement de fonds et évasion fiscale.
30:49Il est condamné à deux ans d'emprisonnement.
30:51Alors que Kuhn est dans la prison de Sing Sing, au même moment, William Dudley Pelé, le chef de la Silver Légion, est confronté à de multiples accusations et ira bientôt en prison pour quelques années.
31:06C'est ainsi que l'on assiste à de nombreuses pressions judiciaires pour tenter de faire disparaître ces groupes.
31:12Pour les sympathisants du nazisme aux États-Unis, le vent s'apprête à tourner.
31:20De l'autre côté de l'Atlantique, l'Europe a basculé.
31:24En septembre 1939, la France et la Grande-Bretagne sont entrées en guerre contre l'Allemagne nazie.
31:29La crainte d'une extension du conflit gagne l'Amérique.
31:38Face à la menace croissante, le Congrès décide de renforcer les moyens du FBI et durcit sa législation sur les activités anti-américaines.
31:47Les pro-nazis sont dans le collimateur.
31:50Jusqu'alors, les autorités avaient pourtant focalisé leur attention sur le communisme.
32:01L'Union soviétique était considérée comme le grand ennemi.
32:05C'est pourquoi des gens comme Edgar Hoover, le chef du FBI, ont consacré d'énormes ressources à la traque des communistes.
32:11Et pour être honnête, les communistes n'avaient pas de base efficace en Amérique.
32:15L'une des raisons est qu'ils ne disposaient pas des mêmes sommes d'argent que les Allemands pour corrompre les gens, les influencer et les faire travailler pour eux.
32:35Jusqu'alors, Hoover, radicalement anticommuniste, n'avait pas saisi l'ampleur du danger nazi.
32:45Lorsque les États-Unis ont commencé à se rendre compte qu'il existait des liens entre ces groupes et les efforts de propagande politique nazie,
32:53et plus encore de sabotage potentiel et d'espionnage, le Congrès américain a tenté d'y remédier en adoptant une nouvelle législation.
33:01C'est le cas avec la loi sur l'enregistrement des agents étrangers, qui nous a permis de poursuivre en justice certains des dirigeants de ces groupes.
33:10Suite à une infiltration, le 14 janvier 1940, des dizaines d'agents du FBI font un raid contre la cellule du front chrétien de Brooklyn.
33:2117 jeunes hommes sont arrêtés.
33:23Les motifs de ce coup de filet sont extrêmement inquiétants.
33:26Il est évident que l'organisation s'armait de plus en plus,
33:55et devenait de plus en plus dangereuse.
33:58C'est pourquoi, à mon avis, la vague d'arrestation du front chrétien le 14 janvier 1940 n'avait rien à voir avec des préoccupations politiques.
34:06C'était surtout une question de sécurité nationale.
34:09Le front chrétien préparait une attaque massive d'institutions sur la côte est américaine, avec la bénédiction du père Coughlin.
34:25Pourtant, Coughlin, le puissant homme de Média, n'est pas inquiété.
34:30Pour les autorités, la situation est très complexe.
34:38Le père Coughlin est un prêtre, et le FBI est très soucieux de ne pas bafouer les droits religieux.
34:44Coughlin est protégé par la Constitution, mais les 17 prévenus de Brooklyn, eux, sont accusés de sédition.
34:57Le ministère public espère obtenir de lourdes condamnations.
35:01Le procureur, John Roggey, chef de la division criminelle au ministère de la Justice,
35:06est un jeune fonctionnaire à la réputation implacable.
35:08Beaucoup ont invoqué l'atteinte à leur libre expression.
35:13Ils disaient, ce que je fais, c'est simplement faire circuler des idées.
35:17Et la difficulté, c'est que dans le système américain, le procureur doit prouver l'intention.
35:23Est-ce qu'il voulait obtenir un soulèvement, la destruction de l'État américain ?
35:27Donc c'est très compliqué de prouver l'intention.
35:30Or, c'est un élément important, et cette intention, elle doit être prouvée,
35:34et les 12 membres du jury doivent l'accepter,
35:37puisqu'il faut l'unanimité au-delà du doute raisonnable.
35:42Tout s'est donc effondré, et ils ont tous été acquittés.
35:48Le chef du Front chrétien de New York a immédiatement demandé au juge
35:52s'il pouvait récupérer ses armes, ce qui a été accordé,
35:56et il est sorti du tribunal de Brooklyn les armes à la main.
36:03Le procès est un échec retentissant pour le gouvernement.
36:07Leur tentative de coup d'État a échoué, mais les motivations des membres du Front chrétien restent intactes.
36:13Alors que la guerre se profile, tout doit être mis en œuvre pour faire échouer Roosevelt,
36:17qui brigue un nouveau mandat.
36:18Le monde était en feu.
36:22Franklin Roosevelt pensait qu'il était le mieux placé pour guider l'Amérique dans cette période difficile.
36:27Et c'est ce qu'il a fait. Il a été un dirigeant très efficace.
36:30Des millions d'Américains ont le sentiment légitime que Roosevelt pousse le pays vers la guerre.
36:36Il y a des groupes qui pensent que les États-Unis devraient rester en dehors de la guerre
36:39et renforcer ses relations avec l'Allemagne nazie.
36:42Ce dont beaucoup de ces groupes se rendent compte, les extrémistes, ainsi que le ministère allemand des Affaires étrangères,
36:47c'est qu'il s'agit vraiment de la dernière occasion de vaincre Roosevelt sur le plan politique
36:51avant l'entrée en guerre probable des États-Unis.
36:54Les membres du Front chrétien choisissent alors de se rapprocher de l'appareil clandestin nazi aux États-Unis.
37:06Au printemps 1940, le mouvement du Front chrétien en Nouvelle-Angleterre et à Fieladelfie
37:13est presque directement contrôlé par des agents nazis,
37:17notamment des membres de l'état-major SS.
37:24Propagande pro-nazi, espionnage, sabotage,
37:29tout est mis en œuvre pour empêcher l'entrée en guerre des États-Unis et la réélection de Roosevelt.
37:38À l'été 1940, une série d'attentats secouent l'Amérique.
37:42Trois usines de fabrication de poudre sont détruites,
37:45réduisant d'un quart la production militaire américaine.
37:47Bien que le groupuscule représente une toute petite minorité aux États-Unis,
37:55leur opposition à Roosevelt et sa politique extérieure
37:58est largement partagée dans l'Amérique isolationniste de 1940.
38:09Les isolationnistes, le mouvement anti-guerre, n'était pas seulement un mouvement populaire.
38:14C'était aussi un mouvement politique.
38:19Certains de ses membres étaient de puissantes personnalités du Congrès.
38:23C'est un monde qui est très perméable aux idées fascistes
38:26parce qu'ils considèrent qu'ils partagent avec les fascistes un même système de valeurs
38:31qui est la défense d'une race dite nordique, pour reprendre les mots de Madison Grant,
38:36en tout cas une race anglo-saxonne,
38:38des valeurs, civilisationnelles,
38:40et un ennemi commun qui est le bolchevique et le juif.
38:43Le judéo-bolchevisme, c'est une menace qu'ils considèrent bien plus grande
38:47que quelques nazis que ce soit.
38:55Avec de puissants soutiens politiques et industriels,
38:58un comité est créé en septembre 1940.
39:01America First.
39:02Sous l'œil approbateur du régime nazi,
39:08ce lobby s'oppose à toute forme d'intervention américaine dans la guerre.
39:14Son porte-parole est un héros américain,
39:17l'aviateur Charles Lindbergh,
39:19connu dans le monde entier pour ses exploits.
39:21Un temps installé en Europe,
39:27il a côtoyé le régime nazi pendant toute la seconde moitié des années 30.
39:33Le gouvernement allemand l'invite à visiter ses installations aéronautiques.
39:38Göring lui remet de récompenses.
39:39Il pilote leurs meilleurs avions de combat
39:41et il est très vite impressionné par ce qu'il appelle le dynamisme du peuple allemand.
39:49Charles Lindbergh déclare même que l'Allemagne ne cherche qu'à être un pays.
39:51Il a voulu étendre son territoire par des moyens militaires
39:54comme l'Angleterre et la France l'avaient fait pendant des centaines d'années auparavant.
39:59Lorsque Charles Lindbergh est devenu le porte-parole du mouvement America First,
40:05celui-ci s'est transformé en une campagne nationale très, très puissante,
40:09visant à maintenir les États-Unis en dehors de la guerre.
40:15À l'automne 1940, Roosevelt est réélu pour un troisième mandat.
40:19L'entrée en guerre semble imminente.
40:22America First dénonce l'aide fournie au Royaume-Uni pour son effort de guerre.
40:26Et vous commencez à le voir sortir et organiser des rassemblements massifs en 1941.
40:47Vous savez, 10 000, 20 000, 30 000 personnes qui remplissent le Madison Square Garden.
40:53Et avec ce message, de plus en plus au vitriol.
40:56Dans son grand discours de démoine de septembre 1941, il faut l'écouter.
41:00Dans les mots qu'il emploie, il y a trois ennemis aux États-Unis.
41:04C'est les industriels, c'est Roosevelt et c'est les Juifs.
41:08Et c'est eux qui vont pousser à la guerre.
41:09C'est eux qui poussent l'Amérique à rentrer en guerre.
41:11Des dizaines de milliers de sympathisants nazis qui avaient peut-être caché leur affinité politique avec l'Allemagne nazie
41:18rejoignent le mouvement America First.
41:21Ils étaient 800 000 Américains officiellement membres de l'America First avant Pearl Harbor.
41:27Mais bien au-delà du lobbying, l'isolationnisme permet aux nazis d'infiltrer le sommet de l'appareil politique.
41:35C'est un accident qui révèle au public l'ampleur de l'ingérence et la campagne d'influence nazie qui gangrène le territoire américain.
41:48Le 30 août 1940, un DC-3 s'écrase près de Washington DC.
41:53Parmi les victimes, le sénateur républicain du Minnesota, Ernest Landin,
41:59accompagné de deux agents du FBI et un procureur du ministère de la Justice.
42:04Parmi les débris, les enquêteurs retrouvent un futur discours du sénateur.
42:09Un discours résolument pro-Allemagne et isolationniste.
42:13Son auteur n'est autre que George Sylvester Viereck,
42:17l'agent allemand chargé par le régime nazi de diffuser ses idées aux États-Unis.
42:23Il avait eu cette idée et l'avait présentée à Hitler et au commandement allemand.
42:30L'idée était d'essayer de coopter des politiciens américains
42:33pour l'aider à diffuser la propagande nazie,
42:36tout cela sous le couvert officiel de l'État américain.
42:38Pour être honnête, les Allemands étaient un peu sceptiques.
42:41Ils ne pensaient pas vraiment qu'ils seraient capables de réussir,
42:44mais le succès a dépassé leurs espérances les plus folles.
42:47La presse commence à se rendre compte que Lundin est plus qu'un simple isolationniste.
42:58C'était peut-être un agent actif pour le comte de l'Allemagne.
43:02On a commencé à prendre conscience qu'il existait une sorte d'ennemi intérieur clandestin.
43:08Un ennemi qui soutenait le mouvement isolationniste et menaçait peut-être la démocratie dans le pays.
43:16La trahison du sénateur Lundin est telle que, dès le lendemain de son décès,
43:25son épouse se précipite à son bureau pour tenter d'éliminer les preuves.
43:32À sa mort, sa femme retire une grande partie de sa correspondance de son bureau au Sénat,
43:37probablement dans le but de dissimuler la véritable nature de ses relations avec Virek.
43:41Mais ses archives sont aujourd'hui disponibles.
43:44Les historiens peuvent les consulter et les documents montrent très clairement
43:47que Virek et Lundin avaient des relations personnelles et professionnelles.
43:52Il y a des lettres dans lesquelles Virek dit à Lundin qu'il est prêt à écrire des articles en son nom
43:56qui seront publiés dans les principaux journaux américains.
43:59Il rédige des discours pour Lundin.
44:03L'ampleur des révélations a choqué les Américains.
44:06Un certain nombre de personnes très connues étaient impliquées dans cette affaire.
44:09Et ils étaient en fin de compte environ 20 à 25 membres du Congrès et sénateurs
44:14qui ont volontairement travaillé avec Virek.
44:20L'agent Virek parvient à organiser la diffusion de la propagande nazie
44:24depuis les plus hautes sphères des institutions démocratiques américaines.
44:28Ce Virek a monté une opération absolument fabuleuse.
44:32On ne peut que l'admirer.
44:34Mais il a fait en sorte d'avoir des liens privilégiés avec un certain nombre de membres
44:38de la Chambre des représentants, un certain nombre de sénateurs,
44:41pour qui il écrivait des discours, des discours pro-nazi évidemment.
44:45Donc ces élus faisaient leurs discours.
44:47Et la beauté, c'est que tous les discours sont reproduits
44:50dans ce qui est l'équivalent de notre journal officiel,
44:52qui s'appelle le Congressional Record.
44:54Et ensuite, l'élu en question, on lui demandait gentiment
44:57de bien vouloir imprimer son discours et de l'envoyer à ses administrés.
45:01Ils ont donc utilisé des millions d'enveloppes gratuitement affranchies par l'État,
45:09remplies de propagande nazie, avec l'adresse de retour d'un membre du Congrès
45:13ou d'un sénateur du Capitole.
45:15Ils ont inondé l'électorat américain.
45:17Et bien sûr, les Américains qui recevaient ces lettres de leurs députés
45:21pensaient qu'il ne s'agissait que de déclarations légitimes,
45:24de personnes s'exprimant en pleine conscience contre la politique de Roosevelt,
45:27sans jamais réaliser qu'il s'agissait de propagande nazie,
45:31qu'il aurait été distribué à leurs propres frais.
45:36Mais deux événements détournent soudainement l'attention de l'opinion.
45:40L'attaque du Japon à Pearl Harbor, le 7 décembre 1941,
45:44et la déclaration de guerre de l'Allemagne à l'Amérique provoquent une onde de choc.
45:49Le comité America First s'autodissout.
45:52L'entrée en guerre de l'Amérique offre une échappatoire aux élus corrompus.
45:56Un homme entend les en empêcher.
45:59John Roggey, qui avait échoué à faire condamner le front chrétien à Brooklyn,
46:04bâtit un dossier solide impliquant une trentaine de pro-nazis.
46:08Trois ans plus tard, le 3 janvier 1944,
46:12s'ouvre le plus grand procès américain pour sédition.
46:14Une fois de plus, la machine politique prend le dessus sur la justice.
46:27En plus, le procès mené par le procureur Roggey est si stressant
46:31que le juge meurt d'une crise cardiaque en plein milieu de ce procès qui ne dure que 4 mois.
46:36Le procès pour sédition finit par être une véritable farce.
46:43L'accusation n'a même jamais pu finir de présenter ses arguments.
46:46Et plutôt que d'essayer de relancer le procès avec un nouveau juge,
46:49le ministère de la justice décide en fait d'abandonner l'affaire.
46:54Mais Roggey n'a pas l'intention d'abandonner.
46:58Il s'est rendu en urgence dans la zone libérée de l'Allemagne,
47:01où un officier du renseignement américain a découvert des documents hautement compromettants.
47:05« Roggey a accès à des centaines de milliers de communications
47:09entre l'ambassade d'Allemagne à Washington et Berlin,
47:12prouvant que ces personnes étaient impliquées, montrant le montant des sommes dépensées.
47:18Ce sont des millions et des millions.
47:20On estime que les Allemands ont dépensé 100 millions de dollars en monnaie d'aujourd'hui
47:23dans le cadre de cette campagne de désinformation du système américain. »
47:29À son retour d'Allemagne, au vu des éléments compromettants qu'il rapporte de son voyage,
47:33il espère faire rouvrir le procès.
47:41Nous ne pouvons pas vraiment comprendre à quel point ce rapport est explosif.
47:46Cela équivaudrait à découvrir des choses incroyablement scandaleuses
47:49sur des chefs d'entreprises américains connus de tous
47:51et sur certains des hommes politiques les plus en vue du pays.
47:54Mais il ne faut pas oublier que la situation politique des États-Unis a considérablement changé.
48:00Au moment où John Roggey écrit son rapport en 1945, Franklin Roosevelt est décédé.
48:05Le nouveau président Harry Truman a siégé au Sénat américain peu de temps auparavant
48:09et il a donc des liens étroits avec certaines des personnes mentionnées dans ce rapport.
48:13Le sénateur Burton Wheeler le convainc de mettre fin à cette enquête.
48:19En 1946 et 1947, l'Amérique voulait passer à autre chose.
48:24L'idée de savoir qui était nazi et qui recevait de l'argent des nazis n'était plus d'actualité.
48:29Le public américain voulait vraiment acheter sa voiture, son réfrigérateur,
48:33envoyer ses enfants à l'école et laisser tout cela derrière lui.
48:37Et c'est exactement ce qu'ils ont fait.
48:38Malgré des preuves accablantes, le rapport de Roggey est enterré.
48:44Frustré, il en dévoile une partie au grand public.
48:48Il l'est immédiatement licencié.
48:51Cela montre les problèmes liés à l'équilibre des pouvoirs.
48:55Notamment lorsque des personnes hautement placées utilisent leurs privilèges pour contrecarrer la justice.
49:02Et je pense qu'aujourd'hui nous sommes confrontés à une situation très similaire aux États-Unis
49:06avec des personnes qui tentent délibérément de nuire au bon fonctionnement du système judiciaire,
49:11celui du processus électoral et de manière générale à celui des institutions américaines.
49:17Le fait de ne pas avoir purgé ce passé fait qu'on a retrouvé des traces jusqu'à aujourd'hui.
49:23Les mouvements fascistes aujourd'hui américains, dont certains d'ailleurs portent les mêmes noms à America First,
49:28le mouvement de Donald Trump est absolument indissociable du mouvement de l'entre-deux-guerres,
49:34s'expliquent précisément par un passé qui n'a jamais été purgé en raison de la Première Guerre mondiale,
49:41de la Seconde Guerre mondiale, en raison aussi certainement de cette liberté d'expression
49:46qui garantit aussi l'expression des pires horreurs dans ce pays.
49:50L'Amérique a choisi de ne pas regarder ce passé en face.
49:58Les conjurés, soupçonnés ou coupables d'avoir participé à différents complots pro-nazis contre les institutions,
50:05n'ont pas été inquiétés.
50:07Seules deux figures ont subi les foudres judiciaires.
50:10Fritz Kuhn, le patron du Bund, est condamné une seconde fois puis déchu de sa nationalité américaine
50:16avant d'être expulsé vers l'Allemagne.
50:18L'agent nazi, Georges Sylvester Virek, a été condamné à de la prison ferme.
50:25Les élus de la nation s'en sont tous sortis indemnes.
50:30Les responsables politiques d'après-guerre ont tourné la page,
50:33préférant oublier les complicités nazies qui ont révélé les fragilités de la démocratie américaine.
50:48Sous-titrage Société Radio-Canada
51:18Sous-titrage Société Radio-Canada
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