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  • il y a 6 jours
À 30 ans, Juliette, infirmière en réanimation, découvre qu’elle est atteinte d’un cancer colorectal métastasé. Devenue patiente à son tour, elle partage avec nous le regard qu’elle porte aujourd’hui sur la maladie, le soin et l'importance du mental.
Transcription
00:00Le jour où on me l'a annoncé, vraiment ça a été l'hécaton.
00:03J'ai cru que j'allais mourir là tout de suite demain,
00:06que je devais appeler mes parents pour leur dire que j'allais mourir.
00:08Je venais d'acheter un appartement, j'étais en train déjà de réfléchir à qui allait l'hériter,
00:12enfin toutes ces choses-là.
00:14Moi c'est Juliette, j'ai 30 ans et je suis infirmière, je travaille en réanimation.
00:19Depuis peu, on m'a découvert un cancer métastasé et maintenant je suis passée du côté patiente.
00:25Je savais que je voulais travailler dans le milieu du social et de la santé
00:29mais bon, il y a plein de jobs qui font ça.
00:32Et quand j'étais en terminale, j'ai ma meilleure pote qui m'a dit
00:35« Écoute, moi je vais passer mon concours d'infirmière, je vais en prépa infirmière.
00:38Est-ce que ça te dit de venir avec moi ? »
00:39Parce que moi je ne savais pas quoi faire et du coup, je l'ai suivi et j'ai kiffé.
00:44Je travaillais de nuit moi à la base et j'étais hyper fatiguée depuis quelques temps
00:48mais comme je travaillais de nuit et que je faisais un peu la fête avec mes potes entre temps,
00:53je me suis juste dit que j'étais proche de la trentaine et qu'il fallait que je me calme.
00:56Et en fait, un jour, j'ai fait une occlusion intestinale, j'ai été hospitalisée.
01:00Pendant plusieurs semaines, on a pensé au début que c'était la maladie de Crohn
01:04et puis on a décidé quand même de me faire une biopsie sur des petits ganglions qu'on voyait au niveau de mon estomac.
01:09Suite au résultat, on a vu que c'était un adénocarcinome et bétastatique.
01:14En tant qu'infirmière, je me suis dit que j'étais vraiment mal barrée
01:18mais que ça pouvait se soigner s'il y avait des chimiothérapies qui existaient, c'était pour soigner les gens.
01:23Pour mes parents et mes amis, forcément, ça a été un choc
01:28parce qu'à 29 ans à l'époque, on n'était pas censé être malade d'un cancer et surtout métastasé comme il est.
01:34Du coup, forcément, ça a été la peur.
01:36Pour mes collègues de travail, que je considère un peu comme ma famille aussi
01:40parce qu'on est tout le temps ensemble, on bosse en 12 heures, ça a été la même réaction.
01:44Enfin, ils ont eu peur. Ils ont eu peur que je meurs, comme moi.
01:47Sur le moment, je voulais tout contrôler. Je voulais voir mes bilans, mes scanners.
01:50Je voulais tout savoir. Je regardais tout ce que les infirmières me posaient.
01:55Le lendemain de mon opération, quand on m'a posé ma stomie,
01:58j'ai demandé au chirurgien quelle technique il avait utilisée et j'en étais là.
02:02Il m'a juste dit qu'il fallait que je me laisse faire
02:04et que j'ai confiance au personnel soignant, que maintenant, j'étais patiente et que je n'étais plus soignante.
02:09L'avantage d'être soignante, c'est qu'on peut employer du vocabulaire médical devant moi.
02:14Je comprends tout. Je comprends tout ce qui se passe. Je sais comment agissent les médicaments exactement à l'intérieur du corps.
02:21Je connais les résultats de mes bilans. Je sais quand ça craint et quand ça ne craint pas.
02:25Les inconvénients, c'est qu'on est super chiant. Voilà.
02:28Parce qu'on veut tout, tout, toujours contrôler, en fait.
02:31Malgré qu'on m'ait demandé de ne pas contrôler, je me suis bien, bien calmée, quand même, à ce niveau-là.
02:35Mais on a envie de tout, tout, tout contrôler tout le temps, quoi.
02:39C'est les cordonniers les plus mal chaussés.
02:41Des fois, ça m'arrive d'oublier mon traitement et ça ne m'arrive pas d'oublier mes rendez-vous,
02:44mais je suis obligée de les noter et de regarder plusieurs fois pour ne pas oublier, quand même.
02:49Pour l'instant, je suis en arrêt maladie.
02:51Donc, du coup, pour l'instant, je ne peux pas travailler et ça me manque beaucoup.
02:55C'est d'ailleurs à chaque fois la question que je pose à mon oncologue, c'est quand est-ce que je vais pouvoir retourner bosser.
02:59Donc là, il y a une chirurgie qui est en approche.
03:01Donc, normalement, suite à la chirurgie, je pourrais recommencer certainement à travailler.
03:05Donc, ce sera dans quelques mois.
03:07J'ai décidé de ne pas me faire soigner ni opérer dans la clinique où je bosse.
03:11Déjà pour respecter mes collègues parce que je n'ai pas envie qu'ils s'occupent de moi.
03:16Je sais que ça va les toucher plus qu'avec d'autres patients, forcément.
03:19Et je n'ai pas du tout envie de les rendre mal à l'aise.
03:22Moi aussi, ça me rendrait mal à l'aise d'être prise en charge par eux, qu'ils me fassent la toilette ou ce genre de choses.
03:27Enfin, je ne vois pas du tout mes collègues regarder mes fesses.
03:29Et en plus de ça, je n'ai pas envie qu'un chirurgien ou un médecin que je connais, que je lui remette toute la faute dessus.
03:36On m'a fait beaucoup de soins, beaucoup de soins invasifs que moi, je trouvais banals quand je travaillais et qui, en fait, peuvent faire mal, très mal.
03:45Et donc, du coup, je pense que je ferais plus attention à ça.
03:48Par exemple, enlever un pansement, ça fait super mal.
03:50Juste enlever un pansement, ça fait super mal.
03:52Et quand on enlève, je ne sais pas, une fois tous les deux jours, eh bien, t'en as juste ras-le-bol, quoi.
03:56Quand les chimios ne me tabassent pas trop, quand je ne suis pas trop fatiguée, j'ai vraiment une vie complètement normale.
04:01Je vois mes potes, je peux voyager.
04:03J'ai juste un rendez-vous toutes les deux semaines pour faire mes chimios.
04:06J'essaye de ne pas trop y penser.
04:08Après, il y a toujours quand même le stress quand il y a les scanners, les TEP scanners et qu'on attend les résultats.
04:13Mais honnêtement, j'ai un bon mental.
04:15Vu que les résultats sont bons, on a décidé qu'on allait m'opérer bientôt.
04:19Ça va être une chirurgie un peu lourde.
04:21Je vais être hospitalisée aux soins intensifs, réanimation, genre le service où je travaille.
04:26Donc, je sais très, très bien à quoi m'attendre.
04:29Et après, je ne sais pas, il y aura peut-être de la radiothérapie, de la chimiothérapie encore.
04:32Mais en tout cas, l'opération, ça veut dire que ça avance.
04:36Ça m'a appris sur moi-même que le mental, il y est pour beaucoup, beaucoup, voire pratiquement tout.
04:41Bon, il y a quand même beaucoup à cause des traitements aussi.
04:44Sans les traitements, on ne peut pas être soigné.
04:47Mais vraiment, le mental pour subir les traitements, ça, c'est quelque chose que j'ai et que j'aurai tout au long de ma vie, du coup.
04:54Donc, pour les gens qui regardent cette vidéo et qui sont atteints aussi d'un cancer,
04:58sachez qu'il y a de la vie, que ce n'est pas fini et qu'il faut se battre, il faut garder du mental.
05:14Merci.
05:15Merci.
05:16Merci.
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