- il y a 7 semaines
Didier Varrod reçoit Youssou N'dour, le « roi du Mbalax », légende de la musique sénégalaise.
Le titre de son dernier album « Eclairer le monde / Light The World » résume à lui seul sa carrière, sa musique et le sens qu'il lui donne : « la musique c'est la lumière ». Originaire de Dakar, où il est né en 1959, l'auteur-compositeur-interprète a toujours été mu par le désir d'agir, de « faire quelque chose ».
Convaincu que la musique « soulage » autant qu'elle « réveille », son engagement s'est avant tout incarné dans ses chansons dénonçant la violence, les guerres, la pauvreté ou le racisme tout en chantant, en wolof, en français ou en anglais, son amour pour son pays et pour l'Afrique. Sa passion pour la world music illustre sa volonté d'aller au-delà des frontières pour livrer un message de paix universel.
De son premier concert en France organisé par l'association des taxis sénégalais à son passage au ministère de la culture en passant par le succès mondial du tube « 7 seconds » avec Neneh Cherry, Youssou N'Dour revient sur sa carrière guidée par la passion et l'engagement.
Embarquez Quai n°8 pour cette nouvelle émission de LCP. A bord du train, le paysage défile mais les mots, eux, prennent leur temps. Un journaliste, un invité et un trajet pour faire émerger ce qui ne se dit pas ailleurs. Dans un compartiment singulier, une conversation s'installe, explorant ce qui tisse un itinéraire, éclaire une pensée, porte un engagement. Chaque collection emprunte sa propre voie : Didier Varrod s'entretient avec des artistes pour qui la musique est aussi un acte citoyen. Yves Thréard fait revivre à des figures politiques le jour où leur vie a été bouleversée par un événement à résonnance nationale ou internationale. Laure Adler donne la parole aux féministes. Daphné Roulier interroge des personnalités du cinéma, reflet de notre société... Un format inédit, comme une invitation à penser autrement.
Le titre de son dernier album « Eclairer le monde / Light The World » résume à lui seul sa carrière, sa musique et le sens qu'il lui donne : « la musique c'est la lumière ». Originaire de Dakar, où il est né en 1959, l'auteur-compositeur-interprète a toujours été mu par le désir d'agir, de « faire quelque chose ».
Convaincu que la musique « soulage » autant qu'elle « réveille », son engagement s'est avant tout incarné dans ses chansons dénonçant la violence, les guerres, la pauvreté ou le racisme tout en chantant, en wolof, en français ou en anglais, son amour pour son pays et pour l'Afrique. Sa passion pour la world music illustre sa volonté d'aller au-delà des frontières pour livrer un message de paix universel.
De son premier concert en France organisé par l'association des taxis sénégalais à son passage au ministère de la culture en passant par le succès mondial du tube « 7 seconds » avec Neneh Cherry, Youssou N'Dour revient sur sa carrière guidée par la passion et l'engagement.
Embarquez Quai n°8 pour cette nouvelle émission de LCP. A bord du train, le paysage défile mais les mots, eux, prennent leur temps. Un journaliste, un invité et un trajet pour faire émerger ce qui ne se dit pas ailleurs. Dans un compartiment singulier, une conversation s'installe, explorant ce qui tisse un itinéraire, éclaire une pensée, porte un engagement. Chaque collection emprunte sa propre voie : Didier Varrod s'entretient avec des artistes pour qui la musique est aussi un acte citoyen. Yves Thréard fait revivre à des figures politiques le jour où leur vie a été bouleversée par un événement à résonnance nationale ou internationale. Laure Adler donne la parole aux féministes. Daphné Roulier interroge des personnalités du cinéma, reflet de notre société... Un format inédit, comme une invitation à penser autrement.
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00:00J'aimerais qu'on oublie le bonheur, pour qu'ils espèrent.
00:05Beaucoup de sentiments, de races qu'il faut, qui désespèrent.
00:09Je veux les gamins ouverts, des amis pour parler de leur peine, de leur joie, pour qu'ils le prient.
00:14Des infos qui le divisent, pas changé.
00:21Bonjour Yusundur.
00:23Bonjour.
00:23Quel plaisir de vous accueillir et de faire un voyage avec vous.
00:27Si j'avais imaginé, lorsque je vous ai rencontré la première fois, ça devait être en 1985,
00:32mais on y reviendra, qu'un jour je prendrai le train avec Yusundur,
00:36je me serais dit, ah ben ma vie va être belle.
00:38Comment allez-vous ?
00:39Ça va très bien, merci pour l'invitation, je suis très heureux aussi.
00:43Vous êtes auteur, compositeur, interprète, homme d'affaires, homme politique.
00:50Vous êtes un homme protéiforme, mais vous n'avez cessé finalement d'être toujours, comment dire,
01:00habité par l'idée de tisser un lien fondamental entre la musique africaine et la musique pop occidentale.
01:09Vous êtes un des pionniers de la musique du monde, la world music, un des éclaireurs.
01:14Et aujourd'hui, vous revenez avec un album qui raconte comment éclairer le monde.
01:23C'est quand même quelque chose qui vous habite depuis toujours, cette notion de la lumière pour éclairer le monde.
01:30Sauf, cher Yusundur, qu'entre le moment où vous avez commencé à enregistrer cet album après le Covid et aujourd'hui,
01:37le monde est encore plus en train de basculer dans l'obscurantisme.
01:41Comment on peut éclairer le monde aujourd'hui ?
01:43Oui, c'est en voyant déjà tout ce qui se passe qu'on est rentré dans cette coquille,
01:53d'essayer de penser, d'essayer de réfléchir, de composer, de raconter la chose, d'apercevoir des choses
02:03et essayer d'abonner une réponse.
02:07Une réponse qui est de la musique.
02:11Parce que bon, malgré toutes mes casquettes, moi je suis passionné par la musique.
02:15Je pense que c'est la musique qui a amené tout ça.
02:17Les autres choses arrivent au fur et à mesure.
02:20Et après la Covid, nous avons travaillé comme tout le monde pour arriver avec quelque chose d'autre.
02:29Je me suis rendu compte que la World Music qui était très prisée dans les années 80-90,
02:37on en parle moins parce qu'en fait tout le monde en fait.
02:40Et je me dis que cette source qui est la World Music qui permet en tout cas des courants d'autres musiques d'exister ou de s'épanouir,
02:52avait besoin de contenu.
02:54Et bon, effectivement, je suis un des pionniers de cette World Music.
02:58Et cet album-là arrive pour dire aux gens, ok, j'amène encore un peu de contenu par rapport à la musique
03:07et vous pouvez vous ressourcer parce qu'on voit maintenant les tendances de la musique
03:12avec les plus jeunes qui vont dans des rythmes afro-beat, à ma piano, la pop, etc.
03:22Et j'ai rencontré quelqu'un de formidable qui est Michael Leak, qui a produit l'album,
03:29qui avait aussi les mêmes préoccupations et les mêmes idées que moi.
03:33Mais alors, Yusundur, est-ce que la musique est le vecteur, le moyen d'expression le plus fondamental pour trouver la lumière ?
03:43Mais partout, partout on a la musique.
03:45Même dans nos lieux préservés, culte et autres, les gens, ils appellent, c'est de la musique.
03:55Ils appellent pour la prière, ils appellent pour beaucoup, beaucoup de choses.
03:58Et c'est de la musique. La musique est partout.
04:00En fait, la musique, effectivement, c'est la lumière qui, dans nos vies,
04:06amène cette petite chose dont on a besoin qui est là.
04:12Et je crois effectivement que la musique, c'est la lumière.
04:16Et cette lumière-là, on en a besoin tout le temps, jour et nuit.
04:21Ça fait grandir la musique, ça permet de rassembler, ça crée du lien.
04:27Mais est-ce que ça peut changer le monde, Yusundur ?
04:30Est-ce que vous pouvez dire ça après 45 ans de carrière ?
04:34Participer a changé le monde.
04:35Je pense que les acteurs, c'est-à-dire les artistes, peuvent donner des messages,
04:42peuvent raconter même dans leurs chansons des histoires qu'on vit.
04:49Et participer à calmer un peu les gens par une chanson, par une mélodie,
04:56on peut capter un message qui vous fait du bien.
05:02Bon, je pense qu'il y a un peu de tout quand même pour faire un monde.
05:06Et donc la musique, il participe, mais ce n'est pas seulement la musique.
05:09C'est étonnant parce que vous dites calmer.
05:11Et c'est vrai que j'ai toujours, moi, considéré que la musique est réparée, souvent.
05:16Elle réparait les âmes.
05:18Vous êtes d'accord avec ça ?
05:20Je suis tout à fait d'accord parce que calmer, c'est-à-dire la musique,
05:23que, bon, voilà, calme et aussi réveille, réveille en vous certaines choses.
05:32Quand vous écoutez une musique qui vous rappelle votre enfance,
05:36vous voyez, voilà, vous replongez dans votre passé.
05:42Quand vous écoutez une musique qui vous impressionne, ça vous plonge vers l'avenir et tout.
05:50Effectivement, c'est calmé, mais en même temps, bon, ça vous réveille intérieurement.
05:55Alors, dans votre dernier album, comme dans ceux d'avant,
05:59vous utilisez le wolof, l'anglais et le français.
06:03Moi, je voudrais savoir, qu'est-ce que ces langues vous permettent de dire de différent ?
06:13Par exemple, le wolof.
06:14Quand vous vous exprimez un wolof, qu'est-ce qui est le plus important à exprimer pour vous ?
06:20C'est ma langue, c'est ma langue de base et je pense que je suis meilleur avec le wolof.
06:26C'est une affaire culturelle aussi, bon, parce qu'une langue aussi permet
06:31d'interpréter un peu l'environnement.
06:34Le wolof me permet de raconter ma société, où je vis,
06:38parce que moi, je vis en Afrique, au Sénégal.
06:40Comme je suis dans la world music aussi, je viens d'Afrique,
06:43ça ne veut pas dire que je fais que de la musique africaine.
06:46Je suis aussi intéressé par le jazz, par d'autres musiques et tout.
06:51Et automatiquement, ces jonchons-là me permettent aussi de dire
06:56« Ah, oui, cette partie, ce refrain, il sonne bien en français, il sonne bien en anglais. »
07:06C'est comme ça que je raisonne.
07:08Mais la base, c'est le wolof, parce que c'est ma langue qui m'a vu...
07:14Naitre.
07:14Chanter.
07:15Naitre et chanter.
07:16Oui, naître, bien sûr, mais chanter.
07:18Bien sûr.
07:18C'est-à-dire, la première phrase que j'ai chantée dans ma vie, c'est un wolof.
07:24Donc, c'est la base.
07:26Alors, on va faire un petit voyage en arrière,
07:29même si le train roule dans le bon sens, cher Youssou Ndour.
07:33Revenir en 1983, il faut raconter cette histoire pour les plus jeunes.
07:39Ce sont les taxis sénégalais qui se sont cotisés pour organiser votre premier concert.
07:44Oui, oui.
07:45Ce n'est pas une légende, ça ?
07:46Ah, mais c'est ainsi, ça s'est passé comme ça.
07:50C'est merveilleux.
07:51Ils se sont réunis, ils avaient une association des taxis sénégalais,
07:55des sénégalais à Paris, et ils se sont réunis et ils ont voulu organiser ma venue ici.
08:03Et ça m'avait beaucoup touché.
08:04Et donc, effectivement, aujourd'hui, si on en parle, on voit que c'est une légende ce truc-là.
08:10Mais ce sont les taxis avec qui il y avait des amis comme Moustapha Ndiaye,
08:15un ami de très très longue date.
08:17Je me souviens, quand je venais à Paris, même en dehors de, après ce concert,
08:22que je restais devant avec lui, dans son taxi, je circulais dans Paris.
08:29C'est comme ça que j'ai connu beaucoup d'endroits ici à Paris.
08:32Effectivement, l'association des taxis man d'origine sénégalaise m'ont fait venir pour la première fois
08:39et j'ai joué à la mairie du 14e.
08:42C'est ça, c'était la mairie du 14e.
08:44Je me souviens.
08:46Alors ensuite, il y a un passeur qui a été extrêmement important pour vous, un passeur français.
08:53C'est Jacques Higelin.
08:54C'est là où je vous ai rencontré.
08:57Et j'ai des souvenirs incroyables, notamment quand Jacques Higelin a fait Bercy.
09:01Il vous a invité.
09:03Mais c'est quelqu'un qui n'invitait pas uniquement pour faire la première partie.
09:09Il vous intégrait aussi dans son spectacle.
09:12Et il y a eu des moments comme ça, presque de trans-chamanique avec vous.
09:17Et il a fait quand même découvrir aussi cette musique africaine au public français.
09:22Ah non, mais il était impressionnant, Jacques.
09:25Respect.
09:27Impressionnant.
09:28La première fois qu'il est venu au Sénégal, je pense qu'il y avait Béat Soule.
09:34Donc, il avait demandé à écouter de la musique et je pense qu'il est tombé sur une de mes chansons.
09:40Il a dit, je veux celui-là.
09:42Et sur Dakar, même au Sénégal, quand j'ai vu son concert, c'était très impressionnant.
09:46On avait beaucoup appris avec sa présence sur scène.
09:50Il occupait la scène comme personne.
09:53Et après, on s'est linkés.
09:57C'est là où il nous a fait venir avec Faux Moricante aussi, qui était là.
10:02Et on a fait ce spectacle, effectivement, où nous ne sommes pas venus pour faire la première partie.
10:08C'est ça.
10:08Il nous avait intégrés dans son spectacle.
10:10Et c'était quelque chose d'extraordinaire, qui nous a permis d'ouvrir les yeux et de voir la richesse, toute la richesse qui pouvait tourner autour de ce que nous faisions à l'époque.
10:21Donc, je n'oublierai jamais ces moments-là à Bercy, où on est restés plusieurs jours, où il y avait des voitures dans le spectacle.
10:30Sur scène, oui.
10:31Sur scène, énormément de choses.
10:33Vous étiez mêlé à la foule, même.
10:35Ah non, c'était magnifique.
10:36C'était incroyable.
10:37Oui.
10:38Ces années-là, on va dire, les années 85, 90, on dit à ce moment-là que Paris est la capitale de l'Afrique.
10:47Alors, ça vient de Jean-François Bizeau, qui dirigeait Nova.
10:51Ça vient aussi de cette place très importante que la musique africaine avait en France.
10:58Philippe Constantin, qui était un activiste de la musique africaine, paix à son âme, lui aussi, a beaucoup contribué.
11:05Tous les condamins.
11:07Exactement.
11:08C'était vraiment la capitale de l'Afrique ?
11:11Oui, je pense qu'il y a eu deux choses.
11:13D'abord, il y a la musique qui venait du Nigeria, avec Fela, Osebissa et autres, qui résonnaient un tout petit peu dans les pays anglophones.
11:24Mais tout le reste résonnait à Paris pour le reste de l'Afrique.
11:28Et effectivement, il y avait des militants, des gens qui croyaient à la musique africaine et tout,
11:34qui en faisaient leur démarche était vraiment de promouvoir cette musique.
11:39Moi, je me souviens des maisons de disques comme Celluloid, qui étaient nées seulement par rapport à la musique africaine,
11:47si la production, etc.
11:50Et donc, effectivement, il y avait une jonction qui faisait que Paris devenait vraiment la base de la musique africaine.
11:57Et après, je pense que les gens ont vraiment focus sur ça.
12:02Alors, autre personnalité importante avec laquelle vous avez eu des liens très forts, c'est Peter Gabriel.
12:07Peter Gabriel, ça a été votre alter ego pour faire comprendre à la vieille Europe, mais aussi aux Etats-Unis,
12:19que cette musique africaine était compatible avec la musique pop, qu'il y avait un langage commun.
12:28Oui, il y avait un langage commun et il y avait aussi vice-versa.
12:35Je pense que la pop-musique, d'une manière générale, avait besoin aussi de s'ouvrir un peu plus,
12:41de se réinventer, de s'améliorer et tout.
12:44Je pense qu'effectivement, avec la musique africaine et les musiques qui venaient d'ailleurs,
12:49parce qu'il ne faut pas oublier que la world music, ce n'est pas seulement de la musique africaine,
12:53c'est de la musique pop, c'est de la musique qui vient du Pakistan, comme Nusrat Alifak, etc.
13:01L'Inde, évidemment.
13:02L'Inde, donc c'est une jonchon.
13:04C'est vrai.
13:04Beaucoup de choses, chacun a mené.
13:06Et je pense que le mérite de Peter, c'est d'avoir poussé avec son label Real World, tu vois,
13:16c'est de pousser, d'amener les gens à focus sur...
13:22Mais d'arrêter surtout de considérer la musique africaine comme du folklore,
13:26d'arrêter d'avoir une vision de Colomb, pardon, sur cette musique-là.
13:30Non, non, mais dès l'instant qu'il y avait ce mélange, on avait complètement effacé cela,
13:36parce que les gens, même beaucoup de gens à l'époque disaient,
13:39la world music, c'est la musique qui vient des pays sous-développés.
13:45Peter, il disait non, je me souviens, non, ce n'est pas ça.
13:49Ce sont des gens, tu vois, qui viennent rencontrer d'autres musiques.
13:53Effectivement, c'était nécessaire pour tout le monde à l'époque.
13:56– Vous avez dit récemment, au moment de la sortie de votre dernier album qui éclaire le monde,
14:04que l'Europe souffrait d'un vieillissement pathologique
14:08et qu'il était temps que l'Afrique se réveille.
14:11– Oui, je le disais, dans la mesure où, au niveau de démographique,
14:21l'Afrique aujourd'hui représente un truc extraordinaire avec sa jeunesse.
14:29Voyez-vous, 70% de la population africaine a moins de 25 ans.
14:33– 70% ?
14:34– Pratiquement.
14:35– C'est énorme.
14:36– Vous voyez cette énergie, ce nouveau discours, etc.
14:42Et je pense que pour comprendre cette Afrique-là,
14:45il faut écouter cette jeunesse qui représente l'Afrique aujourd'hui.
14:53Et je disais que, bon, si vous venez ici,
14:57ce n'est peut-être pas le même pourcentage au niveau démographique et tout.
15:01– Ça fait clair.
15:01Et donc, je pense que, bon, l'Europe a intérêt à écouter ce nouveau truc,
15:07ce nouveau message qui vient de l'Afrique avec cette jeunesse-là,
15:11qui a un nouveau discours, et de changer les donnes,
15:15de changer la donne, c'est-à-dire les relations que nous avons eues culturellement,
15:21oui, ils sont là, mais il faut les représenter, il faut les revoir,
15:28il faut, c'est pour cela que j'apprécie quand même que des oeuvres puissent retourner en Afrique, etc.
15:35– La restitution des oeuvres pour vous, mais vous dites que ça ne suffit pas.
15:40– Non, non, du tout, ça c'est un point, dans plusieurs points aussi.
15:45– Évidemment, vous avez, dans votre pays, eu un rôle aussi assez fondamental,
15:51un rôle d'entrepreneur pour faire rayonner la culture sénégalaise,
15:56et un rôle politique, vous avez été ministre de la Culture.
16:00Moi, j'ai envie de vous demander, qu'est-ce que vous avez retenu de cette expérience,
16:05de la politique au sens premier du terme ?
16:08– Quand je suis, je fus nommé ministre de la Culture,
16:13bon, au départ, je me disais que, ah, je vais pouvoir faire quelque chose, changer des choses.
16:17et quand vous êtes dedans, vous vous rendez compte, ce n'est pas évident,
16:22ce n'est pas aussi rapide que ça.
16:24Tout ce que j'ai eu à faire, c'est vraiment de dresser un plan,
16:28en disant, ça, il faut laisser tomber, ça, il faut…
16:31J'ai laissé un plan parce que je suis resté 18 mois au ministère.
16:36– Oui, c'est relativement court.
16:38– C'est relativement court, mais j'ai laissé un plan
16:40et j'ai compris qu'il fallait beaucoup plus réformer qu'autre chose.
16:49Et je pense que j'ai laissé des choses qui ont servi
16:52et d'autres qui n'ont pas été prises en compte.
16:55Mais c'est une belle expérience parce que servir son pays,
16:59c'est quelque chose d'extraordinaire.
17:01Et moi, je regarde ce qui se passe dans mon pays, dans mon continent,
17:06et si je peux faire quelque chose, je fais quelque chose.
17:08Je n'ai pas laissé la politique, il y a le temps de la politique.
17:12Des fois, quand vous avez la parole, vous dites ce que vous pensez.
17:16Mais moi, je suis d'abord fondamentalement un artiste,
17:19un artiste, un musicien passionné.
17:22On peut être nommé ministre, mais il n'y aura toujours
17:28qu'un seul Yousundur, qu'un seul Peter Gabriel.
17:32Voilà, tout le monde peut être nommé, quelque part.
17:35Mais j'ai la sensation qu'aujourd'hui, c'est dans la musique
17:39que vous pensez que c'est le plus efficace de continuer
17:43à faire passer des messages et à donner aussi votre avis,
17:46comme sur ce dernier album où vous prenez position
17:49contre les mariages forcés en Afrique.
17:52Par exemple, j'ai l'impression que c'est votre terrain
17:56le plus favorable pour continuer à faire passer des idées,
18:00qui sont souvent des idées politiques.
18:02Oui, oui, mais c'est ça que je dis.
18:04On peut être nommé pour jouer un rôle,
18:08mais tout le monde peut être nommé.
18:10Mais il n'y a qu'un seul Yousundur ou qu'un seul Peter Gabriel
18:13ou qu'un seul Jacques Higérin.
18:16Ça, c'est clair et net.
18:17Effectivement, ma passion, c'est la musique.
18:21La base, c'est la musique.
18:22Et je pense que je suis beaucoup plus à l'aise pour parler de raconter notre société
18:28par rapport à ma vision, par ma musique.
18:33Vous avez appelé votre fils Nelson,
18:36évidemment en hommage à Nelson Mandela.
18:40Oui.
18:40J'ai envie de vous demander, Yousundur.
18:44C'est un acte de griot que de baptiser son fils Nelson.
18:49On peut peut-être rappeler ce que sont les griots.
18:51Votre maman ou votre grand-mère étaient griots.
18:53C'est-à-dire, c'est la pratique de l'oralité,
18:55de la transmission de l'oralité par les hommes et les femmes.
19:00Et j'ai la sensation que dans ce signal-là,
19:03de baptiser votre fils Nelson,
19:05il y a quelque chose d'un peu ancestral de l'ordre de la philosophie du griot.
19:09Je me trompe ?
19:11Oui, le griot et toutes les personnes en Afrique,
19:15culturellement, il y a toujours un lien.
19:19Quand on donne le prénom à quelqu'un, il y a un lien.
19:22Le lien qu'il y a...
19:24Mandela, c'est un père.
19:26C'est quelqu'un...
19:27Son parcours m'a tellement touché.
19:29Son parcours a été quelque chose qui a parlé au monde.
19:33Et comme partout, on essaie de retenir quelque chose de lui.
19:39Avoir un fils et parler avec sa maman.
19:42D'ailleurs, ce n'est pas seulement moi qui ai décidé.
19:45Avec sa maman aussi qui admire Mandela,
19:50que j'ai eu à rencontrer
19:51et que j'ai vu tout son parcours,
19:55tout ce qu'il a eu à faire
19:56pendant qu'il était en prison,
19:59après qu'il ait pris le pouvoir,
20:00après qu'il ait parti du pouvoir et tout.
20:02C'est quelqu'un qui nous a donné un message très, très fort.
20:06Et on veut le garder en donnant le prénom de...
20:09Pour ne pas que l'humanité oublie aussi.
20:13Parce qu'on a tendance...
20:13On ne va jamais l'oublier.
20:14Et c'est comme ça qu'il faut faire.
20:16Exactement.
20:18Yusundou, nous sommes près du lac du Bourget,
20:21dans cette belle France des Alpes.
20:24On a l'impression que la France
20:25est dans une quiétude et une sérénité absolue.
20:28Et ce n'est pas le cas.
20:30Les images, parfois, sont trompeuses.
20:33Quel regard vous avez sur, aujourd'hui,
20:35cette France qui est fracturée,
20:38qui traverse un moment politique et social
20:40extrêmement difficile ?
20:43Vous avez un regard sur notre pays ?
20:47Sincèrement, moi, je ne vis pas ici.
20:48Je suis l'actualité comme tout le monde.
20:51Je pense que, bon, voilà,
20:52c'est un pays démocratique où tout le monde parle.
20:56C'est bien de le rappeler.
20:57Oui, oui.
20:58Tout le monde parle.
20:59Il y a des courants.
21:01Il y a toute cette démocratie
21:04qui est très importante,
21:06qui est la base.
21:08Et aujourd'hui, c'est le peuple qui décide.
21:11Si la France est bloquée,
21:13c'est parce que les gens ne sont pas départagés
21:16par rapport à la politique et tout.
21:19Et je pense que c'est un pays
21:20où il faut garder toujours
21:22ce que j'appelle le dialogue.
21:25J'ai discuté et tout.
21:26La France, elle est importante pour les Français
21:28et elle est importante aussi
21:30pour le reste du monde.
21:31Oui, je pense que c'est la démocratie
21:36et la démocratie,
21:38ce n'est pas facile des fois.
21:40Ce n'est pas facile des fois
21:41parce que, bon, voilà,
21:42les gens décident
21:43et quand ils décident,
21:45le résultat, c'est le résultat
21:46et il faut faire avec.
21:49Une autre question que j'avais envie
21:51de vous poser,
21:52c'est évidemment le regard que vous avez
21:54sur les rappeurs français, notamment,
21:58qui sont tous quasiment issus
22:00du grand continent africain.
22:02Beaucoup, d'ailleurs,
22:03la majorité de ceux qui stream
22:05et ont un succès considérable
22:08sont issus du Congo.
22:10Oui.
22:11Quel regard vous avez sur le rap
22:13qui a tout d'un coup fait l'hybridation
22:15entre le rap et la musique africaine
22:18avec plus de racines,
22:21de plus en plus ?
22:22Ça vous rend heureux ?
22:24Je suis très, très content.
22:25Ce sont des gens qui sont nés ici.
22:28Tu vois, ils sont d'origine
22:29et ils sont nés ici.
22:31Ils sont allés à l'école,
22:32comme les Français.
22:35Ils ont vécu ici
22:36et donc, ils écrivent très, très, très bien.
22:39Ça sonne très, très, très, très bien.
22:41Et je pense que quand ils rappellent
22:43en français et tout,
22:45on les écoute,
22:47on n'a aucun problème.
22:48c'est ce que je disais
22:50dans beaucoup de milieux,
22:51si la France utilise tout son potentiel
22:55des enfants qui sont nés ici,
22:56comme dans le football,
22:58comme dans la musique, etc.
22:59Je pense que c'est bénéfique pour la France
23:02et je suis fier d'eux.
23:03Pour terminer,
23:05avant d'arriver,
23:06évidemment,
23:07on doit parler un peu
23:09de votre tube interplanétaire
23:12Seven Seconds.
23:13Seven Seconds.
23:14Eh oui,
23:14avec Néné Chéri.
23:15C'est une chanson
23:18qui est régulièrement reprise,
23:21en France notamment.
23:22Oui, oui.
23:23C'est votre porte-bonheur.
23:25C'est une chanson
23:27qui a changé votre vie aussi ?
23:29Oui, c'est une chanson magique.
23:31Ah !
23:32C'est une chanson magique.
23:34L'histoire,
23:35tout le monde connaît l'histoire
23:36et on a voulu faire cette chanson.
23:38Sept premières secondes
23:39de nouveau-nés.
23:40Voilà.
23:41Donc,
23:41on a voulu faire cette chanson
23:43parce qu'on a voulu chanter ensemble.
23:46On n'avait rien calculé.
23:47Cette chanson,
23:48c'est comme une fenêtre
23:49qui s'ouvre
23:49pour le reste de ma musique.
23:51Effectivement,
23:52c'est quelque chose de très fort.
23:53J'en suis très, très, très fier
23:55et je pense que c'est la même chose
23:56aussi pour Néné.
23:57Et bon, voilà.
24:00C'est un classique.
24:01C'est là.
24:02C'est une chanson à message aussi ?
24:03Oui, bien sûr.
24:04C'est très important.
24:06Une chanson doit raconter
24:07quelque chose.
24:09Et je trouve que
24:10dans ces temps un peu troublés,
24:12perturbés,
24:13on devrait réécouter
24:15ce que ça raconte
24:17du destin de l'humanité.
24:20Au départ,
24:21l'humain est fait
24:21pour être bon.
24:24Oui.
24:25Moi,
24:25j'ai des problèmes
24:28des fois
24:28à expliquer,
24:30à décortiquer
24:31tout ce que je dis
24:33pour essayer
24:33d'échanger
24:36avec les gens.
24:37Je dis,
24:38on écoute une chanson.
24:39Après,
24:40on s'intéresse
24:41à la melodie
24:41et on se dit
24:42la chanson va où ?
24:45Et on interprète
24:46pour soi-même.
24:47Et je pense que,
24:48bon,
24:48quand vous voyez
24:49deux enfants jouer,
24:51on ne sent pas
24:53que ces enfants-là
24:54sont en train de dire
24:55couleur et autre et tout.
24:57Ce sont des enfants
24:58qui jouent,
24:59ils sont ensemble,
25:01et que ce soit
25:01des noirs
25:02ou des blancs,
25:03ils sont ensemble.
25:04Et c'est ça
25:05dont on a besoin,
25:06cette image.
25:07Et cette chanson-là
25:07parle des premières
25:09sept secondes,
25:09mais parle aussi
25:10de l'enfant
25:11qui est vraiment
25:13innocent.
25:15L'innocence,
25:17c'est quelque chose
25:17d'extraordinaire
25:18et on ne voit pas
25:20des bruits,
25:21on voit que
25:22quelque chose
25:23d'extraordinaire.
25:24Et je pense que
25:25« Seven,
25:25Seven,
25:25Seven,
25:26c'est ça aussi.
25:27C'est une chanson
25:28qui nous a beaucoup
25:29donné mélodiquement,
25:32mais qui nous parle
25:32énormément aussi
25:33au niveau du message.
25:35Merci beaucoup,
25:35en tout cas,
25:36c'est moi,
25:36Yusundur,
25:37d'avoir fait ce voyage
25:38avec moi.
25:39Et merci d'éclairer
25:40le monde
25:41et de continuer
25:42à penser
25:43que la lumière
25:44gagnera toujours
25:45sur l'obscurité.
25:47À la fin de la journée,
25:48oui.
25:49Merci beaucoup.
25:49C'est moi.
25:51Merci.
25:51– Sous-titrage Société Radio-Canada
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