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Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a officiellement réintroduit un couplet oublié de l’hymne national algérien « Qassaman », et ce choix fait déjà polémique. Ce troisième couplet, écrit en pleine guerre d’indépendance par le poète Moufdi Zakaria, s’adresse directement à la France avec des mots forts : « Ô France ! Le temps des palabres est révolu… Ô France ! Voici venu le jour où il te faut rendre des comptes ». Il s’agit d’un cas unique au monde : aucun autre hymne national ne cite explicitement un pays étranger de manière aussi frontale. Cette décision n’est pas un simple détail protocolaire mais un geste politique lourd de sens. Car depuis 1986, sous le président Chadli Bendjedid, ce couplet n’était plus chanté dans les cérémonies officielles afin d’éviter d’alimenter les tensions diplomatiques. Abdelaziz Bouteflika avait poursuivi cette pratique en privilégiant une version abrégée. Pourtant, la révision constitutionnelle de 2008 avait déjà rendu tous les couplets « immuables » et inscrits dans l’hymne national algérien. Avec son décret de mai 2023, Abdelmadjid Tebboune met donc fin aux demi-mesures : lors des commémorations officielles, notamment en présence du chef de l’État, l’hymne doit désormais être entonné dans son intégralité, y compris ce passage dirigé contre l’ancienne puissance coloniale. Les réactions ne se sont pas fait attendre. Du côté algérien, beaucoup saluent une affirmation de souveraineté et une fidélité à la mémoire des martyrs tombés entre 1954 et 1962. Pour eux, chanter ce couplet, c’est rappeler que l’indépendance s’est arrachée dans le sang et que la colonisation ne peut être effacée des mémoires. Du côté français, en revanche, cette réintroduction est jugée « à contretemps ». Paris estime que ce choix complique les tentatives de rapprochement et de coopération, notamment sur les dossiers sensibles de l’énergie, de la sécurité et de la migration. Certains observateurs y voient une provocation diplomatique, voire une volonté de relancer une rhétorique anticoloniale au moment où l’Algérie traverse des tensions politiques et sociales internes. Ce retour du couplet anti-français illustre en réalité une fracture plus large : plus de soixante ans après l’indépendance, le passé colonial continue de peser lourdement dans les relations entre la France et l’Algérie. Pour Alger, rappeler ce couplet, c’est réaffirmer une identité nationale forgée dans la lutte. Pour Paris, c’est un rappel douloureux qui empêche de tourner la page. Au-delà des débats politiques, cette décision de Tebboune démontre combien les symboles ont une portée considérable. L’hymne national, loin d’être un simple chant, devient un outil de mémoire et un instrument diplomatique, capable de raviver des blessures historiques et d’influencer les rapports entre États. Cette affaire montre que le passé n’est jamais totalement derrière nous et que la mémoire reste un champ de bataille décisif dans la politique contemporaine. #Algérie #France #Tebboune #Qass

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Transcription
00:00C'est le troisième couplet de l'hymne national algérien, le Kasaman.
00:03Le 24 mai dernier, le président algérien Abdelmagic Tebboune a pris la décision par décret de le réintroduire dans certaines situations.
00:10Jusqu'à présent, ce couplet n'était chanté qu'à titre exceptionnel, lors des congrès du FLN et l'investiture du président de la République.
00:16Par ce nouveau décret, le président Tebboune réintroduit l'utilisation de la version complète de l'hymne lors des commémorations officielles en présence du président de la République.
00:24Faut-il percevoir cet événement, passé relativement inaperçu dans l'Hexagone, comme un nouveau revers dans les relations diplomatiques franco-algériennes ?
00:31Composé en 1955, au tout début de la guerre d'Algérie, par le poète et militant indépendantiste Moufdi Zakaria, le Kasaman fut adopté en 1963, quelques mois après l'indépendance.
00:40L'hymne a depuis fait l'objet de nombreuses polémiques.
00:42Dans les années 1980, sous la présidence de Shadli Benjadid, les autorités algériennes ont tenté de supprimer le couplet problématique.
00:48Mais l'amendement a été rejeté.
00:49Un décret de mai 1986 a toutefois limité l'usage de la version complète du Kasaman.
00:54Hautement symbolique, l'élargissement décidé en mai dernier intervient dans un contexte diplomatique tendu entre la France et l'Algérie.
00:59Fin décembre, quatre mois après la visite d'État d'Emmanuel Macron, le président Tebboune avait salué la nouvelle relation de confiance entre les deux pays.
01:07Il est urgent d'ouvrir une nouvelle ère des relations franco-algériennes.
01:10Plus de 60 ans après la guerre, il faut passer à autre chose.
01:13Les deux chefs d'État avaient même convenu d'une date de visite d'Abdelmadjid Tebboune dans l'Hexagone, au mois de mai.
01:18Mais entre temps, Paris et Alger se sont retrouvés au milieu d'une brouille diplomatique,
01:22après que Paris a aidé à exfiltrer de Tunis vers l'Hexagone l'opposante franco-algérienne Amira Bourouari, sous le coup d'une condamnation.
01:29Si cette tension passagère n'a pas duré, Tebboune a reporté sa visite d'État au mois de juin, puis à l'été.
01:34Autre source de tension, Alger voit d'un mauvais œil les critiques régulières de la politique migratoire française appliquée à l'Algérie depuis son indépendance.
01:41Récemment, l'ancien Premier ministre Édouard Philippe a remis en cause le traité franco-algérien de 1968,
01:47qui prévoit des conditions d'accueil et de séjour privilégiés pour les Algériens en France.
01:51Bien entendu, il y a des relations historiques extrêmement puissantes entre la France et l'Algérie,
01:56mais le maintien d'un tel dispositif, avec un pays avec lequel nous entretenons des relations compliquées, ne me paraît plus justifié.
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