- il y a 2 mois
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Bienvenue au Cœur du Crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la Gendarmerie Nationale ?
00:19Je m'appelle Yann Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:25Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:41L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:50Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:55Tony Kourtner a déjà bu plus que de raison.
01:05Et dans les secrets replis de son cerveau, il en a pleinement conscience.
01:09Pourtant, il se sert un autre verre.
01:12Peut-être est-ce tout simplement pour faire enrager Allison.
01:16Arrête, Tony, je t'en prie, arrête !
01:19C'est à peu près tout ce que sa femme arrive à lui dire ces jours-ci.
01:22Assise sur le canapé, Allison se tient à une distance suffisante pour éviter tout contact avec Tony,
01:31tout en surveillant sa consommation d'alcool du coin de l'œil.
01:35Tony, passons à table. Le rôti va être trop cuit.
01:39Eh bien, sors-le du four. J'ai encore envie de boire un verre avant de passer à table.
01:44Et puis, je meurs pas de faim.
01:45Quoi ? Mais tu as déjà bu six verres !
01:49Osons voir la vérité en face, Tony. Tu es devenu un alcoolique.
01:53Tu parles d'une épouse compréhensive.
01:56Son mari prend un petit apéritif en rentrant et tout de suite, elle le traite d'alcoolique.
02:01Écoute, Tony, il y a des mois que tu t'enivres tous les soirs.
02:04Il faut que cela cesse ou je m'en vais.
02:07À toi de choisir.
02:07Écoute-moi bien, Alison.
02:11Tu t'es mariée avec moi pour le meilleur et pour le pire.
02:15Je t'ai consacré cinq ans de ma vie qui m'ont permis d'accroître nos ressources.
02:19Ce dont tu profites, hein ?
02:21Quand je rentre après une dure journée de travail, j'ai bien le droit de me détendre, non ?
02:26La tolérance que j'attends de toi fait partie intégrante du marché que tu as librement consenti en m'épousant.
02:33Et ce contrat, tu n'as pas le droit de t'en délier.
02:35Tu ne me quitteras pas, Alison.
02:39Sur ce, et essentiellement afin de se prouver qu'il est toujours maître chez lui,
02:45Tony se resserre une vodka qui l'avale cul sec.
02:48L'alcool lui brûle le gosier et autour de lui les meubles tanguent.
02:53Alison ne se méprend pas sur le sens de cette bravade.
02:57Ah non, Tony, cette fois-ci en est trop, je m'en vais.
03:00Pour toute réponse, il lui lance à la tête son verre vide.
03:03« Se baisse-t-elle à temps pour l'éviter ? Le projectile n'a-t-il pas été lancé avec suffisamment de force ? »
03:10Tony ne peut répondre.
03:12Il sait seulement qu'Alison est indemne.
03:15Mais une rage folle l'envaye.
03:17Une rage désespérée de meurtrir son épouse en révolte et de la retenir de force au domicile conjugal.
03:22Fou furieux, il se rue sur elle pour la saisir par les épaules et peut-être à la gorge.
03:26Dès lors, tout devient flou.
03:31Ses doigts se referment sur quelque chose d'indistint.
03:34Mais au même moment, il sent que le parquet perd contact avec la réalité,
03:39tandis que ses mains tâtonnent à la recherche d'Alison.
03:44Ses souvenirs s'arrêtent là.
03:45« Pauvre type ! » entend Tony dans un brouhaha de voix et de musique tonitruant.
03:55C'est une plantureuse personne qui vient de parler de lui.
03:58Au fur et à mesure que ses facultés visuelles lui reviennent,
04:02il identifie le lieu où il est.
04:05Un bar.
04:06Mais comment il a abouti ici reste un mystère.
04:11En tout cas, il est en compagnie d'une blonde au visage rond comme une lune
04:16qui, même en faisant abstraction du lourd maquillage des lèvres et des paupières,
04:21est dénuée de tout charme.
04:24Elle exhibe grassement des épaules nues qui offrent la douceur un peu molle des filles bien en chair
04:30et le tissu noir de sa robe, trop ajustée, se distant sous les rondeurs d'une poitrine lourde.
04:38« Ça se demandait pourquoi certaines épouses font un foin de tous les diables
04:41quand leur mari boit un petit coup.
04:43De névroser, ma parole ! » dit la blonde.
04:48Ainsi, il a lié conversation avec cet inconnu
04:53et s'est même très certainement laissé aller à des confidences.
04:57« Mais où est donc Alison ? » interroge Tony.
05:04Il se rappelle lui avoir lancé un verre à la tête,
05:06mais ensuite c'est le vide absolu dans sa mémoire.
05:10« Comment tu t'appelles ? » demande la blonde.
05:14« Moi, c'est Marva. Et toi ? »
05:18« Tony. Tony Courtner. Et ma femme s'appelle Alison.
05:23Je lui remets pratiquement tout mon salaire.
05:25Je travaille, je ne cours pas les jupons.
05:28Quand un homme peine à l'ouvrage, c'est normal qu'en rentrant,
05:31ils boivent un verre ou deux pour se détendre, non ?
05:34En tout cas, je ne suis jamais ivre. »
05:37« Elle ne t'apprécie pas ta juste valeur, Tony. »
05:41« C'est d'autant plus regrettable qu'à part ça,
05:44Alison et moi, on n'a aucune divergence. »
05:47« Vous comprenez ? »
05:50« Mais alors ta femme, elle est où en ce moment ? »
05:54« Je suppose qu'elle est partie. »
05:57« Partie ? Où ça ? »
06:00« Qui sait ? »
06:02« Qu'importe. »
06:04En parlant, il ingurgite plusieurs vodkas.
06:09Tout redevient peu à peu cotonneux autour de lui.
06:12Mais il continue à se confier à sa voisine et aussi à boire.
06:16Il a agi sous l'empire d'une haine homicide, c'est vrai,
06:19mais il a glissé et perdu connaissance.
06:22C'est sûr qu'il n'a pas été jusqu'à tuer Alison
06:23et quand il est revenu à lui, il a eu besoin de voir du monde
06:27et c'est un taxi qu'il a déposé dans ce bar de troisième zone.
06:31Voilà tout.
06:33« L'ai-je frappé ou non ? »
06:36demande-t-il à sa compagne.
06:39« Laisse-moi te reconduire, mon chou.
06:41Si t'as battu ta femme, c'est tout simplement que t'as riposté à ses attaques. »
06:47Marva le soutient pour sortir du bar et arrête un taxi.
06:50Elle surprend un peu Tony quand elle prend place à côté de lui,
06:54mais après avoir donné son adresse au chauffeur,
06:56il somnole tout en laissant appuyer sa tête sur le doux oreiller
07:00que lui offre cette épaule ronde et nue.
07:04Il éprouve une nouvelle surprise quand Marva règle la course,
07:07renvoie le chauffeur et l'accompagne jusqu'à son appartement.
07:10Là, elle l'aide à ouvrir la porte et même franchit le seuil.
07:17« Halte-la, halte-la ! Alison est peut-être revenue ! »
07:22« Mais non, mon petit chou, tu sais bien qu'elle est partie pour de bon. »
07:26Après avoir inspecté les lieux, Tony constate que rien n'a bougé
07:31depuis que l'orage a éclaté entre eux.
07:33Les débris du verre qu'il achetait à la tête d'Alison gisent encore sur le tapis.
07:38« Mon Dieu ! Est-ce que j'ai blessé Alison ?
07:42Est-ce que je l'ai vraiment atteinte ? Oh, je ne me souviens plus de rien.
07:49Oh, Alison ! Alison ! »
07:53Et il s'effondre sur son lit.
07:57C'est seulement le lendemain matin que des bruits de rangement parvenant de la cuisine
08:01le tirent de sa léthargie.
08:03Mais ce n'est pas Alison qui le voit.
08:08C'est une blonde, grande et forte, plutôt vulgaire,
08:11qui a mis son tablier et sa fer en tous sens.
08:15« Qui êtes-vous ? »
08:18« Je m'appelle Marva, tu te souviens, chérie ? »
08:22« Oui. »
08:24En effet, Tony se souvient.
08:26Mais ses bribes de souvenirs ne font qu'ajouter à sa confusion.
08:30« Où est Alison ? »
08:33« Elle n'est pas ici, comme tu peux le constater. »
08:37« Vous ne l'avez pas vue ? »
08:40La blonde secoue la tête négativement.
08:43« Vous avez passé la nuit ici ? »
08:45« Oui, mais dans la chambre d'amis, figure-toi. »
08:49« De mieux en mieux, » fait-il avec affectation.
08:53« Merci de m'avoir ramené à mon domicile.
08:56Je devais être dans un triste état.
08:58Mais je me sens suffisamment bien à présent pour ne plus avoir besoin de votre assistance. »
09:02« Tenez, il fouille dans ses poches et trouve deux billets de banque qui lui tendent. »
09:08La femme accepte l'argent qu'elle a enfoui dans son corsage,
09:11mais elle ne fait nul mouvement vers la sortie.
09:16« N'aurait-elle pas compris ? »
09:18« Vous feriez mieux de vous en aller maintenant.
09:19Il faut que je m'apprête à aller au bureau. »
09:22« Je vais te préparer ton petit déjeuner, mon chou. »
09:25« Non, c'est fort aimable à vous, mais je n'ai aucun appétit. »
09:28« Comme tu veux. »
09:30« Il y a encore un beau rôti au frigo. »
09:32« Tu rentres vers quelle heure pour dîner ? »
09:35dit-elle en allant s'installer sur le canapé du salon
09:38pour feuilleter les revues de mode qu'Allison avait achetées.
09:41« Non mais, eh, où vous vous croyez, là ? »
09:45« Vous ne pouvez pas rester ici, hein ? »
09:47« Pourquoi ? »
09:49« Je te déplais, Tony ? »
09:52« Non mais la question n'est pas là. »
09:53« Mais vous devez comprendre que ma femme va rentrer,
09:56que votre place n'est pas ici. »
09:59« Tu ne te souviens donc plus, mon chou ? »
10:03« Mais si, si, je me souviens. »
10:06« Ma femme et moi, nous nous sommes violemment disputés. »
10:09« Elle m'a reproché d'avoir bu, alors je suis sorti
10:11et j'ai échoué dans un bar et vous avez bien voulu me ramener à mon domicile. »
10:16« Alison, ma femme, ne devrait pas tarder à rentrer. »
10:19« À part ça, est-ce qu'il y a un autre fait mémorable ? »
10:25« T'étais complètement noir, Tony. »
10:28« Ivre mort. »
10:29« Oui, bon, d'accord. Et après ? »
10:33« Eh bien, deux choses l'une, mon chou. »
10:36« Soit tu te souviens vraiment plus du reste, soit tu ne veux pas t'en souvenir. »
10:42« Mais me soumire de quoi, bon Dieu ? »
10:45« De ce qui est arrivé à ta femme, mon chou. »
10:50Tony Kourtner découvre que ce n'est pas sa femme qui est à la cuisine,
11:02mais une femme grosse et blonde.
11:05Le souvenir d'une violente bagarre la veille avec Alison, sa femme, lui revient.
11:11Il lui a acheté un verre à la tête parce qu'elle lui reprochait d'être ivre.
11:15Ensuite, ensuite c'est le vide.
11:17Il se rappelle bien que dans un bar, il a fait la connaissance de Marva,
11:21cette femme blonde qui est là ce matin,
11:23mais il est incapable de s'expliquer l'absence de sa femme.
11:28Marva, elle, peut lui dire ce qui s'est réellement passé entre eux.
11:35Un froid mortel s'infiltre en Tony comme une coulée de glace
11:38et d'une voix blanche comme étrangère à la sienne, il demande
11:42« Que lui est-il arrivé ? »
11:46« Tu l'as tué, mon chou. »
11:52« Comment pouvez-vous en être si sûr ? »
11:55« Sûr ? Ah ! Mais j'ai vu le cadavre ! »
11:58Alison a été étranglée.
12:00« Par moi ? »
12:04« Par qui d'autre voudrais-tu, mon chou ? »
12:07« Au bar, tu m'as tout raconté. »
12:09« J'ai vu ici, en pleine nuit, le cadavre de Alison gisait sur le carrelage de la cuisine. »
12:16« Comment expliquer ça, si c'est pas toi qui l'as tué ? »
12:21« Je me rappelle pas du tout avoir fait ça. »
12:24« Mais le cadavre, je l'ai pas vu. »
12:27« Bien sûr, je m'en suis occupé. »
12:30« Comment ça ? T'inquiète pas, chérie. T'as rien à faire sinon te préparer pour aller à ton travail. »
12:38La transition s'est faite en douceur.
12:41Depuis des années, Alison est sa femme.
12:44Récemment, ils ont emménagé dans ce bel appartement.
12:47Mais aujourd'hui, ils voient une grosse blonde installée à sa place.
12:53Tandis que Marva se constitue une réserve de scotch pour ses besoins personnels,
12:58Tony, de son côté, fait vœu d'abstinence.
13:02Il devient mélancolique.
13:04Et ses pensées sombres gravitent continuellement autour de la disparition du cadavre.
13:10Comment Marva s'y est-elle prise pour faire disparaître le corps sans laisser aucune trace ?
13:16A-t-elle transporté seule le corps frêle d'Alison ?
13:21Oh mon Dieu, c'est possible.
13:24Horriblement possible.
13:28Tony, dépassé par les événements et impuissant à retourner la situation,
13:34qu'il juge irréversible,
13:37doit forcément tolérer l'aventurière qui,
13:39paré d'atours sans cesse nouveau,
13:42parade journellement.
13:45Tout au plus,
13:46osse-t-il lui demander le prix des fourrures ?
13:49Marva lui cite quelques chiffres avec son éternel sourire,
13:53puis ajoute en commentaire
13:54« Mais ces fourrures valent leur argent, n'est-ce pas, mon chéri ?
13:59Après tout ce que j'ai fait pour toi ? »
14:02Parfois, quand la tension monte trop en lui
14:05et que, sous la puissance de la migraine,
14:07il sent son crâne éclater,
14:09il lui pose l'obsédante question.
14:12« Marva,
14:14qu'avez-vous fait du corps ? »
14:16et elle répond invariablement
14:18« T'inquiète pas, mon chou,
14:20je m'en suis occupé. »
14:24Pour Tony,
14:25devoir tolérer sous son toit
14:27cette créature obscène
14:28se révèle encore plus pénible
14:31que s'il devait supporter
14:32la présence du cadavre d'Alison.
14:36Enfin,
14:36un jour,
14:37il se décide à lui demander
14:38« Marva,
14:40il faut que je sache. »
14:43« Que tu saches quoi, mon chou ? »
14:46« Ce que vous avez fait du corps d'Alison. »
14:49« Mais pourquoi t'en inquiéter, mon chou ? »
14:54Jusqu'alors,
14:54il s'est gardé de lui livrer
14:55le fond de sa pensée,
14:57mais le désespoir
14:58le fait sortir de sa réserve.
15:00« J'ai tout lieu de m'inquiéter. »
15:02« Vous avez enlevé le corps d'Alison
15:03pour aller le cacher quelque part,
15:04mais il vous est possible
15:05de le faire ressortir à tout moment. »
15:08« Pourquoi est-ce que je ferais
15:09une chose pareille, mon chou ? »
15:11« Vous le feriez, j'en suis sûr,
15:13si je cessais de jouer le jeu,
15:15si je refusais tout crédit
15:16pour payer vos folles dépenses,
15:18et si je vous flanquais dehors. »
15:22« C'est donc ça que tu veux faire, mon lapin ? »
15:26« Me flanquer dehors ? »
15:29Sur le point de passer à l'acte,
15:32Tony bat en retraite.
15:33« Non, je n'ai pas dit
15:34que j'allais le faire.
15:36Mais il est temps
15:37que nous jouions carte sur table.
15:38Quelles sont vos intentions ?
15:40Combien de temps comptez-vous
15:41vous incruster en parasite chez moi ? »
15:46Les lèvres à présent pincées,
15:48Marva fronce les sourcils.
15:51Jamais l'expression enfantine
15:52et innocente de son regard
15:54n'apparut plus déplacée
15:55dans son visage bouffi et artificieux.
16:00Puis un sourire vient aggraver
16:02la laideur de cette face vulgaire.
16:04« Je me plais bien ici, mon chou. »
16:10« Mais vous ne pouvez pas
16:10continuer à vivre ainsi.
16:12Je ne suis pas inépuisablement riche.
16:14Au train où vous allez,
16:15je n'aurai bientôt plus un sous-vaillant. »
16:19« Je te répète que je me plais bien ici, mon chou. »
16:22dit-elle avec obstination.
16:25« Tâche de me comprendre, mon trésor. »
16:28Avant ça, je n'étais qu'une fille de bar.
16:32Et voilà, tout d'un coup,
16:33c'est l'aubaine.
16:35J'ai l'occasion de vivre
16:36dans un bel intérieur confortable,
16:38intime et tout.
16:39Un appartement bien propre
16:41où tout reluit.
16:42Et en plus avec un homme comme toi, Tony.
16:45Un chic type.
16:47Un gars bien fait
16:48et bien à sa place
16:50dans cet appartement.
16:53C'est vrai que tu as tué ta femme,
16:55mais tu avais les meilleurs motifs
16:56pour en arriver là, j'en suis sûr.
16:59Donc, à mes yeux,
17:00tu restes un type bien.
17:03Désormais, je suis comblé
17:04puisque j'ai un bel intérieur
17:07et un mari.
17:09Un mari, naturellement.
17:12Parce que tu vas te sentir seul.
17:15T'as pas encore oublié Alison,
17:16mais ça viendra.
17:18Et ce moment-là,
17:19j'ai tout loisir
17:21de l'attendre.
17:24Horrifié,
17:25Tony a un mouvement de recul.
17:26Mais vous êtes folle à lier !
17:29Oh non,
17:30elle n'est pas folle, Marva.
17:33Elle sait ce qu'elle veut.
17:35Elle n'est que trop consciente
17:36de tenir Tony à sa merci.
17:39Assise,
17:40elle lui sourit
17:40de tout son rouge à lèvres
17:42sur un visage blafard
17:44et vulgairement grotesque
17:45de Bouddha peinture lurée.
17:47Et cette caricature
17:49veut devenir officiellement
17:50son épouse.
17:53Ayant désespérément besoin
17:55de chasser de sa vue
17:56et de son esprit
17:56cette présence aborée,
17:58Tony gagne la cuisine
17:59en titubant.
18:02Marva y a entreposé
18:03une caisse entière
18:03de scotch pour elle seule.
18:05Bien qu'il ait en aversion
18:06le whisky,
18:07il en ouvre une bouteille.
18:09Le goût de cet alcool
18:10le fait grimacer,
18:11mais il continue
18:13à en boire
18:14goulûment
18:15pour s'étourdir.
18:21C'est un coup de sonnette
18:22qui réveille brutalement
18:24Tony.
18:25Le temps qu'il réalise
18:26qu'il doit aller ouvrir,
18:28la sonnette retentit
18:29à nouveau.
18:30Dans sa boîte crânienne,
18:31le carillon a l'effet
18:32d'un marteau
18:33sur une enclume.
18:35Pestant et jurant,
18:36il s'arrache du divan
18:37et d'une démarche
18:39encore chancelante
18:40se dirige vers la porte
18:42dont il ouvre
18:43le bâton
18:43à toute volée.
18:46Alison !
18:47Incroyable !
18:51Cette Alison,
18:52bien vivante,
18:53menue et gracile,
18:55une petite ride
18:56apparaît sur son fronce
18:57pendant que ses prunelles
18:58brunes dévisagent
18:59son mari
19:00dont elle passe en revue
19:01l'ensemble
19:02de l'apparence.
19:05Tu as encore bu,
19:06Tony ?
19:07Oui,
19:07c'est vrai,
19:08j'ai bu,
19:09mais c'est la première fois
19:10depuis que tu es parti.
19:11Ça n'arrivera plus,
19:12je te le promets.
19:13Oh, Alison,
19:13Alison,
19:14je ne peux pas vivre
19:15sans toi.
19:16Ne me quitte plus jamais,
19:17je t'en supplie.
19:18Que faut-il faire
19:19pour te garder toujours ?
19:21Il lui couvre les mains
19:22de baiser,
19:22lui prodigue des paroles
19:23rassurantes.
19:24Cependant qu'il l'entraîne
19:25au salon,
19:26il a fait asseoir
19:26dans le grand divan.
19:28Alison,
19:29c'est toi qu'il me faut.
19:30C'est toi qu'il me faut
19:31et pas la bouteille
19:32ou quoi que ce soit d'autre.
19:33Oui, Alison,
19:34toi seule compte
19:37Peu à peu,
19:40Alison se radoucit
19:41malgré l'aspect hirsut
19:43de son mari
19:44dont la laine
19:45empeste l'alcool.
19:46Le front de l'épouse
19:47redevient progressivement
19:48serein et lisse.
19:51Son regard s'attendrit.
19:54Elle restitue à Tony
19:55sa confiance,
19:57son amour
19:58et recouvre sa foi en lui.
20:03Anthony,
20:03je n'aurais pas dû t'abandonner.
20:07Est-ce que tu veux
20:08que je reste ?
20:09Oh, mon amour,
20:11est-il besoin
20:12de le demander ?
20:13Il s'empare
20:14des mains fines
20:15d'Alison
20:15et les couvre de nouveau
20:16d'une pluie de baisers.
20:19Tout d'un coup,
20:20un souvenir lui revient.
20:24Marva.
20:26Mon Dieu,
20:26mais que faire ?
20:27Comment expliquer
20:28à Alison ?
20:30Si je lui avoue
20:31la vérité,
20:31va-t-elle le croire ?
20:33Pourra-t-elle croire
20:34que dans l'intervalle,
20:35il a cru l'avoir tué ?
20:36Le croira-t-elle
20:38s'il lui jure
20:39de n'avoir toléré Marva
20:39que sous la menace
20:40de chantage ?
20:42N'en déduira-t-elle pas
20:43au contraire
20:43que son départ
20:44a fourni à Tony
20:45la possibilité,
20:46peut-être attendue
20:47depuis des mois,
20:48de vivre maritalement
20:49avec une autre ?
20:51Terrifié à cette idée,
20:53mais convaincu
20:54qu'il doit à sa femme
20:55une confession
20:56sans réticence,
20:57Tony Kourtner
20:58décide d'expulser
20:59l'horreur
21:00qui hante
21:00la chambre d'amis.
21:02Il se remet
21:03lourdement sur pied
21:04et d'un pas décidé
21:05se dirige vers cette pièce.
21:08Et maintenant,
21:09je vous conseille
21:09de dégâpir en vitesse
21:10car vous n'êtes plus
21:11en situation
21:12de me faire chanter.
21:15Mais l'horrible spectacle
21:17qui s'offre à ses yeux
21:18lui coupe le souffle.
21:20Écroulé sur le lit,
21:22Marva n'y forme plus
21:23qu'une masse énorme,
21:25inerte,
21:27répugnante.
21:28Son visage,
21:30enflé,
21:31défiguré,
21:32a perdu toute pâleur
21:33en virant
21:33au violet foncé.
21:36Étroitement serré
21:37autour de son cou,
21:38est noué
21:39à un bas nylon
21:40appartenant
21:40à l'une des paires
21:41fort coûteuses
21:42qu'elle a achetées
21:43sur le compte d'Alison.
21:46De nouveau,
21:48un voile
21:48obscurcit
21:49la vue de Tony.
21:51Déjà,
21:51Alison la rejoint
21:52et regarde
21:52par-dessus son épaule,
21:53les yeux dilatés.
21:55Écoute, Alison,
21:55je peux t'expliquer.
21:57C'est toi
21:57qui l'as tué !
21:58interroge Alison.
22:01Mon Dieu,
22:02tout porte à le croire.
22:04Tu étais ivre ?
22:05Sans aucun doute,
22:07chérie,
22:07sinon,
22:08comment aurais-je
22:08pu faire ça ?
22:10Cette folie
22:11t'a pris tout d'un coup,
22:12comme le soir
22:13où tu m'as lancé
22:13un verre à la tête.
22:15Mais non,
22:16non,
22:16non,
22:17tu ne comprends pas,
22:17Alison,
22:18cette femme
22:19ne m'était absolument rien.
22:20C'est une fille
22:21de bas étage
22:22qui voulait me faire chanter
22:22en me persuadant
22:23que je t'avais tué.
22:25Il suffit
22:26de se débarrasser
22:26du corps,
22:27tu pourrais m'aider,
22:29hein ?
22:29Qui se souciera d'elle ?
22:31Elle ne manquera jamais
22:32à personne.
22:33Alison,
22:34où vas-tu ?
22:36Tony,
22:37tu es un assassin.
22:39Alison,
22:40tu veux prévenir la police ?
22:42L'obscurité envahit
22:45soudain la pièce
22:46alors que dehors
22:48le soleil
22:48est écrasant.
22:51À travers
22:51les ténèbres
22:51s'épaississant,
22:53Tony marche
22:54vers Alison,
22:56se résolvant
22:56à l'inévitable.
23:00Oui,
23:00mon amour,
23:02je suis un assassin.
23:05Je ne peux accepter
23:06de t'avoir perdu,
23:09murmura Tony
23:09en serrant
23:10de toutes ses forces,
23:12le coup fragile
23:13d'Alison.
23:20Vous venez d'écouter
23:21Au cœur du crime,
23:23un podcast
23:24issu des archives
23:25d'Europe 1.
23:26Réalisation,
23:27Julien Tarot.
23:28Production,
23:29Estelle Laffont.
23:30Patrimoine sonore,
23:32Sylvaine Denis,
23:32Laetitia Casanova
23:34et Antoine Reclut.
23:37Au cœur du crime
23:38est disponible
23:39sur le site
23:40et l'appli Europe 1.
23:42Écoutez aussi
23:43l'épisode suivant
23:43en vous abonnant
23:44gratuitement
23:45sur votre plateforme
23:46d'écoute.
23:46Sous-titrage Société Radio-Canada
23:48Sous-titrage Société Radio-Canada
Écris le tout premier commentaire