Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
Anne Fulda reçoit Mathilda di Matteo pour son livre «La Bonne Mère» dans #HDLivres

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Bienvenue à l'heure des livres, Mathilde Adi-Matteo.
00:04Alors, on est très content de vous recevoir.
00:06Alors, vous êtes un nom qui émerge sur la scène littéraire,
00:11parce qu'il y a quelque temps encore, vous étiez consultante pour de grandes entreprises.
00:15Vous avez fait ce métier pendant quelques sept ans.
00:17Et vous venez de publier votre premier roman.
00:19Un premier roman qui fait déjà son petit chemin dans les premières listes des prix littéraires,
00:25qui s'appelle La Bonne Mère, qui est parue aux éditions de l'Iconoclast.
00:28Et je dois dire que c'est vrai que c'est un livre savoureux, qui est plus profond qu'il en a l'air.
00:33Plein de vie, plein d'humour et qu'on lit avec beaucoup de plaisir.
00:38Alors, évidemment, avant tout, on a envie de vous demander,
00:41bon, là, vous avez fait une pause, mais comment, lorsqu'on fait un métier sérieux comme le vôtre,
00:45finalement, on décide de se lancer et d'écrire son premier roman ?
00:48C'est quoi le déclic ?
00:50Je pense que j'écris depuis... J'ai 14 ans à peu près, vraiment régulièrement.
00:56C'était juste difficile d'avoir la discipline nécessaire pour finir un texte en parallèle d'un travail à plein temps
01:05et avancer en parallèle de mes études.
01:07Je pense que ce qui a été un déclic pour moi, c'est que j'ai participé au concours de nouvelles du magazine Libération en 2021,
01:16un concours que j'ai eu la chance de remporter.
01:17et je pense que c'était un petit peu le coup de pouce qu'il me fallait pour me sentir peut-être un petit peu plus légitime
01:23et donc faire les sacrifices qu'il fallait faire pour finir un vrai texte long, un roman.
01:31Alors, vous êtes née à Marseille, vous avez fait des études à Sciences Po, à Paris.
01:36Alors, obligatoirement, on se demande si la Mathilda de votre livre, ce n'est pas un peu vous,
01:41puisque vous-même, vous êtes née à Marseille, vous avez vécu à Marseille, vous avez fait des études à Sciences Po Paris.
01:45Il y a quelques parallèles entre Clara, qui est la fille dans le roman, et moi.
01:52J'ai écrit d'un point de vue que je connaissais, je pense,
01:55parce que je me sentais peut-être aussi, d'une certaine manière, un petit peu plus légitime
01:58pour parler des choses que je connaissais, mais c'est vraiment un roman.
02:01Il y a un petit peu de moi, il y a un petit peu de ma mère dans ce duo explosif du roman,
02:07mais il y a aussi de toutes les femmes qui m'entourent et qui m'inspirent.
02:12Et je voulais vraiment écrire une histoire qui me dépasse,
02:15qui parle vraiment plutôt de famille dysfonctionnelle et de tout l'amour qu'on trouve à l'intérieur.
02:20Oui, parce qu'il y a de l'amour, effectivement.
02:22Alors, dans le livre, l'héroïne raconte son retour chez elle,
02:25après quelques mois passés à la capitale.
02:28elle retrouve ses parents, qui sont des vrais personnages,
02:32son père, qui est taxi, qu'on appelle le napolitain,
02:36sa mère, Véronique, qui est secrétaire médicale dans un hôpital
02:40et qui est un vrai personnage, une femme, écrivez-vous,
02:44qui s'habille au superlatif, c'est très court, très rose,
02:46très pailleté, très décolleté, très échancré, très, très...
02:50En fait, c'est ce qu'on appelle une cagole, c'est ça ?
02:54C'est ça.
02:54Et finalement, qu'est-ce que c'est, une cagole ?
02:56Et est-ce que c'est...
02:58Qu'est-ce que ça, de répréhensible, finalement ?
03:00C'est assez joyeux.
03:01Eh bien, tout à fait.
03:02Une cagole, c'est donc une espèce de mascotte marseillaise
03:07qui, maintenant, se font un peu dans le paysage.
03:09Féminité exacerbée, motif léopard, talon aiguille.
03:13Et moi, quand j'étais petite,
03:14j'ai grandi à Marseille dans les années 90-2000,
03:16c'était une insulte, uniquement.
03:18Et c'est vraiment plus tard,
03:22en lisant des livres,
03:24et ces dernières années,
03:26grâce à la nouvelle génération,
03:28la cagole, elle se réinvente un peu
03:29en icône féministe.
03:31Et pourquoi cagole, c'est une insulte ?
03:33C'est parce que c'est une transgression.
03:35C'est à la fois être hyper féminine
03:37et complètement assumée,
03:39mais c'est aussi presque emprunter
03:41au code du masculin,
03:43en étant presque brutale
03:45dans sa façon de s'exprimer,
03:48en étant complètement à l'aise
03:49dans l'espace public.
03:51Et aussi, c'est une féminité populaire.
03:53Et donc, c'est pour ça
03:53qu'on a peut-être un peu peur
03:57des cagoles, parfois.
03:58Oui, vous écrivez d'ailleurs
03:59un moment vulgaire, non solaire.
04:01Oui.
04:01Parce qu'effectivement,
04:03ce personnage, c'est une force de la nature.
04:05Elle est joyeuse,
04:07elle est déterminée,
04:08elle emporte tout sur son passage.
04:09Alors, elle a des passions
04:11qui sont amusantes.
04:11Par exemple, ce qu'elle adore,
04:12c'est faire les magasins.
04:13Personne, avec sa fille.
04:14Les boutiques.
04:14Tout ça, vous racontez les boutiques
04:15comment elle fait les boutiques
04:17avec sa fille.
04:19C'est un moment savoureux.
04:21Comment d'ailleurs,
04:21elle décide de ne pas aller travailler
04:22le jour où elle a décidé
04:24de faire les magasins.
04:26Mais alors, ce qui est marrant,
04:28c'est que dans la nouveauté,
04:29dans l'intrigue,
04:29c'est que l'héroïne vient
04:32avec son nouveau petit ami,
04:34Raphaël, qui est parisien,
04:37et qui a l'heure de déplaire
04:39tout de suite à sa mère, Vérodique,
04:41qui le déteste,
04:42mais instantanément.
04:44Alors, vous écrivez,
04:46parce qu'alternativement,
04:48on passe dans la tête
04:49de la mère et de la fille,
04:50et là, c'est la mère qui parle.
04:511m90 de cul pincé,
04:53blanc comme un cul,
04:55la chemise rentrée dans le pantalon,
04:56tout droit, tout repassé,
04:57rien qui dépasse.
04:58En fait, il est le symbole apparent
05:01du fossé qui s'est creusé
05:03entre la fille et ses parents,
05:06c'est ça ?
05:06Pour Véro, le girafon,
05:08il représente la trahison de sa fille.
05:10Sa fille, elle l'a quitté.
05:11D'ailleurs, elle le dit,
05:12ça fait quoi ?
05:125 ans qu'elle nous a quittés.
05:14Parce que pour elle,
05:15monter à Paris,
05:16c'était quitter ses parents.
05:17Et donc, elle ramène
05:19ce pur produit
05:20de la classe bourgeoise
05:22et Véro se sent encore plus trahi.
05:25Alors, il est le symbole
05:27quand même d'une trahison,
05:29mais aussi quand même
05:30d'un petit fossé
05:31qui s'est creusé avec les parents,
05:32un fossé qui est culturel aussi,
05:36parce qu'elle,
05:36elle a toujours aimé lire ses parents,
05:40il n'y a pas de livre chez elle,
05:42et puis d'un fossé géographique
05:44et social aussi,
05:46parce que finalement,
05:46elle découvre d'autres milieux sociaux.
05:49Tout à fait.
05:49Clara, elle appelle ça
05:50son étirement identitaire.
05:53Et c'est un étirement identitaire
05:55qui est exacerbé
05:56par la relation
05:57qu'elle entame
05:59avec Raphaël,
06:01de son prénom,
06:02parce qu'il n'est pas
06:03que son surnom.
06:05Et oui,
06:07parce qu'en fait,
06:07quand elle est arrivée à Paris,
06:09elle a déjà gommé
06:10pas mal de choses
06:10qui faisaient que c'était d'ailleurs
06:12elle qu'on appelait la cagole
06:13quand elle arrivait à Paris,
06:14sachant qu'elle voulait fuir
06:16sa mère,
06:16et elle ne voulait absolument pas
06:18être une cagole,
06:18et elle arrive à Paris,
06:19c'est elle la cagole,
06:20ok.
06:20Donc comment on va faire ?
06:21On va tout gommer,
06:22on va perdre des petits morceaux
06:24de soi-même,
06:25et quand on pense qu'on y est arrivé,
06:27on va chercher encore plus loin,
06:29et donc on va se mettre
06:30avec le girafon,
06:30et on va se sentir
06:32encore plus étiré.
06:33Oui, ce qui est amusant,
06:34c'est qu'il y a aussi
06:35cette histoire
06:35de la relation
06:36de la mère et de la fille,
06:38de toujours,
06:38on est souvent en opposition
06:39avec sa mère,
06:40mais finalement,
06:41il y a un boomerang
06:42qui revient,
06:42on est toujours là,
06:43elle est toujours
06:44la cagole de quelqu'un,
06:45il y a l'image
06:46que les autres voient,
06:48c'est assez intéressant
06:49ce que vous dites.
06:50Complètement.
06:50Alors vous écrivez
06:51à un moment,
06:52à propos de la mère
06:55qui parle de sa fille,
06:55je m'en doutais bien
06:56avec sa grande école
06:57et ses grands airs
06:59qu'elle allait nous ramener
07:00à Paris.
07:02Alors,
07:02il y a un autre personnage
07:03qui est très important,
07:04évidemment,
07:05c'est Marseille,
07:06c'est cette ville
07:07qui est vivante,
07:10débordante,
07:11qui donne son titre au livre,
07:13la bonne mère,
07:13puisque la bonne mère,
07:14c'est un double entrée.
07:16La bonne mère,
07:17c'est Notre-Dame Lagarde
07:18et c'est évidemment aussi Véro.
07:21C'est son grand dilemme.
07:22En fait,
07:22elle a l'impression
07:23que quoi qu'elle fasse,
07:24quoi qu'elle dise,
07:25qu'elle soit là,
07:26qu'elle part,
07:26qu'elle revienne,
07:27c'est toujours la mauvaise mère.
07:29Et donc,
07:30la bonne mère,
07:31c'était principalement
07:32pour Véro.
07:33Et puis,
07:33en fait,
07:33oui,
07:35grâce à Véro,
07:36mais aussi en relisant le livre,
07:38je me suis rendu compte
07:39que Marseille,
07:40c'était un personnage
07:40apparenté.
07:41Complètement.
07:42Oui.
07:42Alors,
07:43à un moment,
07:43vous parlez d'un quartier
07:44et vous écrivez
07:46la ville,
07:46on y va que rarement,
07:47ma mère dit du bout des lèvres,
07:49c'est populeux,
07:50ça grouille de merde,
07:52de rats,
07:52de racailles,
07:53de racailles en Y
07:54sur les scooters.
07:56Alors,
07:56ce qui est amusant,
07:57c'est que de temps en temps,
07:57vous utilisez des clichés,
07:59finalement,
07:59sur Marseille,
08:00mais qui demeurent vrais.
08:01En fait,
08:03moi,
08:03je voulais prendre tous ces clichés
08:04et au début,
08:05même quand on regarde
08:06nos quatre personnages,
08:07donc l'intello torturé,
08:08la cagole,
08:09le napolitain
08:10et le petit bourgeois
08:11tout propre sur lui,
08:12mais en fait,
08:13j'ai pris des stéréotypes
08:14et au fil des pages,
08:17je voulais ajouter
08:17de la nuance.
08:18Et du coup,
08:19c'est ce que j'ai essayé
08:19de faire aussi
08:21avec Marseille
08:22parce que finalement,
08:24cette ville
08:24que Clara a ses souvenirs
08:26qui peuvent être assez clichés
08:27de quand elle est petite
08:28et puis finalement,
08:29quand on avance
08:30et quand elle est adulte,
08:30on voit un petit peu plus
08:32de nuances de Marseille
08:34sur la fin,
08:34je pense.
08:35En tout cas,
08:35des nuances,
08:36il y en a beaucoup
08:37dans le livre.
08:38C'est un livre
08:38qui est vraiment
08:39très agréable à lire
08:40mais aussi plein de nuances.
08:42Il y a plusieurs niveaux
08:43d'interprétation.
08:45Je vous le conseille
08:46vraiment vivement.
08:47Ça s'appelle
08:47La Bonne Mère.
08:48C'est paru aux éditions
08:49de l'Iconoclaste.
08:50Merci beaucoup,
08:51Mathilde.
08:51Merci.
08:52Di Matteo.
08:53Merci beaucoup.
08:58Merci.
Écris le tout premier commentaire
Ajoute ton commentaire

Recommandations