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Documentaire sur l'accident de la Route le plus meurtrier de France (1982)
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00:30Il s'agit du plus grave accident de la route jamais vue en France et la plupart des victimes sont des enfants.
00:42C'est encore aujourd'hui l'accident le plus meurtrier des routes de France.
00:48Dans la nuit du 31 juillet 1982, un carambolage impliquant 10 véhicules fait 53 morts.
00:55Les images de l'accident sont insoutenables.
01:02La douleur des familles déchire le cœur de millions de Français.
01:09Très vite, ce drame que les médias surnomment l'accident de Beaune interroge.
01:15Qui avait tapé qui, comment, pourquoi, dans quelles circonstances, pendant toute la nuit ça a été le grand flou.
01:21Dans 22% des cas, les accidents mortels seront liés à la somme de l'Anse.
01:26Comment un simple ralentissement sur l'autoroute a-t-il pu conduire à une telle tragédie ?
01:33Condition météorologique, conduite à risque, quel est l'élément déclencheur ?
01:39Le fait de s'intercaler alors qu'il y a déjà un ralentissement, c'est la catastrophe.
01:43Le freinage est une question clé dans la catastrophe de Beaune.
01:51Comment un véhicule réputé pour sa sécurité s'est-il embrasé si rapidement ?
01:56Scellant le destin des passagers restés à bord.
01:59Les températures montent en une minute à plus de 200 degrés.
02:03Au bout de trois minutes, on est à 800 degrés.
02:04Grâce aux témoignages des gendarmes et des patrouilleurs présents le soir du drame,
02:12à l'analyse des experts techniques qui ont travaillé sur le rapport d'enquête,
02:17et à la parole d'une rescapée du bus en flamme,
02:21nous vous révélerons les causes de cet accident pour mieux comprendre l'enchaînement des événements
02:25qui a conduit cette nuit-là à une catastrophe hors de contrôle.
02:30J'étais la dernière à sortir.
02:34Je me dis, mais qu'est-ce que je vais dire à ma famille ?
02:37On est partie à 12 et je suis revenue toute seule.
02:40Vendredi 30 juillet 1982.
03:06C'est par une coïncidence fortuite que l'accident le plus meurtrier des routes de France
03:12va être immortalisé à jamais sur pellicule.
03:15Inter, 22h.
03:21Pluie, orage et bouchons, tel est le cocktail vacances de cette fin de semaine.
03:26Nous écouterons évidemment Jacques Kessler, M. Météo et nos correspondants sur les routes.
03:29Les bagages étaient prêts, on partait pour Saint-Tropez, on digne très vite le soir et on prend la route.
03:39Des bouchons certes, il y en a eu aujourd'hui pour le classique chassé-croisé des vacanciers de juillet et d'août,
03:44mais pas plus que l'année dernière et apparemment ce soir c'est presque le retour au calme.
03:49Et tout roule, il n'y a pas de problème, jusqu'à la hauteur de Beaune.
03:54On voit au loin un bouchon qui se forme.
04:03Et immédiatement, on entend une explosion et on voit s'enflammer un véhicule.
04:13Et on voit des gamins qui sortent et qui courent dans tous les sens.
04:18En 1982, Roger Piccard est reporter-photographe à Radio France.
04:26Il pense que tous les occupants du véhicule sont déjà en sécurité.
04:31Son professionnalisme reprend le dessus.
04:36Je vais dans mon coffre, je sors les appareils photos et je commence à faire des photos.
04:40Des flammes gigantesques, des débris de véhicules, des marques de freinage au sol,
04:50ces clichés témoignent de la violence de l'accident.
04:54Mais ce que Roger et sa femme sont sur le point de découvrir va changer la portée de ces photos.
04:59Nous, on a fait monter deux gamins auxquels on a posé la question,
05:07est-ce qu'il y a encore des gens dans le car ?
05:09Et ils me répondent oui.
05:10Il y en a un qui me dit oui, j'ai mes deux frères et l'autre me dit j'ai mes cousines.
05:17Là, on comprend tout de suite que c'est un drame.
05:20C'est un drame.
05:21Les passagers de l'autocar sont en grande majorité des enfants.
05:28Si quelques-uns ont pu s'échapper, 44 sont encore à l'intérieur.
05:33Aucun secours à l'horizon.
05:35La situation est désespérée.
05:40Comment un tel accident a-t-il pu se produire ?
05:44Pour comprendre, il faut remonter 8 heures en arrière.
05:47Alors qu'a lieu un départ en vacances, tout ce qu'il y a de plus insouciant.
06:01Crépy en Valois dans l'Oise, à 70 kilomètres au nord de Paris.
06:06En cette fin de journée du 30 juillet 1982,
06:10plusieurs enfants d'un quartier populaire de la ville trépignent d'impatience.
06:13Dans quelques heures, ils partent pour un mois en vacances à la montagne.
06:20C'est le cas de Sylvie Martin, qui avait 15 ans à l'époque.
06:26On était contents, hyper contents de partir en commun avec des vacances.
06:29Pour nous, c'était la joie, c'était un bonheur de partir en vacances seule,
06:34faire nos expériences avec nos copains et nos copines.
06:36Surtout que bon, c'était des enfants de quartier, on se connaissait déjà tous.
06:40La jeune adolescente ne partira pas seule.
06:46Elle sera accompagnée de ses deux frères, Bruno et Frédéric,
06:49âgés respectivement de 13 et 11 ans,
06:52et de Florence, sa petite sœur de 9 ans.
06:56Pour leur mère, Marie-Andrée,
06:58c'est la première fois que 4 de ses enfants partent en vacances tous ensemble.
07:01A l'époque, on ne partait pas trop en vacances puisque mon mari était maçon
07:07et il travaillait beaucoup l'été.
07:12Dans les années 80, comme pour Sylvie et ses frères et sœurs,
07:16la caisse d'allocations familiale permet à 2 millions de ses enfants de quartier
07:20de bénéficier de ses jours de vacances à petit prix.
07:23Ce vendredi 30 juillet 1982,
07:29Sylvie et sa famille, comme une soixantaine d'autres enfants de Crépy-en-Valois,
07:33en sont des heureux bénéficiaires.
07:39Pour transporter cette joyeuse marmaille,
07:41ce n'est pas le train qui a été choisi, mais l'autocar.
07:44La colonie de vacances a affrété deux bus d'une compagnie savoyarde,
07:51semblable à celui-ci, filmé peu de temps après le drame.
07:55Ce sont des modèles standards qui fonctionnent très bien.
07:58Du moins le pense-t-on à l'époque.
08:02On a un Mercedes O303.
08:04Le modèle est apparu en 1974.
08:07Et l'autre, c'est un Cetra issu de la série 100.
08:10Cette série apparaît en 1967.
08:12C'est un véhicule un petit peu plus ancien,
08:13dont la technologie remonte à 15 ans.
08:16Mais ce n'est pas choquant dans le contexte de l'époque.
08:18Le Cetra a été contrôlé au mois de mai 1982.
08:23Donc, quelques mois avant,
08:26les essais de freins ont été concluants.
08:29On est parti en toute confiance.
08:35Avec un contrôle technique obligatoire tous les six mois,
08:38cet autocar, comme tous les autres,
08:39est l'un des véhicules terrestres les plus sûrs
08:42et les plus pratiques pour transporter des enfants.
08:44L'autocar permet, en fait, un service en porte-à-porte.
08:49Les enfants partent de Crépien-en-Valois
08:50et sont déposés à la porte de la colonie de vacances.
08:53Donc, c'est extrêmement simple.
08:55À l'époque, tous les accidents,
08:57c'était surtout l'atolle français.
08:59Pour un milliard de personnes transportées au kilomètre,
09:02en moto, on comptabilise 61 morts,
09:05en voiture, 5 morts,
09:07en autocar, 0,02 morts.
09:11Donc, l'autocar est un moyen très sûr.
09:13En 1982, Francis Mikorski est responsable des homologations
09:20de mises sur le marché des nouveaux autocars.
09:24À l'instar des véhicules de sa catégorie,
09:28le car de la marque Cetra présente peu de risques
09:30grâce à son ossature dite autoportante.
09:32C'est-à-dire qu'il n'y a pas de châssis.
09:40C'est une structure entièrement métallique des tubes
09:43qui sont posés sur des gabarits,
09:46soudés et assemblés.
09:48Tout est autoportant.
09:51Et sur cette structure,
09:52vient se poser des tôles tendues, soudées,
09:55et puis tous les éléments mécaniques sont fixés dessus.
10:01Preuve de son efficacité,
10:02Cette structure est encore largement répandue
10:05dans la conception d'autocar.
10:07Elle présente le double avantage d'alléger le poids total
10:10tout en garantissant une meilleure résistance
10:12en cas de choc frontal.
10:22Exemple avec ce crash test spectaculaire.
10:28On se rend compte que, bien sûr, il y a des dégâts importants,
10:31mais la structure du véhicule va se déformer
10:34et cette déformation va effectivement emmagasiner
10:37toute l'énergie du choc.
10:41Pourtant, malgré la fiabilité des tests,
10:43il arrive que cette conception ne suffise pas
10:45à garantir la sécurité des passagers.
10:47Et conjuguée à d'autres phénomènes,
10:52elle peut même se révéler totalement inefficace.
11:0218h45,
11:03les deux autocars
11:04arrivent à Crépy-en-Valois.
11:07Le premier est attribué
11:08à un groupe d'enfants originaire de Creil,
11:10la ville voisine.
11:11Sylvie, ses deux frères et sa sœur
11:15sont rejoints par leurs huit cousins.
11:18Ils se dirigent tous vers le deuxième quart.
11:22On nous fait mettre en ligne,
11:26appelle un parrain à monter dans les bus
11:30et on monte à la porte avant du bus.
11:33On était supposés tous descendre par l'avant
11:38pour être comptés
11:40comme tout voyage d'école.
11:42On ne prend pas conscience
11:44qu'il y a une porte à l'arrière.
11:48À l'époque,
11:50on a pour la plupart des cars
11:51la porte principale à l'avant,
11:54une double porte hydraulique ou pneumatique
11:56qui fait généralement 90 cm de large
12:01et puis à l'arrière,
12:03une autre sortie un peu plus étroite
12:05encombrée par des sièges arrière
12:07qu'il faut soulever
12:08pour pouvoir atteindre cette porte
12:11qui est vraiment une sortie accessoire.
12:17Seuls les enfants placés à l'arrière du bus
12:19peuvent voir la sortie de secours.
12:25Un détail qui aura une importance décisive
12:28dans quelques heures.
12:31Il est 19h.
12:35Les chauffeurs mettent en marche les autocars
12:38pressés de prendre la route.
12:41Un trajet de 800 km les attend
12:43jusqu'à Ossois-en-Savoie.
12:47Ce long voyage de 13h se fera de nuit
12:49pour éviter le monde prévu sur la route
12:51le lendemain, samedi 31 juillet.
12:53La date n'est pas du tout anodine.
12:56Il s'agit du grand chassé-croisé
12:58entre les juilletistes qui rentrent de vacances
13:01et les aoutiens qui partent.
13:05C'est sans doute la pire journée,
13:06mais c'est la journée où les gens partent.
13:08On peut aller jusqu'à 600, 800,
13:101000 km de bouchons cumulés
13:13sur une journée.
13:16On savait qu'en partant,
13:17on allait rencontrer des bouchons.
13:18C'est pour ça que certains partaient plus tôt,
13:20le matin très tôt ou en soirée.
13:24Mieux vaut ne pas traîner.
13:27La monitrice et le moniteur
13:29nous recomptent un par un
13:31et le chauffeur de bus démarre
13:35et nous faisons au revoir à nos parents
13:37à travers la vitre.
13:39On a un passement au cœur.
13:40Comme d'habitude,
13:41tous les parents font des signes au carreau
13:43et les cars sont partis.
13:45Ça s'est fait un petit peu
13:46dans la précipitation, en fait.
13:51Si la séparation est déchirante,
13:53pour les enfants,
13:54les vacances commencent enfin.
13:58Placée au milieu du car,
13:59Sylvie s'amuse entourée
14:00de ses frères et sa sœur.
14:03J'étais à côté de ma sœur
14:04et mes deux frères étaient placés
14:06devant moi.
14:08Bruno et Frédéric étaient ensemble
14:09et moi, j'étais avec Florence.
14:13On commence à faire connaissance
14:15avec les moniteurs et tout.
14:16et puis, machinalement,
14:19certains changements
14:21se font dans le bus.
14:24Ma sœur voulait être
14:25avec sa copine.
14:26Je lui ai dit oui,
14:28il n'y a pas de souci.
14:29Et j'ai laissé la petite
14:31avec ma sœur
14:33et je suis allée
14:34dans le fond avec les grands.
14:35A cet instant,
14:42rien ne laisse présager
14:43d'un quelconque problème.
14:46Pourtant, Sylvie,
14:46comme le reste des enfants du car,
14:48file droit vers une situation
14:49catastrophique.
14:50j'aurais dû rester avec ma sœur.
14:54Samedi, 31 juillet,
15:071h30 du matin.
15:10Cela fait bientôt 6 heures
15:11que les autocars ont quitté Crépi-en-Valois.
15:14Ils en sont à la moitié du chemin.
15:17Les chauffeurs restent vigilants.
15:19Ils s'apprêtent à traverser
15:23une zone sensible du parcours
15:24au point kilométrique 305
15:26de l'autoroute A6,
15:28l'entonnoir de Beaune.
15:33Beaune est le point de jonction
15:35de l'A6 qui arrive de Paris
15:37et de l'A31
15:40qui vient du nord-est de la France.
15:43L'A31 sur laquelle se plug
15:45un petit peu plus au nord,
15:47l'A36
15:47de l'A36
15:49arrivent notamment les Allemands.
15:52Trois autoroutes donc.
15:54C'est pourquoi
15:55dans cette zone-là,
15:57l'autoroute A6
15:58est équipée de trois voies.
16:00Et puis,
16:00quelques kilomètres plus loin,
16:02elle revient à deux voies.
16:06Cette zone
16:07où se conjugue un fort trafic
16:08et un rétrécissement de chaussée
16:10est extrêmement surveillée
16:11par les professionnels
16:12de l'autoroute.
16:14Comme le raconte Virginie Perrin,
16:17ancienne journaliste
16:17d'autoroute Info.
16:20La peur principale
16:21quand on est à la gestion
16:23du trafic,
16:24c'est de voir
16:25combien de véhicules
16:27par heure il y a
16:28et ça donne une idée
16:29de la saturation
16:30d'une autoroute.
16:31Quand le flux est léger,
16:33ça passe sans problème.
16:34Quand le flux est important,
16:35ça déborde.
16:37Le débordement
16:38sur autoroute,
16:39c'est les bouchons.
16:40si dans ce bouchon
16:42il y a un accident,
16:43ça peut faire des drames.
16:49Quelques semaines avant,
16:50il y avait eu à cet endroit-là,
16:51donc à l'entonnoir de Beaune,
16:52il y avait eu un accident
16:53avec un car.
16:55Pour éviter ce type de problème,
16:57les autorités publiques
16:58ont déployé
16:59pour la toute première fois
17:00ce week-end de juillet 82
17:02plusieurs dispositifs
17:04visant la sécurité routière
17:05dans le secteur.
17:06Prise de vue aérienne,
17:10caméra de surveillance
17:11et augmentation
17:13des effectifs de patrouilleurs.
17:17Fernand Mercé
17:18est l'un d'entre eux.
17:19Sa mission,
17:20traquer la moindre anomalie
17:21qui pourrait perturber
17:22la circulation
17:23et avertir les automobilistes
17:25en cas d'accident
17:26ou de ralentissement.
17:30À ce moment-là,
17:30on activait les feux éclats.
17:33C'est un panneau triangulaire
17:34qui est sur le véhicule
17:35et on mettait le message
17:37soit c'est un arrondissement,
17:39soit c'est un bouchon,
17:40soit c'est un accident.
17:42Un dispositif préventif
17:43indispensable,
17:45particulièrement
17:45dans cette zone à risque.
17:511h35 du matin.
17:53Les deux autocars
17:54pénètrent donc
17:54cette zone sensible.
17:57Ils roulent en convoi
17:58sur la voie centrale.
18:00Une 2 chevaux
18:01vient tout juste
18:02de s'insérer
18:02entre les deux véhicules.
18:05Devant eux
18:06se trouve un car
18:07transportant
18:08des touristes allemands.
18:09Sur la voie rapide,
18:11à gauche,
18:126 voitures.
18:15Il y a deux choses
18:15qui étaient surprenantes.
18:16C'est le fait
18:16que les 3 cars
18:17roulaient sur la voie du milieu
18:19alors qu'il n'y avait
18:19personne à droite.
18:21Ça, c'est surprenant.
18:22Et les interdistance
18:22entre les véhicules.
18:25Les interdistance,
18:26c'est l'intervalle
18:27qui sépare
18:28deux véhicules.
18:30Sur autoroute,
18:31pour une vitesse
18:31de 130 km heure,
18:32la distance de sécurité
18:34réglementaire
18:35est de 73 mètres.
18:37Mais ce soir-là,
18:39aucun des véhicules
18:40ne la respecte.
18:42Je crois que dans
18:43les années 80,
18:44on n'avait pas
18:44conscience
18:45de la dangerosité
18:47de rouler
18:47à 130 sur les autoroutes.
18:48Il faut dire
19:14que les campagnes
19:14de sensibilisation
19:15à la sécurité routière
19:17sont relativement récentes.
19:19Personne,
19:19pas même
19:20les professionnels
19:21des transports,
19:22ne mesurent vraiment
19:23la dangerosité
19:23de l'autoroute.
19:26Des gens qui prennent
19:27l'autoroute
19:27à contresens,
19:29des gens qui reculent
19:29parce qu'ils ont loupé
19:30la sortie
19:31et ils vont reculer
19:32sur l'autoroute.
19:34On pouvait rouler
19:35à 150,
19:36160,
19:38à faire des queues
19:39de poissons.
19:40Il n'y avait pas du tout
19:40la peur du gendarme
19:41à l'époque.
19:45Je m'appelle
19:45Jean Lemire,
19:47j'étais pilote
19:48de voiture rapide
19:49sur l'autoroute
19:50au sein d'une unité
19:51qui s'appelle
19:51la brigade rapide
19:52d'intervention.
19:55Une fois,
19:56on dépasse une voiture
19:57puis on ne voit pas
19:59de gars
19:59qui tient le volant.
20:01Mais qu'est-ce qui se passe ?
20:02On l'arrête.
20:03Et malgré
20:03qu'il n'y avait pas
20:04de volant
20:04sur sa voiture,
20:05il tenait l'écrou
20:06de l'axe
20:08avec une clé à molette
20:09et il tournait comme ça.
20:11Il y avait une inconscience,
20:13il n'y avait pas
20:13une culture
20:15de la sécurité routière.
20:17Il y aurait pourtant
20:18de quoi être vigilant.
20:21Cette année de 1982,
20:23la route fera
20:2312 030 victimes
20:25dont celle de l'accident
20:26qui va bientôt se produire.
20:29Mais les distances
20:30de sécurité
20:31entre les véhicules
20:32et la configuration
20:33du site
20:34ne sont pas
20:34les seuls éléments
20:35qui menacent
20:36le bon déroulé
20:36du voyage.
20:38La météo
20:39joue également
20:39contre les chauffeurs
20:40qui roulent depuis
20:416 heures
20:42dans des conditions
20:42difficiles.
20:45Au cours de la journée
20:45du 30 juillet 1982,
20:47il a plu quasiment
20:48toute la journée.
20:49Ce qui fait que
20:49les patrouilleurs
20:50d'autoroutes
20:51ont passé leur journée
20:53à traiter des accidents.
20:54Il y a des tas
20:54de petits accrochages,
20:56des glissades
20:56sur la route.
20:58Par beau temps,
20:59par temps sec,
20:59normal, classique,
21:01l'autoroute
21:01est très sécurisante.
21:03Dès que les conditions
21:04climatiques se dégradent,
21:06dès qu'il y a
21:06un vent anormal,
21:08dès qu'il y a
21:08de la pluie,
21:09dès qu'il y a
21:09de la neige
21:10ou du verglas,
21:11l'autoroute
21:11devient extrêmement
21:12dangereuse.
21:14À cette époque-là,
21:16la vitesse n'est pas
21:17limitée sur l'autoroute
21:18en cas de pluie.
21:20Sur une chaussée
21:20humide,
21:21la distance totale
21:22d'arrêt
21:23est multipliée
21:24par deux
21:24par rapport
21:25à une chaussée
21:25sèche.
21:27Freinage altéré,
21:29conduites à risque
21:30et goulots
21:31d'étranglement,
21:32les prémices
21:32du drame
21:33entourent déjà
21:34les deux autocars.
21:35Donc certains
21:38patrouilleurs
21:38d'autoroute
21:39se sont dit
21:39quand même
21:40s'il continue
21:40de pleuvoir,
21:41cette nuit,
21:42on risque
21:42d'avoir
21:42un gros problème.
21:45Là,
21:45on a tout ce qu'il faut
21:46pour créer
21:47une situation
21:47dangereuse.
21:51Mais personne
21:52n'en a réellement
21:53conscience car pour l'heure,
21:55aucune difficulté
21:56n'est signalée
21:56devant eux.
21:57Il est 1h39.
22:07Les autocars
22:07se trouvent à présent
22:08au point kilométrique
22:09312,
22:10à 4 km
22:11du rétrécissement
22:12de chaussée.
22:14A l'intérieur,
22:15le calme règne.
22:17Mes deux frères
22:18et ma soeur
22:19commencent à s'assoupir
22:20tranquillement.
22:21Nous,
22:22les grands,
22:23en étant au fond,
22:24on est ensemble,
22:26on discute
22:27et on commence
22:27à s'assoupir aussi.
22:30Dehors,
22:32la pluie s'est calmée
22:33et il n'y a plus
22:34de bouchons.
22:37C'était
22:38une circulation dense
22:39qui pouvait monter
22:40à 2500,
22:412800 véhicules heure.
22:44Le trafic était
22:44important,
22:46mais
22:47pas hyper
22:48bouchonnant.
22:51Devant la relative
22:52fluidité du trafic,
22:54les patrouilleurs
22:55postés au kilomètre
22:56313
22:57viennent tout juste
22:58de baisser
22:58leur signalisation
22:59pour rentrer
23:00au centre de commandement.
23:02Ce départ
23:03des équipes
23:03de l'autoroute
23:04va s'avérer
23:05dramatique.
23:09Ce qu'elles ne savent pas,
23:11c'est qu'il y a
23:12un véhicule
23:12qui tracte
23:13une caravane
23:14et qui a
23:14un problème d'attelage
23:15et que ce problème
23:17d'attelage
23:17avec ce véhicule
23:18tractant une caravane
23:19va provoquer
23:20un nouveau bouchon.
23:21La création
23:25d'un bouchon
23:26fonctionne comme
23:27une onde.
23:27Il se déplace
23:28avec une certaine
23:29vitesse de propagation.
23:31Un bouchon,
23:32il remonte
23:32sur autoroute
23:33à la moitié
23:34de la vitesse
23:35moyenne
23:35de circulation.
23:37C'est-à-dire
23:38que si votre circulation
23:39moyenne est 220,
23:40votre bouchon,
23:41il remonte
23:42à la vitesse
23:42de 60 km heure
23:44divisé par le nombre
23:45de voies
23:45que vous avez
23:46à ce moment-là.
23:46sur l'autoroute
23:50à 6,
23:51le bouchon
23:51créé par le problème
23:52d'attelage
23:53se propage
23:54à une vitesse
23:54de 20 km heure.
23:56La confrontation
23:57entre les deux autocars
23:58et le ralentissement
23:59va se faire
24:00au point kilométrique
24:01313.
24:08Il est 1h40,
24:10tout bascule.
24:12Le car allemand
24:13constate un fort ralentissement
24:15devant lui,
24:16constate l'embouteillage
24:17et freine
24:17tout à fait naturellement.
24:21Le chauffeur
24:22du 1er bus
24:23de Colody
24:24a un léger temps
24:25de retard
24:26avant de freiner.
24:28Le Mercedes,
24:30surpris,
24:30il fait un freinage
24:31d'urgence
24:32assez brusque,
24:33surpris,
24:34il vient taper dedans.
24:42Si le chauffeur
24:43du 1er car
24:43de la colonie
24:44tarde à réagir,
24:45c'est sans doute
24:46lié à son état
24:46de fatigue.
24:48Comme le révélera
24:48le rapport d'enquête,
24:50lui et ses confrères
24:51viennent d'enchaîner
24:51deux voyages successifs
24:53de nuit.
24:53Nos chauffeurs
24:57étaient arrivés
24:58le matin même
24:59dans l'Oise
24:59avec d'autres enfants
25:01et s'apprêtaient
25:02à repartir
25:02le soir même.
25:03Certes,
25:04une chambre d'hôtel
25:04avait été prévue
25:05pour qu'ils se reposent,
25:06mais ils ne vont dormir
25:07que 3h30.
25:10La somme d'annonce
25:11peut aller jusqu'à ce
25:12qu'un conducteur
25:13ferme les paupières
25:14quelques fractions
25:16de seconde.
25:16Le temps d'érection
25:17peut être extrêmement allongé.
25:19Dans 22% des cas,
25:21les accidents mortels
25:23sont liés
25:23à la somme d'annonce.
25:27Le pire est donc
25:28à craindre
25:28quand le premier bus
25:30de la colonie
25:30heurte l'arrière
25:31du car allemand.
25:33D'autant plus
25:34qu'à l'époque,
25:35il n'y a pas
25:35de ceinture de sécurité
25:36dans les autocars scolaires.
25:39Elles ne deviendront
25:39obligatoires
25:40que 30 ans plus tard.
25:44Malgré un temps
25:44de réaction trop long,
25:46le freinage d'urgence
25:47est efficace
25:48et permet à l'autocar français
25:49de réduire son différentiel
25:51de vitesse
25:51avec le car allemand.
25:54On a un choc
25:54qui est minime
25:55entre les deux cars.
25:56Jusque là,
25:56tout se passe bien.
25:59Le drame
25:59semble éviter.
26:01En réalité,
26:03il ne fait que commencer.
26:05Car ce violent
26:06coup de frein
26:07du premier car
26:08va entraîner derrière lui
26:09une réaction
26:10en chaîne dévastatrice.
26:15L'autocar numéro 2
26:17voit très bien
26:18que le véhicule
26:19devant lui freine
26:20et il fait la même chose.
26:23Mais le bus
26:24ne va pas réagir
26:25comme prévu.
26:27Lorsque le chauffeur
26:28du car CETRA
26:28déclenchera
26:29un freinage d'urgence,
26:30à ce moment-là,
26:31il constatera,
26:32mais ce sera trop tard,
26:34que son freinage
26:34est asymétrique.
26:35Pourquoi ?
26:36Parce qu'il y a eu
26:36un défaut d'entretien
26:37de son freinage.
26:39Un freinage
26:40est dit
26:41asymétrique
26:42quand les 4 freins
26:43ne freinent pas
26:44avec la même force
26:45et intensité.
26:47Il y a 4 freins
26:48à tambour
26:48hydropneumatiques.
26:51On a une pédale
26:52de frein
26:52qui envoie de l'air
26:53dans des médecylindres
26:54hydrauliques.
26:57L'air pousse
26:57l'huile
26:58dans les cylindres
26:59de frein
26:59qui écartent
27:00les garnitures
27:01sur les tambours.
27:04On s'est aperçu
27:05qu'il y avait
27:06une usure
27:06disproportionnée
27:08entre la droite
27:09et la gauche.
27:1020% du côté gauche
27:11et 70% d'usure
27:13de votre côté.
27:14Ce qui donne
27:14forcément
27:15un déséquilibre.
27:16Ce déséquilibre
27:17n'a pas été constaté
27:19lors du contrôle
27:20technique
27:21du mois de mai
27:21puisqu'autrement
27:23il aurait été refusé.
27:27Comment expliquer
27:28une telle usure
27:29en seulement 3 mois ?
27:31Un premier élément
27:32de réponse
27:32serait l'utilisation
27:34en haute montagne
27:35de ce quart savoyard.
27:37Les freins à vent
27:38sont généralement
27:39mis à rude épreuve
27:40dans les descentes
27:41à fort dénivelé.
27:43Mais cela
27:43ne serait pas
27:44la seule explication.
27:46Il s'agit
27:47de véhicules
27:48rachetés en Allemagne
27:49que les Allemands
27:50ne veulent plus
27:50faire rouler.
27:52Les Allemands
27:52considéraient
27:53qu'ils étaient
27:53trop vieux
27:54et qu'il fallait
27:55les remiser,
27:57qu'ils n'étaient
27:57plus en état
27:58et qu'il plus est
27:59de transporter
28:00des enfants.
28:02On va parler
28:03d'un véhicule
28:03qui a déjà
28:04600 000 km
28:05au compteur.
28:06Pour un autocar,
28:08ça n'est pas anormal.
28:09Ce type de véhicule
28:09est conçu
28:10pour vivre
28:10à peu près
28:11un million de kilomètres.
28:12Mais il ne peut
28:13le faire en sécurité
28:14que s'il est
28:15correctement entretenu.
28:17Quelle qu'en soit
28:18la raison,
28:19le dysfonctionnement
28:20asymétrique
28:21des freins à vent
28:21est totalement méconnu
28:22du chauffeur
28:23du deuxième autocar.
28:24Et cela va s'avérer
28:27catastrophique.
28:30Quand il freine,
28:31le véhicule
28:32se déporte
28:33sur la voie de gauche,
28:35le frein gauche
28:36étant moins usé
28:37que celui de droite.
28:39Le car
28:39heurte une première voiture
28:41qui s'encastre
28:41dans une autre,
28:42puis une deuxième.
28:44Malgré tout,
28:45le chauffeur
28:45de l'autocar
28:46arrive à revenir
28:47sur la voie centrale.
28:49C'est alors
28:49qu'un autre problème
28:50surgit devant lui.
28:51A la 2 chevaux
28:53qui s'était insérée
28:54un peu plus tôt
28:55se rajoute
28:56au dernier moment
28:56une Citroën GS.
28:59La GS roulait
29:00sur la file
29:01la plus à gauche,
29:02réduit de confronté
29:03à un ralentissement
29:04et sont déportés
29:05sur la file du milieu.
29:06Et ce serait donc
29:07trouvé devant
29:08la 2 chevaux.
29:09La Citroën GS
29:10se rabat
29:12de la file de gauche
29:13pour se placer
29:14devant la 2 chevaux.
29:15Elle se rabat
29:16sans doute
29:16en position dangereuse.
29:19Un point
29:20qui mérite
29:21d'être souligné,
29:21c'est l'absence
29:23de rétroviseur
29:24sur le côté droit
29:25des voitures.
29:26On conduit
29:27avec un énorme
29:28angle mort.
29:30L'angle mort
29:31désigne
29:32toutes les zones
29:33que le conducteur
29:34ne peut pas voir
29:34avec ses rétroviseurs.
29:36Ce sont les zones rouges.
29:38Mais l'absence
29:39du rétroviseur
29:40à droite
29:40augmente
29:41de 25 degrés
29:42l'angle mort
29:42de ce côté.
29:44Le côté droit
29:45devient totalement aveugle
29:47pour le conducteur.
29:48Autant sur la route
29:51ça n'avait pas
29:52une grosse importance
29:53mais sur l'autoroute
29:54effectivement
29:55dès que vous étiez
29:55sur la file de gauche
29:57et que vous vouliez
29:57vous rabattre au centre
29:58vous aviez
29:59un angle mort
29:59qui faisait
30:00que si quelqu'un
30:00vous doublait
30:01par la droite
30:01il y avait un risque
30:03d'accident.
30:03Sur l'autoroute A6
30:06à 1h45 du matin
30:08quand la GS
30:10se rabat brusquement
30:11elle ne fait pas attention
30:13à ce qu'il y a
30:13sur la voie centrale.
30:15Elle ne tape pas
30:16la 2 chevaux
30:17mais réduit encore plus
30:18les interdistance
30:19entre les véhicules.
30:20Et le fait
30:23de s'intercaler
30:24alors qu'il y a déjà
30:25un ralentissement
30:26c'est la cas d'instance.
30:29Le fait
30:30que les deux voitures
30:31s'intercalent
30:31empêche
30:32le deuxième autocar
30:33de pouvoir
30:34s'arrêter normalement
30:36de pouvoir freiner
30:37et de s'arrêter normalement.
30:38Il n'a plus
30:38la distance suffisante.
30:42Conclusion
30:43ils percutent
30:43les deux voitures
30:44qui se trouvent écrasées
30:45entre l'avant
30:46d'un autocar
30:47et l'arrière de l'autre.
30:48Le choc est terrible.
30:51La différence de masse
30:52entre un autocar
30:53de 15 tonnes
30:53et des voitures
30:54pesant moins d'une tonne
30:55chacune
30:56est dramatique.
31:01L'énergie cinétique
31:02en fait
31:03si on prend
31:03l'exemple d'un car
31:04qui roule
31:05à 110 km heure
31:06avec un poids
31:07à peu près
31:07de 15 tonnes
31:08sur un choc frontal
31:10ça représente
31:11à peu près
31:126 500 000 joules.
31:14On peut comparer
31:18à jeter
31:19un car
31:19de 40 mètres
31:20c'est-à-dire
31:21d'un immeuble
31:21de 10 étages
31:22donc c'est quand même
31:23énorme.
31:26Une deux choses
31:26c'est de la taux
31:27de boulonnais
31:28moi je suis amateur
31:29de voitures anciennes
31:30c'est merveilleux
31:31c'est un vrai plaisir
31:32cette voiture
31:32mais aujourd'hui
31:35c'est même plus homologable
31:36le premier crash test
31:38elle explose.
31:40Au niveau
31:40de sa structure métallique
31:41c'est une voiture
31:42qui n'a pas de toit
31:43son toit
31:45est formé
31:45en fait
31:45par une capote
31:46qu'on peut enrouler
31:47ce qui veut dire
31:49que
31:49en cas de choc latéral
31:51les deux parois latérales
31:53ne demandent
31:54qu'à se replier
31:55sur les occupants
31:55du véhicule.
32:04Les images
32:05prises quelques heures
32:06après le drame
32:06témoigneront
32:08de la violence
32:08du choc.
32:13Les passagers
32:16des deux voitures
32:17sont tués
32:17sur le coup.
32:22À l'intérieur
32:23du deuxième car
32:24le carambolage
32:26sème la panique
32:26parmi les enfants
32:27endormis.
32:28On est réveillés
32:29par les coups
32:30de frein
32:30brusquement
32:31et le choc
32:33entre les deux bus.
32:37Il y avait
32:37un des animateurs
32:38qui était au bout
32:39du car
32:39qui dormait
32:39dans le couloir
32:40quand il y a eu
32:41le choc
32:41il est parti
32:42vers l'avant.
32:45Et là
32:45la grosse panique.
32:47On se cherche
32:48l'un à l'autre
32:48on est à moitié
32:49endormis
32:50tout le monde
32:53crie
32:53tout le monde
32:54pleure.
32:56La situation
32:56est déjà traumatisante
32:58pour les 64 passagers
32:59du deuxième car.
33:01En une seconde
33:02elle va virer
33:03au cauchemar.
33:07Après la prise
33:08en sandwich
33:08des deux voitures
33:09entre les autocars.
33:10on aurait pu
33:11en rester là
33:11mais
33:12les réservoirs
33:14des voitures
33:14ont été
33:15écrasés
33:16par le choc.
33:18Si on comprime
33:19un volume
33:20de manière violente
33:21il y a une surpression
33:22qui est créée
33:23et cette surpression
33:24va provoquer
33:25l'éjection
33:25du contenu
33:26des réservoirs.
33:30Au moins
33:3020 litres d'essence
33:31se répandent au sol
33:32aidés par la fine
33:33pellicule d'eau
33:34à la surface
33:35de la chaussée.
33:36Il faut savoir
33:37que l'essence
33:38a une densité
33:39de 0,7
33:39par rapport
33:40à l'eau.
33:41Ça veut dire
33:41que le film
33:41d'essence
33:42court à une vitesse
33:43incroyable
33:44à la surface
33:45de la pellicule
33:46de l'eau.
33:49Et là
33:50la machine infernale
33:51se met en route.
33:52Quand le carburant
34:00des voitures
34:00glisse sur la chaussée
34:01il y a un risque
34:03d'auto-inflammation.
34:06À 400 degrés
34:07une nappe d'essence
34:09prend feu
34:09sans avoir besoin
34:10d'une flamme.
34:12Il faut rechercher
34:12ce qui pouvait être
34:14à une température
34:15supérieure
34:16à 400 degrés.
34:18Qu'est-ce qu'on a
34:18dans ce cas-là ?
34:19On a les collecteurs
34:21d'échappements,
34:21des moteurs.
34:23On peut avoir
34:24des courts-circuits électriques.
34:26Quand on sait
34:26qu'un court-circuit électrique
34:27nous fait dépasser
34:28très facilement
34:293000 degrés,
34:31en fait,
34:32l'énergie d'activation
34:33elle est vraisemblablement
34:34sur des points
34:35qui étaient très chauds
34:37sur les véhicules.
34:38À partir de là,
34:40le feu
34:40va gagner
34:42les deux voitures
34:42et se propager
34:45à l'arrière
34:46d'un autocar
34:46et à l'avant
34:47de l'autre.
34:50La puissance
34:51de l'incendie
34:52est phénoménale.
34:54Et comme si cela
34:55ne suffisait pas,
34:57de nouvelles conditions
34:57météorologiques
34:58influent
34:59sur la propagation
35:00du feu.
35:06Le vent
35:07qui souffle
35:08rabat les flammes
35:09vers le car
35:10qui est derrière.
35:10Donc,
35:11dans une certaine mesure,
35:12le vent
35:13protège
35:15le premier quart
35:15de la colonie
35:16de vacances
35:16mais condamne
35:18le deuxième.
35:27Ce qui va prendre feu
35:29en premier,
35:29c'est le pneumatique
35:30avant droit,
35:31le plancher,
35:32ce sont les structures
35:33basses,
35:34très rapidement,
35:35très vite.
35:36Et avec un plancher
35:38en bois,
35:38ça brûle encore plus vite.
35:39le feu
35:43rentre dans le véhicule.
35:48À l'intérieur du car,
35:50les deux conducteurs,
35:51les trois moniteurs
35:52et les 59 enfants
35:53sont dans un état
35:55de sidération
35:55face à ce qui leur arrive.
35:56On cherche à sortir
36:01puisque tout de suite,
36:02on s'aperçoit
36:03qu'il y a des flammes
36:03et c'est la panique
36:06complète.
36:07Personne
36:08n'a la moindre connaissance
36:09des manœuvres
36:10de sécurité
36:11dans un autocar
36:12et encore moins
36:13en cas d'incendie.
36:14C'est-à-dire que
36:15ni le chauffeur
36:16ni les moniteurs,
36:17encore moins les enfants,
36:19n'ont la moindre idée
36:20de ce qu'il faut faire
36:21en cas d'urgence.
36:22On n'entend pas
36:25de consigne de moniteurs,
36:27ils sont aussi paniqués
36:28que nous.
36:30Pour les 64 passagers
36:31de l'autocar,
36:33une course
36:33contre la montre
36:34commence.
36:35Lorsqu'on va être
36:36devant l'incendie
36:37d'un autocar,
36:38on sait qu'il faut
36:39impérativement
36:40faire sortir
36:40la totalité
36:41des passagers
36:42en moins de deux minutes.
36:52Le téléphone sonne,
36:58c'est le planton
36:59qui m'appelle
37:00en me disant
37:01voilà, tiens Fernand,
37:02il y a un accident,
37:03rien de plus,
37:04quoi s'il voulait.
37:06Au cours de la nuit,
37:07j'étais de permanence
37:08à mon domicile.
37:09J'ençois un appel téléphonique,
37:11gendarme Lamir,
37:12vous venez me chercher
37:13tout de suite
37:13à mon domicile,
37:14il y a un grave accident
37:15sur l'autoroute,
37:17dépêchez-vous.
37:20Quand les gendarmes,
37:21patrouilleurs et pompiers
37:22sont prévenus,
37:23ils ne connaissent pas
37:24la gravité de la situation.
37:27Ils tentent de rejoindre
37:28la zone de l'accident,
37:30mais l'accès au kilomètre 313
37:32est très difficile.
37:36Les pompiers ont du mal
37:37dans la mesure où
37:38il semblerait qu'il y avait
37:39des gens arrêtés,
37:41y compris sur la bande
37:42d'arrêt d'urgence.
37:43Des voitures dans tous
37:44les sens et tout,
37:45je peux vous dire
37:45qu'il a fallu jongler.
37:47Toutes les voies
37:48de circulation sont prises
37:49et donc pour les secours,
37:51c'est impossible
37:53d'arriver sur place.
37:57Or, le temps presse.
37:59Depuis le carambolage,
38:01le feu ne cesse de grossir
38:02à l'intérieur du deuxième car.
38:04Et pour cause.
38:05Quand on examine
38:09l'équipement intérieur
38:11de l'autocar,
38:12on s'aperçoit que les sièges
38:14sont en velours,
38:15matériaux évidemment
38:17non classés
38:18du point de vue
38:19de la tenue au feu.
38:21Des rideaux,
38:22des rideaux souples
38:23là aux fenêtres,
38:25qui sont des matériaux
38:26thermiquement fins,
38:27qui vont s'enflammer
38:28très rapidement.
38:33Tous ces matériaux,
38:35à l'époque,
38:36n'étaient pas soumis
38:37à homologation.
38:39Il n'existait pas de normes.
38:43Ces matériaux étaient
38:44extrêmement dangereux.
38:46Leur tenue au feu
38:47était lamentable
38:48et la combustion
38:49entraînait
38:50des vapeurs toxiques,
38:52hautement toxiques.
39:00Sylvie Martin,
39:02placée au fond du car,
39:04est tétanisée
39:05par ce qu'elle voit
39:05quand soudain.
39:08On regarde
39:09à droite à gauche.
39:11La première des choses
39:11qu'on voit,
39:12c'est la porte arrière
39:13ouverte et on sort.
39:15On ne cherche pas
39:16à savoir
39:17ce qui s'est passé,
39:19c'est l'instinct
39:19où on sort.
39:23Et on voit
39:23énormément de voitures
39:24partout,
39:25on entend des cris,
39:27des gens qui se posent
39:28des questions.
39:29Tout le monde est là,
39:30tout le monde n'est pas là,
39:32vous étiez combien ?
39:37Dehors,
39:38la jeune adolescente
39:39aperçoit les enfants
39:40du premier autocar.
39:41Ils sont tous sains et saufs.
39:45Elle se retourne alors
39:46vers le deuxième car,
39:47à la recherche
39:48de ses deux frères
39:49et de sa sœur.
39:52C'est là où j'ai réalisé
39:53que mes deux frères
39:54et ma sœur
39:55n'étaient pas là.
39:56Donc,
39:57la première tentation,
39:59c'est de retourner
40:00et d'aller les chercher.
40:02Sauf que, bon,
40:03les moniteurs
40:04et les monitrices
40:05qui restaient
40:05ne voulaient pas
40:06qu'on approche
40:07le bus du tout.
40:09Ça a été
40:10une angoisse
40:11terrible pour moi
40:13parce que, bon,
40:15mes deux frères
40:15et ma sœur
40:15étaient encore restés dedans.
40:16Les flammes
40:20empêchent Sylvie
40:21de s'approcher.
40:23Pourtant,
40:23à l'intérieur du car,
40:25il reste encore
40:2644 enfants,
40:27dont ses deux frères
40:28et sa sœur
40:29ainsi que ses huit cousins.
40:31Pourquoi ne sortent-ils pas ?
40:34Ce que les rescapés
40:36ignorent à ce moment-là,
40:37c'est qu'il y a un problème
40:38au niveau de la porte avant.
40:39L'une des voitures
40:48qui l'a écrasées
40:50est venue
40:51coincer
40:51sa porte avant.
40:55Il s'agit
40:56de la deux-chevaux
40:57qui s'est décalée
40:57sur la droite du car
40:58au moment de l'impact.
41:00Impossible donc
41:01d'ouvrir
41:02la porte principale.
41:05C'est là
41:05que l'issue
41:05devient tragique
41:06pour les passagers
41:07à l'intérieur.
41:07Ils veulent tous
41:10descendre par là.
41:13La seule
41:14et unique raison,
41:15ce que nous appelons
41:16nous le mécanisme
41:17lésionnel,
41:18c'est qu'à partir
41:19du moment
41:19où on est
41:20dans une situation
41:21d'urgence,
41:22instinctivement,
41:23on veut sortir
41:23par où on est monté.
41:28On a pu faire,
41:29nous,
41:29à une certaine époque,
41:30des exercices
41:31d'évacuation
41:32dans des salles
41:33de cinéma,
41:34par exemple.
41:35On crée un événement,
41:36les gens
41:37naturellement
41:38sortent par là
41:38où ils sont arrivés.
41:40Si on bloque
41:41ces portes-là,
41:42on les bloque
41:43mécaniquement,
41:45là,
41:46il y a une phase
41:46de désorientation
41:48qui est sensible
41:50avant cette prise
41:52de conscience
41:52d'aller utiliser
41:54une sortie
41:54qui n'est pas connue.
41:56C'est malheureusement
41:59ce qu'il se passe
42:00pour les 48 passagers
42:01coincés dans le car
42:02en flamme.
42:05Totalement désorientés,
42:07ils essayent tous
42:07de sortir par la porte
42:08avant,
42:10ne sachant pas
42:10qu'il existe
42:10une porte ouverte
42:11à l'arrière du car.
42:15Leur sort est scellé.
42:16On va très rapidement
42:20entraîner
42:20l'asphyxie
42:21des enfants
42:23et des moniteurs
42:25et du chauffeur.
42:30Les températures
42:31montent
42:32à plus de 200 degrés.
42:33Au bout de trois minutes,
42:34on est à 800 degrés
42:35au niveau
42:35de la porte
42:36avant-droite.
42:37On ne peut plus rien faire.
42:38C'est fini.
42:38Derrière moi,
42:47plus personne
42:47n'est sorti du bus.
42:49J'étais la dernière
42:50à sortir.
42:54Quand les vitres
42:54finissent par exploser
42:55sous l'effet de la chaleur,
42:57l'appel d'air
42:58généré
42:58enflamme
42:59l'intégralité du car.
43:02C'est ce moment
43:02tragique
43:03que capture
43:03avec son appareil
43:04le photographe
43:05Roger Picard.
43:08Cette photo-là,
43:10le car en flamme,
43:12c'est certainement
43:12le reportage
43:14le plus douloureux
43:14que j'ai effectué
43:15dans ma carrière.
43:25Il est 2h12
43:26quand les secours
43:27arrivent enfin
43:28au point kilométrique 313.
43:31Il est déjà trop tard.
43:35Les bus étaient en feu déjà.
43:37et vous ne pouvez pas
43:39approcher.
43:40C'est tellement important,
43:41c'est tellement...
43:42Vous n'avez rien fait.
43:43Vous êtes impuissant.
43:45À moins d'être là
43:46dans la minute,
43:48il n'y a rien à faire.
43:50Il est impossible
43:51pour les pompiers
43:52d'apporter
43:53un secours quelconque
43:54et c'est évidemment
43:56physiquement impossible.
43:57Je m'appelle Philippe Léglise.
44:07J'ai été le premier journaliste
44:09arrivé sur l'accident de Beaune
44:11sur les coups
44:12de 2h20,
44:142h25 du matin.
44:18J'arrive sur place
44:20et là,
44:21je tombe sur les pompiers
44:22qui sont en train
44:23de finir
44:24de maîtriser
44:25l'incendie.
44:30La situation
44:31est un peu hubuesque.
44:33Il y a ces deux bus.
44:35Entre les deux,
44:36il semblerait
44:37qu'il y ait
44:37une 2 chevaux.
44:38Il y a dans le premier bus
44:46une R16
44:48qui touche
44:50le premier bus
44:51et puis il reste
44:534 voitures
44:54qui sont éparses.
44:56Alors,
44:57certaines contre
44:58la bande d'arrives d'urgence,
44:59une autre carrément
45:00perpendiculaire
45:02à l'axe de circulation
45:03qui avait tapé qui,
45:07comment,
45:07pourquoi,
45:08dans quelles circonstances
45:08pendant toute la nuit,
45:10ça a été le grand flou.
45:13Rejoint par une équipe
45:14de télévision,
45:15Philippe Léglise
45:16suit les opérations
45:17de secours.
45:20À ce moment,
45:21personne ne sait
45:22le bilan exact
45:23de l'accident.
45:27C'est la nuit,
45:28c'est un freud,
45:28on ne sait pas
45:28où on est,
45:29on se demande
45:30ce qui arrive,
45:31ce n'est pas possible
45:32de voir ça.
45:36On n'a que
45:36les éclairages
45:38des secours
45:39pour toute lumière.
45:40C'est un peu surréaliste.
45:43Et puis,
45:44tout d'un coup,
45:44le petit jour
45:45est là,
45:47la vision d'apocalypse.
45:50c'est le plus dur.
46:02C'est ça le plus dur,
46:03c'est qu'au matin,
46:04au petit jour,
46:05quand le jour s'est levé,
46:07je dis,
46:08mais ce n'est pas possible.
46:11Vous savez,
46:11quand vous montez
46:12dans le quart
46:12et puis vous voyez
46:13tous ces gosses
46:14qui sont au milieu,
46:14tous les uns sur les autres.
46:16On a toujours ça
46:26dans la tête,
46:27quoi.
46:29Puis on ne peut pas
46:30l'oublier,
46:30non,
46:31ce n'est pas possible.
46:34Non.
46:34Le bilan est sans précédent.
46:4153 personnes
46:42sont mortes
46:43dans l'accident.
46:4546 enfants,
46:47dont 44 dans l'autocar.
46:52Sylvie et les 61 rescapés
46:53sont mises en sécurité
46:54loin de l'autoroute.
46:58Pour la jeune adolescente
46:59de 15 ans,
47:01la douleur
47:01est incommensurable.
47:02Un vide.
47:07Un vide.
47:08Un désarroi
47:09total.
47:12Parce que je me dis,
47:13mais pourquoi
47:13c'est arrivé
47:14et qu'est-ce que je vais dire
47:16à mes parents ?
47:18Qu'est-ce que je vais leur dire ?
47:21Après,
47:21quand on prend conscience
47:22que mes cousins
47:24et mes cousines
47:24ne sont plus là non plus,
47:27je me dis,
47:27mais qu'est-ce que je vais dire
47:28à ma famille ?
47:30Pour moi,
47:32c'était terrible.
47:36On est parti à 12
47:37et je suis revenue
47:38toute seule.
47:39Alors que s'activent sur l'autoroute
47:56les grues et les dépanneuses
47:58pour déplacer les véhicules
47:59et les mettre sous scellés
48:00pour expertise,
48:01à 500 km de là,
48:08à Crépy-en-Valois,
48:10les familles apprennent seulement
48:11que les cars
48:12qui transportaient leurs enfants
48:13ont eu un terrible accident.
48:14nous sommes rendus tous en mairie
48:21pour avoir essayé
48:22d'avoir les infos
48:23et on a reçu
48:23les informations
48:24quand on était à la mairie.
48:34C'est à ce moment-là
48:35que j'apprends
48:35que mes trois enfants
48:36sont décédés.
48:37qu'est-ce que je me souviens,
48:42c'est les urnements
48:43de ma soeur
48:44qui a perdu connaissance.
48:49Mais après,
48:50pour moi,
48:50c'est le brouillard,
48:51un petit peu le brouillard.
48:52La route tue chaque semaine
48:57et on s'y habitue presque.
48:59Cette fois,
49:00il s'agit du plus grave accident
49:01de la route
49:02jamais vu en France
49:03et la plupart des victimes
49:04sont des enfants.
49:08L'annonce de la catastrophe
49:10bouleverse tous les Français.
49:13Un deuil national
49:14est décrété.
49:17Les obsèques se feront
49:17en présence
49:18du président
49:18de la République de l'époque,
49:21François Mitterrand.
49:22Plus rien n'est comme à vous.
49:27On nous a enlevé
49:28une partie
49:29de notre innocence.
49:32Tout simplement.
49:33On a déchiré
49:34toutes les familles entières.
49:39Une question
49:40ne cesse de revenir.
49:42Comment éviter
49:42qu'un tel accident
49:43se reproduise ?
49:46Après deux ans d'enquête
49:47et un procès
49:47pendant lequel
49:48les familles des victimes
49:49apprendront que le deuxième car
49:50a été conduit
49:51par un chauffeur
49:51occasionnel,
49:53plusieurs mesures fortes
49:54sont prises
49:54par les autorités publiques.
49:59La première conséquence
50:00immédiate
50:01après Beaune,
50:02c'est de décider
50:03que pour le chassé-croisé
50:04entre juilletiste
50:05et haussien
50:06de l'été suivant,
50:07il est hors de question
50:08d'avoir
50:09des transports
50:10collectifs d'enfants.
50:11baisse de la limitation
50:12de vitesse
50:12par temps de pluie
50:13sur toutes les routes,
50:14on perd 20 km heure.
50:18À cela s'ajoute
50:19un contrôle plus strict
50:20du temps de conduite,
50:21de nouvelles normes
50:22concernant la tenue au feu
50:23des matériaux
50:24et des exercices
50:26d'évacuation
50:26des cars scolaires.
50:28Mais est-ce que cela
50:29est suffisant
50:30pour garantir
50:31la sécurité absolue ?
50:32En 2015,
50:35un accrochage
50:36entre un carré
50:36et un poids lourd
50:37entraîne un incendie
50:38et cause le décès
50:39de 43 personnes.
50:44La raison ?
50:46Tous les occupants
50:46ont voulu sortir
50:47par la porte avant.
50:49Ma conviction personnelle,
50:51c'est qu'aujourd'hui,
50:53même circonstance,
50:55même conséquence,
50:56même avec un véhicule moderne.
50:59Même si le risque zéro
51:00n'existe pas,
51:02certains professionnels
51:03appellent aujourd'hui
51:04à renforcer
51:05les messages
51:05de sensibilisation
51:06à destination
51:08des passagers
51:08des autocars.
51:10Il suffit de faire
51:11dans l'autocar
51:12ce que l'on fait
51:13dans l'avion.
51:14Ça peut être aujourd'hui
51:15dans tous les autocars,
51:16il y a des vidéos.
51:17Et on leur explique
51:18par où il faut sortir,
51:20comment on peut sortir
51:21et comment on peut
51:21briser une glace.
51:22Et là,
51:23on divise nos bilans
51:24par deux.
51:27Des solutions
51:28qui peuvent sauver
51:29des vies
51:29et éviter
51:31à d'autres passagers
51:32de se retrouver
51:32comme pour ce 31 juillet 1982,
51:36au cœur d'une situation
51:37hors de contrôle.
52:01de l'avion.
52:04Sous-titrage Société Radio-Canada
52:05Sous-titrage Société Radio-Canada
53:06...
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