- 19/07/2025
Ce matin, on évoque les Olympiques internationales de Physique, qui ont lieu pour la première fois en France. Avec Serge Haroche, prix Nobel de physique 2012 et Jean-Michel Courty, physicien, médaille d’or du CNRS en médiation, ancien participant au concours. Plus d''info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20/l-invite-de-8h20-du-we-du-samedi-19-juillet-2025-4162703
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00:00Il est 8h17 et un an après, Paris refait le coup des Olympiades, mais cette fois pas de Léon Marchand ni de Basket 3-3.
00:14Les Olympiades qui s'ouvrent aujourd'hui à l'école polytechnique, ce sont les Olympiades internationales de physique.
00:21Et en France, c'est une première. Ce sont des élèves de niveau terminal et de première année de prépa scientifique qui s'affrontent.
00:28Et pour en parler ce matin, deux invités. D'abord Serge Haroche, bonjour, physicien prix Nobel de physique en 2012 pour vos travaux sur la physique quantique.
00:37Et Jean-Michel Courty, bonjour, physicien vous aussi, professeur à Sorbonne Université, vulgarisateur également, notamment à travers plusieurs ouvrages.
00:46Et sur YouTube, votre chaîne Merci la Physique. Vous avez participé, vous, à ces Olympiades internationales en quelle année ?
00:521983.
00:53Et c'était où ?
00:54C'était en Roumanie, la Roumanie de Ceausescu à Bucarest.
00:58Vous nous raconterez aussi votre expérience parce que ça pourra nous aider à comprendre pourquoi il a fallu attendre si longtemps, Serge Haroche, pour accueillir ces Olympiades en France.
01:10Ça fait 55 ans que ça existe.
01:11Je ne saurais pas répondre à cette question. Je pense qu'effectivement, ces Olympiades existent depuis très longtemps. La date à laquelle, l'année à laquelle ça se passe est décidée très longtemps en amont.
01:26Je crois une dizaine d'années en amont. Donc je pense que la France était candidate dans le passé.
01:31Oui, ça fait longtemps. Et ensuite, pour la France, il y a eu une interruption. C'est-à-dire que moi, la France, à partir de 1984, n'a plus participé. Il y avait eu une quinzaine d'années de participation. Et puis, elle a repris la participation vers 2005.
01:45Et pourquoi il y a eu une interruption alors ?
01:47Alors ça, tout ça, je ne saurais dire. À l'époque, j'étais jeune et je ne savais même pas que ça s'était interrompu. Je l'ai appris récemment.
01:54Serge Haroche, vous êtes six prix Nobel français à soutenir ces Olympiades. Pourquoi pour vous, c'est important de montrer votre soutien à un tel événement ?
02:04Je pense qu'il est important de montrer que la coopération internationale existe en science à tous les niveaux et en particulier au niveau des jeunes.
02:10Dans une période qui est troublée, où la science est attaquée, où on a besoin de plus en plus de science,
02:15c'est réconfortant de voir que les jeunes venant d'environnements, de régimes et de pays très différents
02:21peuvent se rencontrer, discuter, créer des liens qui vont durer toute la vie ensuite, dans certains cas.
02:28Donc c'est vraiment essentiel, surtout si l'on pense que les défis auxquels nous sommes confrontés
02:34seront résolus par cette génération et les générations suivantes.
02:37Oui, 90 pays, Jean-Michel Courty, 90 pays, 440 candidats de moins de 20 ans du monde entier.
02:46Vous aussi, ça vous ravi de voir cette coopération dont parle Serge Haroche ?
02:50Ah oui, c'est vraiment exceptionnel parce qu'il y a bien sûr les gros pays pour lesquels on voit que la science,
02:57c'est super important et tous les gros pays sont là et compètent ensemble.
03:02Mais 90 pays, ça veut dire qu'il y a des pays de tous les continents en fait
03:06et des interactions entre les candidats parce qu'assez rapidement...
03:10C'est ce que j'allais dire, ce sont des rencontres aussi au-delà de la compétition et des épreuves.
03:16Vous qui avez participé, vous le disiez, en 1983, j'imagine que là, il y a un monde qui s'ouvre aussi devant vous
03:22et vous avez rencontré tout un tas de gens là-bas.
03:25Tout à fait, parce qu'en fait, il y a les épreuves, mais les épreuves, c'est juste deux fois cinq heures
03:30et le reste du temps, pendant que le comité corrige les copies, etc.
03:34Il y a tout un programme social de visite, etc.
03:38Où là, toutes les délégations sont ensemble, il y a des petites fêtes, etc.
03:42Donc il y a énormément de contacts entre les différents pays et ça, c'est exceptionnel.
03:47Serge Haroche, vous vouliez rajouter un mot là-dessus ?
03:49Effectivement, il y a des contacts aussi entre les jeunes et les plus seniors,
03:55ceux qui organisent et en particulier les membres du comité d'honneur dont je fais partie.
04:01On a l'occasion de rencontrer et de discuter avec certains de ces jeunes et c'est très intéressant.
04:05Et on peut ajouter aussi que chacune des équipes a un jeune Français du même âge accompagnateur.
04:12Donc ça veut dire qu'il y a aussi énormément de contacts entre l'équipe et l'accompagnateur
04:17qui peut expliquer le pays, les coutumes, ce qui se passe, les différences.
04:22Moi, j'ai énormément souvenir aussi des interactions avec l'accompagnateur.
04:25Oui, il y a cinq jeunes en équipe de France, pour le coup, ceux qui vont participer à la compétition.
04:32Pour qu'on essaye de comprendre, parce que j'imagine que certes, ils sont jeunes,
04:36mais ceux qui sont sélectionnés, c'est déjà un peu le top niveau de la physique à leur âge.
04:41Est-ce qu'on peut essayer d'expliquer quelles sont en fait les épreuves ?
04:45Comment ça se passe ? Vous disiez deux fois cinq heures, comment ça se déroule vraiment ?
04:49Une épreuve théorique et une un peu plus pratique.
04:51Jean-Michel Courti explique.
04:51Oui, alors pour les sélections, en fait, pendant l'année, il y a des centres en France de préparation.
04:57Donc, les meilleurs élèves vont dans ces centres de préparation, dans lesquels ils ont des formations.
05:04Vers la fin de l'année, il y a une épreuve de présélection, dans laquelle il y a une quinzaine,
05:08une vingtaine de candidats qui sont présélectionnés et qui ensuite viennent faire un stage de dix jours à Paris,
05:14où ils vont avoir une formation complémentaire et des tests expérimentaux.
05:17Et à cette issue, il y a l'équipe de cinq qui est faite.
05:19Et ensuite, pour les Olympiades, il y a une épreuve expérimentale de cinq heures et une épreuve théorique de cinq heures.
05:26Quand on dit une épreuve expérimentale, ça veut dire quoi ?
05:29Ça veut dire qu'il faut faire des expériences.
05:30Et donc, tous les candidats, quand ils arrivent, ils sont tous dans des boxes.
05:35Et dans chaque box, quand ils rentrent, ils trouvent une boîte.
05:37Et dans cette boîte, il y a tout le matériel pour réaliser deux expériences de physique totalement différentes,
05:47avec des mesures très précises, mais un besoin de créativité.
05:53Donc, dans les dispositifs expérimentaux, quand on regarde dans le passé, il y avait des choses du 6 black box.
05:58C'est-à-dire que, par exemple, il y avait une expérience où vous trouvez dans la boîte un disque de bois d'une vingtaine de centimètres de diamètre.
06:06Et on vit au milieu de ce disque, il y a un disque en acier qui a été caché.
06:11Quelle est la taille du disque ? Quelle est sa position ?
06:13D'accord. Ça, c'est le genre d'expérience ?
06:15C'est le genre d'expérience qu'on peut avoir.
06:17Et là, vous vous débrouillez, vous avez une règle, vous avez une balance, vous pouvez l'accrocher pour la faire tourner.
06:24Et donc là, c'est toute la créativité du physicien qui va décider de ce que je peux faire comme expérience
06:29pour avoir des informations sur cet objet qui est à l'intérieur.
06:32Serge Haroche, vous disiez que vous avez discuté avec des anciens candidats.
06:37Est-ce qu'ils vous ont impressionné aussi ? Est-ce qu'ils vous impressionnent, ces jeunes ?
06:40Là, c'est quasiment du sport de haut niveau, ce que nous raconte Jean-Michel Courty.
06:44Bien sûr. Effectivement, d'abord, on est impressionné par leur enthousiasme, par leur envie d'apprendre, leur envie de leur créativité aussi.
06:53Parce que lorsqu'on vous donne une boîte comme celle-là, il faut effectivement exercer sa créativité, sa curiosité.
07:00Et il est remarquable de voir qu'il y a dans chaque génération de jeunes des candidats qui ont cette appétence et cette qualité.
07:09Et l'important pour notre... En général, l'important pour le système éducatif, c'est de maintenir cette qualité, cet enthousiasme,
07:18et de maintenir ces jeunes dans la voie de la physique, dans la voie de la recherche ou de l'enseignement
07:26pour vraiment aider à maintenir l'intérêt et maintenir aussi ce niveau de créativité, d'acquisition de connaissances
07:39qui peut être utile sur le plan fondamental et aussi sur le plan des applications pratiques.
07:43Et bien justement, allons-y sur la place des sciences peut-être en France et dans l'éducation.
07:51Le niveau des élèves français en maths et en sciences, on le sait, est inférieur à la moyenne des pays de l'OCDE.
07:57On a l'impression, étude après étude, que le phénomène ne s'arrange pas.
08:02Jean-Michel Courtier, est-ce qu'on manque de culture scientifique, vous diriez, en France ?
08:07Alors je pense qu'il faut voir aux différents niveaux.
08:09Il y a la question des écoles élémentaires, collège, lycée et après-classe préparatoire.
08:13Et à chaque fois, les choses sont un petit peu...
08:15Là, quand je parlais de l'OCDE, c'est fin du primaire et au milieu du collège en quatrième.
08:19Le point, c'est qu'on a globalement une dévalorisation de la profession d'enseignant depuis 20-30 ans.
08:26Ce qui fait que, pour les personnes qui sont intéressées, brillantes, maths, physique, sciences, etc.,
08:33il y a des tas d'autres possibilités de carrière beaucoup plus intéressantes que l'enseignement.
08:37Donc il y a une désaffection des métiers de l'enseignement pour les personnes de qualité
08:43qui allaient à l'enseignement comme moi j'étais...
08:47Et donc ça, ça a des conséquences forcément sur les élèves ?
08:50Oui.
08:51Saint-Garroge, vous partagez le constat ?
08:52Par exemple, dans l'enseignement primaire, la plupart des professeurs des écoles sont plutôt des littéraires.
08:58Ils sont issus de filières littéraires, sciences humaines.
09:02Et ils ne sont pas à l'aise avec les concepts scientifiques, même à un niveau élémentaire.
09:07Et ça se ressent, parce que si on transmet cette espèce de difficulté ou de résistance face aux maths,
09:15ça se transmet aux élèves.
09:17Et je pense surtout aux filles.
09:19Le fait qu'il y a un déficit de filles dès ce niveau-là,
09:24c'est lié à ces raisons-là, qui ne sont pas des raisons scientifiques essentielles,
09:30qui sont des raisons plutôt culturelles et sociales.
09:32Et sociales, et des stéréotypes.
09:34Et donc c'est tout ça qu'il faut essayer de modifier, mais ça va prendre du temps.
09:38Et ça ne va pas se refléter dans les classements PISA immédiatement.
09:42Et comment justement on peut...
09:43Alors je sais que c'est la question qui vaut très très cher,
09:46parce qu'on en parle souvent, et sur l'antenne de France Inter et ailleurs.
09:49Alors comment on peut réussir un petit peu à changer ça ?
09:52Là, vous parliez de la formation des enseignants.
09:54Quelles clés on peut trouver pour apporter un peu plus de science
09:58et de bonheur de la science à l'école, et notamment pour les filles ?
10:02Alors il y a deux choses.
10:05Alors il y a ce qu'on disait sur la question de revalorisation du métier,
10:07ça c'est super important.
10:08Après, il y a aussi la nécessité, avec l'évolution des générations,
10:13de faire évoluer les manières d'enseigner les choses.
10:16Et ça, ça peut se faire aussi à quelques niveaux.
10:18Et là, je voulais re-mentionner les Olympiades,
10:21parce qu'en fait, mon expérience aux Olympiades a fait que,
10:25quelques années après, j'ai pu faire arriver des changements
10:29dans l'évolution de l'enseignement dans les classes préparatoires.
10:32En fait, j'ai découvert aux Olympiades une manière de faire de la physique
10:35qui était beaucoup moins guidée que ce qu'on me faisait dans les exercices habituels,
10:39où on fait faire des calculs, des choses comme ça.
10:41Et avec les choses que je disais, où il y avait vraiment besoin de créativité.
10:44Donc moi, ça m'a énormément marqué pour tout le reste de ma carrière.
10:48Et quand j'ai été professeur d'université, j'ai cherché à faire des enseignements de ce type.
10:53Une fois que j'ai fait ça, en fait, quand il y avait la préparation pour les Olympiades,
10:57j'ai introduit ce type d'exercice qu'on appelle des marges de résolution de problèmes
11:02dans la préparation aux Olympiades.
11:04Ça a permis de faire une épreuve de sélection pour les Olympiades comme ça.
11:08Le fait d'avoir une épreuve de sélection, ça permet de montrer qu'on peut noter ce type d'épreuve de créativité.
11:12C'est pas évident.
11:13Et avec une double correction de valider qu'on peut avoir une notation qui est très efficace.
11:18Et suite à ça, l'inspection générale m'a demandé de participer à la rédaction des programmes de classe préparatoire.
11:23J'ai rédigé la partie sur démarche de résolution de problèmes.
11:27Et en fait, aujourd'hui, dans les concours, il y a des épreuves de résolution de problèmes dans les sujets décrits.
11:32C'est identifié par une petite barre noire sur le bord de gauche du sujet et à l'oral.
11:36Donc on voit que ces Olympiades qui sont pour une petite élite,
11:40en fait, ça a aussi un effet très important sur l'ensemble de l'enseignement en France.
11:44Alors là, à plus long terme.
11:46Serge Haroche, je vous voyais réagir à tout ça.
11:48Finalement, on pourrait penser que dans les matières scientifiques, avant tout, l'enseignement est assez figé.
11:54Pas du tout.
11:54Il y a des manières de faire, d'autres manières de faire, inventer des choses.
11:58Oui, bien entendu.
12:00L'enseignement doit évoluer.
12:01Mais je reviens sur l'idée fondamentale.
12:03Il faut revaloriser le métier d'enseignant.
12:05Ce que Jean-Michel a décrit, c'est vraiment la partie émergée de l'iceberg.
12:09Lorsqu'on parle des Olympiades, lorsqu'on parle des classes préparatoires.
12:13Mais c'est vraiment à la base qu'il faut reprendre des choses.
12:16Et comme tous les problèmes qui se posent actuellement à la société en France, pour ça, il faut des moyens.
12:22Revaloriser le métier d'enseignant, ça demande de l'argent, ça demande des moyens.
12:26C'est un peu le même problème que l'hôpital.
12:28On a besoin, et je pense que c'est essentiel, parce que la formation des jeunes, l'éducation, c'est vraiment la base de ce qui fait la richesse d'un pays.
12:36Et comme je le disais, ça se fait sur le long terme.
12:41Et le gros problème, c'est que les politiques, eux, sont vraiment intéressés par ce qui va se passer au court terme.
12:46Et donc, ce problème de la différence entre le court terme politique et le long terme, pour résoudre les problèmes vraiment essentiels de la société,
12:56se pose de plus en plus, et il va falloir trouver une solution à ça.
12:59Vous évoquez les moyens, là, en l'occurrence, de l'école.
13:02Il y a aussi les moyens de la recherche.
13:03Le budget du ministère de l'enseignement supérieur de la recherche a baissé en 2025.
13:09On connaît les problématiques du budget de l'État pour les années qui viennent.
13:14Serge Haroche, j'imagine que vous, ça vous inquiète, d'autant que vous êtes prix Nobel.
13:19D'autres Français, finalement, des prix Nobel en sciences, pour la France, il y en a un certain nombre.
13:25La recherche française est-elle assez aidée aujourd'hui ?
13:28Les prix Nobel français actuels reflètent l'état de la recherche il y a 20, 30, 40 ans.
13:33Et donc, si on veut avoir des prix Nobel dans le futur, et quand je dis prix Nobel, c'est symbolique,
13:37si on veut faire de la recherche vraiment de pointe, il faut mettre des moyens.
13:42Et la France est effectivement en retard par rapport aux grands pays concurrents.
13:46Et c'est inquiétant parce que ça conduit à une fuite des cerveaux.
13:52Les jeunes vraiment brillants vont souvent travailler à l'étranger.
13:55Actuellement, on a un problème de fuite des cerveaux en sens inverse.
13:58Le fait que l'administration Trump se conduit de façon absolument irresponsable vis-à-vis de la recherche scientifique,
14:04fait que beaucoup de scientifiques américains cherchent à s'expatrier.
14:08Et certains, il y a un programme pour les accueillir en France.
14:10C'est très bien, je pense que c'est essentiel, mais ça demande des moyens.
14:14On ne peut pas les accueillir à moyen constant en France,
14:16parce qu'il manque déjà de moyens pour la recherche française.
14:20Donc, il faut également une augmentation de ces budgets.
14:22Et on recevait hier à ce micro le président de l'université d'Aix-Marseille
14:26qui, justement, accueille des chercheurs américains.
14:29Jean-Michel Courti, sur ce sujet, Serge Haroche disait tout à l'heure
14:32qu'on n'a jamais sans doute eu autant besoin de la science
14:35en raison de ce qu'on vient d'évoquer aux Etats-Unis,
14:39les problématiques du complotisme qui gagnent aussi du terrain,
14:42un certain nombre de théories, de choses.
14:45On remet en cause des principes élémentaires de la physique, d'ailleurs,
14:49de comment marche notre planète.
14:51Ça vous inquiète, vous aussi, j'imagine, l'état de la recherche et les financements ?
14:56Alors, pour ce qui est de l'état de la recherche et des financements, bien sûr,
14:58parce que ce qu'il faut, c'est réussir quand même à comprendre que c'est un investissement.
15:02Ce n'est pas une dépense, ce n'est pas un coût.
15:05C'est vraiment un investissement pour le futur.
15:08Et ensuite, effectivement, il y a toutes ces théories, etc.
15:12Mais en fait, j'allais dire, quand j'étais jeune,
15:15il y avait déjà des élucubrations qui tournaient, etc.
15:18Ça a toujours existé, ça, c'est sûr.
15:19Et c'est moi ce qui m'a motivé pour faire de la vulgarisation, en fait.
15:23Avec l'idée qu'à la fois, il faut pouvoir critiquer, débunker, comme on dit.
15:28Mais si on n'a rien à proposer, ça ne sert pas à grand-chose.
15:31Donc, moi, je me suis plutôt mis sur la position de dire,
15:34qu'est-ce qu'on peut proposer de différent en vulgarisation
15:38pour pouvoir, que les personnes pour lesquelles, quand il y a eu du débunking,
15:42qu'ils aient autre chose à voir.
15:45Et justement, puisque vous en parlez, la vulgarisation,
15:50je le disais tout à l'heure, est-ce qu'on manque de culture scientifique en France, etc.
15:53Il n'y a jamais eu autant de programmes, de contenu sur la science.
15:57Sans doute qu'aujourd'hui, entre les vidéos sur YouTube,
16:01les réseaux sociaux, les podcasts, y compris ici à Radio France,
16:04on a un certain nombre d'émissions scientifiques.
16:06En fait, la science, elle est partout, Serge Haroche, dans notre société aujourd'hui.
16:10La science vulgarisée, peut-être aussi.
16:12Oui, c'est vrai.
16:14Et ça, c'est plutôt une bonne nouvelle, j'imagine.
16:16Bien sûr, c'est une bonne nouvelle, si elle est menée de façon convenable,
16:19si elle permet de développer l'esprit critique,
16:21si tout ce qui se trouve sur Internet peut être filtré par ceux qui les regardent,
16:26ce qui n'est pas toujours le cas.
16:27Jean-Michel disait tout à l'heure que ça existait,
16:29que les problèmes de négation de la science ou des farfelus existaient depuis longtemps.
16:35C'est vrai, mais ça n'a jamais atteint le niveau que ça atteint aujourd'hui.
16:37Et le fait que maintenant, ça touche les classes dirigeantes,
16:41des pays entiers dans lesquels les dirigeants partagent ces idées,
16:48c'est grave.
16:49Et ça, ça n'existait pas avant.
16:50Et c'est contre ça qu'il faut lutter.
16:52Et comment vous parliez, Jean-Michel Courtier, à l'instant,
16:54de ces Olympiades qui sont très importantes,
16:56mais qui s'adressent effectivement à une élite ?
16:58Vous qui faites de la vulgarisation,
17:00comment on rend finalement la physique, les sciences de manière générale,
17:03peut-être plus populaires, plus accessibles ?
17:06Pour moi, le cœur, c'est de réussir à incarner la science.
17:09Incarner de deux manières.
17:11Incarner parce que c'est des humains qui font.
17:13Donc pour moi, la première manière, c'est le contact direct,
17:16c'est la médiation, c'est faire des expériences,
17:18c'est rencontrer les gens, aller les chercher un par un.
17:21Je veux dire, les députés, ils font les marchés
17:22et ils vont serrer les mains un par un des gens.
17:24Et bien nous, scientifiques, il faut qu'on aille chercher les gens un par un,
17:27en faisant des expériences...
17:29Serge Haroche, ça n'a pas l'air d'être très emballé.
17:32Non, vous dites qu'il y a trop de travail.
17:35Allez-y, je le sais pas.
17:36Et là-dessus, sur cette rencontre,
17:38il y a des institutions qui sont centrales en France,
17:40qui sont par exemple le Palais de la Découverte,
17:42dans lequel le cœur de la vulgarisation,
17:46c'est les médiateurs qui vont faire des expériences
17:48devant les gens,
17:49qui vont pouvoir faire participer les gens.
17:51Et donc, ça fait moi depuis 4 ans
17:53que je travaille sur le projet de rénovation
17:54du Palais de la Découverte,
17:56qui pour l'instant est en suspens.
17:58Donc, ce qu'on espère vraiment,
18:00c'est qu'on va pouvoir réouvrir ce palais
18:03et avec cette dimension de rencontre,
18:05de médiation,
18:06avec les médiateurs qui incarnent la science,
18:09pour montrer que c'est des gens qui la font,
18:11et ces expériences qui font que les lois de la physique
18:13s'incarnent dans la réalité.
18:14Et que c'est pas juste des idées philosophiques,
18:17non, ça marche la science.
18:18Serge Haroche, pour terminer sur les serrages de mains
18:22des scientifiques ?
18:23Non, je crois qu'il faut faire comprendre aux gens
18:25que tout ce qui fait leur condition de vie actuellement,
18:27tous les appareils qu'on a vu se développer
18:30depuis les derniers demi-siècles,
18:33proviennent de la science,
18:34en particulier de la physique,
18:35de la physique et de la chimie,
18:36et qu'on ne vivrait pas dans le monde actuel
18:38si ces appareils n'existaient pas.
18:41Je prends souvent un exemple
18:43qui paraît absolument évident aux gens
18:45qui ne se rendent pas compte d'où ça vient,
18:47le GPS, la possibilité de se localiser
18:49dans le monde au mètre près,
18:52c'est de la science,
18:52c'est de la physique quantique,
18:54c'est de la relativité,
18:55et c'est un problème qui se pose
18:57depuis plusieurs siècles.
18:58Le problème de la navigation,
18:59de la position dans les océans,
19:01c'est un problème qui date depuis
19:03le XVIIe, XVIIIe siècle.
19:04Et le dernier point sur lequel je voulais insister,
19:06c'est qu'une façon de vulgariser,
19:08c'est également de faire de l'histoire des sciences,
19:10d'apprendre aux gens d'où vient la science actuelle,
19:13comment s'est constituée la méthode scientifique.
19:15Et ça, je pense que c'est facile,
19:16ça ne demande pas des connaissances particulières,
19:18ça demande simplement
19:19d'éveiller la curiosité des gens.
19:21J'espère qu'on aura un petit peu vulgarisé ce matin
19:23et puis qu'on retrouvera les participants
19:25de ces Olympiades internationales de physique
19:27dans les décennies qui viennent
19:29pour un certain nombre d'avancées
19:31dans les sciences.
19:32Merci Serge Haroche,
19:33merci Jean-Michel Courti
19:34d'avoir été les invités d'Inter ce matin.
19:36Bonne journée.
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