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  • il y a 8 mois
Pendant le confinement, ils restent au contact des plus fragiles. Voici leur quotidien.
Transcription
00:00Le plus difficile dans ce genre de maladie, c'est que ma femme ne parle plus.
00:03Qu'est-ce qu'elle a comme maladie, votre femme ?
00:05Elle a la maladie d'Alzheimer.
00:07S'il n'y avait pas d'aide soignante, s'il n'y avait pas d'aide à domicile, je serais seul.
00:11Ce serait une catastrophe.
00:13C'est vrai que Mme Barthel, j'y viens 3, 4 fois, plus, même par semaine.
00:19Plus, 4 fois par semaine.
00:21Oui, mais c'est pas une régularité.
00:24C'est des sensations qui durent 2 heures.
00:26Effectivement, en 2 heures de temps, avec Mme, avec la maison, il y a quand même beaucoup de choses à faire.
00:31Et c'est vrai qu'avec Mme, au tout début, on essayait de garder quelques habitudes.
00:38L'épluchage des légumes, l'essuyage de la vaisselle, participer à des petites choses.
00:44Après, on a un peu diminué avec les massages, puis l'accompagnement aussi de bien-être.
00:48Il faut aussi qu'elle se sente apaisée quand on est là, qu'elle soit apaisée.
00:55Si l'aide à domicile n'était pas là, votre femme irait à l'EHPAD, c'est ça ?
01:03Oui, elle irait à l'EHPAD, ce qui aurait 2 inconvénients.
01:08Le premier, c'est que ça coûte beaucoup plus cher.
01:11Et le deuxième, c'est que je serais tout seul.
01:14Et que c'est beaucoup plus agréable de l'avoir à la maison que de courir à l'EHPAD.
01:19Surtout en ce moment.
01:22Les aides à domicile sont des professionnels, principalement des femmes, plusieurs centaines de milliers en France.
01:26Elles vont très concrètement aider les personnes à se lever le matin, à se coucher le soir.
01:30Elles vont les aider à se déplacer dans la journée.
01:33Elles vont les aider à se nourrir en préparant les repas, en les aidant parfois à s'alimenter.
01:38Elles vont également les aider à se laver, à faire leurs toilettes.
01:41Et puis veiller avec elles à la prise des médicaments.
01:45Dans la période qu'on connaît aujourd'hui, dans la crise du coronavirus, elles ont une place singulière.
01:51Les personnes âgées sont aujourd'hui les premières victimes de ce virus.
01:55Celles pour lesquelles les conséquences, les symptômes sont les plus graves.
01:58Et donc les aides à domicile ont un rôle clé.
02:21Nous estimons d'ordinaire à à peu près 800 000 personnes, le nombre de personnes âgées en perte d'autonomie à domicile.
02:28Et dans le cœur de la crise que nous connaissons, parmi ces personnes qui sont accompagnées par des professionnels dans leur quotidien,
02:33on pense que 60 à 70 % d'entre elles continuent à bénéficier de cet appui au quotidien.
02:39Toutefois, bien sûr, la plupart du temps, lorsque l'appui est maintenu,
02:43il est lui-même réduit en termes de temps passé auprès des personnes.
02:47Mais dans cette situation, ce que l'on observe surtout,
02:51c'est que ces chiffres sont très différents d'un territoire à l'autre.
02:55Il existe des situations d'inégalités territoriales d'ordinaire,
02:59en raison des politiques très diverses qui sont menées par les conseils départementaux,
03:03qui sont les principaux financeurs des services d'aide à domicile.
03:07Et dans cette crise, ces inégalités peuvent s'accroître,
03:11tout simplement parce que l'État a demandé aux départementaux de s'assurer
03:16de poursuivre leur financement à même niveau pendant la crise des services d'aide à domicile.
03:20Or, le moins que l'on puisse dire, c'est que si certains sont exemplaires
03:24et se mettent en ordre de marche, ce n'est pas le cas de beaucoup d'autres.
03:28Et que ce contexte d'incertitude pour les associations,
03:32pour les services publics territoriaux liés à ces politiques départementales singulières
03:36amène à l'accroissement de ces inégalités d'accès des personnes âgées
03:40aux services d'aide à domicile.
03:46L'affaire des masques est une affaire terrible.
03:50Il fallait aller récupérer le matériel, les masques, dans les pharmacies
03:54qui avaient de tout petits stocks, en réalité quelques boîtes, la plupart du temps
03:58et qui devaient également en délivrer aux médecins libéraux, aux infirmiers libéraux.
04:02Évidemment, dans une partie très significative des situations,
04:06l'aide à domicile était une affaire terrible.
04:10C'est-à-dire qu'il fallait récupérer le matériel, les masques, dans les pharmacies
04:14L'aide à domicile était la dernière roue du carrosse, c'est-à-dire celle à qui on en donnerait peut-être s'il en restait.
04:18Et quand il n'en restait vraiment pas beaucoup, on se disait
04:22on va peut-être plutôt le garder pour le médecin que pour l'aide à domicile.
04:26Les services d'aide à domicile y ont été confrontés sur plein de sujets.
04:28On l'a été sur les masques, on l'a été sur la question de l'accueil des enfants à l'école,
04:32qui était prévue pour les soignants.
04:34Et donc quand les aides à domicile, qui étaient elles aussi prévues comme prioritaires
04:38pour pouvoir accéder à la garde de leurs enfants dans les écoles,
04:40pour ensuite pouvoir aller s'occuper des personnes âgées à domicile,
04:42des écoles leur ont posé des refus.
04:44Alors tout ça a évolué avec le temps, parce qu'il a fallu se battre.
04:48Ça a été des combats pour agir sur les représentations des uns et des autres,
04:50rappeler les priorités et l'importance de ces métiers.
04:54Aujourd'hui, ça l'est à nouveau sur la question des tests.
04:58Et bien sûr, l'aide à domicile pour le moment n'est pas prioritaire.
05:01Or elle devrait l'être.
05:02Sans ces professionnels de l'aide à domicile, les solutions pour les personnes âgées seraient plus que limitées.
05:08Hospitalisation, EHPAD, solidarité familiale, donc épuisement des aidants.
05:13Donc elles sont indispensables. Ce sont des métiers d'utilité publique.
05:18Céline, elle est une des personnes qui vient souvent, c'est ça ?
05:22Oui, je me suis battue pour avoir.
05:25Ce sont des gens qui n'ont plus de visite ?
05:28Plus de visite. Plus de visite, c'est terminé.
05:30Donc ils n'ont que vous ?
05:31Donc ils n'ont que nous. On rythme leur journée.
05:33Et si vous n'étiez pas là, ils se laisseraient mourir ?
05:35Cette solitude glisserait sur le moral, ça glisse vite déjà.
05:38Déjà le fait de ne plus voir leurs enfants, il y a de l'inquiétude.
05:41Si nous en plus on ne passait pas, il n'y aurait plus rien.
05:44J'ai pris cet exemple de cette dame âgée de 93 ans qui n'a pas de famille.
05:52La tuterie s'habite en Bretagne. Nous habitons dans le Nord.
05:57C'est moi qui gère la carte bleue.
06:02C'est une confiance en fait.
06:04Si je n'intervenais plus, si je faisais un droit de retrait,
06:08ce serait carrément impossible.
06:11C'est inimaginable.
06:13Cette personne, elle resterait alitée dans son lit,
06:16elle n'aurait pas le petit déjeuner,
06:18elle se laisserait mourir de faim.
06:20Actuellement, j'ai des gens qui ont entre 70, 87, 80 jusqu'à presque 100 ans.
06:27Ces gens-là, qu'est-ce que vous voulez leur demander ?
06:29Déjà, c'est difficile pour eux d'être seuls.
06:31Ils sont conscients d'être à la maison et d'avoir cette chance d'être à la maison.
06:34Maintenant, il ne faut pas non plus que ce soit un retour de bâton
06:38et qu'on dise vous êtes à la maison ou vous êtes seul.
06:40Non, nous on est là, c'est un sincère devoir.
06:42En fait, ça c'est une mission.
06:44Entre équipes, avec l'établissement, c'est la mission.
06:47C'est de pouvoir limiter la casse, limiter les détresses psychologiques,
06:52la détresse physique.
06:53Tout ce qu'on donne, c'est vrai qu'on n'aura jamais de retour.
06:56Le gouvernement, ça, il n'en a rien à faire.
06:58Il a pensé à dire merci aux aides à domicile il y a 2-3 jours.
07:04Il y était un petit peu de temps quand même.
07:06Donc, c'est vrai que c'est navrants qu'ils ne prennent pas en compte
07:09notre job avec un peu plus de valeur en fait.
07:18Oui, non, ce n'est pas de la colère, mais il faut le vivre pour comprendre.
07:28Sous-titrage Société Radio-Canada
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