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  • 10/03/2025
Mère Agnès-Mariam de la Croix, mère supérieure de Saint-Jacques-le-Mutilé à Qara, témoigne des massacres de civils opérés depuis jeudi dans l'ouest de la Syrie. 

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Transcription
00:00Bonjour ma sœur, maire supérieur du monastère Saint-Jacques-le-Mutilé à Carins.
00:04Bonjour, merci d'être en direct avec nous.
00:07On va parler de la situation en Syrie,
00:11situation abominable.
00:13Vous vous êtes déplacée, vous témoignez ce matin sur CNews.
00:16Merci d'être là.
00:20Ce qui se passe actuellement, ça se passe au nord-ouest de la Syrie,
00:23vers l'Atakier, Tartus, nord-ouest, zone côtière.
00:28Qu'est-ce qui se passe là-bas ?
00:31Alors, il y a deux scénarios, ou bien deux genres d'événements qui sont superposés.
00:39Depuis quelque temps, il y a eu une insurrection dans ces régions-là.
00:45Et donc, le gouvernement actuel, qui est présidé par M. Joulani,
00:51donc ex-M. Joulani et M. Al-Sharaa,
00:54il a donc lancé une contre-offensive.
00:57Il y a eu des combats, il y a eu aussi des dommages collatéraux.
01:02Ça, c'est une affaire.
01:04Mais en parallèle, il y a des factions armées qui sont takfiri,
01:09c'est-à-dire, ce sont des factions terroristes
01:13qui sont répertoriées comme étant terroristes par la communauté internationale,
01:18qui vivaient à Idleb, dans l'émirat islamiste d'Idleb,
01:22qui viennent à la faveur de ces combats.
01:25En parallèle, ce fait très troublant,
01:29ils passent par les barrages qui sont occupés par le président,
01:33c'est-à-dire par les barrages de sécurité qui appartiennent au gouvernement actuel.
01:39Alors, ils passent, ils ont donc un sauf-conduit,
01:43ils rentrent dans des zones résidentielles qui n'ont rien à voir avec les combats,
01:50d'ailleurs, les combats sont presque terminés,
01:53qui n'ont rien à voir avec les combats.
01:55Alors, ces factions rentrent, s'infiltrent, en catimini si vous voulez,
02:01mais ce n'est pas très en catimini puisqu'on les voit à l'oeil libre.
02:04Alors, ils rentrent et ils opèrent un véritable nettoyage ethnique.
02:10C'est-à-dire qu'ils assassinent dans des conditions abominables les alaouites,
02:17qui est la religion de Bachar el-Assad ?
02:20Oui.
02:21Et vous soupçonnez que ça se fasse avec la bénédiction du nouveau président islamiste par intérim,
02:31qui est en costume, qui veut être bien vu des Occidentaux,
02:35mais vous soupçonnez que ce qui se passe actuellement se fait avec sa bénédiction ?
02:40Je vais vous dire une chose.
02:41Oui.
02:42C'est-à-dire qu'il y a un de deux arguments.
02:46Ou bien il le sait et il le couvre,
02:50ou bien il ne le sait pas et ça veut dire qu'il est incompétent.
02:53Il y a les deux.
02:54Donc, tout le monde actuellement se sent dans une insécurité croissante.
02:59J'étais dans des communautés alaouites, j'étais dans des communautés chrétiennes.
03:03On vit comme en ghetto, barricadés, personne n'ose sortir.
03:08Pas simplement chez eux, mais presque dans toute la Syrie.
03:12Et vous dites que des islamistes sont montés dans des appartements ?
03:16Ils sont montés, alors là, à Banias.
03:20Ils sont rentrés dans le quartier alaouite qui s'appelle Kousour.
03:25Ils sont rentrés dans les immeubles résidentiels, étage par étage.
03:31Ils ont liquidé tout le monde.
03:33Ce qui est sorti sur les moyens de communication sociale,
03:38c'était au début une affaire de 164 victimes lorsque je suis arrivée à Banias.
03:44À Banias, j'ai demandé aux autorités locales de voir.
03:48Ils m'ont dit « mais non, il n'y a pas ça.
03:50C'est quelques victimes qui ont payé un prix, mais c'est rien ».
03:56Mais j'ai voulu, c'est-à-dire, aller sur les lieux.
03:59J'ai rencontré les parents, les familles de ces victimes.
04:05J'ai entendu, j'ai vu, mais ils avaient une peur bleue.
04:09Ils étaient rassemblés dans une école et il y avait des gens armés tout autour.
04:14Même j'ai dû dire aux gens armés « est-ce que vous avez peur de moi ?
04:17Vous croyez que je viens vous faire du mal ?
04:19Voulez-vous un tout petit peu vous retirer ? »
04:21Et alors, on m'a dit que tel, il avait perdu son grand-père,
04:25tel autre, il avait perdu toute sa famille, etc.
04:28Mais en revenant, nous avons topé.
04:31J'ai une équipe de sécurité avec moi.
04:33Alors, le chef de mon équipe, il vient de Idlib aussi,
04:37mais ce sont des noms takfiri, vous voyez.
04:40Alors, il a vu qu'un de ses cousins était sur un barricade aussi de Idlib,
04:46mais il faisait partie des forces gouvernementales.
04:50Alors, il lui a dit « Cousin, qu'est-ce qu'il y a ? »
04:52Il dit « Tais-toi, il y a au moins 1 500 à 2 000 cadavres
04:57qui sont encore dans les appartements. »
05:00En revenant, en sortant de Banias, je tombe sur le convoi du croissant rouge.
05:06Je parle avec le chef, il me prend à la morgue,
05:09une morgue qui a été faite de campagne.
05:14On avait là 80 cadavres.
05:16Et il me dit effectivement, ma mère, il était très gentil,
05:20il me dit « Effectivement, nous avons besoin de 30 équipes pour procéder. »
05:25Je lui dis « Vous ne pouvez pas laisser les cadavres
05:28parce qu'il y aura après, n'est-ce pas, une épidémie.
05:31Ça fait au moins deux jours que ces cadavres sont...
05:36Il faut les donner au moins à leur famille.
05:39Alors nous nous sommes mis d'accord parce que je suis ici une organisation humanitaire,
05:43j'ai des hôpitaux mobiles, des ambulances et puis des équipes médicales.
05:46Il m'a dit « Écoutez, si vous pouviez nous aider. »
05:49Il m'a dit « Demain, je cherche 30 équipes médicales pour dégager les corps.
05:53Vous, qu'est-ce que vous pouvez faire ? »
05:54J'ai amené un hôpital mobile avec climatisation,
05:57comme ça on peut transporter beaucoup de corps,
06:00et trois ambulances avec les équipes médicales.
06:03Les autorités locales n'ont pas voulu que je rentre.
06:07Pourquoi ? Parce que quand j'étais là, ils ont tout fait pour cacher.
06:11Alors voilà, est-ce que les autorités locales sont là pour cacher ?
06:14Si elles cachent, ça veut dire qu'elles se sentent coupables.

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