Avec Myriam Benraad, Politologue, spécialiste du Moyen-Orient et professeur en relations internationales à l’université international Schiller
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##ON_DECRYPTE_LE_MONDE-2024-10-19##
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NewsTranscription
00:00On décrypte le monde avec notre invité Myriam Benraad.
00:06Bonjour.
00:07Bonjour.
00:08Bienvenue sur Sud Radio.
00:10Politologue, spécialiste du Moyen-Orient, professeur en relations internationales à
00:14l'université, non moins internationale, à l'université Schiller.
00:18On revient sur la guerre.
00:20Dans la bande de Gaza, le chef du Hamas a été tué par Tsal cette semaine jeudi soir,
00:25précisément dans une opération militaire.
00:28Deux jours après, on est d'accord, les combats continuent sur la bande de Gaza et les bombes
00:33continuent de tomber sur le territoire.
00:35Oui, je pense qu'il faut prendre une certaine distance par rapport à ces derniers développements,
00:43tout comme d'ailleurs on l'a vu au cours des derniers mois avec d'autres éliminations
00:47ciblées qui certes portent un coût très important.
00:51Le Hamas, ça ce n'est pas à remettre en cause, mais qui ne signifie pas du tout la
00:54fin de la guerre.
00:55Je renvoie aux déclarations du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou qui a parlé
01:01de début de la fin et non pas de fin de la guerre, sans compter qu'on n'a absolument
01:05aucune relance, en réalité une relance sérieuse pour parler autour de la libération des otages
01:12et surtout autour des modalités d'en cesser le feu durable dans ce petit territoire, avec
01:17par ailleurs, je vais quand même ajouter ce point, l'ouverture du front libanais qui
01:21présage d'une guerre encore très longue dans cette partie du monde.
01:24Oui, dans cette autre partie du monde, en tout cas cette autre partie du Moyen-Orient.
01:28Revenons sur la situation sur la bande de Gaza, est-ce qu'on a une idée de ce qui reste
01:33à ce stade du Hamas ?
01:35C'est très compliqué parce qu'il faut quand même dire que derrière l'objectif, en réalité
01:42depuis le début de cette guerre, derrière l'objectif d'élimination, d'anéantissement
01:46du Hamas, Israël n'a jamais fourni véritablement de définition précise.
01:51Alors on sait que, évidemment, l'État hébreu vise au premier plan les dirigeants, les idéologues,
01:57je dirais les figures, les têtes de fil de ce mouvement, mais c'est un mouvement qui
02:02s'est profondément ancré dans la bande de Gaza, qui certes aujourd'hui a perdu ses
02:06chefs, qui a perdu un soutien significatif de la population compte tenu de l'ampleur
02:10des destructions, mais qui a les moyens, les capacités de se reconstituer, même de manière
02:17je dirais minimale, mais suffisamment sérieuse pour empêcher toute stabilisation dans ce
02:22territoire.
02:23Et puis d'ajouter un point que je développe dans mes travaux, il va y avoir évidemment
02:27à l'issue de cette guerre, un immense sentiment, un immense désir de vengeance parmi un certain
02:32nombre de Gazaouis et plus largement de Palestiniens, qui va encore une fois alimenter ce cycle
02:37de représailles au long cours.
02:39Alors vous disiez il y a quelques instants, et on l'entend peu, le Hamas a perdu une
02:43bonne partie de son soutien auprès de la population Gazaoui du fait des destructions
02:48entraînées par la riposte israélienne au massacre du 7 octobre.
02:51Est-ce qu'on en a des preuves ou pas à ce stade de cette perte de soutien ?
02:55Alors ce qu'il faut déjà quand même dire, c'est très important, c'est qu'Israël a
03:00infligé à la population Gazaoui un châtiment collectif suite au 7 octobre, en considérant
03:06finalement que toute la population de Gaza était derrière le Hamas.
03:10Ça n'a jamais été le cas, parce qu'il faut quand même revenir aux conditions dans
03:13lesquelles ce mouvement s'est imposé, il s'est imposé par la force, par la subversion
03:18d'une élection, en semant un régime de terreur auquel en fait les Gazaouis n'avaient
03:23pas d'opportunité de se soustraire, aucune possibilité de se soustraire.
03:27Donc il faut quand même déjà partir de là pour dire que beaucoup de civils qui ont
03:31payé le prix de cette guerre n'étaient pas des soutiens du Hamas.
03:35Aujourd'hui vous l'imaginez bien, indépendamment même d'Israël, comment un mouvement qui
03:40a finalement entraîné toute une population civile dans cette guerre de dévastation va
03:44pouvoir se relégitimer aux yeux de cette population ? Je pense que les dégâts sont
03:49trop importants et puis donc là je réintroduis Israël dans l'équation, de toute façon
03:53il est juste, compte tenu de la violence de cette guerre et de l'ampleur des opérations
03:57israéliennes, il est juste impensable que le Hamas puisse un jour reprendre la main.
04:02C'est un peu le même scénario si vous voulez de ce qu'on a vu en Syrie et en Irak avec
04:06Daesh, l'idée c'est vraiment d'infliger une défaite si écrasante que le mouvement
04:14ne pourra pas s'enrelever, en tout cas pas dans l'immédiat, pas au moyen terme et
04:18encore moins au cours de la prochaine décennie, ça c'est sans certitude.
04:22Sauf qu'il restera plusieurs centaines de milliers voire millions de civils sur place,
04:27quel est à ce stade leur avenir, quelles sont leurs perspectives ?
04:30Je dirais que c'est tout le problème aujourd'hui, c'est qu'on a cette perpétuation de la
04:36logique guerrière qui est confirmée par les dires de M. Netanyahou et puis en même
04:40temps on n'a aucune vision, aucune visibilité sur l'après, il n'y a pas de plan politique
04:46clair.
04:47On s'oriente d'ailleurs à mon avis plutôt vers une occupation même soft de la bande
04:51de Gaza par Israël parce que je ne vois pas dans les conditions présentes de gouvernance
04:56alternative émergée, sans compter qu'on a aussi évidemment des violences en Cisjordanie,
05:02dans les territoires occupés, une autorité palestinienne qui est très affaiblie, voire
05:07aujourd'hui quasi inexistante et qui ne pourra pas prendre la relève.
05:10Donc les Israéliens de toute façon, et c'est déjà tout de même en cours dans les plans
05:15de l'armée, même si une partie de l'armée s'y oppose, on s'oriente vers une réoccupation
05:20de Gaza, même si une administration je dirais dépolitisée peut être mise en place pour
05:26faire une sorte de médiation entre la population civile et l'armée israélienne, mais je ne
05:30vois pas quel autre plan existe aujourd'hui.
05:33Et on sera amené à en reparler avec vous, pourquoi pas.
05:35Merci beaucoup Myriam Benrad, je rappelle que vous êtes politologue spécialiste du
05:39Moyen-Orient et professeur en relations internationales à l'université Chilay.