Législatives 2024 : "Les intentions de vote peuvent encore bouger d'ici dimanche" assure un politologue grenoblois

  • il y a 3 mois

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00:007h45, voilà on discute ensemble, entre autres à trois jours du premier tour des élections législatives.
00:05On fait le point sur le scrutin avec votre invité Théo H.
00:07Oui Simon Persico, bonjour.
00:09Bonjour.
00:09Merci d'être avec nous ce matin, vous êtes enseignant en sciences politiques à Sciences Po Grenoble, vous êtes membre du laboratoire Pacte.
00:15Alors on l'entendait ce matin, la députée de l'ISER, la socialiste Marie-Noëlle Batistel, a porté plainte après un tag sur son local de campagne assassinée parisais
00:27qui comparait le Nouveau Front Populaire au Hamas.
00:31Elle dit qu'en 14 ans de mandat, elle n'a jamais vécu une violence pareille dans une campagne.
00:35Est-ce que vous avez le même sentiment d'une violence particulière dans cette campagne ?
00:40C'est sûr qu'il y a des manifestations objectives de violences, d'insultes, de dégradations etc.
00:47qui sont le fruit à mon avis d'un niveau de tension dans le système politique extrêmement important
00:52avec vraiment cette logique entre les trois blocs et des trois blocs qui ne se parlent plus, qui s'accusent de mots extrêmement graves
01:00d'antisémitisme, d'appartenance à l'arc républicain, de respect de la constitution, enfin je veux dire c'est des choses extrêmement lourdes, c'est le rapport à la République qui se joue là
01:08avec un effet de jeu, enfin de jeu politique, de mettre attaché des images les plus négatives possible à ses adversaires, campagne négative en fait,
01:18on ne s'adresse pas en disant ce qu'on va faire mais pourquoi les autres sont dangereux, c'est des classiques de la vie politique
01:23sauf que là on a atteint un niveau extrêmement intense, extrêmement grave, un peu comme ce qu'on a pu voir aussi aux Etats-Unis précédemment
01:30et donc ce n'est pas si étonnant que ça qu'il y a toute une série d'électeurs ou de personnes un peu plus décalées qui en viennent à des formes d'expression totalement illégales pour le coup.
01:39Avec Jean-Thomé par exemple, Jean-Luc Mélenchon qui parlait d'ennemis, on parle d'ennemis plus que d'adversaires politiques.
01:46Dans les trois camps, on a vraiment cette impression que c'est exactement ce que vous dites, ce qui est d'ailleurs inquiétant, il y a un ouvrage magnifique qui s'appelle
01:53« Comment est-ce que les démocraties meurent ? » en anglais et qui en gros décrit le fait que quand on considère effectivement les autres partis politiques,
02:03les autres responsables politiques comme des adversaires, comme des ennemis justement et plus comme des adversaires, on s'écarte un peu de la démocratie
02:08parce que finalement une démocratie c'est quand même la capacité à trouver des accords, à se parler et à faire une majorité.
02:14Là on voit bien que ça va être très difficile de faire une majorité, c'est vraiment incertain les résultats des élections mais s'il y a encore une fois une absence de majorité absolue,
02:24on se rend bien compte que le système politique français actuellement est incapable de faire discuter les responsables politiques entre eux pour aboutir à des compromis.
02:30On va poursuivre cette réflexion avec vous Simon Persico, dans un instant d'abord un petit détour au standard de France Bleu et Isère.
02:36Oui on vous a posé la question, est-ce que votre choix est déjà fait ? Est-ce que vous êtes dans l'indécision ? Jean-Paul nous appelle de Fontaine, bonjour Jean-Paul.
02:42Oui bonjour.
02:43Alors justement on vous repose la question, vous en êtes où vous par rapport à ce choix pour les législatives ?
02:49Ah ben mon choix est fait, parce que mon choix est fait depuis que j'ai reçu les professions de foi.
02:54D'accord, c'était le déclencheur, vous attendiez ça pour vous décider ?
02:59Oui je voulais savoir de quoi il parlait, de quoi il défendait, moi je n'écoute pas trop la télé, alors la radio oui mais la télé pas trop.
03:05Mais je voulais savoir sur les professions de foi ce qui était indiqué et je ne suis pas forcément un gros candidat d'ailleurs.
03:12Et vous vous êtes décidé sur des éléments particuliers du programme du coup Jean-Paul ?
03:17Oui je suis quelqu'un qui est très fortement intéressé, enfin pas intéressé mais concerné par le domaine du handicap et j'ai regardé qui en parlait, il n'y en avait qu'un seul.
03:28D'accord donc c'était un point précis du programme ?
03:31C'est un point très précis et très important pour moi, ce n'est pas forcément essentiel pour tout le monde, mais pour moi c'était très important.
03:38Et sur cette violence dont on parlait dans le débat politique, comment est-ce que vous le voyez, vous le ressentez Jean-Paul ?
03:45Le problème de la violence c'est surtout pourquoi croire que c'est en criant ou en menaçant qu'on a forcément plus raison que les autres, c'est ça qui m'angoisse un peu.
03:56Si on a de bonnes raisons d'être cru et d'être considéré comme avoir le meilleur argument possible, il n'y a pas besoin ni de crier ni de menacer qui que ce soit.
04:04L'appel du bon sens de Jean-Paul.
04:06C'est un bon résumé Jean-Paul, je ne sais pas s'il sera entendu mais en tout cas on garde ça de côté.
04:10Merci beaucoup de nous avoir appelé ce matin Jean-Paul, belle journée à vous.
04:13Merci au revoir.
04:14Notre invité ce matin Simon Persico est enseignant en sciences politiques à Sciences Po Grenoble.
04:19Est-ce que le cas de Jean-Paul est un cas particulier des électeurs qui se...
04:25Oui c'est un cas particulier de ce qu'il décrit, c'est-à-dire qu'il lit une profession de foi et qu'il décide en fonction d'un enjeu qui n'est pas l'enjeu central de l'élection, même si c'est un enjeu important, c'est assez rare.
04:36En général les électeurs ont quand même des formes d'identité partisane, il y a des camps dans lesquels ils se reconnaissent, la gauche, la droite, le centre, Macron, le président de la République.
04:45Il y a des enjeux aussi centraux qui sont importants comme l'immigration, comme l'écologie, comme la redistribution des richesses.
04:53Le pouvoir d'achat.
04:54Le pouvoir d'achat sur un enjeu comme le handicap c'est peut-être un peu plus rare et en même temps c'est aussi intéressant, ça montre la nécessité démocratique d'avoir des professions de foi, de laisser du temps, d'écrire des programmes aussi.
05:03Alors là peut-être l'auditeur aura été déçu de l'absence du handicap dans un certain nombre de programmes, il faut rappeler...
05:08Il nous dit que c'est présent dans un seul...
05:10Dans un seul, je ne sais même pas sur quelle circonscription ni pour quel candidat il a choisi de voter, mais dans tous les cas ce qui est sûr c'est que cette année c'était difficile d'écrire des programmes et des professions de foi.
05:18C'est allé très vite.
05:19Il a fallu s'organiser extrêmement rapidement, ce qui d'ailleurs est un autre problème et qui mène à une forme de tension, c'est qu'en fait toute une série de discussions sur les politiques publiques qui peuvent être menées etc.
05:27à l'intérieur des camps, à l'intérieur des blocs mais aussi entre les camps, elles n'ont pas lieu de manière saine parce qu'elles ont lieu de manière extrêmement rapide avec l'objectif, un objectif de très court terme de campagne.
05:37Vous parliez des trois blocs effectivement, l'ERN, l'Union de la Gauche et le camp présidentiel.
05:43Trois blocs qui sont clairement identifiés et on n'a pas l'impression que leur poids bouge beaucoup depuis quasiment l'annonce de la dissolution.
05:52Un nouveau sondage ce matin, Ipsos pour Le Monde et Radio France, montre très peu de mouvements.
05:57L'ERN en tête des intentions de vote à 36%, 29% pour l'Union de la Gauche et 19,5% pour le camp présidentiel.
06:04Trois blocs qui semblent figés. Est-ce que ça peut encore bouger d'ici dimanche ?
06:09Oui, ça va certainement bouger d'une part parce qu'encore une fois la campagne a été courte.
06:14Il y a toute une série d'électeurs qui ne seront pas encore décidés d'aller voter.
06:20C'est ça qui va être déterminant, c'est la mobilisation, ce qu'on appelle la mobilisation différentielle.
06:25Quel est le camp qui va convaincre le plus de ses électeurs d'aller voter ?
06:30C'est encore incertain. Je ne suis pas extrêmement sûr qu'il y ait beaucoup d'électeurs ou d'électrices
06:36qui en ce moment, par exemple, hésitent entre voter pour le Rassemblement National ou le Front Populaire.
06:40Ou même d'ailleurs pour le Front Populaire ou La République En Marche.
06:43Il n'y a pas de mouvement.
06:44Mais par contre, est-ce qu'ils vont aller voter ?
06:47Ça, ce sont des questions qui sont plus importantes.
06:49Et dans tous les cas, cette configuration tripolaire que je décrivais tout à l'heure et qui maintenant est évidente,
06:54elle existe depuis un certain temps, donc elle s'établit.
06:57Et c'est pour ça que, par exemple, le vote Rassemblement National, c'est un vote qui s'est solidifié
07:02au sens où les gens maintenant ont le sentiment d'avoir une partie significative des électeurs du Rassemblement National.
07:07C'est leur choix, ils sont partisans, ils l'ont déjà fait.
07:10Ils l'ont déjà fait aux dernières européennes, mais même peut-être à la présidentielle précédente
07:13et même peut-être aux européennes précédentes.
07:15Il y a eu un saut avec les européennes de 2024.
07:17Mais c'est quand même des électorats qui sont de plus en plus solidifiés.
07:20Et où il y a de la volatilité, par exemple, dans le bloc de gauche.
07:23Ça, on le voit, voter Glucksmann, Mélenchon, etc.
07:26À l'intérieur du Rassemblement National, ils ont vraiment fait le propre autour d'eux.
07:29Donc là, il n'y a plus beaucoup d'hésitation.
07:31Avec des votes qui sont très certains, je crois qu'il y a quasiment 90% des électeurs du Rassemblement National
07:36qui sont sûrs et certains de voter RN au premier tour.
07:39Tout à fait. C'est l'électorat le plus solidifié.
07:41Après, l'électorat du Front Populaire aussi est assez solidifié.
07:43Et la grosse question, c'est dans le camp présidentiel, avec une campagne difficile, etc.
07:49Puis en plus, avec l'affrontement Front Populaire contre Rassemblement National,
07:53qui fait que le système politique français est ainsi fait, que ça a tendance à bi-polariser.
07:57Et jusqu'ici, c'était le pôle central qui réussissait à rejeter tous les autres sur le côté.
08:02Maintenant, c'est plutôt l'inverse.
08:03C'est les autres qui grossissent et qui affaiblissent de manière importante le pôle central.
08:07Est-ce que vous avez déjà fait votre choix pour ce dimanche ?
08:10C'est la question qu'on vous pose ce matin, Mathieu.
08:13Tout à fait. 04 76 46 45 45.
08:15Il vous reste encore quelques minutes pour nous appeler.
08:18Vous êtes aussi passé sur les réseaux sois-il qu'avec des gens qui nous donnent leur avis sur cette question.
08:22Et la réponse est oui.
08:23Est-ce que vous avez déjà fait votre choix, en tout cas pour la plupart de nos auditeurs ?
08:27Et contrairement à Jean-Paul, qu'on a entendu tout à l'heure à l'antenne,
08:31on a par exemple Colette qui dit « je ne suis pas une girouette, je garde mes convictions »,
08:36comme ce que nous disait notre invitée.
08:38Et puis Corine qui regrette un peu qu'on en soit arrivé à un point
08:42où on ne vote plus pour, mais plutôt contre un parti.
08:46Vous avez parlé de la participation.
08:48Simon Persico, ça va être l'un des enjeux principaux de ce premier tour.
08:52En tout cas, dans notre dernier sondage paru ce matin, la participation est estimée à 63%.
08:57C'était moins de 50% il y a deux ans.
09:00Ça peut changer quoi ? Ça peut profiter à qui ?
09:02Alors ça change plusieurs choses.
09:04D'abord parce que la participation détermine qui a le droit d'être présent au second tour de l'élection.
09:08Il faut atteindre 12,5% des inscrits.
09:11Exactement.
09:12Donc ça fait qu'avec une participation de 64% ou 65%,
09:15il vous faut faire un peu moins de 20% des suffrages pour réussir à vous maintenir.
09:18Ça fait que le ticket d'entrée pour le deuxième tour est beaucoup moins élevé.
09:23Et de fait, une triangulaire, ça ne donne pas des résultats similaires.
09:26Ça va poser aussi des enjeux très forts dont on entend déjà discuter,
09:29de savoir si on se maintient ou pas, avec le risque de la victoire du RN.
09:32Et est-ce qu'on appelle à voter pour faire front républicain ?
09:36Exactement, pour faire front républicain.
09:37Et là on voit déjà Marine Tondelier pour les écologistes,
09:39mais même François Hollande, qui disent qu'en cas de risque de victoire RN,
09:43on désistera à nos candidats.
09:44C'est-à-dire que même s'ils avaient la capacité d'aller au second tour,
09:47ils n'iront pas pour garantir une victoire de quelqu'un qui n'est pas du RN.
09:51Et donc ça, la participation est vraiment déterminante là-dessus.
09:54Et la deuxième chose dans laquelle elle est déterminante,
09:57c'est qui va se participer en plus.
09:59Donc là c'est une élection qui est importante parce qu'elle distribue le pouvoir national.
10:02C'est pour ça qu'il y a plus de gens qui vont voter que la dernière fois,
10:04où les gens avaient l'impression que les jeux étaient finis.
10:06Et là maintenant, qui va se déterminer en plus ?
10:08Est-ce que c'est des électeurs plutôt du RN, macronistes ou du FP ?
10:13Ça, ça va vraiment avoir un impact sur les résultats.
10:15Et on retourne au standard de France Blu, Isère Mathieu.
10:17Avec toujours cette question, est-ce que vous avez fait votre choix
10:19à quelques jours du premier tour des élections législatives,
10:21ou que vous êtes toujours indécis ?
10:23Lila nous appelle de Vienne. Bonjour Lila.
10:25Bonjour.
10:26Et avec vous, on repose cette question alors.
10:28Est-ce que vous avez déjà fait votre choix ?
10:31Il l'a fait depuis longtemps, il s'est décidé il n'y a pas si longtemps ?
10:34Non mais mon choix est fait depuis très longtemps.
10:36J'ai 50 ans, j'ai quelques votes derrière moi,
10:40et donc il n'est pas du tout envisageable pour moi
10:44de laisser une frange passer.
10:48Voilà, parce que la démocratie c'est important,
10:51et qu'elle est clairement menacée aujourd'hui,
10:55donc il est très important d'aller voter.
10:57Donc c'est un vote contre plutôt qu'un vote pour, Lila ?
11:00Alors, contre épidermiquement,
11:04mais pour aussi dans le sens où je redécouvre aujourd'hui,
11:08à travers les débats, à travers les professions de foi
11:12qui ont été écrites certes rapidement, mais quand même,
11:14qui sont significatives,
11:16je redécouvre certaines personnes dont je n'avais pas connaissance
11:20jusqu'à présent, et qui me font dire que malgré tout,
11:23ce sera quand même pour.
11:25Contre, assurément, parce que le candidat qui semble se présenter,
11:31ou en tout cas le parti qui semble se présenter
11:34avec le plus gros pourcentage,
11:36est assurément inquiétant pour notre démocratie,
11:39mais je serais quand même contente de voter pour
11:42des programmes et des professions de foi
11:45qui me semblent intéressants aujourd'hui.
11:47Merci Lila de votre appel.
11:49Merci beaucoup.
11:50C'est intéressant ce que nous dit Lila Simon-Persico,
11:52il y a à la fois la peur,
11:54et puis quand même un peu d'envie des programmes.
11:56Qu'est-ce qui mobilise le plus ?
11:59C'est dur à dire.
12:00Je pense que la question de l'élection,
12:02c'est vraiment la victoire du Rassemblement National,
12:04parce qu'il a fait un énorme score aux Européennes,
12:06que Macron a dissous derrière,
12:08que du coup ça fait la question centrale,
12:10et que du coup je comprends tout à fait
12:12pourquoi des électeurs se positionnent par rapport à ce risque-là,
12:14ou par rapport à cette opportunité-là.
12:16Il y a des électeurs aussi qui peuvent se dire
12:18on n'est pas loin du compte.
12:20Après, il y avait vraiment des offres de politique publique
12:22extrêmement différentes.
12:24Donc on peut aussi se mobiliser pour,
12:26d'un côté, un programme de relance économique,
12:28d'augmentation des salaires,
12:30de transition écologique,
12:32l'autre, du côté de Macron,
12:34on n'a pas vraiment de changement,
12:36et après un programme basé sur la défense de l'identité nationale,
12:38et des politiques économiques
12:40qui sont de moins en moins précises,
12:42d'ailleurs, ou de moins en moins sociales.
12:44Donc il y a des offres vraiment très différentes.
12:46Trois offres très différentes, et vous nous avez dit
12:48ça peut encore bouger d'ici dimanche, d'ici le premier tour.
12:50Merci beaucoup Simon-Persico,
12:52d'avoir été notre invité ce matin,
12:54président de l'Assemblée Politique à Sciences Po Grenoble.
12:56Belle journée, merci.

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