L'écrivain Nathan Devers était l’invité de Midi News ce mardi 9 avril sur CNEWS. Il a commenté les promesses énumérées la veille sur CNEWS par Valérie Hayer, candidate de la majorité aux élections européennes, qui propose d'en finir avec Lampedusa d'ici deux ans : «La Méditerranée est un cimetière à ciel ouvert»
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00:00 Ces élections européennes doivent se jouer sur l'immigration, sur l'insécurité, sur l'empédousa.
00:06 Et l'empédousa, justement j'y viens, le problème majeur de l'empédousa, il faut juste le rappeler,
00:11 c'est que l'empédousa est devenu le nom du fait que la Méditerranée, et pas seulement la Méditerranée,
00:17 la Manche aussi, mais surtout la Méditerranée, est un cimetière à ciel ouvert.
00:21 Les gens qui traversent la Méditerranée dans ces conditions, ils ne le font pas pour des raisons égoïstes,
00:27 ils le font parce qu'ils savent qu'ils peuvent mourir, et ils le font pour fuir.
00:30 Et en effet, je suis parfaitement d'accord avec ce que dit Frédéric Roland-Fadil.
00:33 Oui, mais donc pour fuir des choses, quand vous savez que vous allez traverser la Méditerranée,
00:37 que vous avez une chance sur deux ou sur trois de mourir en Guernity,
00:39 vous ne le faites pas en vous disant "j'ai eu le petit bonheur de la chance".
00:42 Mais tous ne fuient pas des pays en guerre.
00:43 Oui, bien sûr. Fuir aussi la grande misère, le blocage civique, le blocage politique.
00:47 Maintenant, et c'est la nuance que je mettrais, c'est que ce qu'elle propose pour arrêter ce drame,
00:53 c'est une vision technicienne de la chose.
00:55 On fait des coopérations avec l'Union européenne, on fait du filtrage, du blocage.
00:59 Ce n'est pas seulement une vision technique qu'il faut avoir.
01:01 Mais je vous ai posé la question.
01:03 Pour poser la question à l'échelle internationale, je vais vous donner un exemple.
01:05 Attendez, je vous ai posé la question hier, je me suis dit "mais quelle est votre philosophie ?".
01:08 Est-ce que vous estimez qu'il peut y avoir une diversité heureuse ? Et c'est très bien.
01:12 Et dans ce cas-là, vous pouvez imaginer qu'avec encore plus de migrants,
01:16 on peut imaginer encore un projet ou un imaginaire collectif ?
01:20 Bon, je n'ai pas eu la réponse. Est-ce que vous pensez que c'est encore possible
01:23 parce que la loi du nombre aujourd'hui, est-ce que finalement,
01:25 elle ne finit pas par tout emporter sur son passage ?
01:27 Moi, je vous répondrai pour ma part que je crois absolument à l'idée
01:31 d'une diversité heureuse pour le reprendre, mais que ce dont on parle,
01:36 ce n'est pas la même chose.
01:37 Quand il y a eu par exemple le Irak en Algérie et que la jeunesse algérienne,
01:40 l'Algérie, c'est un pays extrêmement jeune, disait "nous en avons assez de vivre dans un pays
01:45 avec un régime pourri, un pays bloqué, un pays où nous n'avons aucune perspective sociale,
01:50 professionnelle, économique, civique et politique et où une des seules perspectives
01:54 d'émancipation, c'est de traverser la Méditerranée pour aller en France".
01:57 Là, évidemment, il ne s'agit pas d'une immigration, il s'agit d'une immigration
02:02 qui se joue sur la fuite, sur l'évasion d'un malheur.
02:05 Et poser la question...
02:05 Et donc, qu'est-ce qu'on fait ? On ouvre toutes les portes.
02:07 Mais justement, c'est ce que disait Frédéric, poser la question à l'échelle internationale,
02:11 avec du co-développement qui ne revient pas à soutenir ou à se mettre à l'aise...
02:13 Mais vous allez résoudre les problèmes de l'Algérie, de la Tunisie, du continent africain,
02:17 de la Libye qui est devenue un non-État ?
02:19 Prenons l'exemple des relations entre la France et l'Algérie.
02:21 Quelles ont été ces relations depuis 2017 ?
02:23 Ça a été de se coucher en permanence devant le régime algérien,
02:26 qui est un régime qui fait souffrir sa population.
02:28 Ça a été de soutenir ce régime pendant le IRA.
02:29 Le Maroc, l'Algérie... Mais répondez-moi, est-ce que vous pensez qu'à court terme,
02:32 vous pouvez résoudre le problème de tous ces régimes et dire "ça peut marcher,
02:35 donc je vais tarer..." ?
02:36 Alors, si on ne peut pas le faire, que fait-on à un autre niveau ?
02:38 Pas à court terme.
02:39 La politique, ça ne se fait pas que dans le court terme.
02:40 Donc à un autre niveau, qu'est-ce que vous proposez ?
02:42 D'avoir cette vision-là de relations interpersonnales.
02:46 Vous comprenez ce que je dis, je suis d'accord.
02:48 Vous voyez ce qui me gêne ?
02:50 Je vais vous dire, parce que je viens aussi de l'autre côté de la Méditerranée,
02:52 c'est toujours cette vision de croire qu'on va influer sur l'autre côté du monde.
02:56 Il y a un gendarme, il va passer au bas.
02:58 Oui, c'est autoritaire.
02:59 Mais écoutez, pardonnez-moi, en Libye, la France et l'Angleterre,
03:03 on pouvait tomber en régime.
03:04 Vous avez vu ce qui s'est passé ensuite pour les voisins ?
03:06 C'est mieux, maintenant ?
03:07 Excusez-moi, je ne sais pas...
03:09 Vous ne me disiez pas bien avant.
03:11 Oui, mais c'est mieux.
03:12 La vision que je proposais, ce n'est pas une vision néocoloniale
03:16 de dire "on arrive en Algérie, on renverse un régime".
03:18 Ce n'est pas ça.
03:19 C'est de la "néo-colonialism soft".
03:21 Non, les relations diplomatiques, ça se fait à deux.
03:23 Je dis juste que quand on est dans une relation diplomatique
03:25 avec un régime qui est pourri, qui est corrompu,
03:27 qui fait souffrir sa population,
03:29 on ne se met pas à plaventre dans lui.
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