Laurent Paganelli Convoqué : Le Choc de se Retrouver à la Rue

  • il y a 7 mois
Plongez dans l'histoire bouleversante de Laurent Paganelli, ancien footballeur professionnel, qui se retrouve confronté à la dure réalité de la vie à la rue.

Ce documentaire poignant retrace le parcours de Paganelli, de ses années de gloire sur les terrains de football à sa chute brutale et son combat pour survivre dans la rue.

Découvrez les moments clés de ce récit :

La chute de gloire : Paganelli, victime d'une grave blessure, voit sa carrière de footballeur s'éteindre brutalement.
La spirale infernale : Accablé par les dettes et la solitude, Paganelli sombre dans la dépression et se retrouve à la rue.
Le combat pour la survie : Paganelli doit apprendre à vivre dans des conditions précaires et affronter les dangers de la rue.
La rencontre avec des âmes charitables : Des personnes bienveillantes lui tendent la main et l'aident à se reconstruire.
Le chemin vers la rédemption : Paganelli, grâce à sa détermination et au soutien de ses proches, retrouve le chemin de la vie normale.

Ce documentaire est plus qu'un simple récit de vie, c'est un véritable message d'espoir et de solidarité.

Il nous montre que même dans les moments les plus difficiles, il est toujours possible de se relever et de retrouver sa dignité.

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Transcript
00:00 On revient habiter dans le quartier et on n'a pas d'entrée d'argent.
00:03 C'est-à-dire qu'on a un mois où on n'a plus rien.
00:05 J'ai vécu deux mois sur le chômage,
00:07 après on se retrouve à la rue complète.
00:09 Moi quand j'ai commencé Canal,
00:11 quand j'ai commencé Canal,
00:13 la première année,
00:16 j'ai eu même dormi à la gare de Lyon.
00:18 [Musique]
00:36 Taga, je suis content, très content de te recevoir aujourd'hui.
00:40 El grande jugador.
00:42 El grande jugador.
00:43 Tu es même un petit malin,
00:45 il y a trois mois il me l'a dit, "El grande jugador".
00:47 C'est devenu carrément une marque de fabrique.
00:49 Tu devrais faire un t-shirt et tout.
00:51 On te le souhaite.
00:53 Je ne sais même pas d'où c'est venu.
00:55 Ils ont fait des parodies, ils ont tout fait.
00:57 Je ne me suis jamais rendu compte que je disais ça.
01:00 Je l'ai dit après, pour rigoler.
01:02 Tu sais qu'aujourd'hui on n'est pas là pour parler de Paga.
01:05 Non, parler de qui ?
01:07 De Laurent Paganelli.
01:08 Mais pas le footballeur, pas le journaliste,
01:10 lui-même.
01:12 Tu as fait un redroit.
01:14 Tu avais des amis avant ?
01:16 Après, en off.
01:18 Quoique tu l'as déjà fait sur des plateaux télé.
01:21 On l'a fait toujours, on déconne toujours.
01:23 On est une génération un petit peu agitée.
01:25 Pour revenir sur ton enfance,
01:27 tu es né en 1962 à Aubenas.
01:29 Tu avais trois frères.
01:31 Trois frères, oui.
01:33 Tu dis dans une interview que c'est plutôt ta grand-mère
01:37 et ta tante qui t'élevaient.
01:39 C'est ça.
01:41 On était quatre, mon père SNCF,
01:43 ma mère a quatre garçons.
01:45 Il est venu travailler à Avignon.
01:48 Il ne pouvait pas élever les quatre.
01:50 On habitait dans le quartier.
01:52 C'est ma grand-mère et ma tante.
01:55 En fait, on tournait un petit peu.
01:57 On faisait des tournantes.
01:59 Il y en a deux qui allaient là et deux qui restaient là.
02:01 C'était entre Avignon et Aubenas.
02:03 C'était un peu ça.
02:05 Après, tous les frères ont rejoint ton père à Avignon.
02:07 Ça a été long quand même.
02:09 Tu es là ?
02:11 Quand on était assez proche, les quatre,
02:13 on était sur trois ans.
02:15 Ça a commencé vers les sept ans, les huit ans
02:17 où on s'est retrouvé les quatre.
02:19 Deux dans un lit et deux dans un autre.
02:21 On avait passé deux chambres.
02:23 Dans un immeuble, on avait passé deux chambres.
02:25 C'était une autre époque.
02:27 Oui, c'était une autre époque.
02:29 C'était une période particulière.
02:31 Mais c'était bien fraternisé.
02:33 Quel genre d'enfant étais-tu ?
02:35 Quel genre d'enfant j'étais ?
02:37 J'étais un peu perturbateur.
02:39 J'étais un peu le déconneur.
02:41 Franchement, je ne m'y attendais pas.
02:43 Non, mais je n'étais pas méconcentré,
02:45 pas très studieux.
02:47 J'étais vraiment dans la légèreté.
02:49 Je suis un souciant totalement.
02:51 Mais bon,
02:53 c'était aussi guidé par le fait
02:55 qu'on avait moins de repères.
02:57 Mon père était à la SNCF.
02:59 À l'époque, il partait trois jours, quatre jours.
03:01 Ça partait dans tous les sens.
03:03 Moi, ça m'arrangeait très bien
03:05 d'être comme ça.
03:07 Ça m'amenait une certaine liberté.
03:09 J'étais quand même aussi,
03:11 d'un autre côté, un peu timide,
03:13 un peu réservé.
03:15 Je n'étais pas du tout sûr de moi.
03:17 C'est pour ça que j'avais cette image.
03:19 J'essayais de me libérer autrement
03:21 parce que ça me permettait
03:23 d'avoir une autre prestance,
03:25 une autre assurance, plus d'assurance.
03:27 Pour revenir sur tes frères,
03:29 vous êtes une famille de sportifs.
03:31 Le sport de prédilection, c'était le rugby ?
03:33 Les trois jouent au rugby.
03:35 Mon père et ma mère ne m'avaient jamais vu jouer au foot.
03:37 Ils se foutaient tous de ma gueule.
03:39 Comment ça t'est venu le foot ?
03:41 J'ai joué au rugby et j'ai commencé au rugby.
03:43 Je me suis cassé le col de l'humerus.
03:45 Avec mon bras bandé, j'ai pu jouer au football.
03:47 J'ai joué au football,
03:49 j'ai commencé et j'ai eu
03:51 l'opportunité de jouer
03:53 avec l'ASU, à l'école,
03:55 un club qui nous cherchait. J'avais des qualités.
03:57 Tout ça fait des qualités.
03:59 On fait que finalement, je me suis retrouvé
04:01 être au foot parce que les gens
04:03 m'attiraient au football.
04:05 J'ai grandi là-dedans
04:07 un peu
04:09 par le fait que j'avais des qualités.
04:11 J'avais des qualités au foot.
04:13 J'avais des qualités à l'époque
04:15 déjà qui dépassaient.
04:17 On me poussait, je jouais un pupille,
04:19 un minimum.
04:21 À un moment, j'étais même un double.
04:23 Un minimum, je jouais un junior.
04:25 Tu n'as pas délaissé que le rugby, tu as délaissé l'école aussi ?
04:27 Tu n'étais pas un élève très studieux ?
04:29 Non, pas du tout, mais vraiment pas.
04:31 Déjà par le fait que j'avais aucune concentration.
04:33 Quand tu n'es pas concentré,
04:35 et dans le foot, ça a été mon problème d'ailleurs.
04:37 Je n'ai jamais trop parlé, mais je n'ai pas
04:39 de concentration. Je peux me concentrer
04:41 pendant une demi-heure,
04:43 déjà c'est un maximum,
04:45 mais je déconnecte vite.
04:47 Je déconnecte vite, même sur un film,
04:49 même sur un spectacle.
04:51 Je te donne une date, Paga.
04:53 1978.
04:55 Ça ne te dit rien ? C'est mon premier match en pro.
04:57 C'est fou quand même.
04:59 Tu deviens le plus jeune joueur à jouer en professionnel.
05:01 Tu remplaces Dominique Rocheteau
05:03 au Parc des Princes.
05:05 Direct dans des conditions de fou, de gras.
05:07 Oui, c'était particulier parce que
05:09 je venais d'arriver il y a deux mois
05:11 à Sainte-et-Pierre, et puis il y avait
05:13 tous les anciens qui avaient fait les Coupes d'Europe, qui avaient fait la finale,
05:15 donc c'était impressionnant.
05:17 Je me suis retrouvé là par hasard.
05:19 Il manquait deux ou trois joueurs, parce qu'à l'époque
05:21 il n'y avait que 16 joueurs, il n'y en avait pas 36 000 non plus.
05:23 Il y avait trois blessés,
05:25 et puis il m'avait demandé de venir faire un jeu de tête,
05:27 il y avait un entraînement sur ces jeux de tête.
05:29 Et ça s'était bien passé, et il m'a dit
05:31 "Allez, je te prends", et il m'a pris comme ça. Et Dominique se blesse à la mi-temps
05:33 et je rentre à la mi-temps.
05:35 Après j'ai été nul pendant 45 minutes.
05:37 C'est pas que j'étais nul, mais j'étais...
05:39 Je m'étais trop impressionné, c'était quand même quelque chose.
05:41 C'était au Parc, il y avait 50 000, 15 ans et demi.
05:45 Puis 15 ans et demi, tu n'as pas de repères.
05:48 C'est-à-dire que tu joues comme un enfant de 15 ans et demi.
05:50 Alors que les pros, ils jouent comme des pros.
05:52 Ils jouent avec l'organisation, d'une certaine façon.
05:54 Moi je partais, je faisais tout et n'importe quoi,
05:56 ça ne ressemblait pas.
05:58 J'étais seul contre le monde entier.
06:00 À la tête retrouve, c'est particulier.
06:02 - Mais c'est ce qui t'a un peu desservi dans ta carrière.
06:04 Tu disais que tu aimais le football plaisir.
06:06 - Oui, c'est le football plaisir, c'est particulier.
06:08 Mais je suis toujours resté dans le football plaisir.
06:10 Et un peu comme dans la vie, ça a toujours été mon problème.
06:12 Parce que j'avais envie de jouer comme j'avais envie de jouer.
06:15 J'avais envie de m'entraîner comme j'avais envie de m'entraîner.
06:17 Et ça, tu ne peux pas. Dans une structure professionnelle, c'est très difficile.
06:20 Surtout dans un club comme Sainte-Étienne.
06:22 C'est très très difficile.
06:24 - Justement, Sainte-Étienne, c'est les CT.
06:26 On ne va pas parler de maintenant, vu la situation.
06:29 Mais ça reste quand même l'un des plus grands clubs de France.
06:32 Tu as seulement 15 ans.
06:34 Tu côtoies des Michel Platini.
06:36 C'est quoi tes sensations ?
06:38 - C'est particulier.
06:40 Mais déjà, beaucoup de respect par rapport à tous ces joueurs-là.
06:43 Parce que c'était des grands joueurs.
06:45 Et à l'époque, moi personnellement, je n'avais pas prévu de faire une carrière professionnelle.
06:48 Donc je me retrouve à Sainte-Étienne, le plus grand club,
06:50 comme Paris maintenant par exemple.
06:52 Donc, c'était des grands joueurs.
06:54 Et je te dis beaucoup de respect.
06:56 Je me disais franchement...
06:58 J'avais cette impression que c'était vraiment des monstres, les gars.
07:01 Je faisais les paninis, les machins, les trucs.
07:03 Tu te retrouves 5 minutes après avec eux.
07:05 Et tu te dis que c'est des messieurs.
07:07 Et après, tu te rends compte que c'est des grands professionnels.
07:10 De suite, tu as cette barrière où tu te dis que tu ne ressembles à rien.
07:13 Et tes petits moulés, tu fais 1m10.
07:16 C'est des pros.
07:18 Et de suite, tu te dis qu'il va y avoir du boulot.
07:20 Et tu peux revenir sur ta carrière.
07:22 Tu as mis un peu de temps à t'installer dans l'équipe.
07:24 Après, tu t'es installé.
07:26 Et consécration 1981, champion de France.
07:28 Oui, champion de France.
07:30 J'avais déjà été avec la D3.
07:32 On avait été champion avec une génération superbe.
07:36 Et après, effectivement, 1981, avec 5 ou 6 jeunes d'ailleurs,
07:39 on a été champion.
07:41 Et on avait vraiment une belle équipe.
07:43 On était au-dessus de tout le monde.
07:46 Et puis, il y avait des grands joueurs.
07:48 Et il y avait souvent des grands joueurs qui m'ont aidé à grandir aussi.
07:52 Non, mais bon, les grands joueurs, c'est notamment Platini, Johnny Reb,
07:56 qui avait fait 2 finales de la Coupe du Monde.
07:58 Tous les anciens qui avaient fait la finale 1976.
08:00 Les Jean-Guillaume, toute la bande.
08:02 Et Rocheteau.
08:04 Tu avais 18 ans à cette époque ? 18-19 ans ?
08:06 Oui, j'ai fait mon premier match en pro.
08:08 De titulaire, je crois que j'avais 17 ans.
08:10 Pour mettre en parallèle, c'est à peu près la même année.
08:12 Tu t'es marié à 18 ans et tu es champion de France après.
08:14 C'est quoi le plus beau dans les deux ?
08:16 Les deux, les deux.
08:18 Est-ce que tu devrais en choisir quand même ?
08:20 C'est ma femme. Non, sans problème.
08:22 Parce que, contrairement à ce que l'on peut penser,
08:24 en football,
08:26 enfin, moi, c'est ce que je pense moi,
08:29 ce ne sont pas les titres que je retiens le plus.
08:31 Tu vois ce que je veux dire ? Ce ne sont pas les titres.
08:33 Les titres, c'est une chose. C'est vrai, on a gagné ça, on a gagné ça.
08:35 Mais on a partagé tellement de choses.
08:37 On a partagé tellement de moments.
08:39 Tu vois, des matchs plus difficiles.
08:41 Tu vois ce que je veux dire ? C'est une vraie saison.
08:43 Après, c'est vrai que tu as le titre et tout,
08:45 mais on a partagé beaucoup de choses.
08:47 Elle est là pour te soutenir, parce que tu es quand même aussi passé du rêve au cauchemar.
08:50 Tu étais titulaire, tu es champion de France,
08:53 et après, il y a Robert Herbin qui te roule un peu sur le banc,
08:57 qui t'empêche de rejoindre l'équipe de France.
08:59 Oui, il m'empêche de rejoindre l'équipe de France,
09:01 parce qu'on a le match Coupe d'Europe,
09:03 et le match après Coupe d'Europe, il ne me fait plus jouer,
09:06 il m'écarte de l'équipe.
09:07 Mais à l'époque, c'était particulier, parce qu'à l'époque, les mecs,
09:09 tu n'étais pas dans l'explication.
09:11 Tu vois, tu étais là, tu devais subir,
09:13 et tu devais te débrouiller, tu devais te démerder,
09:15 et c'est là où tu devais forger ton caractère et te dire,
09:18 tu vois, et montrer à l'entraîneur qu'il avait tort, tu vois.
09:21 Mais c'est compliqué, c'est compliqué.
09:23 Quand tu es jeune, quand tu as 18 ans, c'est compliqué.
09:25 C'est compliqué parce que tu n'as pas toutes les cartes en main.
09:27 À l'époque, j'aurais pu partir au CER,
09:29 je me rappellerai toujours Guirou, il m'appelle Guirou, il me dit,
09:32 "Alors, je prends l'avion maintenant ?"
09:34 Je suis allé au CER, "Je prends l'avion maintenant,
09:36 tu signes dans deux heures, dans trois jours, tu es au CER,
09:40 dans deux mois, tu es international."
09:42 Et cinq minutes après, ils étaient à Fonson, c'était Roland-Courbis,
09:45 à Toulon, c'est Roland-Courbis.
09:47 - Et toi, tu as fait le choix plutôt du coin, en fait, c'est pour ça ?
09:50 - Oui, j'ai hésité, puis à l'époque, je faisais le tournoi de Toulon.
09:55 Je n'avais pas encore choisi, j'avais ma voiture,
09:57 et je prends le virage de Bandol.
09:59 Alors, c'est rigolo, je m'arrête à une cabine,
10:01 c'est comme dans l'inspecteur Harry, on n'avait pas les portaires à l'époque.
10:04 Je m'arrête et j'appelle ma femme et je lui dis, "On signe à Toulon."
10:07 - Elle était contente ?
10:08 - Oui, parce qu'on avait besoin de retrouver le Sud,
10:10 et moi, j'avais besoin de ça aussi.
10:12 C'est con à dire, mais quand on est du Sud, c'est important.
10:17 Surtout à l'époque, c'était important, parce qu'à l'époque, les clubs,
10:20 tu vois, en Bretagne, tu avais des Bretons, en Alsace, tu avais des Alsaciens.
10:23 - En Marseille, tu avais des Marseillais.
10:25 - Voilà, en Marseille, tu avais des Marseillais.
10:27 Et tout ça, je trouve que ça s'est beaucoup perdu, et c'est un peu dommage.
10:30 - Parce qu'en fait, Toulon, ça devient vite le drame.
10:32 - Oui, oui.
10:33 - C'était le 14 juillet.
10:35 - C'était le 14 juillet.
10:36 - Oui, ton petit frère Michel t'appelle pour te dire qu'il va fêter le 14 juillet
10:41 chez ta grand-mère, en Ardèche.
10:43 Et finalement, toi, tu lui dis "Viens le fêter avec moi à Toulon",
10:46 et il décède sur la route.
10:47 - Oui, oui.
10:48 Ça a été...
10:50 Ça a été...
10:51 Je peux même pas me parler, enfin, je peux pas me parler,
10:54 parce que j'ai jamais, j'ai jamais assimilé le fait qu'il soit décédé, tu vois.
11:01 C'est terrible, c'est terrible.
11:02 J'ai jamais...
11:03 Putain, j'ai toujours fait abstraction, j'ai toujours fermé les yeux.
11:06 Alors, j'en ai souffert intérieurement, mais extérieurement, je me suis jamais libéré de ça.
11:12 Jamais libéré de ça, parce que tu te sens frotti.
11:14 Tu te dis "Putain, il s'était pas signé à Toulon",
11:16 tu te dis "Il s'est pas parti à Saint-Étienne".
11:18 Si tu lui avais pas dit ça, tu veux dire que c'est compliqué,
11:20 c'est un truc aberrant, quoi.
11:22 Et tu te sens toujours responsable, responsable.
11:24 Et tous les jours où je me lève, tu sais que t'es responsable.
11:26 C'est terrible, c'est horrible.
11:27 Non, tu sais parce que tu l'es pas, mais tu le ressens, tu penses.
11:30 Tu culpabilises.
11:31 Non, mais tu es obligé de...
11:33 Tu peux pas...
11:34 Tu peux le tourner dans tous les sens que tu veux,
11:36 tous les sens que tu veux.
11:37 Putain, tu te retrouves toujours devant le fait que tu te dis "Putain".
11:41 Mais ça a été horrible, c'est horrible.
11:43 Enfin, ça l'est toujours, c'est toujours une cicatrice.
11:45 J'ai jamais pleuré, j'ai jamais pu pleurer, j'ai jamais pu...
11:48 Tu vois, j'ai jamais pu l'accepter.
11:50 C'est horrible.
11:51 T'as pas extériorisé ?
11:52 Jamais, jamais, jamais, jamais, jamais.
11:54 Alors, j'ai subi plein de choses intérieurement.
11:56 Des problèmes de santé, des problèmes de...
11:59 Pas de dépression, mais des problèmes de vie d'intérieur, tu vois,
12:02 de blacao, de machin, de tout.
12:04 Ça a été depuis...
12:06 Donc, ça fait combien de temps, maintenant ?
12:08 C'est une quarantaine d'années ?
12:10 Ouais, ça fait 35 ans.
12:12 Et...
12:13 Putain, tu vis que comme ça, comme ça, comme ça, comme ça.
12:16 Putain, c'est chiant parce que tu...
12:18 C'est horrible, quoi.
12:19 Tant que je vais pas rejoindre, c'est horrible.
12:21 Non, mais c'est vrai.
12:23 T'es obligé de te...
12:25 T'es obligé au moins de dire ça, quoi.
12:27 T'es obligé au moins de dire ça et de te dire...
12:29 C'est ce que ta femme nous a dit, en fait.
12:31 Tu t'es senti responsable.
12:32 Mais d'un côté, ça t'a fait voir les choses autrement.
12:34 Et maintenant, tu profites de la vie.
12:36 Tu sais que tout peut t'arriver d'un coup.
12:38 Ouais, je pense surtout qu'on est beaucoup de personnes dans la vie
12:42 à vivre des drames.
12:43 On vit tous des drames personnels.
12:45 Et t'as deux solutions.
12:47 Ou tu subis et puis tu vis plus.
12:49 Ou tu l'utilises pour effectivement essayer d'avancer.
12:52 Et surtout de profiter, tu vois.
12:55 Tu profites de la vie en te disant
12:57 "Allez, tu la vis comme s'il était là à côté.
12:59 Tu la vis pour lui.
13:01 Tu la vis pour tes petits-enfants, pour tes enfants.
13:03 Tu fais des choses."
13:04 Tu peux pas...
13:05 Comment te dire ?
13:06 Tu peux pas être en permanence
13:08 en train de montrer ta souffrance, tes problèmes.
13:10 En fait, tu l'as tellement mal vécue,
13:12 ta femme parlait même de presque une maladie.
13:14 Les mots du corps sont les mots de l'esprit.
13:16 Ça t'a empêché même de jouer au foot.
13:18 T'arrivais plus, t'avais plus d'énergie.
13:20 De toute façon, dès que ça m'est arrivé ça,
13:23 tous les gestes simples du foot,
13:25 toutes les choses que je faisais,
13:27 je pouvais plus les faire.
13:28 C'est incroyable.
13:29 C'est incroyable.
13:30 Mais tu vois, après j'ai joué en amateur,
13:32 j'ai joué avec les crampons usés,
13:34 avec les vétérans, mais c'est la même chose.
13:36 D'ailleurs que tout ce que je...
13:37 J'arrivais...
13:38 À un moment, tout ce que je faisais,
13:40 je savais bien faire un extérieur,
13:41 un pass, un but, un piqué, machin,
13:43 tout ce qui était à moi dans l'essence du foot
13:45 et dans mon expression.
13:46 Quand j'avais plus mon expression intérieure,
13:48 je me suis rendu compte que finalement,
13:50 finalement, c'est le mental qui décide de tout.
13:53 Et même dans le football, tu vois,
13:55 dans le football, il faut que tout soit en accord.
13:57 Il faut que là, les gens, le physique,
13:59 tout soit en accord, ta liberté,
14:00 tu vois, être heureux dans ton expression et tout ça.
14:02 Et quand tu perds, tu perds, tu vois, quelque chose,
14:05 c'est comme si tu perds un bras et que...
14:07 Je sais pas moi.
14:08 En fait, toi qui bordes en V,
14:10 c'est comme si on faisait reset.
14:12 Tout à zéro.
14:13 Exactement.
14:14 Tu repartais de...
14:15 Non, non, non, exactement.
14:16 Mais en plus, tu peux pas repartir de zéro.
14:17 Tu peux pas repartir de zéro.
14:18 C'est-à-dire que tu peux plus réévoluer derrière.
14:20 C'est ça qui est terrible.
14:21 Ah ouais ?
14:22 Non, tu peux plus.
14:23 Tu peux plus.
14:24 Tu peux faire ce que tu veux.
14:25 Tu peux plus, tu peux plus.
14:26 C'est-à-dire qu'à aucun moment,
14:27 à aucun moment, même en termes de foot,
14:29 tout ça et tout,
14:30 enfin en termes de tout,
14:31 tu peux pas revenir à ce que tu maîtrisais.
14:33 Tu maîtrises plus rien.
14:34 Et tu le maîtriseras plus jamais.
14:36 C'est quoi la solution alors ?
14:38 T'as arrêté le foot pour moi, ça a été...
14:42 Non, t'as quand même été...
14:43 Non, non.
14:44 Non, j'ai arrêté le foot.
14:45 Non, j'ai arrêté.
14:46 Après, après, après, malheureusement,
14:48 j'avais pas de renticorps dans mon arc.
14:50 Donc il faut vivre aussi.
14:51 Il faut vivre.
14:52 Donc j'ai accepté aussi de continuer un petit peu,
14:54 tu vois, de continuer.
14:55 D'ailleurs, j'ai signé à Grenoble.
14:56 À Grenoble, j'ai arrêté.
14:57 Tu vois, j'avais un contrat de 4 ans.
14:59 J'avais un très bon salaire.
15:01 J'ai décidé, tu vois, j'aurais pu dire,
15:04 je veux...
15:05 Non, je veux 2 ans de salaire.
15:06 Non, j'ai dit j'arrête.
15:07 Je veux rien du tout,
15:08 par respect au club, tu vois, qui m'avait pris.
15:10 Donc j'ai arrêté.
15:11 Et après, j'ai arrêté.
15:13 Après, j'ai fait 2 ans,
15:14 2 ans où j'ai pas été bien, tu vois.
15:16 J'ai fait ma maison de repos, tout ça et tout.
15:18 Tu vois, j'ai vraiment...
15:19 Je me suis dit, dans mon coin, c'était dur.
15:21 J'ai bataillé de ça.
15:22 Je suis revenu.
15:23 J'ai rejoué à Avignon.
15:24 Tu vois, j'ai rejoué à Avignon.
15:25 Et pour redémarrer, pour repartir...
15:27 Parce que, parce que, finalement,
15:29 je me suis dit, mes repères, c'est le foot.
15:32 Mes repères, c'est le foot.
15:33 Et j'en ai besoin.
15:34 J'en ai besoin.
15:35 Et pour ma famille,
15:36 pour que ma famille, elle dise,
15:37 "Qu'est-ce qu'on fait, ma femme ?
15:38 "Qu'est-ce qu'on fait ?
15:39 "On vit plus, on n'existe plus.
15:40 "Les enfants qu'ils m'en aient donnés,
15:41 "tout ça, qu'est-ce qu'on fait ?"
15:42 Donc, il fallait repartir, se relancer.
15:44 Et puis, je suis reparti.
15:45 Et c'est le foot qui m'a permis d'eux, tu vois,
15:47 qui m'a permis d'eux.
15:48 Le foot, Avignon, machin,
15:50 et après, Canal, quoi,
15:51 qui arrive derrière, tu vois, 35 ans.
15:53 Mais c'est toujours le foot, quand même,
15:55 qui m'a sauvé.
15:56 Alors, pas de la même façon.
15:57 Pas de la même façon.
15:58 C'est-à-dire que ce que je ne pouvais plus faire en pratique,
16:01 je l'ai fait avec la voix.
16:02 - OK, ouais. Tu as comblé...
16:03 - Ouais, j'ai comblé.
16:04 C'est-à-dire que ma carrière, je l'ai finie avec Canal.
16:07 Tu vois, c'est une continuité.
16:09 C'est une continuité de ma carrière de footballiste.
16:11 - Il y a eu quand même un temps, non ?
16:12 Parce que tu arrêtes ta carrière à 28 ans.
16:13 Tu as commencé Canal à 35, pendant ces...
16:15 - Ouais, j'ai fait...
16:16 J'ai arrêté...
16:17 J'ai fait Avignon ces 30 ans
16:18 et j'ai joué en amateur à Nyons pendant 4 ans.
16:19 - OK, en amateur, alors.
16:20 - Pendant 85 ans.
16:21 - Pendant 85 ans, ou les 4 ans de Nyons,
16:25 on s'est retrouvés...
16:26 La dernière année avant Canal, il y a eu des mois,
16:30 on avait zéro d'entrée d'argent.
16:32 On s'est retrouvés vraiment à la rue complète.
16:34 - Tu jouais, en fait. Là, c'était le football plaisir.
16:35 Il n'y avait pas de...
16:36 Tu ne jouais pas pour l'argent.
16:37 - Non, mais là, quand je dis qu'il y avait zéro argent,
16:39 c'est qu'il y avait zéro entrée d'argent.
16:40 C'est même pas le football plaisir.
16:41 C'est-à-dire que je jouais en amateur,
16:42 mais il n'y avait pas d'entrée d'argent.
16:43 C'est-à-dire que les mois,
16:44 si je n'avais pas eu mes parents à ce moment-là,
16:46 on ne gagnait plus un centime.
16:48 C'est-à-dire que moi, quand j'ai arrêté ma carrière,
16:49 je n'avais pas gagné d'argent.
16:50 J'en devais presque.
16:51 C'est-à-dire qu'à l'époque, on ne dépensait plus
16:53 que ce qu'on gagnait.
16:54 Et à cette période-là,
16:55 donc j'arrive à 33, 34 ans,
16:56 on a les deux enfants, Carole,
16:58 on revient habiter dans le quartier
16:59 et on n'a pas d'entrée d'argent.
17:01 C'est-à-dire qu'on a un mois, on n'a plus rien.
17:03 J'ai vécu deux mois sur le chômage.
17:05 Après, on se retrouve à la rue complète.
17:07 Moi, quand j'ai commencé Canal,
17:09 quand j'ai commencé Canal,
17:10 j'ai même, la première année,
17:14 j'ai même dormi à la gare de Lyon.
17:16 C'est fou quand même de se dire
17:17 qu'un mec qui a joué au foot,
17:19 il a été au chômage et il a dormi…
17:21 Oui, parce que, comme je te dis,
17:23 on n'avait pas d'éco-salaire.
17:25 Moi, j'étais champion de France avec Saint-Étienne.
17:27 C'était, en euros maintenant,
17:29 c'était 2 000 euros.
17:31 On n'était pas dans le même rapport financier.
17:33 Donc, quand tu arrêtais la carrière,
17:34 je veux dire, ce que tu gagnais,
17:35 allez, à l'époque, le plus gros salaire
17:37 que j'ai dû avoir à Toulon,
17:39 ça devait être du 7 000 euros,
17:40 un truc comme ça.
17:41 Mais à l'époque, tu vivais, tu dépensais
17:43 pratiquement ce que tu gagnais.
17:45 Donc, à la fin de la saison…
17:46 Moi, j'étais à Grenoble,
17:47 j'ai remboursé à peu près ce que je devais,
17:49 financièrement, à la banque.
17:51 Donc, j'ai arrêté, j'avais plus rien.
17:52 Et pourtant, je refusais de traiter
17:55 par respect avec Grenoble.
17:59 Donc, on s'est retrouvés comme ça.
18:01 On s'est retrouvés comme ça.
18:02 Donc, Canal est arrivé à ce moment-là.
18:04 Tu as entendu la main
18:05 ou c'est toi qui allais les démarcher ?
18:06 C'est un pote à moi qui a démarché.
18:08 Donc, j'ai fait un premier match
18:09 qui s'est avéré, après, c'est continué.
18:11 Mais là, c'est pareil.
18:12 Les deux, trois premières années de Canal,
18:14 on n'était pas dans le même rapport financier.
18:16 C'était, tu gagnais 1 500 euros par mois.
18:20 On n'était pas dans un…
18:22 C'est pour ça que je te dis, on n'était pas…
18:24 Il fallait jongler quand même avec tout.
18:26 Il fallait toujours jongler avec tout.
18:28 Non, non, non, ça a été une vraie expérience de vie,
18:31 mais qui m'a beaucoup servi.
18:34 Dans l'approche des choses,
18:36 dans mon travail, après, dans ma vie agitaire.
18:38 C'est pour ça que je te dis, c'est une vraie vie.
18:40 C'est pour ça que je dis que ma femme,
18:41 elle a été quand même aussi solide.
18:43 C'est pas grave, si on devrait revenir sur ta carrière,
18:48 tu as été surnommé le "Petit Moisard".
18:50 Oui, oui, oui.
18:52 Moi, j'aimerais quand même savoir,
18:53 ça fait quoi d'être un mettermin à l'espoir ?
18:55 Parce que tout le monde te voyait comme le Messie, en fait.
18:58 Oui, bien sûr, bien sûr.
18:59 Moi, le gros problème que j'ai eu déjà, c'est que,
19:01 moi, j'ai été connu très tôt, j'ai été connu à 13 ans.
19:04 C'est-à-dire, déjà à 13 ans, j'étais déjà, tu vois.
19:07 Pression cash à 13 ans.
19:08 Oui, parce qu'à 13 ans, j'avais fait un match,
19:09 j'avais été télévisé,
19:10 donc après, tous les clubs sont venus pour me recruter, tu vois.
19:12 Donc, à 13 ans, j'ai commencé les équipes de France,
19:14 tous les jeunes, tu vois.
19:15 Donc, à 13 ans.
19:16 C'est-à-dire que quand j'arrive à 13 ans,
19:19 et que j'arrive à jouer, on va dire jusqu'à 20 ans,
19:22 tu as déjà 7 ans où les mecs,
19:25 publiquement, on parle de toi,
19:27 on disait toujours, là là, là là, là là.
19:29 Mais ça fait 7 ans.
19:30 Et 7 ans, c'est long.
19:32 7 ans, c'est long d'assumer,
19:33 on me perd un ans, ça me perd un an.
19:34 Alors, je te dis, je jouais,
19:36 ma première année à Saint-Étienne, par exemple,
19:38 je crois que je calcule, j'avais fait 12 équipes.
19:40 C'est incroyable.
19:41 12 équipes ?
19:42 C'est-à-dire que la même année où je jouais en pro,
19:44 je jouais aussi en cadet national.
19:46 C'est incroyable.
19:47 12 équipes en un an ?
19:48 Oui.
19:49 C'est-à-dire, cadet national,
19:51 junior Saint-Étienne, pour la gambardée là,
19:54 la DH, la D3, la D1.
20:01 Après, tu rajoutais équipes de France,
20:04 j'avais fait minime, cadet,
20:06 j'avais fait espoir, d'accord ?
20:08 J'avais fait l'équipe de,
20:11 à l'époque, Spar Endurance, c'était du Lyonnais,
20:15 faire les intermachés.
20:17 J'avais fait un minime, j'avais fait un cadet.
20:19 Donc, je suis à 10.
20:20 Tu n'étais pas fatigué ?
20:22 C'était du n'importe quoi.
20:24 C'était du n'importe quoi.
20:25 Donc, tu imagines, moi j'ai vécu ça toutes les années.
20:28 Alors, quand on me demande après,
20:29 mais quand tu arrives à 20 ans,
20:31 ça je l'ai fait toutes les années,
20:33 de 13 ans jusqu'à 20 ans.
20:34 C'est incroyable.
20:35 Je n'arrêtais pas.
20:36 Je faisais là, je faisais là, je faisais là.
20:37 C'est-à-dire qu'à aucun moment,
20:39 il n'est venu dans la tête du club Saint-Étienne
20:41 de se dire, attends, on va calmer le jeu,
20:44 tu ne vas faire qu'une chose pour une finale.
20:46 Tu vas faire ta formation, tu vas jouer, tu comprends.
20:48 Et ça, et puis à l'époque,
20:50 quand tu jouais en réserve,
20:52 tu jouais à Guegnon, à Clermont, à Machin,
20:54 c'était que des anciens d'un bout comme ça.
20:56 C'était au charbon, le groupe 60, c'était au charbon.
20:59 Et tout ça, tu comprends.
21:01 Et quand j'arrive à 20 ans,
21:02 je suis dans une usure physique,
21:04 physique et mentale qui est terrible.
21:06 Qui est terrible.
21:07 Le premier match où je ne suis pas bon,
21:09 on commence à dire,
21:10 ah ouais, mais bon, ça restera.
21:13 Mais j'ai 20 ans.
21:14 Bon, après, tu as eu quand même une belle carrière.
21:16 Non, mais après, j'ai eu une carrière,
21:18 j'ai augmenté la carrière par rapport à mes qualités.
21:22 Je n'ai pas eu l'évolution.
21:24 Je n'ai pas eu une marge d'évolution qui m'ont permis.
21:26 C'est-à-dire que tous ceux qui étaient en retard sur moi,
21:28 ils m'ont rattrapé, ils m'ont doublé.
21:30 OK.
21:31 Ça a été ça à un moment.
21:33 Alors que moi, j'aurais dû avoir une progression plus lente,
21:37 plus lente, plus tranquille,
21:39 et arriver à maturité à 22, 23 ans.
21:42 Ouh là, tu vois, j'aurais...
21:44 Et ça, ça n'a pas été.
21:46 Et quand tu arrives à Canal,
21:48 tu es l'un des premiers footballeurs à devenir journaliste, bord terrain.
21:52 Ça a existé depuis 6 mois.
21:53 Ils avaient acheté des matchs sur kiosque.
21:57 Donc, ils ont recruté des garous et des gambes.
21:59 Tu vois, il y en avait une vingtaine.
22:01 Moi, je suis arrivé, ça a existé depuis 5 mois, je crois.
22:04 Et les plus jeunes d'entre nous,
22:05 ils te connaissent plus pour tes qualités de bord terrain
22:07 que pour tes qualités footballistiques.
22:09 Oui, bien sûr.
22:10 On n'a pas collé...
22:11 Logique, logique, logique.
22:12 Tu vas voir la télé à l'oreille blanche, là.
22:14 Ou la VHS.
22:15 Ou la radio.
22:16 À l'époque, ça s'écoutait à la radio.
22:18 Ça t'écoutait à la radio, c'est bien.
22:19 Et tu as fait des multitudes d'interviews.
22:22 Tu as rencontré des grands joueurs, Neymar,
22:24 Mbappé-Mouvié, Djibbalo-Telly.
22:26 C'est laquelle l'interview qui t'a le plus marqué ?
22:29 Putain, c'est toujours la question un peu piège,
22:32 parce que comme le but, tu sais, tu sais tout ça.
22:34 Mais...
22:36 Qui m'a le plus marqué ?
22:38 Qui m'a le plus marqué, c'est quand je me suis retrouvé à Bastia
22:40 avec le camarade de Marseille qui pleurait.
22:42 Camara ?
22:43 Ouais, de Marseille à l'époque.
22:44 Il est arrivé...
22:45 C'est pas ça, c'est que...
22:46 Il était sur le terrain,
22:48 et c'est Marseille, c'est avec une pression énorme.
22:50 C'était leur course, ils étaient joués à la première place,
22:52 à Bordeaux, et...
22:53 Il a eu 12 occasions, il ne marquait pas, il ne marquait pas,
22:55 il ne marquait pas, il ne marquait pas.
22:56 Et puis à Marseille, il ne se marquait pas.
22:58 À la fin, il avait joué au baby-foot, tu sais.
23:01 Et là, il sort le panneau pour le remplacer.
23:04 Et quand il sort le panneau pour le remplacer,
23:06 sur la dernière action, il marque.
23:07 C'est vrai ?
23:08 Ouais. Et là, il vient.
23:09 Il s'assoit sur le bas à l'époque.
23:11 Et là, d'un coup, il essaie de répondre.
23:14 Il part en larmes.
23:15 En larmes, il te dit,
23:16 "Putain, mais c'est terrible, la pression à Marseille.
23:19 C'est terrible de... Tu marques."
23:21 Et là, il se lâche complètement.
23:23 Et émotionnellement, c'était fort,
23:25 parce que je ne lui disais rien.
23:27 Je lui ai tapé sur l'épaule, je le consolais.
23:29 Ah oui, tu ne sais pas quoi répondre à ce moment-là.
23:31 Ah oui, tu es dans la consolation.
23:33 Et rien, en disant rien.
23:36 C'est-à-dire que c'est ma plus belle interview,
23:38 parce que finalement, je ne pose pas de questions.
23:40 Et tu es là.
23:41 Et dans l'émotion et dans le doute, tu as tout.
23:43 Tu as tout.
23:44 C'est incroyable.
23:45 Tu as tout à ce moment-là,
23:46 qui se met en bras, qui se met en route.
23:48 Et tu te dis...
23:51 Les gens qui sont devant la télé,
23:53 ou les supporters de base,
23:54 les machins qui vont te dire...
23:56 De court, ils vont comprendre que c'est ça aussi le foot.
23:59 Les humains.
24:00 Voilà, c'est ça aussi le foot.
24:01 Il faut leur remettre aussi, à un moment,
24:04 ce côté humain qui fait que...
24:06 Des bourdes t'en as fait quand même.
24:07 Je pense notamment à deux en particulier.
24:09 Celle où tu annonces l'égalisation sur Genesio.
24:11 Oui, oui.
24:12 Mais surtout celle où...
24:13 Elle m'a fait rire, celle-là,
24:14 où tu poses des questions à Rudi Garcia
24:15 alors qu'il y a la minute de silence.
24:16 Et tu te dis...
24:17 On va répondre après.
24:18 Oui, oui.
24:19 Là, tu ne t'es pas fait remonter les bretelles.
24:21 Mais celle-là, elle est d'autant plus terrible,
24:23 que je perds mon père deux jours avant.
24:25 Je perds mon père deux jours avant.
24:27 Je ne sais pas qu'il y a la minute de silence.
24:28 Je ne le sais pas.
24:29 Tu ne le sais pas.
24:30 Moi, je ne sais pas qu'il y a la minute de silence.
24:32 Et quand je commence à démarrer,
24:34 à la question,
24:35 trois secondes après,
24:37 il y a la minute de silence qui démarre.
24:39 Je ne le sais pas.
24:40 Donc c'est un peu...
24:41 Et je sais que...
24:44 Quand ils veulent m'en parler,
24:45 je dis ne m'en parlez pas.
24:46 Je perds mon père deux jours.
24:48 Je sais ce que c'est.
24:49 Je ne savais pas qu'il y avait la minute de silence.
24:50 Pour le final, on ne parle pas.
24:51 On ne va pas plus loin.
24:52 Parce que ce n'est pas une...
24:53 Si j'arrive à suivre la minute de silence,
24:55 si je sais que...
24:56 Tu vois, je ne vais pas le faire.
24:57 Bien sûr.
24:58 Bien sûr, tu ne le fais pas.
24:59 Donc ce n'était pas le moment.
25:02 On a parlé des choses qui étaient les plus importantes à tes yeux.
25:05 Le football, les médias maintenant.
25:07 On n'a pas oublié quelque chose ?
25:09 La famille.
25:10 C'est très très important.
25:11 La famille pour toi.
25:12 Oui, oui.
25:13 Petite nouveauté dans la saison 2 de Conrecu,
25:17 puisqu'on est dans la saison 2.
25:18 D'accord.
25:19 Il y a une boîte noire.
25:20 Tu vois.
25:21 Que je mets juste ici à ta disposition.
25:23 Tu l'ouvres quand tu veux,
25:24 puisque là, on va aborder le thème de la famille.
25:26 Donc c'est à toi de l'ouvrir.
25:27 Je l'ouvre quand tu arrives pas dans l'émission ?
25:28 Oui, oui, bien sûr.
25:29 On va partir à la maison avec.
25:30 Elle m'a quand même coûté 4 euros la boîte.
25:32 J'ouvre alors.
25:33 Tu veux l'ouvrir maintenant ?
25:34 Ah non, je veux qu'elle s'ouvre.
25:35 Non, c'est…
25:36 Moi, je n'ai pas de main.
25:37 Tu peux l'ouvrir maintenant.
25:38 C'est comme tu veux.
25:39 Je l'ouvre maintenant.
25:40 C'est bien, c'est cool.
25:41 C'est cool.
25:42 Oh clunaise, la banda Basile.
25:44 Là, il y a la banda Basile.
25:46 Là, je vous l'ai dit, il y a la banda Basile.
25:48 C'est une photo de famille ?
25:49 Junior.
25:50 Oui.
25:51 Junior.
25:52 Malouka, bien sûr.
25:53 La femme de ton amie.
25:55 La femme de Junior.
25:56 Marius, le petit, on en est deux.
26:00 Melvin, votre fils.
26:02 Et Carole, ma femme.
26:04 Et il faut rajouter Malone, qui a 3 mois.
26:06 Elle m'a envoyé une photo aussi, ta femme avec.
26:08 Et là, on était aux Etats-Unis, à la Universal Studios.
26:12 Avant le confinement.
26:13 Avant le confinement.
26:14 C'était un régal, on rêvait d'y aller ensemble.
26:16 On est Marius et la famille, c'est exceptionnel.
26:18 On le voit quand même que tu es très famille, c'est ça qui te ressource en fait.
26:21 Ah oui, non, non, oui, oui.
26:22 Ça, c'est ma survie, oui.
26:24 Ça, c'est mon ADN.
26:26 Je me shoot avec eux.
26:27 Je fais des shoots.
26:28 T'as survie quand même.
26:29 Ouais, ouais.
26:30 Non, mais c'est important.
26:31 Je crois que c'est Sir Teresa qui me disait, déjà aimer sa famille, c'est déjà beaucoup
26:35 dans une vie.
26:36 Aimer sa famille, c'est important.
26:38 C'est important, voilà, parce que tu t'imprègnes toujours.
26:41 Vous êtes jeune, donc c'est normal, vous êtes jeune.
26:44 On s'en rend plus compte au fil du temps.
26:46 C'est important parce que tu es là pour les plus jeunes, et tu es là pour les parents
26:50 aussi, tu es là pour tout le monde.
26:51 Donc la famille, c'est une cellule passionnante.
26:53 Et donc, moi, je vois ma mère qui a perdu deux enfants, en fait.
26:58 Et puis, elle n'en était qu'un, elle n'en avait plus que deux.
27:00 Elle a perdu son mari.
27:02 Elle est exceptionnelle.
27:03 Elle est là, elle est toujours là, toujours la pêche, toujours machin.
27:05 Donc, tu te dis, c'est des vies, tu vois, c'est quelque chose.
27:08 Parce que j'allais dire, ta mère, elle a un rôle très important.
27:11 Ouais, mais disons que c'est un exemple, quoi.
27:13 C'est un exemple.
27:14 C'est un exemple.
27:15 Et puis, tu te dis, il faut le faire, quoi.
27:17 Il faut le faire dans une vie.
27:18 Il faut les vivre, les vies de certaines personnes, pour te dire, il faut être solide.
27:22 Il faut être solide.
27:23 Et puis, toujours, toujours, ça me paraît...
27:25 Elle ne parle jamais des problèmes, machin, toujours à positif, positif.
27:28 Et c'est bien.
27:29 C'est bien pour les enfants, aussi.
27:30 Tu vois, c'est bien pour les enfants.
27:32 Même si pour les deux, ça a été...
27:34 De m'avoir comme père, c'est problématique.
27:36 Pourquoi ?
27:37 Ah, parce que moi, je suis un peu quand même agité, quoi.
27:39 Je n'ai pas grandi, quoi.
27:40 Non, mais je n'ai pas grandi, je suis toujours dans l'adolescence, quoi.
27:42 Et c'est dur de se dire que je suis plus ami que père, tu vois.
27:48 Même si, au fil du temps, j'essaye de...
27:50 C'est un rôle différent, quand même.
27:51 Oui, c'est un rôle différent.
27:52 C'est un rôle différent, mais bon...
27:54 Tu as des regrets sur ça ?
27:55 Oui, oui, beaucoup.
27:57 Beaucoup, parce qu'il faut les bâtir, les enfants.
27:59 Même si ils ont une colonne verte, tu vois, elle est quand même saine et pure.
28:02 Et je les adore.
28:04 Et puis, voilà, ils sont bien élevés.
28:06 Et puis, il y a ma femme, aussi, qui a redressé tout ça.
28:09 Mais bon, le rôle du père, il est important, aussi.
28:11 Bien sûr.
28:12 Il est important dans l'autorité, tout ça et tout.
28:13 Et puis, moi, bon, tu vois ce que je suis, quoi.
28:15 Je suis un peu...
28:16 En fait, tu dis que tu n'as pas grandi.
28:18 Est-ce que tu penses que c'est le fait que tu es tout fait, tout jeune ?
28:21 Tu as été professionnel à 15 ans, tu étais marié à 18 ans, tu avais des enfants à 25 ans.
28:24 Oui, oui.
28:25 Tu as tout enchaîné, en fait.
28:26 Oui, j'ai tout enchaîné.
28:27 Puis, de vivre toujours en avance sur ton temps, tu as toujours envie de revenir en arrière.
28:33 Tu vois, tu es là, tu es là.
28:34 Tu vois, je me rappelle quand j'ai fait mon premier match en pro.
28:37 Autant le match, c'était un régal, autant tout ce qui passait avant, c'est dur.
28:42 Parce que tu as des adultes, tu as eu des plus grands, tu n'es pas dans ton élément.
28:46 Et quand tu n'es pas dans ton élément, tu n'as qu'une envie, c'est de te ressourcer, tu vois,
28:51 avec ce que tu maîtrises et là où tu es bien, et dans ton cocon à toi.
28:54 Et moi, mon coco, il est là, il est toujours en permanence.
28:56 Il est dans ma jeunesse, il est toujours avant, il n'est pas dans ce qui se passe au-dessus.
29:00 On a toujours voulu me faire vivre au-dessus, tu vois, avec des gens plus âgés,
29:05 avec un décalage, alors que non, alors que moi, j'ai besoin, tu vois.
29:09 Si j'avais fait une carrière en évoluant qu'avec des jeunes, avec moins de taux,
29:13 au lieu de jouer à Cannes et la Nuit, je jouerais à 22 ans,
29:15 j'aurais fait une carrière exceptionnelle, sûrement.
29:17 D'ailleurs, Pagat, pour t'expliquer le fil de l'interview,
29:21 là, on va finir la partie 1, donc c'était ce qui est un peu plus sérieux et tout.
29:24 Il y a une partie 2 un peu plus ludique et rapide.
29:26 Mais avant ça, pour conclure, nous, on a l'habitude dans l'émission
29:29 de demander deux mots à un proche qui définisse l'invité.
29:32 Donc, on a eu ta femme au téléphone, qui te connaît très, très bien depuis très longtemps.
29:37 Elle ne s'est pas limitée à deux mots.
29:40 Est-ce que tu as des idées de certains mots qu'elle a pu dire sur toi ?
29:45 Il y en a exactement un, deux, trois, quatre, cinq.
29:51 Je sais qu'elle me connaît bien, donc elle sait que...
29:54 Après, le mot juste, je ne sais pas, moi.
29:56 Déjà, elle a dit "vrai" et "gentil" en bien comme en mal.
29:58 Ça peut être une qualité et une défaut.
30:00 Oui, parce que je ne sais pas dire non et je suis gentil, tu vois.
30:04 Et vraiment, des fois, je m'embarque dans des trucs.
30:08 Alors, je dis "putain, je ne sais pas comment elle sortira des fois".
30:11 Oui, j'avoue, ça c'est vrai.
30:13 C'est ce qu'elle a dit, elle a dit "ne sais pas dire non".
30:15 Entre parenthèses, gros défaut.
30:17 Oui, mais je sais, je sais.
30:19 "Gentil", oui, j'ai une âme.
30:20 "Gentil", je ne suis pas méchant.
30:21 Méchant, je ne sais pas l'être.
30:22 Donc, ça c'est "gentil" ou "je suis gentil".
30:24 Et puis, je peux rester toute une journée à écouter tout le monde, tu vois.
30:29 Oui, tu n'as pas hâte de blesser les gens.
30:32 C'est ce qu'elle dit, tu as un cœur immense aussi.
30:35 Oui, oui, oui.
30:36 Dans un petit corps, un cœur immense dans un petit corps.
30:39 "Gentil".
30:40 Non, ça c'est moi qui l'ai rajouté.
30:42 Ça m'étonne.
30:44 Non, non, cœur immense.
30:45 C'est vrai, ça se voit.
30:48 Moi, tu m'as directement dit oui pour l'interview alors qu'on ne se connaît pas.
30:51 Oui, oui, oui.
30:52 Non, mais parce qu'après, c'est au philique aussi.
30:54 Je veux dire, les choses aussi.
30:55 Mais bon, c'est vrai que bon, c'est...
30:56 Non, mais puis c'est important.
30:58 Je pense que c'est important aussi de tendre la main.
31:00 C'est important d'être présent.
31:02 C'est important que la personne, quand elle part, tu vois, elle se dise
31:05 "C'est bien, j'ai passé un beau moment" ou "Ça m'a apporté quelque chose".
31:08 Je ne sais pas, je trouve que c'est important.
31:09 "Ça va, tu passes un beau moment ?"
31:10 Oui, là, je m'éclate, franchement.
31:12 Oui, oui, oui, non, je m'éclate.
31:13 Moi, je déconne plus d'habitude.
31:15 C'est le but aussi.
31:17 Non, c'est exactement ça.
31:18 C'est bien de...
31:19 Voilà, c'est bien de resituer les choses.
31:22 Je vais juste dire le dernier mot,
31:23 parce que j'aimerais bien revenir dessus.
31:25 Elle a dit que tu n'étais pas toujours réaliste.
31:27 Moi.
31:28 Pourquoi ?
31:29 Parce que des fois, je vais m'emporter sur des choses,
31:32 je vais passer des choses,
31:34 et je ne suis pas dans la réalité.
31:36 Je ne suis pas dans la réalité, tu vois.
31:38 Des fois, comme je disais, je ne sais pas.
31:43 Je ne sais pas dans quel côté elle peut l'exprimer, ce réalistesse.
31:47 Mais tu te reconnais dans tout ce qu'elle a dit.
31:48 Oui, bien sûr, mais je comprends ce qu'elle veut dire.
31:50 Je comprends ce qu'elle veut dire, bien sûr.
31:51 Bien sûr, bien sûr.
31:52 Je ne suis pas très réaliste, non.
31:54 De toute façon, je ne suis pas dans le concret,
31:56 je ne suis pas dans le vrai, ça c'est vrai.
31:58 Je le sais, je ne suis pas…
32:00 Tu sais, et puis je ne sais pas.
32:02 Non, mais c'est compliqué.
32:03 Je suis quelqu'un de très compliqué pour elle,
32:05 et je suis quelqu'un de très compliqué aussi.
32:07 Pour les autres aussi.
32:08 C'est là aussi, tu vois,
32:10 elle aimerait des fois que ce soit un peu plus carré.
32:13 Structuré, oui.
32:14 En tout cas, Paga, c'est la fin de la première partie.
32:16 Ça va.
32:17 Merci beaucoup.
32:18 C'est la mi-temps.
32:19 C'était un plaisir.
32:20 Tu reviens quand tu veux.
32:21 Non, c'est toi qui vas revenir pour la deuxième partie.
32:22 Ça va, ok, tu reviens pour la deuxième partie.
32:24 C'est cette année aussi ?
32:25 C'est la même année, le même mois, le même jour, la même heure.
32:27 Ça va, ok.
32:28 C'est cool.
32:29 C'était bien.
32:30 [Musique]

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