Tous les dimanches, Aymeric Pourbaix et ses invités abordent l’actualité d’un point de vue spirituel et philosophique dans #EQE
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00:00 Bonjour à tous, bienvenue dans Enquête d'Esprit.
00:02 Le temps du carême a démarré depuis cinq jours pour les chrétiens du monde entier,
00:07 mercredi dernier, le 14 février.
00:09 C'était en effet le mercredi décembre qui marque le début de ce temps de pénitence,
00:14 mais c'était aussi la Saint-Valentin, une coïncidence intéressante.
00:17 Mais qui sait que Saint-Valentin, avant d'être le patron des amoureux,
00:21 est d'abord un martyr chrétien des premiers siècles.
00:23 Le carême serait-il donc une forme de martyr volontaire, de chrétien un peu masochiste ?
00:28 Quel est donc le sens de ses privations et de ses efforts ?
00:31 Y aurait-il en creux la demande d'un réveil spirituel ?
00:34 Et aussi surtout d'une forme de cœur à cœur avec Dieu ?
00:38 Disons le mot d'amour.
00:40 On rejoindrait ainsi notre Saint-Valentin.
00:43 Pour parler de tout cela, du sens du carême, bonjour Véronique Jacquier.
00:46 Bonjour Aymeric, bonjour à tous.
00:48 Nous sommes donc avec trois invités aujourd'hui.
00:50 Alors, dont Louis-Hervé Guigny qui vient d'écrire un ouvrage sur le combat spirituel,
00:55 père Max Huot de Longchamp, "Carême pour les cancres", c'est l'un de ses ouvrages,
01:00 et puis Marie Fournay, comédienne et metteur en scène d'une pièce qui évoque les sept péchés capitaux.
01:04 Et tout cela, c'est en partenariat avec l'hebdomadaire France Catholique.
01:08 Tout de suite, on passe aux infos religieuses de la semaine.
01:10 Somaya Labidi.
01:23 Bonjour Somaya, l'actu de la semaine, c'est aussi le carême et la messe du Mercredi des cendres.
01:29 Bonjour Aymeric, bonjour à tous.
01:31 Absolument, temps de pénitence et de jeûne à l'approche de la fête de Pâques
01:35 qui débute donc, comme vous l'avez dit, par la messe des cendres,
01:38 une célébration que nous avons suivie à Notre-Dame d'Auteuil à Paris.
01:42 Récit d'Éloi Rochebrune.
01:44 Amen, je vous le déclare.
01:47 Ce mercredi à Notre-Dame d'Auteuil, l'église est pleine pour la messe des cendres
01:50 qui marque l'entrée en carême.
01:53 Les prêtres inscrivent sur le front de chaque fidèle une croix de cendres,
01:56 un symbole fort qui rappelle aux chrétiens leur fragilité et leur pauvreté face au péché.
02:00 En fait, nous mettons en correspondance notre condition humaine
02:03 avec cette fragilité que les cendres représentent
02:07 et l'espérance que la croix du Christ, la résurrection du Christ, insuffle dans notre foi.
02:12 Que Dieu n'aise pas l'être humain uniquement dans le cycle de la nature,
02:17 mais qu'il veut lui donner un surplus de vie, si vous voulez,
02:20 ou lui faire participer à sa propre vie.
02:23 Pendant 40 jours, les fidèles choisissent des axes d'effort,
02:26 pas seulement un défi pour la volonté, mais aussi une démarche spirituelle.
02:30 Ça me réjouit de participer.
02:33 Pour moi, c'est une participation à la souffrance du Christ et ça fortifie ma foi.
02:38 Pour moi, c'est pour me libérer de choses qui m'encombrent
02:40 et m'ouvrir à quelque chose de plus grand que moi.
02:42 C'est un moment de conversion, de pénitence,
02:46 d'un renforcement dans l'amour de Dieu et de son prochain,
02:49 en se décentrant un peu de soi.
02:51 Une étape de purification pour les chrétiens avant Pâques,
02:54 leur plus grande fête, la résurrection de Jésus.
02:57 Le torchon brûle entre le Vatican et Israël
03:00 après les déclarations du cardinal Parolin.
03:03 Le prélat a qualifié le droit de défense d'Israël de « disproportionné »,
03:07 prenant l'exemple des 30 000 morts du côté des civils gazaouis,
03:10 une position qui a suscité l'indignation de l'État israélien
03:13 qu'il a qualifié de « déclaration déplorable ».
03:16 Le Saint-Siège a de son côté rappelé sa position officielle.
03:19 Il condamne l'attaque du Hamas et dénonce « toute manifestation d'antisémitisme ».
03:24 Le nouveau président argentin, Ravier Milei,
03:27 s'est entretenu avec le pape François en début de semaine.
03:30 Une rencontre cordiale après quelques tensions,
03:33 au lendemain de la canonisation de Mama Antula,
03:36 Première Sainte d'Argentine.
03:38 Clotilde Payet.
03:41 Un personnage néfaste, c'est en ces mots que le président argentin
03:44 avait qualifié le pape François pendant sa campagne politique.
03:47 Une relation qui avait mal commencé entre ces deux natifs de Buenos Aires.
03:51 Pour la première fois dimanche dernier, ils se sont serrés la main au Vatican.
03:55 Des tensions qui semblent avoir été oubliées.
04:00 Les deux hommes sont apparus tous au rire lors de la messe
04:03 pour la canonisation de la Première Sainte Argentine,
04:06 une religieuse et missionnaire du XVIIIe siècle.
04:10 - Nous venons aujourd'hui Maria Antonia.
04:13 Santa Maria Antonia de San José.
04:16 Pour qu'elle nous aide beaucoup.
04:19 Que le Seigneur nous bénisse tous.
04:22 - Le sujet d'une prochaine venue du pape François
04:25 dans son pays d'origine a été abordé.
04:27 Ravier Milei l'avait déjà invité à venir il y a un mois.
04:30 Le Saint-Père n'est pas retourné en Argentine depuis son élection en 2013.
04:34 - On reste au Vatican, où cette semaine ont été honorés
04:37 les mémoires de 21 martyrs coptes orthodoxes
04:40 assassinés par Daech en 2015.
04:43 Une célébration associée aux catholiques et orthodoxes
04:46 dans le cœur de la basilique Saint-Pierre
04:48 et qui s'inscrit dans l'occuménisme du sang
04:50 défini par le pape François.
04:52 C'est aussi un signe très fort de rapprochement
04:54 entre les catholiques et les coptes orthodoxes.
04:57 La crise agricole à présent qui se poursuit en Europe
05:01 et des agriculteurs italiens ont trouvé une solution.
05:04 Pour faire venir une vache au Vatican, objectif
05:07 obtenir un soutien spirituel de l'église catholique.
05:10 Éloi Rochebrune.
05:12 - Avec leur vache au Vatican, les agriculteurs italiens
05:15 sont venus demander le soutien du Saint-Père
05:17 alors que la crise se poursuit.
05:19 Au milieu des touristes, la bête n'a pas été choisie au hasard.
05:22 - C'est la fille d'Ercolina,
05:25 bénie par le pape Jean-Paul II en 1997.
05:29 Elle s'appelle Ercolina II.
05:31 Nous sommes venus ici pour recevoir la bénédiction.
05:35 - Les curieux peuvent goûter le lait.
05:38 En plus de leurs revendications économiques,
05:41 ces éleveurs italiens viennent trouver des ressources spirituelles
05:44 et prier l'angélus avec le pape.
05:47 - Nous sommes aussi venus ici pour prier,
05:50 pour voir si la prière peut nous donner des conseils
05:53 sur les prochaines étapes à suivre.
05:56 - Certains évêques soutiennent officiellement
05:58 ce mouvement européen.
06:00 Le Vatican n'a lui pas exprimé de position.
06:03 - Nouvelle étape dans la reconstruction de Notre-Dame.
06:06 La flèche est désormais visible au sommet des échafaudages.
06:09 Une structure du XIXe siècle ravagée par l'incendie de 2019.
06:13 La réouverture de la cathédrale est prévue le 8 décembre 2024.
06:17 Une date confirmée par l'Elysée.
06:20 On termine avec cette belle histoire,
06:22 celle d'une religieuse de Lorient et d'un chauffeur de taxi nantais.
06:25 Alors que la Monial avait raté son avion
06:28 lors d'un blocage de taxi, un généreux chauffeur s'est proposé
06:31 pour l'emmener à Toulouse.
06:33 Un service d'une importance capitale, car la Lorientaise
06:36 se rendait dans la ville rose pour donner un rein à son frère.
06:39 La course a été offerte par l'ensemble des grévistes.
06:42 Voilà pour l'essentiel de l'actualité de la semaine.
06:45 - Merci Soumaya Labidi.
06:47 Nous parlons du carême aujourd'hui dans Enquête d'Esprit.
06:50 Quel est le sens de ces efforts que les chrétiens du monde entier
06:53 s'infligent pendant 40 jours ?
06:56 On en parle avec Don Louis Hervé Guigny.
06:59 Bonjour, merci d'être avec nous.
07:01 Vous êtes l'assistant général du modérateur de la communauté
07:04 Saint-Martin et auteur d'un livre sur le combat spirituel,
07:07 Un chemin de liberté pour tous.
07:09 Le combat spirituel s'est publié chez MAM.
07:12 Vous nous direz en quelque sorte en quoi le carême peut être
07:15 considéré comme un temps privilégié pour ce combat.
07:18 Et puis avec nous le père Max Huot de Longchamp.
07:21 Bonjour mon père. - Bonjour.
07:23 - Vous êtes comédienne, metteur en scène,
07:26 vous avez une pièce à l'affiche dont vous êtes la co-auteur
07:29 pour la compagnie Rostand, L'Hôtel des Sept.
07:32 Il s'agit des sept péchés capitaux, des sept tentations
07:35 dont qui sont les plus graves.
07:38 Vous êtes aussi comédienne, metteur en scène,
07:41 vous avez une pièce à l'affiche dont vous êtes la co-auteur
07:44 pour la compagnie Rostand, L'Hôtel des Sept.
07:47 Il s'agit des sept péchés capitaux, des sept tentations
07:50 dont qui sont les plus graves.
07:53 C'est un des succès du Festival Hoff à Avignon 2023.
07:56 Vous nous en parlerez.
07:59 Et puis bien sûr Véronique, Véronique Jaquet,
08:02 qui nous parlera de l'histoire du carême depuis les premiers siècles.
08:05 Ce sera, vous le verrez, passionnant.
08:08 Ce jour du mercredi décembre qui marque l'entrée en carême,
08:11 c'était mercredi dernier, donc il y a cinq jours,
08:14 40 jours pour se préparer à Pâques.
08:17 C'est un jour de carême et qu'est-ce qu'il n'est pas justement ?
08:20 Puisque dans les médias, il est souvent d'usage de souhaiter
08:23 un bon ramadan aux musulmans quand les catholiques restent
08:26 la plupart du temps dans l'ombre au moment du carême.
08:29 Faut-il s'en désoler ? C'est en tout cas un signe des temps.
08:32 Mais quelle est la différence entre les deux ?
08:35 Nous avons posé la question à Annie Laurent,
08:38 écoutez, elle est spécialiste de l'islam.
08:41 Le ramadan n'a pas de finalité, si vous voulez,
08:44 c'est la volonté de Dieu, mais ça ne conduit pas à quelque chose
08:47 ou à un événement, surtout pas à un événement.
08:50 Ça fait partie des cinq piliers de l'islam.
08:52 Dans l'islam, l'essentiel c'est la soumission à la volonté de Dieu.
08:55 On ne connaît pas Dieu.
08:57 Je pense qu'on peut dire ça, que comme chrétien,
09:00 nous vivons dans la relation avec Dieu
09:03 et nous cherchons toujours à être plus proche de Dieu.
09:06 Et de ce point de vue, je crois qu'on peut dire que le carême
09:09 est un temps privilégié pour être plus proche de Dieu
09:12 qu'un temps normal, je dirais.
09:14 De manière à être vraiment près intérieurement,
09:16 l'intériorité est très importante pour nous.
09:18 Dans l'islam, l'apparence compte beaucoup.
09:20 Vous voyez, il faut obéir à Dieu.
09:22 Alors, une réaction dans Louis Hervé Guigny,
09:25 est-ce que si je résume les propos d'Annie Laurent,
09:27 le ramadan ce serait une fin en soi,
09:29 alors que le carême, ce n'est pas l'effort pour l'effort ?
09:32 Je veux dire d'abord que le carême, c'est un cadeau
09:35 que l'Église nous donne pour vivre un temps particulier de conversion.
09:39 C'est vrai que quand on pense au carême,
09:42 on pense d'abord aux efforts, à la pénitence,
09:44 mais c'est d'abord un temps où on va se rassembler,
09:47 on va revenir à l'essentiel de notre vie chrétienne
09:50 et effectivement, la finalité, c'est Pâques.
09:53 En fait, le temps du carême, c'est se préparer à célébrer
09:56 la Vigile Pascale, c'est-à-dire à célébrer le fait
09:58 que nous avons été sauvés par le Seigneur et dans le Seigneur.
10:01 Et donc, le carême, c'est ce temps de préparation.
10:03 Père Max Delonchamps, est-ce qu'on peut dire que le carême,
10:06 aussi, c'est une démarche qui est plus personnelle que communautaire,
10:09 contrairement peut-être à ce qui se passe pour le Ramadan ?
10:12 Je ne sais pas ce qui se passe pour le Ramadan,
10:15 mais à coup sûr, c'est une démarche, puisqu'il s'agit de retrouver Pâques
10:21 et en retrouvant Pâques, de retrouver le baptême,
10:23 où tout se joue dans la relation personnelle avec la Personne du Christ.
10:28 Et la liturgie du mercredi décembre, il y a trois reprises,
10:31 Jésus dit « Quand tu jeûnes, ferme ta porte »,
10:34 autrement dit, ça regarde ton père et toi-même.
10:36 « Quand tu pries, ferme ta porte. »
10:38 « Quand tu fais l'aumône, ferme ta porte. »
10:40 Donc, en effet, il s'agit bien d'abord d'une démarche spirituelle,
10:44 c'est-à-dire de restaurer et laisser grandir une relation avec Dieu, notre Père,
10:50 et à partir de là, nos autres relations seront restaurées.
10:54 Véronique Jaquet.
10:55 Mais comment comprendre cette idée de fermer la porte ?
10:57 Est-ce que ça veut dire un appel à l'intériorité,
11:00 ou est-ce que ça veut dire, au contraire, que ça doit rester quelque part secret,
11:03 donc dans une relation personnelle avec Dieu ?
11:06 Pourquoi est-ce qu'on n'a pas le droit de l'afficher, finalement, qu'on fait carême ?
11:08 Alors, ce n'est pas une question de droit, pas avoir le droit.
11:11 L'Évangile continue, Jésus dit « Ton père est là dans le secret ».
11:15 Et lui, il sait.
11:17 Autrement dit, il ne sait pas contre je ne sais pas quoi,
11:19 où il ne faut pas se montrer, des fois ça se voit, des fois ça ne se voit pas.
11:23 Mais le point décisif, c'est « Ton père est là,
11:30 et maintenant tu vas prendre le temps de t'occuper, de mener vie commune avec lui,
11:36 puisque c'est ça le sens du baptême, c'est ce qui a commencé pour toi ton baptême,
11:40 c'est ce qui va commencer pour ceux qui seront baptisés normalement dans l'Aveiller Pascale ».
11:44 Oui, je pense qu'il faut bien comprendre, en fait, que si Jésus dit ça,
11:49 dans l'Évangile, c'est pour nous inviter, d'une certaine manière,
11:53 à une démarche qui n'est pas hypocrite, ce n'est pas pour les autres qu'on le fait,
11:55 mais c'est avec les autres qu'on va le faire.
11:57 Donc il y a le côté « Cache-toi », c'est-à-dire ne le fais pas pour les autres,
12:00 donc ne sois pas hypocrite, Jésus le dit, mais ça n'empêche que c'est quand même
12:03 une démarche proprement communautaire.
12:05 D'ailleurs, dans toutes les églises, les vendredis, il y a des chemins de croix,
12:08 le vendredi sept, il y a des chemins de croix qui est une dimension publique.
12:11 Donc il y a quand même un caractère public à ce temps de carême,
12:14 pour aussi montrer que la foi, elle a une dimension collective.
12:18 L'Église, c'est toujours « Je crois, nous croyons ».
12:20 Donc il faut toujours tenir les deux, la dimension personnelle et communautaire en même temps.
12:24 - Vous l'avez tourné, comment vous le vivez ? Parce que vous êtes donc metteur en scène,
12:27 on parlera de votre pièce tout à l'heure, mais vous êtes aussi catholique
12:30 et vous l'assumez pleinement, y compris dans votre métier.
12:33 Cette dimension, justement, publique du carême, on voit que,
12:37 notamment dans le monde anglo-saxon, ça revient, cette idée de se prendre en photo
12:42 avec la croix du mercredi décembre sur le front, y compris à la télévision, etc.
12:48 On a un article du Catholic News Agency qui montre cela récemment.
12:54 Et donc, vous, comment est-ce que vous l'avez vécu ce mercredi décembre ?
12:58 Et comment vous vivez de manière générale le carême ?
13:00 Est-ce qu'effectivement, c'est quelque chose, une dimension que vous vivez
13:03 plutôt de manière secrète, ou vous n'hésitez pas à l'afficher ?
13:07 - Alors moi, le carême, c'est vraiment un moment où on essaie de se rapprocher de Dieu,
13:11 un moment où on va faire des efforts par rapport à nos péchés,
13:15 et où on se rend compte qu'on n'est pas ancré dans nos mauvaises habitudes,
13:20 qu'on peut s'en libérer.
13:22 Et c'est justement le cœur du message de la pièce, de se dire qu'on peut surmonter nos péchés,
13:27 et ce, grâce à l'amour qu'on a pour les autres et pour Dieu.
13:32 Et c'est de cette façon aussi qu'on voit que, quand on en parle avec les autres,
13:38 quand on discute des efforts qu'on fait au quotidien,
13:42 que c'est aussi une notion qui peut parler à tout le monde,
13:45 puisqu'on se rend compte qu'on a tous été plus ou moins orgueilleux, colérique ou gourmand.
13:50 - Véronique Jacquet ?
13:51 - Dans Louis Hervé Guinie, qu'est-ce que c'est le péché, et qu'est-ce que ça veut dire faire pénitence ?
13:56 - Alors, avant de dire qu'est-ce que le péché, j'ai envie de dire qu'est-ce que la liberté et la grâce.
14:00 C'est-à-dire que l'homme a été créé à l'image de Dieu, pour le bien, et ça, ça reste.
14:04 Et que oui, d'une certaine manière, le péché ne définit pas notre nature.
14:09 Il appartient ensuite à notre existence.
14:11 Le péché, c'est de manquer sa cible.
14:13 En hébreu, on dit "c'est", c'est-à-dire on rate l'objectif.
14:15 Et donc, en fait, on s'est détourné.
14:17 Mais il faut rappeler qu'il y a fondamentalement un désir bon en nous, vers le bien,
14:21 et le temps du carême, c'est Saint-Paul qui le dit,
14:23 "le bien que je voudrais faire, je ne le fais pas, et le mal que je ne voudrais pas faire, je le fais".
14:27 Et donc, le temps du carême, c'est-à-dire, bon, je me remets dans l'axe,
14:30 et donc, effectivement, je peux voir positivement comme un déploiement de la vie de la grâce en moi,
14:34 et pour cela, il va falloir que je me batte.
14:36 C'est-à-dire, effectivement, que je lutte contre ce qui en moi était vicié, détourné de l'objectif fondamental.
14:41 Donc, c'est important de comprendre que le péché, ce n'est pas d'abord le fait de désobéir à un loi,
14:46 le péché, c'est rater sa cible, c'est-à-dire ne pas être ou faire ce que je dois devenir.
14:52 - Ce n'est pas d'abord une morale, c'est un peu ça que...
14:54 - Ce n'est pas d'abord une morale. La morale va venir exprimer quelque chose,
14:57 parce qu'on l'a trop souvent vu, on est dans une morale du bonheur,
15:01 une morale du salut, et pas dans une morale de l'obligation.
15:05 Et donc, ça, c'est important de comprendre que c'est d'abord quelque chose de positif,
15:08 dont on doit se libérer. Donc, le carême, c'est un temps de libération, de délivrance, de guérison.
15:13 Effectivement, en se battant, et effectivement, contre les péchés capitaux en nous, contre les vices.
15:19 - Alors, on va voir comment, mais juste avant, je voudrais qu'on regarde quand même ce qu'est le béabat
15:23 de ce que l'Église demande pour ce temps du carême, qui, je le rappelle, dure 40 jours.
15:29 Il y a, en fait, ce sont des prescriptions qui sont assez légères, somme toute.
15:33 Un jeûne obligatoire, c'est-à-dire qu'on se passe d'un repas le mercredi décembre et le vendredi saint,
15:39 donc deux jours sur 40, et puis on s'abstient aussi de viande les vendredis du carême.
15:45 Père Max de Longchamp, finalement, pourquoi est-ce que ces demandes, donc obligatoires de l'Église,
15:51 sont extrêmement minimes ou légères ? Est-ce que ça veut dire que l'Église tient compte de la faiblesse humaine,
15:57 ne demande pas des efforts surhumains ?
15:59 Non, ça veut dire tout simplement qu'il s'agit de pratiques symboliques, mais qui symbolisent quelque chose
16:05 qui est beaucoup, beaucoup plus lourd, même si ça ne repose pas sur nos forces, parce qu'on a dit pour faire le bien,
16:15 moins faire le mal, pas de péché, etc. Mais tout ça parce qu'en amont, nous sommes faits pour celui dont Jésus
16:22 dit qu'il est le seul bon pour Dieu notre Père, et donc c'est pour permettre cette relation.
16:28 Alors, les observances rituelles, qui en plus, si la santé, etc., elles sont vraiment symboliques.
16:34 Mais ça ne veut pas dire que le carême doit être symbolique, ça veut dire que c'est exactement comme
16:38 si vous allez à la messe le dimanche, c'est pas pour que le reste de la semaine vous soyez païen,
16:42 si à ces pratiques-là, c'est pour indiquer cette volonté de retrouver le fondement même de ce qu'il fait le chrétien,
16:50 cette relation vivante à Dieu notre Père, et là, les exigences sont infinies.
16:56 Et au-delà de quelques pratiques rituelles qui les indiquent, parce qu'en effet, comme vous étiez très justement
17:02 tout à l'heure, nous sommes, je dirais, on n'est pas chrétien dans la clandestinité, au-delà, il y a ce remodelage
17:13 par la grâce de Dieu, c'est-à-dire quand nous décidons de vivre pour Dieu, Lui, à ce moment-là, vient vivre en nous.
17:20 C'est ça, l'acte de foi. Et à ce moment-là, c'est vraiment toute notre vie qui est remodelée par le bon Dieu
17:26 dans le temps du carême.
17:27 Véronique Jacquet.
17:28 Alors, il y a les trois piliers du carême, prière, partage, ça on comprend, la charité, la prière, le partage,
17:35 et on parle de jeûne. Comment faire le distinguo avec ce jeûne qui est très à la mode, le jeûne thérapeutique,
17:41 le fait de se purifier, enfin voilà, que dit l'Église là-dessus, et comment ça nous aide à aller vers Dieu ?
17:47 Alors moi je veux bien parler du jeûne, mais avant je veux reparler d'une chose.
17:50 Parce que quand on parle du combat, il faut comprendre que le combat, Jésus utilise l'image du combat spirituel,
17:57 Saint Paul l'utilise. Pourquoi ? Parce qu'il nous dit que si on prend le langage militaire, avant de prendre des moyens,
18:03 c'est ce qu'on appelle la tactique, il faut avoir une vision, une stratégie.
18:06 Donc c'est quand même d'abord ça, c'est-à-dire c'est quoi la finalité du carême ? La finalité du carême c'est se délivrer de ce qui nous alourdit,
18:13 donc du péché qui nous détourne de notre vocation fondamentale. J'insiste là-dessus parce que le jeûne va prendre du sens
18:18 que si on y regarde la finalité. L'autre jour, le mercredi d'histoire, je disais en prêchant, mais on n'a rien à faire qu'on ne mange pas de chocolat,
18:25 de chocolat pendant le carême, on n'a rien à faire. Si ce n'est que quelle est la place que prend le chocolat dans ma vie ?
18:31 Mais donc avant c'est de se dire de quoi je... Qu'est-ce qui m'alourdit ? Qu'est-ce qui m'empêche de prier ? Qu'est-ce qui m'empêche d'être tourné vers les autres ?
18:37 Et donc la vraie finalité c'est de se dire mais en fait, qu'est-ce qui me pèse dans ma vie aujourd'hui ? Qu'est-ce qui m'alourdit ?
18:43 Qu'est-ce qui m'empêche d'être fils de Dieu ? C'est-à-dire de me déployer dans la grâce de mon baptême. C'est ça qui est fondamental.
18:50 Et ensuite, je verrai les moyens que je vais prendre, parce que trop souvent les gens quand ils pensent carême, ils pensent tout de suite
18:55 "Qu'est-ce que je vais faire ?" Non, avant de "Qu'est-ce que je vais faire ?" c'est "Qu'est-ce que je veux vivre dans ce carême ?"
19:01 C'est quoi l'objectif ? C'est quoi l'objectif ? C'est la vision, c'est la stratégie, c'est le plan.
19:06 Marie Fournay, juste un mot avant la pub. Vous, sans trahir de secret bien sûr, mais ces prescriptions de l'Église, si légère soit-elle, elles sont importantes pour vous ? Vous les appliquez ?
19:17 Oui, ces prescriptions sont très importantes pour moi. Ce qui me semble surtout important, c'est ce que vous disiez, c'est ce moment de remise en question.
19:26 C'est essayer d'identifier ce qu'est un péché, qu'est-ce que je fais mal au quotidien.
19:33 Puisque souvent aussi, surtout dans cette société où on prône le relativisme à chacun sa vérité, parfois on ne se rend même pas compte de ce qu'est un péché.
19:43 Et une des forces de cette pièce, c'est de montrer grâce à des scènes de la vie.
19:49 L'Hôtel des Sept. L'Hôtel des Sept, donc qui est une pièce que j'ai mise en scène, co-écrite avec Marie-Gabrielle Pellissier du Rosas et dans laquelle je joue,
19:56 qui est une création originale autour des sept péchés capitaux. On vous en reparlait tout à l'heure.
19:59 Oui, on montre vraiment des scènes de la vie quotidienne auxquelles on peut facilement s'identifier.
20:04 Et justement, des personnes non croyantes, parfois en sortent et se disent "ah oui, c'est effectivement un péché".
20:10 Et c'est ce qui permet de les interroger sur leur propre vie intérieure.
20:14 Voilà, et cela, c'est peut-être justement le combat à mener pendant le carême. En quoi est-ce que le carême est un combat spirituel ?
20:22 Vous restez avec nous, on en parle tout de suite après la pub.
20:25 Nous sommes de retour dans Enquête d'Esprit et nous parlons du carême. En quoi est-il un combat spirituel ?
20:31 Un combat entre le bien et le mal qui commence peut-être en nous-mêmes.
20:35 On en parle avec nos invités, dont Louis Hervé Guigny. Il est l'auteur d'un ouvrage récent sur le combat spirituel.
20:41 Un chemin de liberté pour tous, Le Combat Spirituel, publié chez MAM, avec le père Max Huot de Longchamp,
20:47 auteur d'un petit livret justement pour suivre le carême au jour le jour. C'est très pédagogique et très profond.
20:52 Le carême pour les cancres à l'école des Saints, aux éditions Centre Saint-Jean de la Croix.
20:56 Et puis Marie Fournet, qui est comédienne, metteur en scène, qui nous parlera d'une pièce dont elle est la co-auteure.
21:01 Ça s'appelle L'Hôtel des Sept et ça concerne les sept péchés capitaux.
21:04 Et puis Véronique Jacquier, bien sûr, est avec nous et elle nous parlera de l'histoire du carême dans les premiers siècles de l'Église.
21:11 Alors, ce carême, il dure 40 jours jusqu'à Pâques. Ça fait mémoire aussi, on va en parler, des 40 jours du peuple hébreu dans le désert,
21:20 après leur libération d'Égypte et avant d'arriver à la Terre Promise.
21:23 Ce sont aussi les 40 jours que Jésus a passé dans le désert où il a été tenté par le diable.
21:29 Et à cette occasion, l'Église demande notamment de jeûner deux jours. Deux jours sur 40, ce n'est pas beaucoup,
21:35 mais néanmoins c'est important. Justement, dans Louis Hervé Guinie, quel est le sens de ce jeûne ?
21:40 Parce qu'aujourd'hui, le jeûne est à la mode. On fait des semaines de jeûne entière, on fait des jeûnes thérapeutiques.
21:45 Est-ce que c'est vraiment le même sens ?
21:47 Alors, je ne sais pas si c'est le même sens. D'ailleurs, il ne faut pas minimiser le fait que même des gens, s'ils ne savent pas pourquoi ils le font,
21:52 il y a peut-être une démarche tout simplement de se retrouver, de se réconcilier avec son corps, son âme, son esprit.
21:57 Donc le jeûne, c'est important parce que, en fait, c'est une manière de nous alléger de nos sécurités,
22:03 parce que nous avons un rapport tous à la nourriture, parce qu'on parle de jeûne, effectivement, de nourriture,
22:07 mais on pourrait parler du jeûne des réseaux sociaux, du jeûne...
22:10 C'est-à-dire d'un certain nombre de pratiques que nous avons dans notre vie, qui fait que, quelquefois,
22:13 dans le chemin de la liberté, dans le chemin de la vie de l'esprit en nous, nos peurs, nos craintes, nos blessures,
22:18 fait qu'on se raccroche à des sécurités.
22:20 Et même Jésus, qui était élu sans péché, d'ailleurs on l'a célébré aujourd'hui, dans l'évangile,
22:26 où Jésus part au désert jeûner 40 jours, c'est-à-dire, lui, qui n'avait pas besoin de jeûner, a vécu ce jeûne,
22:32 comme pour vivre une situation de vulnérabilité, parce que le jeûne nous met dans une situation de vulnérabilité,
22:37 donc de pauvreté, comme pour nous ramener à l'essentiel.
22:40 Et c'est là où l'Église nous donne ce temps, et en nous y invitant clairement, en disant "Vas-y, essaye, mon fils, ma fille,
22:48 de te libérer de certaines choses, quelquefois c'est vraiment des mauvaises choses dont on se libère,
22:54 quelquefois c'est des choses légitimes, manger est quelque chose de bon,
22:57 mais le fait de s'en priver pendant un certain temps va nous aider à rechercher une nourriture plus grande".
23:05 D'ailleurs Jésus le dit, une nourriture plus grande qui est sa parole, qui est la parole de Dieu.
23:08 Et on voit bien, d'ailleurs, que quand on fait une expérience de marche en montagne,
23:12 par exemple la valeur d'un verre d'eau prend plus de sens.
23:16 Donc c'est ça aussi, ce temps de...
23:18 - S'en priver de quelque chose, ça prend plus de valeur, c'est ça ?
23:20 - Ça prend plus de valeur et ça nous permet de remettre les choses en place,
23:23 de remettre ce qui est essentiel à sa place.
23:25 C'est un temps de remise en ordre de nos vies en fait, le carrément.
23:28 - Père Max Delonchamp, vous confirmez ?
23:30 - Alors, je confirme, il s'agit de retrouver l'équilibre,
23:34 on ne retrouve l'équilibre que par des corrections.
23:38 Mais attention, le vocabulaire du combat, le vocabulaire du péché, du bien, du mal,
23:43 ne doit pas nous faire oublier que quand saint Paul parle par exemple du combat spirituel,
23:49 c'est toujours en vue de quoi ?
23:51 De cette vie commune avec Dieu, afin d'être trouvé,
23:55 ressuscité au moment de l'achèvement de l'histoire du salut.
24:00 Alors, je dis ça parce que ce serait triste s'il s'agissait d'une amélioration personnelle.
24:05 - C'est pas l'effort pour l'effort, le volontarisme ?
24:07 - Aucune performance dans la vie chrétienne.
24:09 La vie chrétienne, c'est pour les petits-enfants nous, dit Jésus,
24:11 pour les gens qui ne sont pas capables.
24:13 Et vous voyez bien, dans l'Évangile, il va vers ceux qui ne peuvent pas.
24:16 Bon, et donc notre effort, oui, notre volonté devient capable,
24:23 avec la grâce de Dieu, de retrouver ces équilibres.
24:25 Mais ce qui dépend de nous, et ce qui forme l'acte de foi,
24:29 qui fait de nous un chrétien, c'est l'adhésion inconditionnelle,
24:33 et donc par amour, à la personne même de Jésus,
24:36 et en Jésus, à Dieu notre Père.
24:39 Voilà, pour que, il ne s'agit pas de 40 jours de morale,
24:42 il s'agit de 40 jours de cultiver ce qu'il y a de plus profond en nous,
24:47 cette vocation, cet appel de Dieu, qui veut mener vie commune avec nous.
24:52 - Oui. - Véronique Jacquier.
24:54 - Concrètement, le Christ au désert a été tenté par le diable,
24:59 et il a résisté aux sirènes de l'orgueil, des possessions matérielles,
25:02 ou encore du pouvoir mondain.
25:04 Et alors nous, pour qu'on comprenne bien, contre quoi devons-nous lutter ?
25:09 Parce que, on est dans une ère d'un grand relativisme en termes de valeur.
25:15 Donc, voilà, donnez-nous des exemples concrets.
25:18 Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui, il est urgent de lutter,
25:21 pour s'alléger et retrouver une vie en Dieu ?
25:23 - Par exemple... - Il y a évidemment l'orgueil,
25:25 les tentations du monde, les mondanités, mais encore, dans notre quotidien.
25:28 - Dans notre quotidien, par exemple, j'aborde dans mon livre un chapitre
25:31 qui s'appelle "Le combat des pensées".
25:32 Je m'aperçois que beaucoup de gens vivent dans leur pensée,
25:35 dans ce que j'appelle le mental.
25:36 Parce qu'il y a une espèce de fuite du réel,
25:38 une fuite de la vie parce qu'elle est difficile à certains moments.
25:41 Donc beaucoup de gens partent dans leur pensée et vivent là-haut.
25:44 Et puis ils l'alimentent par les réseaux sociaux, par un certain nombre de choses.
25:47 Donc, par exemple, concrètement, c'est dire,
25:49 il faut que je revienne à quelque chose de beaucoup plus simple dans ma vie,
25:52 de concret, c'est-à-dire au réel de la vie.
25:55 Parce qu'en fait, je m'aperçois aujourd'hui que beaucoup de gens fuient leur vie
25:58 parce qu'ils ont souffert, parce qu'ils ne veulent plus souffrir.
26:01 Donc chacun trouve des moyens de se sécuriser.
26:04 Et donc cette libération auquel le Seigneur nous appelle,
26:06 c'est justement, par exemple, dans le cadre du combat des pensées,
26:08 de se dire, bon allez, de ne pas s'associer à ses pensées, mais de s'en libérer.
26:12 Et là, par exemple, l'écoute de la parole de Dieu va nous aider, justement,
26:15 à reprendre, à nous ouvrir des portes qui étaient fermées.
26:18 Vous voyez, je vais vous donner un deuxième exemple.
26:21 La jalousie-comparaison.
26:23 Beaucoup de gens se comparent, beaucoup de gens sont jaloux.
26:26 Voilà, c'est pas grave, c'est un fait, on n'en va pas...
26:28 Mais ça peut alourdir la vie des gens et les empêcher d'être heureux.
26:32 Parce qu'ils ne voient plus ce qu'ils ont, leur relation à Dieu,
26:34 ils se sont coupés de leur relation à Dieu parce qu'ils sont tellement concentrés sur ça,
26:38 que ce péché, le péché capital, justement, qui vient les alourdir.
26:42 Et bien, se dire, bon, pourquoi je suis jaloux ?
26:46 Pourquoi je me compare ?
26:47 De quoi il faut que je me sépare pour arrêter de nourrir, d'alimenter cette jalousie-comparaison,
26:51 va redonner du souffle.
26:53 Et va faire que je vais rétablir des relations, par exemple, que j'avais coupées
26:56 parce que j'étais rongé par un mal intérieur.
26:59 Alors, justement, on va s'intéresser à la pièce que vous avez réalisée,
27:04 on peut dire, mise en scène plus exactement,
27:06 Marie Fournay, ça s'appelle "L'autel des sept" et ce sont les sept péchés capitaux.
27:10 Alors, on rappellera juste après, quels sont ces sept péchés capitaux, quand même,
27:14 c'est important pour ceux qui nous écoutent.
27:16 Mais regardez d'abord, Elouan Rochebrune s'est rendu à une des représentations.
27:20 À l'autel des sept, l'accueil est sombre, nous sommes aux portes de l'enfer.
27:32 Au rythme de "Sept cénettes", la comédie confronte le spectateur à son propre péché,
27:40 une sensibilisation aux sept péchés capitaux, comme la paresse,
27:45 mise en scène dans un cadre professionnel.
27:47 Je dirais, le message que je souhaiterais transmettre, c'est l'importance de se rendre compte,
28:03 finalement, qu'on peut tomber dans le péché facilement,
28:05 que ce n'est pas grave une finalité en soi,
28:08 mais que c'est bien de le remarquer et peut-être de faire des efforts au quotidien.
28:12 C'est-à-dire que toutes nos scènes commencent par une émotion,
28:15 on voit nos personnages qui admirent beaucoup leurs amis,
28:17 ou bien qui sont très énervés par quelque chose,
28:19 on voit ensuite le moment où il y a une forme de persistance volontaire dans cette émotion,
28:22 et on essaye à chaque fois de montrer aussi comment est-ce qu'on peut rebrousser chemin,
28:25 comment on peut essayer de revenir en arrière.
28:28 Autre péché, la luxure, tournée en ridicule dans cette scène d'orgie.
28:35 L'homme au milieu de ses femmes plonge peu à peu jusqu'à sombrer dans une profonde solitude.
28:40 Corps, objet, désir vain, corps, objet, désir vain, désir corps, objet.
28:46 C'est quelque chose d'abstrait mais qui, chez l'humain, se caractérise plus par,
28:50 en tout cas pour moi, c'est comme ça que je le vois, par l'émotion.
28:52 Qui lui donne envie, une envie charnelle, de toutes les filles qu'il voit autour de lui.
28:58 Mais c'est surtout parce que c'est celui qui me fait un peu plus rigoler quand je le joue,
29:03 parce que c'est très grandiloquent en fait.
29:06 L'Hôtel des Sept est joué actuellement à Paris au Théâtre Saint-Michel.
29:10 En plein carême, c'est l'occasion de faire un travail sur soi,
29:13 car malheureusement, vous pourriez peut-être vous reconnaître dans l'un de ces sept péchés capitaux.
29:18 On va poser la question à nos invités. C'est joué jusqu'au mois de mai.
29:27 Marie Fournay, c'est quand même audacieux de faire une pièce de théâtre aujourd'hui en parlant du péché.
29:33 Ce n'est quand même pas banal.
29:36 En effet, c'était un pari pour moi, notamment lorsqu'on l'a emmenée à Avignon,
29:41 puisque c'est un lieu disparaître.
29:43 Elle a été remarquée cette pièce.
29:45 C'est ça, tout à fait. Bigaré, c'est une notion quand même religieuse,
29:49 dans un univers avec beaucoup de spectateurs qui sont non-croyants.
29:53 Ce qui était vraiment touchant, c'est de voir à quel point ils arrivaient à s'identifier.
29:57 Ils nous expliquaient qu'on pouvait voir de façon très concrète les conséquences du péché,
30:03 que sont notamment la haine, le mensonge, le désespoir, la solitude,
30:08 et comment on pouvait s'en défaire, notamment grâce à l'amour des autres, à l'amour de Dieu,
30:14 et aussi au pardon.
30:16 On a des scènes qui consacrent des moments de silence,
30:21 qui permettent la remise en question, et des moments où on se pardonne les uns les autres.
30:25 Les réactions sont plutôt favorables, positives ?
30:28 Oui, les réactions sont très favorables.
30:30 C'est aussi une comédie, donc on donne une grande place à l'humour,
30:36 et on montre aussi comment l'humour peut corriger les mœurs.
30:39 C'est le fameux "Questigate ridendo mores" de Molière,
30:42 avec l'idée qu'en riant de nos péchés, on pourra peut-être les surmonter.
30:46 Il y a une question qui se pose dans "Lui a vegini",
30:48 c'est aussi quelle différence il faut-il faire entre, d'un côté, la tentation,
30:53 les blessures qui peuvent être psychologiques, et le péché,
30:56 parce qu'aujourd'hui, tout cela, dans l'esprit de nos contemporains, c'est un peu confus.
31:01 De fait, c'est vrai que c'est important de distinguer,
31:04 et c'est là où l'analyse de ce que nous sommes en train de vivre,
31:06 entre par exemple une épreuve et une tentation.
31:09 Par exemple, quelqu'un m'a fait du mal, donc je suis blessé.
31:13 C'est une épreuve, c'est un fait objectif.
31:15 Et après, c'est comment je vais traverser cette épreuve ?
31:17 L'enjeu va être là, de ma liberté, c'est comment je vais traverser cette épreuve.
31:20 Et tout l'objectif, c'est si je suis dans l'ordre de la vertu,
31:24 justement, j'ai acquis une certaine habitude de pardonner, d'être dans la justice,
31:28 j'ai plus de disposition, de force en moi, pour justement traverser cette épreuve
31:34 et ne pas me laisser ronger par cette haine qui peut s'installer, ce désespoir.
31:38 Je vais prendre un autre exemple aussi, celui de la maladie.
31:42 La maladie, c'est quelque chose de difficile,
31:44 et on voit bien que dans la vie, il y a des gens qui traversent les maladies,
31:47 avec le Seigneur, dans le Seigneur, et d'autres qui s'arrêtent
31:51 ou qui se laissent enfermer dans le désespoir.
31:54 La différence, c'est que Jésus le montre, lui, il a été éprouvé au désert,
31:58 comme on le fait aujourd'hui, et il n'est pas rentré dans la tentation.
32:01 Et puis, autre chose, c'est important de distinguer des blessures psychologiques,
32:05 physiques, du péché.
32:08 Je vois une Thérèse de l'Enfant-Jésus, par exemple,
32:10 elle avait une certaine blessure, elle manquait de confiance en elle,
32:15 elle avait sans doute un certain fond de désespérance,
32:19 ce qui ne l'a pas empêché d'avoir une espérance extraordinaire.
32:22 Mais elle a su le traverser et laisser la grâce agir en elle.
32:25 - Véronique Jacquet ?
32:27 - Rappelons d'abord ce que sont les sept péchés capitaux,
32:29 pour ceux qui nous regardent.
32:31 L'envie, la paresse, la gourmandise, l'avarice, la luxure, l'orgueil et la colère.
32:36 Et alors, sur ce point, la sainteté, ce n'est pas quelque chose de très porteur
32:40 dans le monde dans lequel nous vivons.
32:42 On est tous appelés à la sainteté, mais finalement,
32:44 tout un chacun a-t-il véritablement envie d'être saint ?
32:47 Que faut-il faire, justement, pour lutter contre les tentations
32:49 et traverser les épreuves ?
32:51 - Père Max Delonchamps ?
32:53 - La sainteté est un cadeau, ça ne demande aucun effort.
32:57 - Ah bon, on n'est pas d'accord !
32:59 - L'interprète n'est pas d'accord !
33:01 - Quand je baptise un petit enfant, je dis à la maman,
33:05 "Ne lâchez pas, c'est Jésus-Christ."
33:07 Ce n'est pas une façon de parler.
33:09 Il faut bien comprendre que dans la vie chrétienne, on reçoit tout.
33:13 Alors, il n'y a plus besoin d'effort.
33:15 Formidable !
33:17 L'effort, encore une fois, c'est un effort d'amour.
33:20 Et les amoureux savent bien que le seul effort,
33:24 c'est de ne pas aimer encore assez.
33:26 Alors, je dis, ça, c'est très important.
33:28 Parce qu'on parle du péché comme si,
33:30 "Qu'est-ce qu'il vient faire dans notre vie ?"
33:32 Le péché est une conséquence de quelque chose de beaucoup plus fondamental.
33:36 Saint Augustin nous dit,
33:38 "Ève ne serait pas intéressée à la tentation,
33:41 si préalablement, elle ne s'était pas détournée
33:44 de cette embrassade dans laquelle elle est venue à la vie."
33:48 Vous voyez, au livre de la Genèse,
33:50 nous naissons dans la réciprocité avec Dieu.
33:52 - Finalement, le péché, c'est se détourner de Dieu.
33:54 C'est ce que vous dites.
33:56 - Non, je n'ai pas dit ça.
33:58 Le péché, beaucoup plus radicalement,
34:01 avant, le péché est une mauvaise solution,
34:03 une fois qu'on s'est séparé de Dieu.
34:05 Et c'est là qu'est notre liberté.
34:07 Et c'est pour ça aussi qu'il ne faut pas envisager
34:09 le rétablissement dans le bonheur de l'union à Dieu.
34:12 Il ne faut pas l'envisager comme quelque chose qu'on conquiert,
34:14 mais comme quelque chose qu'on reçoit.
34:16 Et ce qui fait que tout l'effort d'une vie chrétienne,
34:19 Saint Paul le dit, c'est pas la loi,
34:21 c'est la foi qui vous sauve,
34:23 est de retrouver, et c'est prioritaire,
34:25 même dans nos pratiques de carême,
34:28 retrouver l'union à Dieu,
34:30 donc dans le recueillement, la prière avant tout,
34:32 non pas la prière suppliante,
34:34 mais la prière recevante,
34:36 de retrouver cette position dans laquelle était Ève,
34:39 avant de s'intéresser ensuite.
34:41 Parce que quand on est devenu malheureux,
34:43 on compense comme on peut,
34:45 alors c'est là qu'on se met à tomber dans les sept péchés.
34:47 Mais il y a quelque chose de beaucoup plus fondamental,
34:50 nous dit Saint Augustin,
34:52 et c'est essentiel pour comprendre
34:54 que le point d'équilibre de la vie chrétienne,
34:56 c'est la foi, c'est-à-dire l'abandon amoureux,
34:59 et ce n'est pas la performance
35:01 dont on serait éventuellement récompensé ensuite.
35:03 Vous avez une très belle formule,
35:05 parce que vous allez chercher dans les auteurs spirituels
35:08 les plus profonds dans votre petit livret,
35:10 "Le carême pour les camps",
35:11 vous parlez de jeûne d'amour.
35:13 Et ça c'est très intéressant, je trouve.
35:15 Dans Louis Hervé Guinie,
35:17 à quoi cela sert-il de faire des efforts
35:19 si c'est la foi qui sauve, pendant le carême ?
35:22 Je suis d'accord avec le père sur l'insistance,
35:24 sur la finalité, et sur le fait que le salut
35:26 est un don de Dieu,
35:28 et que la foi nous fait recevoir ce don.
35:30 Mais j'instrigue, parce que c'est une ligne de crête.
35:32 Bien sûr qu'on ne va pas tomber dans le pélagianisme,
35:34 d'ailleurs le pape François dénonce un pélagianisme au sens des forces.
35:36 Le pélagianisme, en deux mots, c'est...
35:38 Je vais me sauver par mes propres forces,
35:40 à force de faire des efforts avec ma volonté.
35:42 Mais quand même, je préciserai,
35:44 parce que oui, c'est un don de Dieu avec la grâce,
35:46 mais il y a quand même et la liberté,
35:48 c'est la grâce et la liberté,
35:50 va passer par des efforts, des exercices,
35:52 bien sûr qui sont subordonnés
35:54 au don de la grâce, mais c'est vrai que
35:56 quelquefois, ou on insiste trop sur le fait
35:58 que c'est un abandon, c'est un don de Dieu,
36:00 donc on se laisse faire, ou on est dans le volontarisme pélagianisme,
36:02 donc c'est vrai que la ligne de crête
36:04 à trouver, et c'est vrai que je vois bien que pour les gens,
36:06 ils sont un peu perdus, parce que quelquefois on insiste
36:08 beaucoup sur la finalité, sur
36:10 c'est un don de Dieu, c'est un salut, et puis d'autres fois
36:12 on insiste trop sur les efforts à faire.
36:14 Donc c'est vrai que la ligne de crête,
36:16 c'est la notion même de vertu,
36:18 c'est une ligne de crête entre l'excès et l'effondrement,
36:20 c'est la notion entre la grâce et la liberté.
36:22 Mais c'est pour ça d'ailleurs que quand même
36:24 dans le vocabulaire, la notion de combat,
36:26 j'y reviens, parce que, elle dit quand même
36:28 qu'il y a, qui dit combat, qui dit qu'il peut avoir
36:30 une victoire, il peut y avoir aussi des défaites.
36:33 Et lorsqu'on est marqué par un vice, c'est qu'on a perdu
36:35 une bataille, ce qui ne veut pas dire qu'on n'aura pas à la fin
36:37 quelque chose à remporter.
36:39 - Alors le père Max Delonchamp et Marie Fournay nous dira comment elle vit tout ça.
36:41 - Je voudrais,
36:43 bien sûr, bien entendu, je suis tout à fait d'accord,
36:45 mais je vous invite à observer une chose.
36:47 Je pense à
36:51 un fiancé qui n'arrivait pas à se débarrasser
36:53 de l'habitude de fumer,
36:55 il a essayé, bon,
36:57 il fait tout ce qu'il faut,
36:59 il fume toujours, très bien.
37:01 Puis un jour je le rends compte, il ne fume plus.
37:03 Et je dis, ah, c'est bien,
37:05 c'est qu'elle n'aime pas ça,
37:07 en parlant de sa fiancée. Autrement dit, par amour,
37:09 vous serez beaucoup plus performant
37:11 que par tout effort pour dire,
37:13 je devais m'irriter.
37:15 Si la fille n'aimait pas, elle ne serait pas arrêtée de fumer.
37:17 Donc, je veux dire,
37:19 il faut être tout, je suis tout, bien sûr,
37:21 ce que vous dites là,
37:23 et deux fois catholique, mais...
37:25 Je veux dire,
37:27 il est très important de voir que le moteur,
37:29 c'est de retrouver
37:31 cette bonne, cette unique bonne nouvelle
37:33 que nous sommes enfants de Dieu.
37:35 Et quand Jésus dit,
37:37 la vie chrétienne c'est pour les petits enfants,
37:39 il ne dit pas c'est pour ceux qui ne sont pas capables,
37:41 il dit, spontanément,
37:43 vivre dans cette séduction
37:45 que Dieu exerce sur tout homme
37:47 venant de ce monde. C'est ça qu'il faut
37:49 libérer en nous. Et à ce moment-là, tout à fait d'accord avec vous,
37:51 notre volonté va
37:53 devenir, sans que ça soit
37:55 une lutte contre nous-mêmes, au contraire,
37:57 elle va être dynamisée, et à ce moment-là,
37:59 oui, tout à fait d'accord, on va être
38:01 reconstruit, et on va retrouver
38:03 ce que nous avions perdu
38:05 dans le drame d'être séparés de Dieu.
38:07 - Oui, je voudrais juste préciser,
38:09 je suis d'accord avec vous, Thérèse Davila dit
38:11 la contemplation c'est le levier de l'action.
38:13 Donc là où je vous rejoins, et d'ailleurs, on ne l'a peut-être pas assez dit,
38:15 mais l'essentiel du carême c'est quand même la prière.
38:17 C'est-à-dire, parce que je me
38:19 remets avec mon Père, notre Père qui est
38:21 aux cieux, c'est-à-dire parce que je me remets
38:23 dans ma filiation, je me réapproprie
38:25 davantage, je contemple,
38:27 je retrouve du désir, de la force d'aimer,
38:29 et donc, effectivement, après je vais faire les efforts
38:31 qui sont comme une conséquence. Là, je vous rejoins
38:33 complètement. - Marie Fournay,
38:35 comment est-ce que vous vivez cela, et puis
38:37 est-ce que finalement la bonne nouvelle aussi
38:39 c'est qu'on peut se libérer
38:41 justement de ces tentations,
38:43 de ces péchés, et c'est un peu
38:45 le thème aussi de votre pièce.
38:47 - Oui, tout à fait. Je pense que la bonne nouvelle
38:49 c'est de se rendre compte que
38:51 une fois qu'on a fait cette
38:53 remise en
38:55 question, on est capable
38:57 de tendre vers une conversion.
38:59 Moi-même, j'ai rencontré la foi
39:01 pendant mes années de classe
39:03 préparatoire à Louis-le-Grand, où j'étais
39:05 logée dans un foyer de soeurs Ursuline,
39:07 et c'est une rencontre qui a
39:09 transformé et bouleversé ma vie,
39:11 et je me suis rendue compte
39:13 qu'il y avait un certain chemin au bonheur,
39:15 et c'est ce qui m'a ensuite conduite
39:17 d'avoir une certaine lucidité sur mes
39:19 actions, et c'est vraiment
39:21 ce chemin de bonheur que j'ai envie de transmettre
39:23 au sein de la pièce.
39:25 - Alors, Véronique, on va revenir
39:27 un peu aux origines du carême, quand même, parce que
39:29 ce qui est intéressant, c'est que
39:31 dans les premiers siècles, on a dit, effectivement,
39:33 que le carême, ça se passe d'abord
39:35 dans le secret du cœur, avant d'être
39:37 une démonstration publique. Néanmoins, cette dimension
39:39 publique, dans les premiers temps de l'Église,
39:41 elle était extrêmement
39:43 plus affirmée qu'aujourd'hui, en tout cas
39:45 beaucoup prise au sérieux.
39:47 - Oui, jusqu'au Vème siècle, le chrétien
39:49 qui avait commis une faute grave devait en faire
39:51 l'aveu secret à l'évêque,
39:53 mais il était mis au rang des pénitents
39:55 et sa pénitence était publique.
39:57 La faute restait secrète. Alors,
39:59 par "faute grave", on entendait le sacrilège,
40:01 le fait de jurer contre Dieu, donc tout ce qui
40:03 touchait à la relation à Dieu, bien entendu,
40:05 et puis les meurtres, les agressions,
40:07 les vols, l'adultère.
40:09 Alors, pour de grandes figures de l'Église, comme
40:11 Tertullien ou Saint-Augustin, il n'était pas question
40:13 de marginaliser ou d'humilier le pêcheur,
40:15 bien entendu, mais plutôt
40:17 l'idée de faire prier toute la communauté
40:19 pour lui. Ça, c'est très important.
40:21 Ensuite, jusqu'à la fin du Moyen Âge,
40:23 le mercredi décembre, les fameux
40:25 pénitents, donc qui avaient commis des fautes
40:27 très graves, se présentaient devant l'évêque,
40:29 deux par deux, en procession,
40:31 un cierge à la main, ils s'inclinaient
40:33 devant l'évêque en disant leur péché,
40:35 donc là, publiquement, et évidemment,
40:37 le but, c'était quand même qu'il les regrette amèrement,
40:39 pourquoi pas qu'il pleure, en tout cas, il y avait
40:41 une contrition publique.
40:43 L'évêque les aspergeait d'eau bénite, il les exhortait
40:45 dans un serment à se repentir,
40:47 à changer de vie, à ne plus
40:49 commettre le mal, parce que dans l'idée du carême,
40:51 il y a aussi quand même cette idée de changer de vie,
40:53 de repartir, pourquoi pas, à zéro. Et puis,
40:55 pendant 40 jours, donc pendant les 40 jours
40:57 du carême, ils devaient prier,
40:59 jeûner, faire l'aumône, donc les trois
41:01 piliers du carême, pourquoi pas un pèlerinage,
41:03 ils étaient mis en
41:05 quarantaine, c'est de là que vient
41:07 l'expression "être mis en quarantaine",
41:09 exclusion de leur famille,
41:11 exclusion aussi, entre guillemets, de l'église, ils n'avaient pas le droit
41:13 de rentrer dans une église, ils étaient
41:15 écartés de la communion eucharistique,
41:17 symboliquement, évidemment, pour réparer le mal
41:19 qu'ils avaient fait.
41:21 Le jeudi saint, donc à la fin
41:23 du carême, trois jours avant Pâques,
41:25 il se présentait de nouveau devant l'évêque
41:27 avec un cierge à la main, le cierge
41:29 était éteint et il était rallumé
41:31 par un diacre qui venait avec
41:33 un semblant de cierge pascal
41:35 pour dire que finalement, le cierge
41:37 qui allait être allumé était là
41:39 pour réveiller en eux
41:41 la vie de Dieu et leur rappeler
41:43 qu'ils étaient appelés à la résurrection du Christ,
41:45 donc à faire leur salut. Et là, la cérémonie
41:47 se voulait un renouvellement du baptême,
41:49 on signifie aux pénitents qu'ils devaient donc
41:51 se souvenir de se conduire en enfant de Dieu
41:53 et le message c'était aussi pour tous ceux
41:55 qui étaient dans l'assemblée, c'est-à-dire
41:57 tous les baptisés dans l'assemblée
41:59 qui se savaient forcément pécheurs,
42:01 la nécessité permanente d'une conversion
42:03 et d'une pénitence. Alors, tout cela
42:05 a disparu à la fin du Moyen-Âge,
42:07 au XVIIIe siècle ça a commencé
42:09 à être light, passez-moi l'expression,
42:11 mais il y a encore
42:13 un semblant de pénitence publique
42:15 en Corse, à certaines
42:17 notamment, le vendredi saint,
42:19 un pénitent qu'on appelle le "catenatio",
42:21 l'enchaîner, effectue un chemin de croix,
42:23 il porte une croix de
42:25 37 kilos, il a
42:27 à ses pieds une chaîne de 17 kilos,
42:29 seul le curé connaît son
42:31 identité et les péchés qu'il veut
42:33 expier, pour le pénitent ça s'apparente quand même
42:35 à une vraie démarche spirituelle parce qu'il rentre au couvent
42:37 deux jours auparavant pour
42:39 se préparer et mettre sa vie sous le regard de Dieu.
42:41 Voilà, et on reparlera de cette
42:43 tradition corse parce que
42:45 effectivement, nous vous la ferons vivre
42:47 sur les antennes du groupe
42:49 canal au moment de la semaine sainte,
42:51 dont Louis Hervé Guigny, une réaction, parce
42:53 que effectivement, cette dimension publique
42:55 de la pénitence, du carême,
42:57 aujourd'hui, elle s'est beaucoup estompée,
42:59 vous nous avez dit qu'elle demeurait néanmoins que c'était
43:01 important, et notamment dans votre livre,
43:03 vous parlez du fait que
43:05 les tentations ou le combat spirituel
43:07 s'exercent aussi sur cette dimension
43:09 publique de la foi et qu'elle est
43:11 importante à en tenir compte.
43:13 Oui, parce que vous voyez, quand on parle des
43:15 trois temps du carême, la prière,
43:17 la pénitence et le partage. Et donc
43:19 dans la notion de partage ou de charité fraternelle,
43:21 ça nous rappelle à notre vocation,
43:23 si nous sommes des fils et des filles de Dieu et que nous disons
43:25 "notre Père", c'est donc que ça nous ouvre
43:27 à une fraternité, dont le pape
43:29 François insiste beaucoup d'ailleurs. Et donc
43:31 dans le caractère du carême, il y a
43:33 une dimension proprement missionnaire et
43:35 évangélisatrice du carême.
43:37 C'est-à-dire, moi, dans "Les gens que je peux accompagner"
43:39 et dans "Qu'est-ce que je vais faire pendant le carême",
43:41 il y a cette dimension
43:43 évangélisatrice, directe ou indirecte.
43:45 C'est-à-dire que chacun, en fonction de là où il vit, de ce qu'il ressent
43:47 et comment l'Esprit-Saint y pousse. Quelquefois, ça va vraiment
43:49 dire "oui, je suis chrétien" et puis
43:51 d'oser dire, par exemple, que je vais à la messe
43:53 le dimanche ou j'ai entendu dire, par exemple, que le
43:55 mercredi-dicembre, il y a eu beaucoup plus de monde
43:57 au messe cette année que les années précédentes.
43:59 Donc j'ai entendu beaucoup ça.
44:01 - Et comment vous l'expliquez ?
44:03 - Eh bien, je pense que beaucoup reviennent,
44:05 peut-être qu'il y a une soif spirituelle, un besoin
44:07 spirituel qu'on retrouve chez beaucoup de gens de
44:09 tout âge d'ailleurs. C'est aussi le fait qu'il y ait
44:11 beaucoup plus de cathécumènes, je pense qu'on va le dire
44:13 bientôt. - Les cathécumènes, c'est ceux qui sont baptisés ?
44:15 - Les cathécumènes, c'est ceux qui se sont baptisés le jour du Pâque, ceux qui préparent
44:17 aux baptêmes. Il n'y en a jamais eu autant.
44:19 Et partout en France, c'est impressionnant ça. - Donc il y a un réveil
44:21 spirituel, on dirait. - Je pense, parce qu'au fond,
44:23 devant peut-être
44:25 le matérialisme, l'homme
44:27 cherchant et en quête de spiritualité
44:29 retrouve quelque chose. Et là,
44:31 je reviens à ce que disait le Père Max, si on retrouve
44:33 l'essentiel de notre religion, qui est quand même une religion d'amour
44:35 et de charité, et que Dieu est là
44:37 pour nous nourrir et pour nous délivrer
44:39 et nous libérer, je pense que c'est
44:41 plus attirant que de voir l'Église
44:43 comme une église de la morale et de la loi.
44:45 - Des phases de carême. - Exactement.
44:47 Et donc c'est vrai que ce caractère,
44:49 je dirais, public de la pénitence,
44:51 ça serait à un moment donné une autre discussion,
44:53 mais il y a aussi une évolution spirituelle
44:55 qui fait qu'on a regardé les choses de manière
44:57 plus forte et symboliquement.
44:59 Là où peut-être qu'à un certain moment, on avait besoin
45:01 de plus de marquer les choses et les signifier.
45:03 Et si l'Église a évolué
45:05 de cette manière-là, je pense que c'est parce qu'il y a aussi
45:07 une évolution spirituelle, une compréhension aussi
45:09 du caractère personnel.
45:11 Il n'y avait pas la pratique de la confession autrefois.
45:13 Donc c'est aussi pour ça qu'il y avait ces dimensions publiques.
45:15 Il y a quelque chose de plus intime.
45:17 - Mais ça marquait aussi l'enjeu de manière très forte
45:19 que constituait effectivement
45:21 la conversion et le baptême.
45:23 - Mais ce qui n'empêche que beaucoup de gens font encore
45:25 des pénitences, je ne dirais pas publiques,
45:27 mais ou de faire un pèlerinage, ou d'ailleurs
45:29 de recommander, et d'ailleurs le temps du carême,
45:31 va marquer. Et les gens disent
45:33 "Tiens, pourquoi tu ne sors pas vendredi soir ou samedi soir ?"
45:35 Parce que je fais le carême, donc il y a une manière
45:37 très discrète et délicate d'exprimer
45:39 et qui doit éveiller les autres. "Ah tiens, pourquoi tu fais ça ?"
45:41 C'est ça qui est important.
45:43 - Marie Fournay, cette dimension de témoignage,
45:45 vous en êtes un exemple d'une certaine manière avec votre pièce
45:47 puisque là, pour le coup, vous affichez la couleur,
45:49 je dirais, sur les sept péchés capitaux.
45:51 - Oui, tout à fait.
45:53 En fait, le but
45:55 vraiment de cette pièce,
45:57 c'est de transmettre ce message de liberté,
45:59 qu'on est capable vraiment de
46:01 se sortir de
46:03 ces péchés. Et c'est pour ça
46:05 aussi que j'ai voulu que toute la mise en scène
46:07 elle soit à l'image de cette notion
46:09 de liberté. Tout le décor est
46:11 mobile, on passe vraiment d'un univers
46:13 à un autre.
46:15 Et donc, la distribution
46:17 aussi, elle est mobile, puisqu'on est quatre comédiens
46:19 qui jouent une quinzaine de personnages différents.
46:21 Et donc cette mobilité dans le décor
46:23 et dans la distribution, aussi
46:25 accentue cette idée de
46:27 liberté, cette idée de
46:29 communion avec Dieu
46:31 et les autres. - Liberté de choisir le bien
46:33 et de refuser. - Cette capacité à s'élever
46:35 à de meilleurs choix.
46:37 - Père Max Delonchamps, j'aurais reprendre une phrase
46:39 qui est prononcée, une prière qui est prononcée
46:41 lors de la messe du mercredi décembre, qui marque donc
46:43 le début du carême.
46:45 On parle, on demande
46:47 "Accorde-nous Seigneur", je vais vous lire ça,
46:49 "de savoir commencer saintement par le jeûne
46:51 l'entraînement au combat spirituel", donc
46:53 ce dont nous avons parlé, mais la suite
46:55 est intéressante, "que nos privations nous rendent plus forts
46:57 pour lutter contre l'esprit du mal".
46:59 Alors, j'aimerais avoir votre commentaire
47:01 là-dessus, parce que finalement, est-ce que
47:03 l'adversaire, d'une certaine
47:05 manière, est une
47:07 personne, ce n'est pas
47:09 quelque chose d'abstrait, le mal,
47:11 et c'est ce contre quoi
47:13 nous luttons, finalement, pendant le carême ?
47:15 - Oui, c'est très important. Le combat spirituel,
47:17 il n'est pas contre quelque chose,
47:19 comme si nous étions
47:21 mal construits, avec
47:23 on ne sait pas quelle tendance perverse, etc.
47:25 C'est un combat contre quelqu'un.
47:27 Et il est très important,
47:29 le premier dimanche du carême,
47:31 on voit Jésus au désert,
47:33 un interlocuteur. Nous avons
47:35 un interlocuteur. - Satan.
47:37 - Et Satan.
47:39 Alors, pour 36 raisons,
47:41 on oublie les anges, je dirais,
47:43 dans la vision, y compris chrétienne
47:45 des choses, les anges, c'est pas trop bon.
47:47 Il est essentiel de voir
47:49 que ce combat spirituel,
47:51 oui, il a des
47:53 partenaires, et que
47:55 on n'est pas...
47:57 Sinon, on lutte contre soi-même.
47:59 Pas du tout. Nous avons
48:01 des alliés,
48:03 des anges bons, et
48:05 nous avons des anges mauvais.
48:07 Alors, il ne faut pas prendre ça comme, je dirais,
48:09 voilà, des gens qui tirent les ficelles,
48:11 malgré nous, etc. Mais de bien voir
48:13 que, puisque tout le mystère chrétien
48:15 est un mystère d'amour, ça met des personnes
48:17 en présence les unes des autres,
48:19 et il ne s'agit pas de redresser
48:21 des tendances tordues en nous.
48:23 C'est des conséquences, et
48:25 c'est pas le plus grave. Mais il s'agit de
48:27 retrouver, en effet,
48:29 avec qui nous voulons-nous construire
48:33 notre vie. Et c'est comme ça que
48:35 le baptême, c'est pas
48:37 pour être quelqu'un de bien, mais
48:39 pour suivre quelqu'un, Jésus-Christ.
48:41 - Don Louis Hervé Guinie, ce sera peut-être
48:43 le mot de la fin, il nous reste à peine deux minutes,
48:45 mais ça peut être décourageant
48:47 de se dire "on lutte contre l'esprit du mal",
48:49 parce qu'on est bien démunis dans ce combat.
48:51 - Oui, mais c'est là où notre foi et notre
48:53 certitude à nous, c'est que le Christ, lui, a déjà
48:55 remporté la grande victoire. La grande
48:57 victoire a été remportée par le Christ. Donc ensuite,
48:59 et c'est ça la bonne nouvelle, donc ensuite, il veut nous
49:01 que nous vivions avec lui ce combat.
49:03 Je voudrais citer cette phrase du pape François qui dit
49:05 "la vie chrétienne est un combat
49:07 permanent, il faut la force et le courage
49:09 pour résister aux tentations du diable et
49:11 annoncer l'évangile". On peut pas reprocher au pape François
49:13 et au Jésus depuis des siècles, qui ont
49:15 reconnu cette place du diable et des démons,
49:17 d'avoir été des hommes qui ont aimé le monde,
49:19 la vie, et qu'on fait des choses extraordinaires.
49:21 Donc, parce que quelque part, on se dit "oui, alors si on parle
49:23 du diable, c'est qu'on est négatif, pas du tout".
49:25 Et il dit cette chose suivante "il désigne
49:27 un être personnel qui nous harcèle. Jésus
49:29 nous a enseignés à demander tous les jours
49:31 cette délivrance pour que son pouvoir
49:33 ne nous domine pas". Et c'est vrai, j'aime bien ce que
49:35 vous y rappelez sur l'ange gardien.
49:37 Je pense qu'il faut prier pour l'ange gardien,
49:39 qui peut nous aider dans le carême à savoir
49:41 les bons combats à mener, je pense.
49:43 - Quelques mots, parce qu'il nous reste
49:45 quelques secondes. Père Max Delonchamps, vous parlez
49:47 d'un printemps de l'âme pour le carême.
49:49 - Oui, tout à fait. - L'expression est très jolie.
49:51 - La couverture, je vois quelqu'un
49:53 qui fait la sieste,
49:55 ce n'est pas triste d'être chrétien,
49:57 c'est même la seule chose qui soit vraiment joyeuse.
49:59 Et donc le carême, c'est un temps
50:01 intense de vie chrétienne, donc un temps de
50:03 joie et de printemps, oui, tout à fait.
50:05 - Voilà, ce sera le mot de la fin. Je rappelle
50:07 le titre de vos ouvrages respectifs.
50:09 Père Max Delonchamps, "Le carême pour les
50:11 cancres à l'école des saints", c'est très important,
50:13 c'est puisé dans la spiritualité chrétienne
50:15 la plus profonde, aux éditions
50:17 Centre Saint-Jean-de-la-Croix, dont
50:19 Louis R. Véghigny, "Un chemin de liberté
50:21 pour tous, le combat spirituel",
50:23 c'est très précis et très concret
50:25 chez MAM. Et puis Marie Fournay,
50:27 je renvoie aussi à votre pièce, on peut la voir donc
50:29 à Paris, au Théâtre Saint-Michel,
50:31 jusqu'au mois de mai. - Tout à fait. - C'est cela, "L'autel
50:33 des sept", ça s'affiche,
50:35 voilà, par la compagnie Rostand,
50:37 donc vous êtes une co-auteur
50:39 et metteur en scène, ça parle des sept péchés
50:41 capitaux. Merci à Véronique
50:43 Jacquier, que faut-il lire cette semaine
50:45 en France catholique ? - Un
50:47 grand angle qui est consacré à un artiste
50:49 exceptionnel, Le Bernard,
50:51 qui est l'auteur du "Bal d'Aquin"
50:53 dans l'église Saint-Pierre
50:55 de Rome, au Vatican, bien entendu,
50:57 l'auteur aussi de la magnifique
50:59 sculpture que vous voyez qui s'affiche
51:01 à l'écran,
51:03 et l'hebdomadaire
51:05 en profite pour mettre un coup de projecteur sur
51:07 la reconquête spirituelle liée au baroque
51:09 en plein XVIe siècle, en pleine
51:11 réforme protestante. - Voilà, une période qui vous est
51:13 chère, père Max de Longchamp. - Bien sûr,
51:15 c'est aussi une renaissance littéraire formidable.
51:17 - Voilà, merci
51:19 à Martin Guillard et aux équipes techniques
51:21 de CNews, merci à vous d'avoir suivi
51:23 cette émission, et puis la semaine prochaine,
51:25 nous changeons complètement de sujet,
51:27 nous parlerons de l'église et
51:29 de la sacralité de la vie, à l'occasion,
51:31 vous le savez, de ce projet
51:33 d'inscrire l'avortement dans
51:35 la Constitution française.
51:37 Très bonne journée à tous et bien sûr, vous restez à notre écoute.
51:39 [SILENCE]