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  • 19/12/2023
Le Honduras est l'un des pays dont le taux de crime est le plus élevé au monde.
Sous le joug d'une des pires organisations criminelles de la planète, les Maras, les habitants essaient tant bien que mal de s'en sortir au péril de leur vie.

Catégorie

Personnes
Transcription
00:00 ...
00:03 -Nous sommes au Honduras,
00:05 un petit état d'Amérique centrale,
00:08 moins connu pour ses rues colorées et ses collines
00:11 que pour son taux d'homicide, extrêmement élevé.
00:14 ...
00:16 Ici, la mort est au coin de chaque rue.
00:19 ...
00:22 Musique douce
00:25 ...
00:28 ...
00:30 -Dans ce quartier populaire, au nord du pays...
00:33 ...
00:35 ...cet homme vient de perdre son fils.
00:38 Qu'est-ce qui s'est passé, monsieur ?
00:40 -Ecoutez, je ne sais pas quoi vous dire.
00:43 -Pourquoi a-t-il été tué ?
00:46 -Je ne sais pas. Je n'étais pas là.
00:49 -Seul témoin du meurtre, le frère de la victime.
00:53 -Il était dans son hamac, tranquille,
00:57 et le mec est arrivé comme un fou.
00:59 Après, le tueur est parti en courant et personne n'a rien fait.
01:03 ...
01:05 -Chauffeur de moto-taxi, Andres n'avait que 22 ans.
01:09 Il a été abattu de plusieurs balles.
01:12 ...
01:15 -Oh, Dieu, quel dolor !
01:18 Dieu, quel dolor !
01:21 Dieu !
01:23 ...
01:28 ...
01:34 -Ce serait un énième règlement de compte entre gangs,
01:37 d'après le seul policier présent sur la scène de crime.
01:40 -Les gangs sont toujours en conflit.
01:45 Et nous, la police, on est au milieu de tout ça.
01:47 C'est dur. On le regrette.
01:51 Mais la situation nous échappe.
01:53 ...
01:55 -Cette scène, les Honduriens la vivent quasiment au quotidien.
01:59 A tel point que chacun poursuit ses activités
02:03 autour de la dépouille encore chaude d'Andres.
02:07 Même le restaurant d'en face continue de servir les clients.
02:11 ...
02:15 Et pire encore, le père d'Andres pense que le meurtrier
02:19 fait partie de la bande du quartier.
02:21 -Le coupable est là-bas, tranquille.
02:24 Je crois bien que je le connais.
02:27 ...
02:29 -Le tueur pourrait bien appartenir à ce groupe de jeunes très menaçant.
02:33 ...
02:41 -La famille ne le sait pas encore,
02:43 mais les meurtriers leur réservent une épreuve de plus.
02:48 Le lendemain de la mort d'Andres,
02:50 son père a vécu une scène ahurissante.
02:53 Les tueurs de son fils lui ont rendu visite.
02:57 -Les tueurs sont venus me demander pardon.
03:00 Ils ont dit qu'ils avaient tué mon fils par erreur.
03:04 Ils étaient venus tuer un autre jeune, en fait.
03:07 Un autre chauffeur de moto-taxi.
03:10 Et ils les ont confondus.
03:12 -Une erreur qui a fait 2 orphelins et une veuve.
03:18 ...
03:21 -Pour éviter que la famille ne se venge,
03:24 les tueurs ont menacé 2 morts, les frères de la victime,
03:27 José et Alexander,
03:30 ainsi que leur beau-frère et un ami proche.
03:34 Qu'est-ce qu'ils vous ont dit exactement ?
03:38 -Les tueurs nous ont laissé 24 heures pour quitter le pays.
03:41 ...
03:48 -Ils leur ont dit de partir, sinon...
03:51 -Nous vivons une telle violence dans ce pays.
03:54 Ici, la vie ne vaut rien.
03:58 -Dans quelques heures, les 4 jeunes prendront la route.
04:01 Ils vont tenter d'entrer clandestinement aux Etats-Unis,
04:04 sans espoir de retour.
04:07 Car le gang qui les menace, c'est la Marasama.
04:11 C'est la Mara Salvatrucha,
04:14 l'une des pires organisations criminelles de la planète.
04:17 En une dizaine d'années, le Honduras a atteint
04:20 l'un des taux d'homicide les plus hauts du monde.
04:23 -Si tu te balades avec ta caméra, tu vas te faire tuer
04:26 avec tous les maréros qu'il y a ici.
04:30 -Au moins 14 morts violentes par jour
04:33 pour un pays de seulement 8 millions d'habitants.
04:36 C'est comme s'il y avait 20 meurtres quotidiennement
04:39 dans la région parisienne.
04:42 Le fléau qui gangrène le pays, les Maras,
04:46 l'équivalent de la mafia en Amérique centrale.
04:49 A un détail près, leur violence n'a aucune limite.
04:52 Il existe plusieurs Maras rivales,
04:55 avec chacune des milliers de membres.
04:58 Ils s'identifient via leur tatouage.
05:02 Les Maras s'affrontent
05:05 pour le contrôle du trafic de drogue,
05:08 d'armes, mais aussi du racket.
05:11 2e pays le plus pauvre du continent américain,
05:14 la situation géographique du Honduras n'arrange rien.
05:18 C'est un passage obligé de la drogue
05:21 vers les Etats-Unis.
05:24 Ces gangs, qui règnent en maître sur le pays
05:27 et terrorisent la population,
05:30 nous les avons rencontrés.
05:34 -Celui-là, c'est mon chouchou. Il est plaqué or.
05:37 -Les traîtres, on les découpe en morceaux.
05:40 Après, chaque bout de leur corps est dispersé
05:43 pour montrer aux gens qui fait la loi dans le quartier.
05:46 -La police et l'armée
05:50 mènent des opérations coup de poing contre les Maras.
05:53 Mais affaiblis par le manque de moyens
05:56 et la corruption, les forces de l'ordre
05:59 restent débordées par ces gangs surarmés.
06:02 ...
06:06 Malgré ce déchaînement de violence,
06:09 des Français audacieux ont décidé de faire des affaires au Honduras.
06:13 -Si les gens ont un emploi, s'ils sont occupés,
06:16 ils ne deviennent pas des voyous.
06:19 -Côté Caraïbes, certains ont même trouvé une jolie place au soleil.
06:23 -C'est le paradis. Il fait peut-être un peu chaud,
06:27 mais c'est le paradis.
06:30 ...
06:33 -Au coeur d'un paradis perdu,
06:36 déchiré par la violence.
06:39 ...
06:43 ...
06:46 ...
06:49 ...
06:52 A Tegucigalpa, la capitale du Honduras,
06:55 aucun policier ne se risque à partir en patrouille
06:59 sans son attirail de guerre.
07:02 ...
07:05 Fusils d'assaut et gilets pare-balles.
07:08 ...
07:11 -A chaque fois qu'on sort,
07:15 on se sent remis à Dieu
07:18 et on espère que ça va bien se passer,
07:21 car on sait que ça peut dégénérer en affrontement
07:24 avec les bandes ou les maras qui opèrent dans le secteur.
07:27 -Effectivement, l'inspecteur Melendez
07:31 charge l'un des pires districts de la ville.
07:34 Son taux d'homicide est parmi les plus hauts du pays,
07:37 car 4 gangs se disputent ce territoire,
07:40 grand comme un cinquième de Paris.
07:43 Au sud, la Mara 18.
07:47 Au nord, la Mara Salvatrucha, dite MS 13.
07:50 Et au nord-est, les Chirisos et El Combo, que nos cédera.
07:53 ...
07:56 -La problématique de la zone,
08:00 ce sont les luttes de territoire et la vente de drogue.
08:03 Et celui qui accroît son territoire
08:06 peut aussi racketter plus de gens.
08:09 ...
08:12 -Le commissariat du district ne compte qu'une quarantaine d'hommes.
08:15 Difficile pour eux de faire respecter la loi.
08:19 -Là, nous allons passer dans une rue
08:22 qui sert de frontière entre les territoires de plusieurs maras.
08:25 Les maras l'ont baptisée
08:28 "la rue de la mort",
08:31 car n'importe quel rival qui passe par cette rue
08:35 est immédiatement exécuté.
08:38 -Ces 2 dernières années,
08:41 une douzaine de personnes ont été exécutées dans cette rue.
08:44 Pour se financer, les gangs ne comptent pas seulement
08:47 sur leur trafic. Ils s'attaquent aussi à la population civile
08:51 et ont même fait d'un métier tout à fait banal
08:54 l'un des plus dangereux du pays.
08:57 ...
09:00 Les chauffeurs de bus sont parmi les premières victimes
09:03 des maras. Ils ne se passent pas une semaine
09:07 où on dure ass sans une attaque de bus.
09:10 ...
09:13 En 2 ans, rien que dans la capitale,
09:16 60 chauffeurs ont été assassinés par les gangs.
09:19 Alors pourquoi s'en prendre
09:23 à ces conducteurs qui n'ont dans leur caisse
09:26 aucune confiance ?
09:29 ...
09:32 En fait, les maras raquettent les patrons de sociétés de bus,
09:35 comme Jorge Lanza.
09:39 Quand une compagnie refuse de payer,
09:42 les criminels tuent un chauffeur.
09:45 ...
09:48 Chaque matin, Jorge s'en remet à Dieu.
09:51 -Seigneur, je te pide aussi
09:55 pour les conducteurs qui travaillent dans les bus
09:58 que tu les gardes sous ton manteau
10:01 et que tu les gardes en sécurité.
10:04 ...
10:07 -Le raquette de l'entreprise de Jorge a commencé il y a 7 ans
10:11 par un coup de téléphone passé au comptable.
10:14 -Chaque semaine, ils m'appelaient.
10:17 Ils ont commencé à exiger une somme d'argent chaque mois.
10:20 J'ai changé de numéro, mais ils ont fait leur possible
10:24 pour me retrouver. Ils me disaient que si je ne payais pas,
10:27 ils allaient me tuer.
10:30 "Si tu payes pas, tu crèves."
10:33 -Jorge n'a pas le choix. Il se soumet à l'extorsion.
10:36 Le raquette des maras lui coûte
10:39 des dizaines de milliers d'euros par an.
10:43 Mais pour l'instant, aucun de ses employés n'a été tué.
10:46 Sous couvert d'anonymat dans une autre ville du pays,
10:49 une société de transport a accepté
10:52 que nous filmions ce raquette en caméra cachée.
10:55 Cela commence toujours de la même manière,
10:59 par un coup de téléphone.
11:02 -Allô ? Je dois donner l'argent à qui ?
11:05 -Ils vont venir te voir.
11:08 -OK, ça marche.
11:11 C'était le type de la mara qui m'appelait.
11:15 -Dans ce sac en plastique,
11:18 l'équivalent de 250 euros.
11:21 Chaque semaine, les maras utilisent des intermédiaires différents.
11:24 Ce jour-là, surprise.
11:27 C'est une femme accompagnée d'un enfant.
11:31 -Tiens, mets ça dans ton sac.
11:34 ...
11:37 -Allez, au revoir. -Au revoir.
11:40 -Au début, le responsable a cru pouvoir résister.
11:43 Mais le gang lui en a vite fait passer l'envie.
11:47 -Ils vous ont déjà menacé
11:50 avec une arme ?
11:53 -Oui, et ils ont fait bien pire que ça.
11:56 Une fois, ils m'ont enlevé et ils m'ont frappé toute la nuit.
11:59 -Depuis cet avertissement,
12:03 le patron n'a jamais raté un rendez-vous.
12:06 D'autant que la situation a encore empiré.
12:09 -Après, le problème, c'est que d'autres bandes de maras
12:12 se sont mises à nous raqueter.
12:15 Alors moi, j'ai dit au chef de la 1re mara,
12:19 "Vous ne nous protégez pas ?" Et il m'a répondu,
12:22 "Mais ce n'est pas pour ça qu'on vous fait payer.
12:25 "Vous payez juste pour qu'on ne vous tue pas."
12:28 ...
12:31 -A Tegucigalpa, Jorge, notre patron de société de bus,
12:35 est l'un des seuls à oser dénoncer ce problème à visage découvert.
12:38 Il est la cible de 3 maras.
12:41 Et comme son terminal se trouve
12:44 devant la plus grande université du pays,
12:48 les gangs lui imposent le tarif le plus élevé chaque semaine.
12:51 -Un gang, on donne 20 euros par bus,
12:54 un autre, 24 euros, et à l'autre, 12 euros,
12:57 et tout ça par véhicule et par semaine.
13:00 Et il y a d'autres compagnies qui doivent payer 4 ou 5 maras.
13:03 -Au total, Jorge se fait raqueter chaque année
13:07 près de 100 000 euros, soit 2 mois de chiffre d'affaires.
13:10 Le gouvernement, impuissant face aux raquettes,
13:13 a fini par envoyer des militaires
13:16 dans les bus.
13:19 Pourtant, les chauffeurs de Jorge
13:23 conduisent toujours la boule au ventre.
13:26 -Les militaires, il y a des jours où ils sont là
13:29 et d'autres où ils ne viennent même pas.
13:32 -Car le gouvernement n'a mobilisé que 500 militaires
13:35 pour sécuriser les 1 700 bus de la capitale.
13:39 Du coup, chaque véhicule
13:42 n'est surveillé qu'un jour par semaine.
13:45 -Le chiffre de chiffre ne met pas fin aux agressions du quotidien.
13:48 Oscar est encore sous le choc de sa dernière attaque.
13:51 -C'était la semaine dernière.
13:55 Un gars s'est mis là où vous êtes
13:58 et il m'a pointé le pistolet sur le ventre.
14:01 Il m'a dit de lui filer l'argent, et derrière,
14:04 il y en avait 2 autres qui voulaient tous les passagers.
14:07 Pour 40 euros, ils peuvent vous tuer.
14:11 On sort de chez soi le matin sans savoir
14:14 si vous avez été tué ou pas.
14:17 -C'est un peu comme un crime.
14:20 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:23 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:27 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:30 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:33 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:36 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:39 -C'est un crime, mais c'est un crime.
14:43 -Ils marquent l'appartenance à un camp ou à un autre.
14:46 Du coup, à chaque contrôle,
14:49 les policiers inspectent chaque centimètre de peau.
14:52 -De l'autre côté.
14:55 Soulève ton T-shirt.
14:59 -Il y a un autre tatouage, là.
15:02 Et là, il y a un autre tatouage sur le bras.
15:05 -En soi, ce n'est pas interdit d'avoir des tatouages.
15:08 Tout le monde peut porter des tatouages s'il en a envie,
15:12 mais pour nous, ça suffit pour représenter
15:15 un soupçon d'appartenance à une mara.
15:18 -La loi leur permet de placer en garde à vue quiconque
15:21 porte des tatouages pouvant faire référence au gang.
15:24 -Baisse ton pantalon.
15:27 -Ce jeune de 16 ans porte des étoiles.
15:31 Certaines bandes les utilisent comme des galons
15:34 acquis après des faits d'armes.
15:37 ...
15:40 -Ce sont des tatouages de gangs.
15:43 -Tout le monde nous l'a déconseillé.
15:47 La police nous a mis en garde,
15:50 mais nous allons quand même tenter
15:53 de rencontrer ces fameuses maras.
15:56 Ces gangs sont nés dans le ghetto de Los Angeles
15:59 dans les années 80.
16:03 De jeunes immigrés latinos font des bandes de délinquants.
16:06 Ils prennent le nom de maras
16:09 en référence aux marabuntas,
16:12 les hordes de fourmis qui dévorent tout sur leur passage.
16:15 La mara contrôlant la 18e rue
16:19 se baptise alors Mara 18,
16:22 tandis qu'une autre, fondée par des salvadoriens,
16:25 se fait appeler Salvatrucha ou MS 13,
16:28 car le M est la 13e lettre de l'alphabet.
16:31 ...
16:35 Leurs tatouages servent de cartes d'identité,
16:38 de grade, et permettent d'impressionner l'ennemi.
16:41 ...
16:44 En une trentaine d'années, les maras se sont étendus
16:47 à toute l'Amérique centrale et même en Amérique du Nord.
16:51 ...
16:54 ...
16:57 Au départ, nous avons cru qu'il serait impossible
17:00 de les rencontrer. Les seules fois où nous pouvions approcher
17:03 ces gangs, c'était lors de leur transfert de la prison
17:07 au tribunal. Comme ici, ces jeunes qui, avec ces gestes,
17:10 revendiquent fièrement leur appartenance à la Mara 18.
17:13 ...
17:16 Puis, après plusieurs semaines d'enquête,
17:19 de rencontres sans résultat,
17:23 un contact finit par nous donner rendez-vous
17:26 au nord du pays, à San Pedro Sula.
17:29 Cette ville possède
17:32 un triste record. La plus grande concentration
17:36 de gangs au Honduras.
17:39 Notre intermédiaire est un journaliste local.
17:42 Sans lui, cette rencontre n'aurait jamais eu lieu.
17:45 Il a convaincu le chef de gang,
17:48 car il a grandi avec lui.
17:51 Nous avons ordre de suivre ce véhicule bleu.
17:55 ...
17:58 Après avoir traversé une partie de la ville,
18:01 la voiture stoppe.
18:04 Et un des lieutenants du groupe monte à bord.
18:07 ...
18:11 Sans cette escorte, impossible d'entrer sur leur territoire.
18:14 Mais le journaliste nous explique
18:17 que même escorté, notre sécurité n'est pas garantie.
18:20 Ce jour-là, plusieurs bandes
18:23 sont sur le pied de guerre.
18:27 -Tout à l'heure, un gars de la Mara 18 s'est fait buter par ici.
18:30 Donc c'est tendu dans le quartier.
18:33 Notre seule sécurité, maintenant, c'est Dieu.
18:36 ...
18:39 -Même la police ne se risque pas dans ces dédales de ruelles.
18:43 Voici le fief du gang de la Ranfla,
18:46 la bande en espagnol. Les ennemis jurent et démarassent.
18:49 ...
18:52 24h/24, des guetteurs surveillent la zone.
18:55 Le lieutenant qui nous a escortés, surnommé El Flaco, le maigre,
18:59 garde lui aussi l'oeil ouvert.
19:02 Il a l'impression d'avoir été suivi.
19:05 -Ici, tout est sous contrôle.
19:08 Il y a pas un fils de pute qui rentre dans notre secteur.
19:11 -Oui, ils savent bien ce qui les attend.
19:15 -Celui qui rentre, il ne ressort pas vivant.
19:18 Et pour tenir les Maras à distance de leur QG,
19:21 El Flaco a quelques très bons arguments.
19:24 Ses outils de travail.
19:27 ...
19:31 -Allez, les gars, venez !
19:34 Ca, c'est une arme semi-automatique.
19:37 Elle ne s'enraye jamais.
19:40 Avec elle, tu peux pas rater ta cible.
19:43 Elle tire 35 balles avec une seule pression sur la gâchette.
19:47 ...
19:50 Ca, c'est un petit revolver.
19:53 Ce fils de pute est vide.
19:56 Mais cette arme est pas mal pour jouer à la roulette russe
20:00 -Celui-là, c'est mon chouchou. Il est plaqué or.
20:03 -Pour plus de discrétion,
20:06 la bande veut se couvrir le visage.
20:09 Mais impossible de mettre la main sur leur cagoule.
20:12 -Les passe-montagne sont partis en mission, mon pote.
20:15 -J'y crois pas. -Si.
20:19 Ils sont en train de bosser.
20:22 -Ca veut dire qu'ils sont en train de tuer.
20:25 Les passe-montagne sont là-bas.
20:28 -Les maras, les maras du Maroc,
20:31 ont une soixantaine de membres.
20:35 Ils se targuent d'être plus humains que les maras.
20:38 -Nous, on n'est pas une mara.
20:41 Mais notre bande se consacre à défendre notre quartier
20:44 contre les maras.
20:47 Parce qu'eux, ils passent leur temps à raqueter les habitants.
20:51 Mais en fait de justiciers,
20:54 ce sont d'abord des tueurs à gage.
20:57 Et ils ont une grille de tarifs très précise.
21:00 -Pour tuer un avocat,
21:03 c'est de 12 500 à 17 000 euros.
21:07 Et pour une journaliste comme toi, c'est 19 000 euros.
21:10 -77 fois le salaire moyen pour un avocat
21:13 et presque 100 fois pour un journaliste.
21:16 Mais pour décrocher le gros lot, il faut taper encore plus haut.
21:19 -Si tu veux tuer un politique, c'est très cher.
21:23 Disons, en moyenne, 85 000 euros.
21:26 Et pour buter un grand patron, c'est autour d'un million,
21:29 un million et demi.
21:32 -Ont-ils déjà gagné autant d'argent ?
21:35 Vu l'état de leur QG, il est permis d'en douter.
21:39 La plupart du temps, ce sont de petits contrats,
21:42 10 à 20 par mois, selon eux.
21:45 Depuis 2 semaines que nous sommes au Honduras,
21:48 230 personnes ont déjà été tuées.
21:51 ...
21:54 ...
21:57 -Ces deux-là faisaient partie de la Mara 18,
22:00 l'une des plus puissantes avec la Mara Salvatrucha.
22:03 Et c'est avec cette dernière que nous avons finalement
22:06 réussi à obtenir, contre toute attente, un rendez-vous.
22:09 ...
22:13 ...
22:15 Aux abords de la cathédrale de San Pedro Sula,
22:18 un détail qui paraît anodin.
22:21 Des chaussures accrochées à un fil électrique.
22:24 C'est le signe qu'un gang contrôle la zone.
22:27 ...
22:31 -Ne me filme pas ! Baisse ta caméra !
22:34 Si tu te balades avec ta caméra comme ça,
22:37 tu vas te faire tuer avec tous les maréros qu'il y a ici.
22:40 -Nous sommes au bon endroit.
22:43 Ce junkie fait le signe de la Mara Salvatrucha.
22:47 ...
22:50 Nous devons attendre sur cette place
22:53 qu'un membre du gang vienne nous chercher.
22:56 ...
22:59 Est-ce un test pour voir si nous étions surveillés par la police ?
23:03 Ce jour-là, pas de rencontre comme promis.
23:06 Mais le lendemain, alors que nous n'avions plus d'espoir,
23:09 un coup de téléphone nous donne le lieu
23:12 et l'heure d'un nouveau rendez-vous.
23:15 ...
23:19 -Cet homme, que nous appellerons Manolo,
23:22 serait l'un des fondateurs de la MS-13,
23:25 la fameuse Mara Salvatrucha.
23:28 Il s'exprime pour la 1re fois devant une caméra.
23:31 A 36 ans, il dit s'être retiré du business.
23:35 Mais les traces de son appartenance au gang sont toujours là.
23:38 -J'ai le 13 de la Mara.
23:41 Ca, c'est la vida loca.
23:44 Vivre entre les deux,
23:48 vivre, mourir ou tuer.
23:51 Les 3 points de la vie folle.
23:54 La larme, c'est un symbole puissant.
23:57 Ca veut dire pleurer, rire, tuer, assassiner.
24:00 Tu ne peux pas te faire tatouer ça
24:03 juste pour avoir l'air méchant.
24:07 Non, c'est pas comme ça.
24:10 ...
24:13 -Cette larme est comme un grade pour les meurtriers de la Mara.
24:16 Elle a tué des dizaines de personnes.
24:19 Quant aux toiles d'araignées, c'est un symbole de pouvoir.
24:23 ...
24:26 Manolo aurait fondé l'antenne hondurienne
24:29 de la Mara Salvatrucha en 1994,
24:32 alors qu'il n'avait que 14 ans.
24:35 ...
24:39 -A l'époque, il n'y avait que de petites bandes.
24:42 Un jour, un gars arrive de Los Angeles, en Californie.
24:45 Ce jeune faisait partie de la Mara Salvatrucha.
24:48 Là-bas, il commandait un quartier pour leur compte.
24:51 Il s'est fait expulser des Etats-Unis.
24:55 C'était un vrai dur, complètement tatoué.
24:58 Il regarde ma bande et il demande
25:01 "C'est qui, le chef, ici ?"
25:04 Et tout le monde répond "C'est lui, c'est lui, c'était moi."
25:07 -La Salvatrucha lui confia alors une mission.
25:11 Trouver des hommes
25:14 pour lancer la Mara au Honduras.
25:17 -Avec ma bande, on s'est mis à recruter plein de jeunes.
25:20 Des gamins de 7 ans, 9 ans, 10 ans.
25:23 ...
25:27 Et très vite, on était une cinquantaine de membres.
25:30 Et on a commencé à faire la guerre aux autres bandes
25:33 pour contrôler le quartier.
25:36 Et puis, on s'est battus pour agrandir notre territoire.
25:39 ...
25:43 On faisait le mal, on assassinait,
25:46 on braquait,
25:49 et on volait la drogue aux autres bandes.
25:52 -Une fois entré dans la Mara,
25:55 la seule façon d'en sortir est la mort.
25:59 Et c'est par la terreur absolue que les Mareros
26:02 ont imposé leur loi en quelques années.
26:05 -Si dans le quartier, il y a un meurtre
26:08 commis par des mecs de la Mara
26:12 et qu'un témoin les balance,
26:15 la Mara va le savoir, car elle sait tout.
26:18 Les Mareros vont emmener le traître dans une maison abandonnée,
26:21 ils vont le tuer, le découper et le mettre dans un sac.
26:24 -Ces maisons, les Maras les appellent
26:27 les casalocas, soit "maison folle".
26:31 Des bâtiments abandonnés
26:34 où les gangs ont expulsé les habitants
26:37 pour en faire des salles de torture et d'exécution.
26:40 Mareros, traîtres, mauvais payeurs,
26:43 tous ceux qui s'opposent à eux terminent ici.
26:47 Cette sauvagerie était déjà courante
26:50 du temps de Manolo.
26:53 L'homme se vante même d'avoir pratiqué le cannibalisme.
26:56 -On les découpait en morceaux.
26:59 Et puis après,
27:03 on faisait frire leur coeur
27:06 pour les manger.
27:09 On dispersait les bouts de corps à chaque coin de rue
27:12 pour montrer aux gens
27:15 qui faisait la loi dans le quartier.
27:19 ...
27:22 -Nous avons pu constater
27:25 que Manolo disait vrai.
27:28 ...
27:31 Ce soir-là,
27:35 au bord de cette route,
27:38 des cadavres viennent d'être retrouvés.
27:41 -D'après nos informations,
27:44 il y a deux inconnus à bord d'une voiture
27:47 qui auraient déposé deux cadavres.
27:51 Apparemment, une femme et un homme.
27:54 En tout, on a découvert 5 cadavres
27:57 en ce début de soirée.
28:00 Voici le bilan.
28:03 -5 morts
28:07 et 500 m de là.
28:10 Plusieurs tueurs avec des armes automatiques
28:13 ont débarqué un peu plus tôt
28:16 pour exécuter un infirmier et deux jeunes.
28:19 Dans ce quartier, tenu par la Marra 18,
28:23 seul le cousin d'une victime accepte de nous parler.
28:26 -Il avait un problème au pied,
28:29 donc il est allé chez le docteur.
28:32 Ils travaillaient tous les deux.
28:36 -En pleine interview, un jeune l'interrompt pour le faire taire.
28:41 ...
28:44 Selon les deux gangs que nous avons rencontrés,
28:47 toutes ces horreurs pourraient prendre fin
28:50 si le gouvernement s'attaquait au problème de la pauvreté
28:53 et du chômage.
28:57 Au Honduras, avec un salaire moyen de 107 euros par habitant,
29:02 de nombreux jeunes se tournent vers la criminalité
29:05 pour se sortir de la misère.
29:08 Rien que la Marra Salvatrucha
29:11 compterait aujourd'hui près de 25 000 membres.
29:15 Leur pouvoir s'étend maintenant bien au-delà des quartiers pauvres.
29:20 Il règne même en maître
29:23 dans certaines institutions d'Etat.
29:26 ...
29:30 ...
29:33 ...
29:36 -Au petit matin, 600 soldats armés comme pour monter au front
29:39 se préparent à une opération d'envergure.
29:42 ...
29:45 -Messieurs, souvenez-vous que l'usage du fusil
29:49 ne doit se faire qu'en ultime recours.
29:52 Si un supérieur vous l'ordonne ou si vous êtes en danger,
29:55 vous ou l'un de vos camarades.
29:58 Maintenant, nous sommes entre les mains de Dieu.
30:01 Allez, en route !
30:05 -Ils s'en remettent à Dieu car ils se dirigent
30:08 vers la plus grande prison du pays,
30:11 dont les Marras contrôlent plusieurs bâtiments.
30:14 ...
30:17 A l'intérieur, plus de 4 000 détenus,
30:21 dont 300 membres de la Marra Salvatrucha
30:24 et autant de la Marra 18.
30:27 ...
30:30 Même s'ils sont séparés dans des ailes différentes,
30:33 entre eux, la guerre continue,
30:37 car les armes circulent dans la prison.
30:40 Il y a quelques mois, une grenade a fait exploser
30:43 le toit de la Marra 18.
30:46 ...
30:49 Les gardiens, par peur, ne font jamais de ronde
30:53 dans les bâtiments des Marras.
30:56 Un des gardiens intervient pour faire le ménage dans la prison.
30:59 Et si près de 600 soldats sont mobilisés,
31:02 c'est parce que tout soit en tête
31:05 la bataille qui a eu lieu un mois plus tôt
31:09 lors d'une fouille dans une autre prison du pays.
31:12 Les militaires avaient été accueillis
31:15 par des tirs d'armes à feu.
31:18 ...
31:21 Bilan. 3 morts chez les prisonniers.
31:25 ...
31:28 Et 38 blessés.
31:31 ...
31:34 Afin d'éviter une telle catastrophe dans son établissement...
31:37 -Voyez avec lui.
31:41 -Le directeur fait transférer tous les chefs des Marras
31:44 dans une nouvelle prison de haute sécurité.
31:47 -Vous allez où ? -Il me transfère.
31:50 -Pourquoi ? -Je suis un détenu très dangereux.
31:54 -Vous êtes un détenu dangereux ? -Oui.
31:57 -Pourquoi vous êtes en prison ? -Je faisais partie de la Marra 18.
32:00 ...
32:03 -Dans la nouvelle prison, ce Marero sera à l'isolement complet.
32:06 Alors que dans celle-ci,
32:09 il communiquait aisément avec l'extérieur.
32:13 -Avec cette opération,
32:16 on espère que les Marras seront complètement désorganisés.
32:19 Car vous savez, depuis l'intérieur de la prison,
32:22 ils continuent de gérer leurs activités criminelles
32:25 dans tout le pays.
32:29 -6 heures plus tard, le butin est impressionnant.
32:32 La dernière fouille date d'à peine 2 mois.
32:35 Pourtant, les militaires ont trouvé
32:38 une centaine d'armes blanches, des téléphones.
32:41 Mais aussi, à peine dissimulés dans ce sac,
32:45 plus de 2 000 doses de cannabis prêtes à être vendues.
32:48 Ainsi que 250 bouteilles d'alcool de pharmacie
32:51 qu'ils transforment en torboyaux.
32:54 Il y a même de la cocaïne et d'autres drogues dures.
32:57 -C'est comme de la méthamphétamine.
33:01 -Mais la grosse prise du jour,
33:04 ce ne sont pas les stupéfiants ni les machettes.
33:07 -On a trouvé des armes à feu.
33:10 Bon, celui-là, mettez-le ici.
33:13 -6 armes à feu et leurs munitions.
33:17 Pas étonnant, ces armes à feu
33:20 ne possèdent pas de détecteur de métaux.
33:23 Une faille insensée.
33:26 Est-ce la corruption ou le manque de moyens ?
33:29 -Les anciens directeurs ont fait n'importe quoi.
33:33 Surtout au niveau des systèmes de sécurité.
33:36 Les fonctionnaires civils sont responsables
33:39 de nombreuses erreurs.
33:42 C'est pour ça qu'il y a des armes en prison.
33:45 -Depuis un an, les militaires,
33:49 ont remplacé les civils à la tête des prisons.
33:52 Petit à petit, ils renforcent la sécurité.
33:55 Sont-ils vraiment plus efficaces ?
33:58 Le doute est permis.
34:01 3 jours après cette fouille,
34:05 3 détenus se sont entretués à coup de machette.
34:08 Mais alors, tout le pays est-il condamné
34:11 à sombrer dans la violence ?
34:14 Musique douce
34:18 Dans certaines régions, en dehors des grandes villes,
34:21 le crime ne règne pas en maître.
34:24 ...
34:29 L'Honduras a des atouilles remplaçables.
34:32 Son climat est particulièrement propice à la culture du tabac.
34:35 Dans le sud du pays,
34:39 la vallée de Dany est devenue la Mecque du cigare.
34:42 Ils sont réputés dans le monde entier.
34:45 ...
34:51 Un univers très masculin,
34:54 dans lequel une Franco-Hondurienne fait figure d'exception.
34:59 ...
35:02 Maya Selva est la seule femme à diriger une entreprise de cigares.
35:06 ...
35:09 -Bonjour.
35:10 -Au début, ses fournisseurs de tabac ne la prenaient pas au sérieux.
35:15 -Enfin ! Je me demandais où tu étais.
35:18 -Mais elle a rapidement su s'imposer auprès d'eux,
35:21 grâce à ses redoutables talents de négociatrice.
35:24 ...
35:27 -Qu'est-ce que tu nous as sorti ?
35:31 -Ah, là, il est caramélisé.
35:34 Donc, c'est... Voilà.
35:36 Donc, vous dites que celle-ci est pas trop mal.
35:39 ...
35:43 -Celui-là sent meilleur.
35:45 Il est plus doux, mais il sent l'ammoniaque.
35:48 -Oui, c'est sûr.
35:49 -Il a encore besoin de faire monter.
35:51 -Oui.
35:52 -Douter du produit a un moyen de faire baisser les prix.
35:56 -Vous avez pas l'air convaincu, là.
35:58 -Quand vous faites le shopping, vous avez pas l'air de convaincu.
36:02 Vous allez pas dire "Oh, qu'est-ce que je suis content,
36:05 "qu'il est beau, ce tabac." -Vous négociez dur.
36:08 -Ca fait partie du jeu, non ?
36:10 -Ah, Maya, Maya. Elle est tellement exigeante.
36:13 C'est à cause d'elle que j'ai les cheveux blancs.
36:16 Elle a du caractère, vraiment.
36:18 Elle a élevé son affaire à la perfection.
36:22 Depuis 20 ans, elle est toujours là.
36:24 Et ça, ça prouve qu'elle a tous les atouts pour ce business.
36:27 Sinon, elle aurait déjà disparu.
36:30 ...
36:32 -Cette femme de poigne ne se laisse pas impressionner
36:35 par la violence de son pays.
36:37 ...
36:39 Elle n'a pas peur de prendre la route seule,
36:42 avec tout de même quelques mesures de sécurité.
36:45 -Pas de garde du corps, rien de tout ça.
36:48 C'est... En revanche, on prend ses précautions.
36:51 Jouer profil bas.
36:53 Et... Et s'organiser.
36:56 Dans le sens... La voiture est louée,
36:59 personne ne sait dans quelle voiture je suis.
37:03 On connaît pas mon emploi du temps.
37:05 Même mes collaborateurs.
37:07 Dès qu'on voit que vous avez un peu d'argent,
37:10 que vous êtes aisés, c'est facile de vous prendre,
37:14 de vous séquestrer contre une rançon.
37:16 Je connais pas mal de personnes qui ont été séquestrées et tuées.
37:20 -La dernière mort en date ?
37:22 -Ça date de vendredi dernier.
37:24 Un type assez remarquable, propriétaire de terre,
37:27 agriculteur, producteur de café,
37:30 très impliqué dans sa communauté.
37:33 Il allait payer ses journaliers à la ferme.
37:35 Ça se savait qu'il était allé à la banque avec son fils.
37:39 Et voilà, et puis ils l'ont pas loupé, quoi.
37:42 Dès qu'il est descendu de sa voiture,
37:45 ils l'ont massacré.
37:47 -Les gangs s'en sont déjà pris indirectement à Maya.
37:50 Certains de ses employés ont été blessés
37:54 lors d'un braquage pendant la remise de paye en liquide.
37:57 Désormais, elle fait payer les salaires par virement.
38:00 L'un des nombreux ajustements qu'elle a dû faire
38:03 pour tenter de changer les choses à son niveau.
38:06 -Bonjour.
38:09 -Dans sa fabrique de cigares, tout est fait à la main.
38:12 Il faut 50 personnes différentes et 3 ans de travail
38:15 de la plantation au roulage pour faire un cigare.
38:18 Elle pourrait faire exécuter certaines étapes
38:21 par des machines, mais elle s'y refuse.
38:25 -Si les gens ont un emploi, s'ils sont occupés,
38:28 ils ne sont pas dans la rue, ils ne deviennent pas des voyous.
38:31 Ca donne une dimension, une raison à l'activité
38:34 qui est pour moi fondamentale.
38:37 -Maya tient aussi à payer ses employés
38:41 20 % plus cher que le SMIC local,
38:44 soit 240 euros.
38:47 Chaque année, elle exporte 2 millions de cigares
38:50 en Europe et aux Etats-Unis.
38:53 Si, comme elle, elle ne peut pas
38:57 payer ses employés, elle peut en faire un.
39:00 Si, comme elle, des Français se sont fait une place au soleil
39:03 dans ce pays violent, certains ont même trouvé
39:06 un coin de paradis.
39:09 Au large des côtes Caraïbes,
39:13 un oasis de sécurité, l'île de Roatan.
39:16 60 km de long.
39:19 Ses plages de sable fin et ses eaux turquoises
39:22 accueillent la 2e plus grande barrière de corail au monde.
39:26 Dans une mer à 28 degrés, 365 jours par an.
39:29 Une quiétude,
39:32 que les maras ne viennent plus perturber.
39:35 Sur cette île, il y a 7 ans,
39:38 le gouvernement a mis les moyens
39:41 et la police a réussi à les déloger.
39:45 Le tourisme a pu se développer, générant des milliers d'emplois.
39:48 Roatan est maintenant
39:51 l'un des endroits les plus sûrs du Honduras.
39:54 Un million d'acanciers en profitent chaque année.
39:57 C'est dans ce havre de paix
40:01 que s'est installé un Français,
40:04 Eric Raspaldo, 53 ans.
40:07 -Tu peux m'installer 2 transats ?
40:10 -Je te les mets là ? -Oui, là.
40:13 -C'est le paradis. Il fait peut-être un peu chaud,
40:17 mais c'est le paradis. Voilà.
40:20 C'est ce que j'ai droit, c'est mon cadeau.
40:23 C'est une grosse nuit de travail.
40:26 -Eric est gérant d'un hôtel de luxe.
40:29 Il s'est installé ici il y a 6 ans avec son fils.
40:33 -Nancy !
40:35 -Il cherchait un endroit où il pourrait allier travail et fermiette.
40:39 -On a l'impression d'être en vacances,
40:42 et les vacances, c'est juste 24 h.
40:45 Donc il faut profiter au maximum.
40:49 -Avant de trouver la tranquillité sur l'île de Roatan,
40:52 Eric s'est confronté à la violence du Honduras.
40:55 ...
40:58 Cuisinier de métier, au tout début,
41:01 il avait monté un restaurant à Tegucigalpa, la capitale.
41:05 ...
41:08 -Un jour, on a eu un gros problème. On nous a envoyé une bombe.
41:11 On va peut-être boire un cocktail monotophe à 3-4 h du matin.
41:14 Donc on a décidé qu'il était temps de fermer.
41:17 ...
41:21 -Heureusement pour lui, il dégote ce job en or,
41:24 gérant l'un des complexes hôteliers les plus luxueux de Roatan.
41:27 Un hôtel flambant neuf,
41:29 des dizaines de villas de grand standing,
41:32 ...
41:35 160 ha de terrain les pieds dans l'eau
41:38 et un golf de 18 trous.
41:41 Prix moyen d'une nuit, 450 $ par personne,
41:44 soit 2 salaires moyens dans le pays.
41:47 A ce tarif, le complexe attire les rentiers
41:51 les plus aisés, des Américains et même des célébrités.
41:54 ...
41:57 Il y a peu, cette villa a accueilli un couple d'acteurs hollywoodiens.
42:00 ...
42:03 -Katrina Zeta-Jones et son mari
42:06 sont venus en vacances pendant toute une semaine.
42:10 -Michael Douglas partait le matin à jouer à 5h45.
42:13 Donc il prenait son petit golf cart,
42:16 il allait faire quelques trous,
42:19 il y avait le jacuzzi pour les enfants.
42:22 C'était la 1re fois qu'elle venait sur l'île.
42:26 -Ce jour-là, pas de stars,
42:29 mais une riche famille guatémaltèque.
42:32 -Ah, vous êtes là !
42:34 -Eric est au petit-soin.
42:37 Il marie leur fils et on fait venir 150 invités.
42:41 -Ah, si !
42:43 -Comment va le papa ?
42:46 -Pour cette occasion inoubliable,
42:49 il a besoin de plus de 70 000 euros.
42:52 ...
42:55 A ce prix-là, ils ont droit de la cuisine française.
42:59 -Comment ça va dans la cuisine ?
43:02 -Pas forcément la plus raffinée.
43:05 -Voilà la sauce.
43:08 -C'est ça qui fait la différence.
43:11 -Hum !
43:15 -Alors ? -Ça manque de poivre
43:18 et de sel. Et maintenant, la fameuse tapenade
43:21 de la Provence, de Saint-Tropez.
43:24 -Vous êtes au petit paradis. -On est bien.
43:27 ...
43:31 -Avec ces recettes toutes simples, qui sentent bon la France,
43:34 Eric est sûr d'en mettre plein la vue aux invités.
43:37 -Angel, on allume toutes les petites bougies.
43:40 Tout ce qui doit être allumé, tu t'en occupes.
43:43 -C'est dans ce décor digne d'une comédie romantique
43:47 que se déroule la cérémonie et la fête.
43:50 Le futur marié, un chef d'entreprise,
43:53 n'a pas choisi cette île au hasard.
43:56 -Tout m'éveute bonheur. On voulait se marier
43:59 sur une plage de sable blanc la plus proche possible du Guatemala.
44:03 Et c'était pas pour critiquer mon pays adoré,
44:06 mais les plages de Huatán sont paradisiaques.
44:09 Ce sont les plus belles de toute l'Amérique centrale.
44:12 ...
44:16 -Mais la mariée se fait attendre.
44:19 -Elle arrive pas. Le coucher de soleil se rapproche.
44:22 Elle a encore 10 ou 15 minutes pour venir.
44:25 Sinon, elle va être obligée de se marier,
44:28 pas dans l'obscurité, parce qu'on a l'illumination.
44:31 C'est dommage.
44:33 -La belle-mère frôle la crise de nerfs.
44:36 -Je vais me prendre une tequila pour me calmer.
44:39 ...
44:42 -Elle arrive. Elle est là.
44:45 ...
44:48 ...
44:51 ...
44:54 ...
44:57 ...
45:00 ...
45:04 ...
45:07 -Je déclare unie par les liens du mariage
45:10 Alvaro Fortuny Lopez et Juliana Bueno Viana.
45:13 ...
45:16 ...
45:20 -Eric est soulagé.
45:21 -On est bon. On est arrivé.
45:23 C'est inservi. C'est fabuleux. Je suis content.
45:26 Juste, hein ?
45:27 -C'était une extrême blessure. -Le dernier qui a signé,
45:31 je sais pas s'il a réussi à signer sur la feuille,
45:34 mais on est arrivé quand même. Content.
45:37 ...
45:40 ...
45:43 ...
45:47 -La soirée se déroule dans une sérénité surprenante
45:50 pour le pays.
45:51 ...
45:54 -Evidemment, au niveau du tourisme,
45:57 on essaie de ne pas associer Roatan ou Honduras,
46:01 parce que malheureusement, on a une mauvaise image
46:04 à l'extérieur de notre pays.
46:07 Mais ici, on est vraiment sur un autre continent.
46:10 -L'an dernier, le tourisme sur l'île de Roatan
46:13 a généré plus de 180 millions d'euros,
46:17 un record.
46:18 ...
46:21 Si dans cette région, les problèmes du Honduras
46:24 ressemblent déjà à un lointain cauchemar,
46:27 à la capitale, ce sont d'autres chiffres
46:31 qui font la une des journées.
46:33 ...
46:36 -Tegucigalpa compte 1 million d'habitants.
46:39 4 meurtres y sont commis chaque jour en moyenne.
46:42 Toutes ces morts violentes,
46:45 un homme a pour mission de les suivre à la trace.
46:48 Sans relâche, il sillonne les rues de la capitale.
46:51 ...
46:54 -Tu sais, Pablo, elle est morte, la fille.
46:57 La vendeuse de mangue,
47:00 elle s'est pris une balle sur l'avenue Kennedy.
47:03 J'ai déjà 2 sujets pour toi.
47:05 -OK, perfecto.
47:06 -Carlos Posadas est journaliste
47:08 pour l'une des chaînes les plus regardées du pays.
47:12 Ici, tout le monde l'appelle El Halcon, le faucon,
47:15 car il est toujours le premier arrivé sur les lieux.
47:18 -C'est moi qui vous ai appelé.
47:20 -Ah oui, merci.
47:21 ...
47:25 -Et pour cause, tous les téléspectateurs
47:28 ont son numéro de portable.
47:30 Le faucon annonce la mort en direct.
47:33 -Bonsoir, chers téléspectateurs.
47:35 Aujourd'hui, un jeune caméraman a été assassiné.
47:39 Les agresseurs voulaient lui voler sa moto.
47:42 Ils lui ont tiré une balle dans la tête.
47:45 -Couvrir les morts violentes au Honduras est un job à plein temps.
47:49 -C'est tous les jours comme ça, 24h/24.
47:52 Du lundi au dimanche.
47:55 Pour l'instant, c'est calme. On n'a qu'un mort par arme à feu.
47:59 -Mais le faucon se pose rarement très longtemps.
48:02 Déjà une scène de crime l'attend à l'autre bout de la ville.
48:06 Un homme vient de se faire abattre en pleine rue.
48:09 -Apparemment, cet adolescent aurait tenté de braquer un groupe de jeunes.
48:14 Comme on le voit, il a une arme à feu à côté de lui, un 9 mm.
48:18 Il a tenté de les agresser, mais ils se sont défendus et l'ont tué.
48:22 Les gens se font justice eux-mêmes.
48:25 Ils ne supportent plus la situation.
48:29 -80 % des homicides sont commis par arme à feu dans le pays.
48:33 Tous au fin hasard.
48:35 -Au Honduras, chaque citoyen peut avoir 5 armes.
48:38 Imagine avec ta femme, vous pouvez avoir 10 armes à vous deux.
48:42 -Ce soir, comme d'habitude,
48:44 les calibres sont encore une fois de sortie.
48:48 A quelques centaines de mètres de là,
48:51 un jeune vient de se faire tuer.
48:54 Musique de tension
48:57 ...
48:59 -Le Faucon travaille pour une chaîne d'info en continu.
49:03 -Je suis actuellement avec un proche de Carla Gomez.
49:06 Il est évidemment très triste de ce décès.
49:09 -Le journaliste ne fait jamais d'investigation.
49:12 Les informations qu'il donne sont toujours assez sommaires,
49:16 mais il y a une bonne raison à cela.
49:20 -C'est dangereux.
49:22 Parfois, on sait qui est l'auteur d'un meurtre
49:25 et pourquoi il l'a fait.
49:27 Celui d'hier s'est fait tuer par la Mara 18,
49:30 parce qu'il était de la Mara 13.
49:33 Mais je m'exposerai à des problèmes avec la Mara 18.
49:36 -Vous vous autocensurez ?
49:38 -Oui, pour protéger ma vie et celle de ma famille.
49:41 -Ces 2 dernières années,
49:43 au moins 5 journalistes ont été tués à Honduras
49:47 pour en avoir trop dit dans leurs reportages.
49:50 90 % des homicides ne sont jamais élucidés dans le pays.
49:53 ...
49:55 ...
49:57 ...
50:00 Pendant notre tournage,
50:02 en près d'un mois,
50:04 460 personnes ont été victimes de meurtres au Honduras.
50:07 Mais tous ces morts ne sont pas une fatalité pour certaines personnes.
50:11 La spirale de la violence doit s'enrayer dès l'enfance.
50:15 ...
50:17 Au coeur d'un territoire en train de se développer,
50:20 au coeur d'un territoire entièrement contrôlé par les Maras,
50:24 une école publique fait figure de camp retranché.
50:27 ...
50:30 ...
50:32 ...
50:34 Roberto Corano, le directeur,
50:36 s'est donné pour mission de défendre ses élèves
50:39 au milieu de ce nid de guêpes.
50:42 ...
50:44 -Vous restez à l'intérieur.
50:46 -A partir de là,
50:48 c'est le territoire d'une Mara.
50:50 ...
50:53 Et de l'autre côté du mur, à l'autre quartier,
50:56 c'est le territoire d'une autre Mara.
50:59 Et ce n'est pas fini.
51:01 Du bas de la rue aux maisons tout là-haut,
51:04 c'est encore un autre gang, les Chirisos.
51:08 Cette zone est dangereuse.
51:10 Dans la rue, il y a une casaloca,
51:12 une de ces maisons où les Maras découpent leurs rivaux.
51:15 Et après, ils les mettent dans un sac.
51:18 Et on les retrouve dans la rue.
51:20 Dans ce conteneur, on a retrouvé 4 corps découpés en morceaux.
51:24 ...
51:26 Le mur porte les impacts de balles
51:28 d'un meurtre survenu un mois plus tôt,
51:30 à l'heure de l'entrée en classe.
51:33 C'était une mère de famille
51:35 qui venait déposer sa fille à l'école.
51:38 Il y a eu une énorme rafale de tirs.
51:40 La petite fille a réussi à s'enfuir en courant,
51:43 mais la mère n'a pas eu cette chance.
51:46 Elle est tombée juste là.
51:48 De là, il y a eu une enquête.
51:50 Et la police a conclu qu'il s'agissait
51:53 d'un règlement de compte
51:55 autour de la vente de la drogue.
51:58 ...
52:00 -Le directeur fait tout son possible
52:02 pour maintenir la violence à l'extérieur de l'école.
52:05 Il y a 3 ans,
52:07 afin d'éviter que des Mareros n'entrent à l'intérieur,
52:11 il a dû fortifier l'enceinte.
52:13 -On a fait relever le mur
52:15 et on a mis des barbelés.
52:17 Quand il était plus bas,
52:19 des jeunes escaladaient.
52:22 Ils allaient jusqu'au salle de classe
52:24 pour repérer et choisir des amis
52:26 ou des futurs membres,
52:28 ou pour vendre leurs drogues.
52:30 -Les Maras ont l'habitude
52:33 de recruter des enfants
52:35 dès l'âge de 8 ou 9 ans.
52:37 Ils en font des guetteurs,
52:39 des mules ou même des tueurs.
52:41 Le directeur et son équipe
52:44 font ce qu'ils peuvent
52:46 pour attraper ceux qui veulent quitter l'école.
52:49 Pas question d'abandonner un seul de leurs élèves.
52:52 Un mois et demi plus tôt,
52:54 le jeune Elmer, 14 ans,
52:57 a failli mal tourner.
52:59 ...
53:01 -Elmer, comment ça va, les études ?
53:03 -Moi, grâce à Dieu, ça va.
53:05 Je retourne en classe.
53:08 Je ne reste plus dehors, comme avant.
53:11 -Quand le directeur parle de la violence,
53:14 il parle de ton passé. Il fait référence à quoi ?
53:17 ...
53:19 -Plein de choses.
53:21 -Les professeurs présents dans la salle le savent.
53:24 Si Elmer parle, il risque sa vie.
53:27 -J'ai eu...
53:30 J'ai eu des problèmes.
53:32 ...
53:34 -Ca va aller.
53:36 -La persuasion
53:38 est la seule arme dont disposent les professeurs.
53:42 ...
53:44 -Maintenant, les profs sont vraiment plus attentifs avec moi.
53:47 Du coup, je vois qu'il faut pas que j'abandonne.
53:50 -Un retour fragile.
53:52 A cet âge charnière,
53:55 près de 40 % des jeunes Honduriens arrêtent l'école.
53:58 Pourtant, le directeur se veut optimiste.
54:01 -On perd très peu d'élèves, finalement.
54:04 On en rattrape beaucoup
54:06 et on arrive à faire changer leur comportement.
54:09 -Comme ce directeur d'école,
54:11 de nombreux Honduriens luttent pour permettre aux jeunes
54:14 d'échapper au maras
54:17 et d'avoir peut-être une vie meilleure.
54:20 ...

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