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  • 01/12/2023
Dans le cadre du festival Migrant'scène organisé par la Cimade, le photographe Christophe Fortin expose les photos qu'il a prises depuis 2019 des habitants des bidonvilles de Montpellier

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Transcription
00:00 Il a pris en photo depuis 2019 les bidonvilles de Montpellier.
00:03 Il expose son travail ce soir à l'alléthropisme de Montpellier.
00:06 Christophe Fortin est notre invité, Anne.
00:08 Bonjour Christophe Fortin.
00:09 Bonjour.
00:10 Comment vous avez commencé déjà à vous intéresser à ces bidonvilles montpellierrins ?
00:15 C'est tout simplement dans le travailler.
00:17 Je passais par Chez Paulette, ce carrefour.
00:21 Le rempois de la Vérune.
00:22 Voilà, c'est ça.
00:23 À l'époque je travaillais pour Midi-Livre, j'étais photographe.
00:26 Et je regardais tous les matins ce bidonville.
00:33 Et un jour je me suis posé une question.
00:37 Je me suis dit, mais il y a des gens qui habitent là, des familles, des enfants.
00:40 Est-ce qu'on les aide ? Qu'est-ce qui se passe ?
00:42 On entend des choses aussi sur les roms.
00:46 Je me suis dit, voilà, tu es journaliste, informe les gens, va voir, va sur le terrain.
00:51 Essaye de les rencontrer.
00:53 Fais un travail, un peu long quand même, parce qu'il faut du temps, pour pouvoir t'informer.
00:58 Et aussi après, par la suite, informer les gens.
01:01 Donc c'est comme ça que vous avez décidé de rentrer.
01:03 Ça a été facile, ça a été bien perçu votre travail ?
01:06 Amener son appareil photo comme ça, c'est pas toujours évident de se faire photographier dans sa vie quotidienne.
01:10 Oui, je ne suis pas venu tout de suite avec mon appareil photo.
01:13 Il faut savoir quand même que lorsque vous rentrez dans un bidonville, vous rentrez chez les gens.
01:17 C'est privé.
01:19 J'étais en observation, j'étais avec l'association AREA, avec les éducateurs, les travailleurs sociaux.
01:28 Je me baladais un petit peu avec eux, je regardais ce qu'ils se faisaient, je m'informais en fait.
01:32 Parce que même tout ce travail social, je ne le connaissais pas non plus.
01:38 Et voilà, je rencontrais les gens, ils me parlaient, ils ne me parlaient pas, au début pas trop.
01:44 Et puis au fur et à mesure, ils ont commencé à me parler, à discuter de choses et d'autres,
01:50 de voitures, avec les garçons, de cuisine.
01:53 J'aime cuisiner donc avec les femmes.
01:57 Vous avez trouvé des points d'accroche ?
01:59 Voilà, c'était une rencontre.
02:02 Et voilà, on me demandait ce que je faisais.
02:05 Je voulais travailler justement avec l'association AREA, voir comment ils travaillaient, les photographier aussi.
02:13 Partager cette rencontre.
02:16 Mais je me suis aperçu que je les suivais comme ça, je les photographiais, mais je ne les connaissais pas non plus.
02:26 Oui, vous étiez encore un peu extérieur à ce monde-là.
02:30 Je ne sais pas vraiment si ça les intéressait aussi.
02:33 Donc voilà, j'ai dit "bon, je vais peut-être travailler un petit peu autrement".
02:38 Je suis rentré dans le bidonville un peu plus.
02:43 Et là, j'ai été accueilli.
02:48 J'ai fait arrêter un petit peu de travailler comme ça, de rencontrer les gens.
02:54 Et là, les gens m'ont laissé rentrer dans leur lieu de vie, le caravane.
02:59 C'est ce qu'on voit dans votre exposition.
03:01 Il y a à la fois des scènes de vie quotidienne, dans ces trois bidonvilles qui depuis ont été détruits.
03:07 Comme vous dites, dans les caravanes, dans les rues du bidonville.
03:11 Et puis, des photos un petit peu plus posées.
03:13 Voilà, des photos un peu plus posées.
03:15 J'avais envie de faire ça aussi, parce que c'est le regard des autres.
03:19 Il y a le regard des autres, mais il y a leur regard aussi.
03:23 Ils ont voulu poser, ils ont bien voulu poser.
03:29 Ils m'ont appelé, des hommes, des femmes m'ont appelé comme ça.
03:34 J'ai des photos où elles posent.
03:37 Des portraits, en fait.
03:38 Je trouve ça très très beau.
03:40 Et pour ceux qui veulent voir le résultat, vous pouvez regarder ces photos sur France 3 Occitanie en direct en ce moment.
03:46 Est-ce que vous avez été surpris de certaines choses ?
03:48 Est-ce que vous êtes arrivé avec une idée et vous avez dit "ah oui, j'étais à côté de la plaque" ?
03:51 Est-ce que votre regard a changé sur certaines choses quand vous êtes rentré dans ces bidonvilles ?
03:56 Le regard, oui, change quand même.
03:59 Parce que ces gens vivent dans une grande précarité.
04:02 C'est leur quotidien.
04:05 Et effectivement, c'est quand même...
04:10 La première journée quand vous rentrez chez vous, c'est compliqué, c'est ça ?
04:13 Ça marque pour Frère Rouge ?
04:15 On s'interroge.
04:17 Je suis journaliste, on s'interroge vraiment.
04:20 On se pose vraiment des questions.
04:23 Mais non, j'avais pas de...
04:26 Au départ, je voulais vraiment travailler.
04:29 Par rapport à tout ce que j'avais entendu, je me dis "mais c'est des êtres humains quand même, c'est des gens qui vivent là".
04:35 Et c'est pour ça que ces portraits m'intéressaient aussi après.
04:40 Et je crois que ça les intéressait aussi.
04:43 Et ça m'a amené ensuite à faire des portraits dans l'association Réa, dans les locaux de l'association Réa, avec un fond neutre.
04:51 Et sortir un petit peu du bidonville.
04:53 Et là, magnifiquement, ils ont bien voulu poser.
04:57 Et voilà, là ils me regardent.
05:00 Là, votre idée c'était de dire "je les prends en photo comme je prendrais finalement n'importe qui d'autre".
05:04 Vous, moi, vous.
05:05 Sorti du contexte, quand on voit les images sur France 3, sorti du contexte, on n'a pas l'impression que ce sont des gens qui vivent dans des bidonvilles.
05:11 C'est ça qui est intéressant, je crois.
05:13 Oui, oui, oui, c'est essayer de poser un autre regard sur ces habitants des bidonvilles.
05:18 Vous avez fait des rencontres dans ces bidonvilles, évidemment.
05:21 Vous êtes resté en contact avec les familles, avec les gens que vous avez photographiés ?
05:25 Alors, après, quand il y a eu les expulsions, j'ai essayé, moi, j'ai pris un peu de recul aussi, parce que c'est quand même une extrême violence.
05:36 Je me rappelle, j'ai vu il n'y a pas si longtemps que ça, Héléna.
05:40 Et je me rappelle, Héléna, elle était sur le Masse Rouge.
05:44 Et à un moment, il y avait les expulsions, tout, donc c'était quand même assez violent, même pour les enfants.
05:49 Il y avait des policiers, il y avait des...
05:52 Vous étiez là, à ce moment-là, vous ?
05:53 J'étais là, oui, oui, j'étais là.
05:55 Et Héléna me voit comme ça, et elle se met à crier, quoi.
06:02 J'ai l'impression qu'elle m'a hugulé, mais pas du tout.
06:05 Je suis allé en discute avec elle il y a deux, trois jours, elle me dit "non, c'est ma colère".
06:08 C'était ma colère par rapport à cette situation, quoi.
06:12 Héléna, qui était une habitante, du coup...
06:14 Oui, qui maintenant habite avec sa maman dans un logement, où toute leur famille vive.
06:20 Et donc ça, c'est des gens que vous suivez encore ?
06:22 Ce n'est pas des gens que je suis là, je suis des gens sur Zenit 1, j'ai repris un travail avec l'Assimad,
06:28 et j'ai retrouvé deux familles, Afim de Victor et de Cosmin,
06:32 et donc là, je vais les suivre un peu plus longuement.
06:36 Je fais aussi un travail avec l'Assimad et l'association 14,
06:40 et qui essaie de mettre, et la mairie aussi, qui essaie de mettre en place des structures,
06:46 des douches, des WC, refaire l'électricité, amener l'eau, voilà, pour que les gens soient...
06:58 - Rendre l'endroit plus salubre. - Voilà.
07:00 C'est un mal pour un bien, du coup, ce déménagement compliqué,
07:03 enfin en tout cas cette expropriation, on va dire, des bidonvilles.
07:05 Aujourd'hui, vous dites que ce sont des personnes qui sont logées,
07:08 comment vous analysez du coup la situation ? C'est bien, pas bien ?
07:12 - Non, les gens sont partis à 500 mètres, il y a ce qu'ils appellent maintenant le Zénith 2,
07:18 ils sont partis, ils ont été... Le Zénith 1, le Zénith 2, qui a été évacué, c'était plus vieux,
07:24 c'était 2006, il y avait quand même plus de 200 personnes, plus de 50 familles, quoi,
07:30 et en plus les enfants allaient rentrer à l'école, donc ils n'ont même pas pu rentrer à l'école,
07:34 il y a des femmes qui travaillaient, qui se sont retrouvées à la rue,
07:39 c'est quand même d'une extrême violence, quoi.
07:42 - Donc la destruction des trois bidonvilles dans lesquelles vous avez travaillé,
07:46 pour vous n'a rien changé, ou ça a amélioré le quotidien de certaines familles quand même ?
07:50 - Non, non, non, ça n'a rien amélioré, au contraire, et ça d'autant plus qu'il y avait tout un travail
07:56 effectué par les associations, et tout ça, après, tout ça est parti,
08:02 et il a fallu que les associations reviennent, reparlent, remettent en place des...
08:07 il n'y a eu plus de confiance, il y a eu moins de confiance, il n'y a eu pas plus de confiance,
08:11 parce que quand même les associations comme Aïréa, la CIMAD sont vraiment présentes,
08:17 mais bon, c'est un travail qui, à un moment, se détruisait aussi, quoi.
08:24 - Ça s'arrête en instant T et qu'il faut reconstruire en suivant.
08:27 - Ça a été violent, même pour moi, ça a été, dans la moindre mesure, ça a vraiment été violent, quoi.
08:33 - On peut voir, Christophe Fortin, votre travail dans cette expo photo sur les bidonvilles de Montpellier,
08:39 à la Halle Tropisme, ce soir, c'est dans le cadre d'une soirée organisée par la CIMAD
08:43 dans le festival Migrants Scènes, l'expo, elle ouvre à 19h, il y aura des discussions ensuite
08:49 au sujet de la résorption des bidonvilles avec les associations, et puis un concert,
08:54 on essaye de rendre tout ça un petit peu festif, merci beaucoup !
08:56 - Merci, je vous remercie bien.

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