La maltraitance proctologique

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00:00 J'ai été opéré sans anesthésie et ça tous les mois pendant plusieurs années.
00:03 Je vous remercie une vidéo qui est violente, donc il y a des détails qui sont vraiment
00:06 glauques.
00:07 Je vais vous parler de maltraitance médicale.
00:09 A l'époque j'avais 21 ans, je venais d'apprendre que j'avais le VIH et j'avais une co-infection
00:13 au HPV, donc le papillomavirus.
00:15 Ça tombe bien, on en parle beaucoup en ce moment.
00:16 Et j'avais des condylomes accumulés internes, donc à l'intérieur de l'anus.
00:20 Dans ce cas là, on est censé faire une opération chirurgicale, anesthésie générale, on retire
00:24 et puis après on fait une surveillance.
00:25 A l'époque, le médecin sur lequel je suis tombé ne pouvait pas m'opérer et plutôt
00:29 que de me rediriger, a décidé de faire ses interventions sur moi, sans anesthésie.
00:33 Je me retrouvais à 4 pattes sur une table et une séance sur deux, il faisait venir
00:37 les étudiants qui avaient mon âge.
00:38 On pouvait être jusqu'à 6 dans le cabinet pour que les étudiants soit regardent, soit
00:42 s'entraînent sur moi.
00:43 Il intervenait au bissouris électrique, donc dans l'anus.
00:45 En plus, il m'engueulait parce que je n'étais pas censé bouger pour qu'il puisse opérer.
00:50 Vous imaginez forcément que c'était affreusement douloureux, donc c'était un peu compliqué
00:54 de ne pas bouger.
00:55 En plus d'être à 4 pattes au milieu d'une ronde d'étudiants qui avaient mon âge qui
00:58 regardait la scène.
00:59 Étant donné que c'était parfois jusqu'à tous les mois, il intervenait sur des plaies
01:03 qui n'avaient jamais le temps de cicatriser, donc j'ai été pendant plusieurs années
01:06 à un continent constamment en cicatrisation, entre de la merde, du pu et du sang.
01:12 Je suis en train de parler à plein d'autres médecins qui tous me répondaient que c'était
01:17 le protocole qu'ils avaient choisi.
01:18 Et quand d'un coup tous les autres médecins trouvent ce que tu subis normal, c'est très
01:21 compliqué d'arriver à prendre conscience que c'est pas du coup pas normal.
01:24 C'est seulement au bout de plusieurs années, et après avoir plusieurs fois parlé à mon
01:27 médecin du fait que je voulais mettre fin à mes jours, tout en expliquant que à 20
01:34 ans c'était compliqué de ne plus avoir de vie sexuelle, de ne plus pouvoir faire
01:36 de sport, de ne plus pouvoir avoir de vie, de devoir quasiment vivre avec des couches
01:41 que je refusais d'ailleurs de mettre, et que je voyais pas le bout du chemin, je me
01:48 dis "mais comment est-ce que je vais vivre dans 5 ans, dans 10 ans, dans 20 ans, dans
01:50 30 ans ?" Et c'est une séance que j'appelais les séances de torture, après avoir insisté
01:54 sur le fait que je voulais vraiment mettre fin à mes jours, qu'il a un peu pété les
01:59 plombs en s'énervant, en m'expliquant que j'avais pas à râler, que j'avais un
02:02 traitement déjà, que j'avais pas à me plaindre, et que l'écroute qu'il était
02:04 en train de me faire à l'intérieur du conduit allait être un avantage si un jour je redécidais
02:09 d'avoir à nouveau une sexualité, parce que ça frotterait le gland de mon partenaire,
02:12 donc ça serait un kiff pour lui.
02:13 Il a rajouté à ça que je pouvais aussi mettre des gants, c'était plus sûr avec
02:16 le papillomavirus, et que ça donnerait un petit côté SM à ma sexualité.
02:19 Après un discours pareil, j'ai plus jamais voulu y remettre les pieds, et heureusement,
02:24 parce que c'est ça qui m'a sauvé.
02:26 J'ai été en errance médicale pendant quasiment plus d'un an, et puis j'ai fini
02:30 par me faire une déchirure anale qui a fait qu'on m'a réopéré en urgence.
02:34 J'ai été pris en charge par un autre médecin qui m'a fait une intervention et
02:37 a réglé le problème en une opération.
02:39 Malheureusement, il s'avérait que quelques temps plus tard, elle était sérophobe, donc
02:43 ça m'a pas non plus beaucoup aidé.
02:44 Il y a deux ans, quand je vous ai raconté cette histoire, vous m'avez encouragé à
02:47 faire un dépôt de plainte, et je vous remercie pour ça, parce que j'ai tenté de le faire.
02:50 J'ai eu une expertise médicale qui en a déduit qu'il n'y avait eu aucune violence
02:54 médicale et que ce que j'avais subi était le protocole standard pour les patients homosexuels,
02:59 et que toute la souffrance que j'avais vécue était induite par, je cite ce qu'il y avait
03:05 écrit dans l'expertise, "mes habitus sexualis".
03:07 Maintenant, il faudrait que j'ai le courage de reporter plainte et de porter plainte aussi
03:11 contre l'expertise.
03:12 Tout ça pour dire que dès que ça touche à l'intimité, du coup, il y a encore plus
03:16 de violence, parce que le tabou fait qu'il y a du silence et que certaines personnes
03:19 se sentent toutes puissantes, je suppose, je sais pas.
03:22 Que contrairement à ce qu'on avait voulu me faire croire, je n'ai pas à avoir honte
03:25 de parler de mon cul, de mon anus ou de caca.
03:28 La seule chose qui est honteuse dans cette histoire, c'est la torture qu'on m'a fait
03:32 subir pendant trois ans qui a failli me tuer.