• il y a 2 ans

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00:00 Emmanuel Macron a annoncé il y a un mois vouloir produire 2 millions de véhicules électriques en France en 2030
00:05 et permettre aux français d'en louer 1% d'euros par mois.
00:08 On parle ce matin dans l'Eco d'ici avec Laurent Castagnet, il est bordelais, ingénieur centralien,
00:14 directeur du B2C2, bureau d'études spécialisé en bilan carbone.
00:24 Il vient de sortir son 4ème essai intitulé "La ruée vers la voiture électrique, entre miracle et désastre"
00:30 Thomas Coignac, il est notre invité ce matin.
00:31 Bonjour Laurent Castagnet, plutôt miracle ou désastre alors cette voiture électrique ?
00:35 Mais est-ce que c'est pas un peu les deux en même temps ?
00:37 C'est un peu un miracle technologique parce qu'on a un véhicule thermique qui depuis la fin du 19ème siècle
00:45 pollue, encombre les vides etc.
00:48 Et puis là tout d'un coup on se dit, l'électrification qu'on a tenté plusieurs fois dans l'histoire
00:51 mais à chaque fois elle a échoué, on se dit oui c'est un miracle puisque tout d'un coup ça ne pollue pas.
00:56 Mais en fait c'est potentiellement un désastre à la fois pour la fabriquer
00:59 et puis même il faut quand même de l'électricité pour la recharger.
01:01 Cette électricité ça n'arrive pas par le ciel et les éclairs.
01:05 Est-ce que vous dites que le problème c'est pas la voiture en elle-même, c'est notre réseau ?
01:09 C'est les deux, c'est-à-dire que la voiture est aussi un problème dans le sens où il y en a trop simplement.
01:14 Donc ça c'est un premier problème de la voiture, après le deuxième c'est qu'elle est de plus en plus grosse.
01:18 Et ça, même jusqu'à l'ONU on crie depuis 30 ans sur le fait qu'elle n'arrête pas de grossir,
01:25 d'avoir une masse de plus en plus grande.
01:27 Et en fait l'électrification au lieu d'aller, en tout cas dans la tendance actuelle,
01:30 vers des voitures un petit peu moins grosses, un petit peu moins lourdes,
01:34 c'est exactement l'inverse qui est en train de se produire.
01:36 C'est-à-dire vraiment une marche d'escalier vers encore plus de surpuissance, de surpoids et de surgabaris.
01:41 Et une voiture électrique ça a du sens écologiquement que si c'est un petit modèle, c'est ça en fait ?
01:47 Pas forcément, parce que déjà ça a du sens que si elle ne s'ajoute pas,
01:51 c'est-à-dire qu'il y a un minima, il faut la substituer.
01:54 Après on dit il faut des petites voitures électriques,
01:56 mais en fait aujourd'hui, regardez dans les villes, les plus petites voitures électriques,
01:59 ce sont des lycéens qui les conduisent.
02:01 Donc est-ce que ces personnes-là ne seraient pas mieux en scooter, sur leur vélo ou dans des bus ?
02:06 Donc en fait simplement dire il faut plus de petites voitures électriques,
02:09 ce n'est même pas forcément la solution.
02:11 Ce dont on a besoin c'est surtout de réguler le parc et de réguler la taille des véhicules.
02:16 Et alors vous faites une proposition qui ne va pas vous faire faire que des copains,
02:21 le prix du litre d'essence à 5 euros, voilà ce qui découragerait les gens de prendre leur voiture.
02:25 Non, ce que j'ai écrit depuis plusieurs années,
02:26 c'est qu'effectivement il faudrait monter le prix du carburant de 3 à 5 euros.
02:30 L'idée en fait, enfin pas l'idée, la question derrière,
02:33 essentielle, c'est de savoir en gros est-ce que les carburants,
02:36 est-ce que c'est de la pomme de terre ou du tabac ?
02:39 C'est-à-dire qu'en gros est-ce que c'est un aliment de première nécessité,
02:42 voir les gilets jaunes et se dire "oh là là, ces gens-là dépensent tellement d'argent
02:45 qu'il faut absolument détaxer le carburant".
02:47 Sauf que la réponse systémique, ça s'appelle les États-Unis
02:50 où les véhicules depuis 100 ans ne sont quasiment pas taxés,
02:53 l'essence en tout cas, et qu'est-ce qu'on a ?
02:55 On a des véhicules une demi-tonne plus lourds
02:57 et des gens aux États-Unis qui habitent 5 km plus loin de leur travail que le français moyen.
03:02 - Non mais c'est le problème, les gens ils habitent pas forcément tout près de leur travail,
03:05 ça arrive une vingtaine, une trentaine, une cinquantaine de kilomètres,
03:07 ils ont besoin de la voiture.
03:08 - Si on regarde l'histoire, la question c'est pourquoi ils habitent si loin de ce travail ?
03:11 Et en fait, à l'origine du problème, c'est le train de banlieue
03:14 et surtout la voiture individuelle.
03:16 C'est le fait qu'on a des kilomètres qui sont accessibles pour assez bon marché
03:20 et avec un véhicule assez rapide,
03:22 et la réponse en quelques décennies, ça a été finalement de l'étalement,
03:25 l'augmentation des distances entre par exemple le domicile et le travail,
03:29 mais on a la même chose au niveau des trajets pour aller faire ses courses ou partir en vacances.
03:33 Et au-delà de quelques dizaines de kilomètres, la voiture devient incontournable.
03:37 Elle a trouvé, ce que dit Bernie Lich, son monopole radical.
03:41 Donc là aujourd'hui, le sujet, c'est pas de se dire,
03:43 donner aux gens un véhicule encore plus rapide et encore moins cher
03:47 pour essayer de les soulager.
03:48 Non, dans 10 ans, 20 ans, les mêmes personnes, elles habiteront encore plus loin.
03:51 - Mais puisque aucun politique mettra le litre d'essence à 5 euros,
03:54 sinon il gagnerait aucune voix.
03:55 Où est la sortie ? Où est la porte de sortie ?
03:57 - Non, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous
03:59 parce que justement, l'essence est très taxée.
04:01 Et encore, elle est moins taxée aujourd'hui.
04:03 Aujourd'hui, le prix de l'essence, la moitié, c'est de la taxe.
04:05 Mais historiquement en France, c'était 80 % il y a 30 ou 40 ans.
04:08 Donc on a taxé l'essence, c'était un produit de luxe,
04:11 au début, une denrée coloniale il y a un siècle.
04:14 Donc on sait quand même taxer le carburant.
04:16 Non, donc je ne suis pas d'accord.
04:17 Après le tabac, par exemple, on a décidé de dire,
04:20 il y a trop de gens qui ont une addiction là-dessus, il faut s'en défaire.
04:23 Qu'est-ce qu'on fait ? On supprime les publicités.
04:25 Donc là, on supprimerait par exemple les publicités sur tous les SUV.
04:27 Et puis après, on taxe, mais on dégage de l'argent
04:29 pour aider les gens à sortir de cette addiction.
04:32 C'est-à-dire, plutôt que de financer le carburant,
04:34 essayer de soutenir les gens pour les aider à déménager
04:36 ou aider à déménager leur travail.
04:38 Et ce sont les pistes que vous évoquez donc dans votre livre,
04:41 "La ruée vers la voiture électrique entre miracle et désastre"
04:43 qui vient de sortir.
04:44 Merci Laurent Castaignet d'avoir été avec nous.

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