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  • 05/10/2023

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Transcription
00:00 Demain et samedi se tient le salon du livre animalier à Perigueux,
00:03 deux jours d'échanges, de conférences,
00:05 sous la présidence d'honneur du moine bouddhiste Mathieu Ricard.
00:08 Il est notre invité ce matin et il répond à vos questions, Louis de Bergevin.
00:11 Bonjour Mathieu Ricard.
00:14 Bonjour.
00:15 Vous avez justement écrit plusieurs livres sur la condition animale,
00:18 c'est un sujet qui vous touche.
00:21 On ne respecte pas assez les animaux aujourd'hui ?
00:24 Si vous voulez, moi j'ai écrit des livres sur l'altruisme en général, la bienveillance,
00:28 et on ne peut pas exclure les 8 millions d'autres espèces
00:31 qui sont nos concitoyens en ce monde, et ce pour vraiment plusieurs raisons.
00:36 Tout d'abord, on estime qu'il y a environ 120 milliards d'êtres humains
00:39 qui ont vécu sur Terre depuis que les Homo sapiens existent,
00:41 et c'est le nombre d'animaux qu'on tue pour nos prétendus besoins
00:44 tous les deux mois, deux mois après deux mois.
00:46 Donc c'est beaucoup de morts et beaucoup d'animaux.
00:48 On sait maintenant, les scientifiques sont d'accord,
00:50 que les animaux les plus évolués ont une conscience,
00:53 c'est des êtres sensibles, qui ressentent de la douleur,
00:56 qui jouent, qui sont capables de faire des choses assez étonnantes.
00:59 Il y a des bonobos qui sont meilleurs en calcul mental que des humains,
01:02 des corneilles de Calédonie qui font des outils,
01:04 les utilisent, les conservent et les réutilisent.
01:07 Donc si vous voulez, c'est un peu "nous sommes tout, ils sont rien".
01:11 Donc au point de vue éthique, il y a vraiment un fossé qui reste à combler.
01:15 Il y a une autre chose aussi importante, c'est que tout le monde y perd.
01:17 D'abord les animaux en premier, ensuite les êtres humains également.
01:20 Parce que si vous voulez, c'est la deuxième cause d'émissions de gaz à effet de serre,
01:28 c'est l'élevage industriel pour la consommation de viande,
01:31 c'est 14% et donc c'est la chose la plus facile
01:35 qui permettrait de réduire un peu le réchauffement climatique.
01:38 Ensuite, pour terminer, on a presque un milliard de tonnes de grains,
01:43 de céréales qui vont des pays d'Amérique du Sud et d'Afrique
01:47 vers les pays riches pour faire de la viande,
01:49 qui pourraient nourrir un milliard et demi de personnes
01:51 et qui en ont bien besoin.
01:52 Donc vous voyez, en gros, tout le monde y perd.
01:54 - Donc c'est pour ça que vous participez au salon du livre animalier à Périgueux.
02:00 Mais quand vous allez à un salon comme ça,
02:02 vous parlez à des gens qui sont déjà sensibilisés ?
02:06 - Je ne sais pas.
02:07 Moi, on m'a proposé, on m'a gentiment demandé de participer.
02:10 Je pense qu'il faut encourager ce genre d'initiatives.
02:13 C'est le premier salon du livre animalier en France, semble-t-il.
02:16 Et donc, si on me demande, moi, je suis prêt à servir
02:20 et à partager des idées qui me sont chères.
02:23 Et le public, c'est lui qui décidera.
02:25 Si vous voulez, je ne donne pas de leçons de morale.
02:29 Je vais simplement montrer un peu les faits,
02:31 qu'est-ce qu'on connaît, qu'est-ce que la science vous dit,
02:33 quels sont les chiffres et tout ce qui concerne le climat,
02:37 la pauvreté, sur la santé, les effets de la viande rouge sur la santé.
02:41 Et après, c'est à chacun de décider en son âme et conscience.
02:45 C'est à chacun et chacune.
02:46 7h48 sur France Bleu Périgord.
02:48 Notre invité ce matin, c'est Mathieu Ricard, moine bouddhiste
02:50 et président d'honneur du salon du livre animalier.
02:53 Il répond à vos questions, Louis de Bergevin.
02:55 Justement, on parle ce matin des difficultés dans les restos du cœur
03:00 qui ne peuvent pas accueillir tout le monde.
03:02 Là aussi, c'est un symptôme du manque d'altruisme dans notre pays.
03:08 Le manque d'altruisme, je crois, bon, tout le monde a des difficultés, c'est évident.
03:12 Néanmoins, la solidarité, le prendre soin de l'autre,
03:17 il est évident que beaucoup de grands penseurs ont souligné
03:22 que la coopération est la seule solution d'avenir.
03:26 On n'en a pas assez aujourd'hui dans notre société de l'altruisme ?
03:32 On pourrait faire mieux, c'est sûr, mais en même temps,
03:35 si vous voulez, en France, il y a beaucoup de bénévolats en France,
03:38 et ce n'est pas compté dans le PIB,
03:39 on compte le trafic de drogue, la prostitution et le trafic d'armes,
03:43 mais on ne compte pas le bénévolat qui est important.
03:45 Donc, il y a aussi une banalité du bien qu'on ne voit pas,
03:48 parce que les gens, finalement, dans la plupart des 8 milliards d'êtres humains,
03:52 se comportent de façon décente la plupart du temps,
03:55 et on est choqué quand il y a des choses comme ça.
03:58 Néanmoins, je pense qu'avec toutes les crises récentes,
04:01 la peur, avec les guerres, etc.,
04:04 on se replie un peu sur soi-même, alors que nous sommes…
04:08 il faut mettre l'accent sur notre humanité commune
04:11 et prendre soin des plus démunis, ça c'est clair.
04:13 D'ailleurs, à Périgueux, la Maison 24 que je soutiens,
04:17 fait exactement un peu le même travail que les Restos du Coeur,
04:21 pour soutenir les sans-abri, en difficulté alimentaire.
04:25 Mathieu Ricard, quand vous êtes en France,
04:26 vous passez la plupart de votre temps en Dordogne,
04:29 quel est votre lien avec le Périgord ?
04:32 Si vous voulez, je suis allé en Inde en 1967, la première fois,
04:36 j'ai rencontré des grands maîtres tibétains,
04:37 et il se trouve que les fils de mon maître spirituel
04:42 vivent une grande partie du temps en Dordogne,
04:44 au Centre d'études de Chanteloupe,
04:46 et donc beaucoup de mes amis depuis 40-50 ans sont là,
04:50 donc quand je viens en France de 3 mois par an,
04:52 j'ai joie d'être en Dordogne et j'apprécie beaucoup cette belle région.
04:56 La Dordogne notamment, c'est un département connu pour le foie gras,
05:01 le gavage de canards, qu'est-ce que…
05:04 on a tous nos contradictions,
05:08 mais c'est quelque chose que vous…
05:09 quel oeil vous portez dessus ?
05:12 Écoutez, la grande romancière Marguerite Goursonnard se dit
05:15 "je ne veux pas faire de mon estomac un cimetière",
05:17 et je pense qu'on peut parfaitement vivre sainement
05:21 et s'alimenter sainement et de façon délicieuse,
05:24 sans pour autant le faire au prix de la souffrance
05:26 et de la mort d'autres êtres sensibles.
05:28 Et là, vraiment, il n'y a pas vraiment d'excuse, disons.
05:32 Et le coût de la tradition, c'est une excuse facile,
05:36 mais il n'y a pas de valeur morale à cela.
05:39 Donc on imagine que vous préférez les noix et les cèpes du Périgord au foie gras.
05:44 Exactement.
05:44 Merci beaucoup Mathieu Récard, moine bouddhiste,
05:47 et donc président d'honneur du Salon du Livre Animalier
05:51 qui se tient demain et samedi à Périgueux.

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