« Si ce n’est pas de l’esclavage, c’est quoi ? » : Emmaüs visée par une enquête pour « traite d’êtres humains »

  • l’année dernière
Des travailleurs sans-papiers d’une antenne d’Emmaüs située à Saint-André-lez-Lille (Nord), sont en grève depuis début juillet. Ils dénoncent le rythme et leurs conditions de travail, mais aussi des promesses non-tenues sur leurs perspectives de régularisation. Des accusations que la direction locale nie fermement. Le parquet de Lille a ouvert une enquête préliminaire pour « traite d'êtres humains » et « travail dissimulé ».

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Transcript
00:00 Ici, ce n'est pas de l'esclavage.
00:01 C'est de quoi ?
00:02 On n'est pas là pour salir l'image d'Imaïs, non.
00:05 On demande juste notre droit qui nous revient.
00:08 C'est tout ce qu'on demande.
00:09 L'esclavage, c'est l'immunité.
00:13 L'esclavage, c'est l'immunité.
00:17 L'esclavage, c'est l'immunité.
00:19 L'esclavage, c'est l'immunité.
00:23 L'esclavage, c'est l'immunité.
00:26 C'est de l'esclavage qu'on vit là.
00:28 On travaille 40 heures par semaine pour gagner 150 euros par mois.
00:32 C'est vraiment catastrophique.
00:34 Le bénévolat, c'est en quelque sorte donner quelques heures de son temps.
00:39 Mais ce n'est pas faire 40 heures par semaine.
00:42 J'ai fait des travaux ici, à Imaïs.
00:45 Des travaux qui méritent 3 à 4 personnes.
00:49 Et lorsque j'ai fini ces travaux,
00:51 on me met encore sur d'autres types de travail
00:55 avec des pressions très intenses.
00:58 Je n'avais pas de choix parce qu'il y avait la menace d'expulsion.
01:03 On me disait ça, les responsables précisément.
01:07 Si tu ne fais pas le travail qu'on te donne,
01:10 tu libères l'appartement et tu retournes en Afrique.
01:14 C'est du racisme, ça me blesse, ça touche ma dignité.
01:19 Et je me sens comme un être humain de seconde catégorie.
01:23 Quand je suis enceinte, je travaille jusqu'à le jour où je vais accoucher.
01:27 Je travaille jusqu'au dernier jour.
01:29 Mon deuxième enfant, je travaille jusqu'au soir et la nuit.
01:34 À 23h, j'ai pris le bus pour aller à l'hôpital.
01:37 J'ai accouché le matin.
01:39 Non, après l'accouchement, il n'y a pas de repos.
01:41 La quasi-totalité des bénévoles, c'est la promesse qu'ils ont reçue.
01:46 C'était de travailler durant 3 ans
01:50 et au sortir de ces 3 ans, ils devraient être régularisés.
01:55 Et donc, ils se sont donné corps et âme.
01:58 C'est ça aussi qui nous motive.
02:00 Parce qu'on n'est pas fou pour faire 40 heures par semaine à cause de 150 euros.
02:05 C'est impossible.
02:07 C'est la seule promesse qui nous a tenus ici.
02:10 Aujourd'hui, ce n'est pas le cas.
02:12 Elle nous a très fait comprendre qu'il n'a jamais été question
02:16 d'être régularisé au bout de 3 ans
02:18 et que les gens pouvaient même faire 10 à 15 ans ici.
02:22 Et que la question d'être régularisé au bout de 3 ans,
02:24 c'est une imagination que nous nous sommes faite.
02:26 Est-ce que vous reproduisez votre grève lundi ?
02:30 Si oui, vous levez la main.
02:32 A l'unanimité, les sans-papiers de Saint-André.
02:37 À partir d'une promesse mensongère,
02:44 d'une régularisation au bout de 3 ans,
02:47 on leur a fait accepter des conditions de travail.
02:49 Eux se sont dit "on va souffrir 3 ans et après on pourra construire notre vie".
02:54 Et en réalité, cette promesse était complètement frauduleuse
02:57 puisque Emmaüs Saint-André n'a même pas l'agrément pour rentrer dans le statut WACAS
03:02 qui permettrait une éventuelle régularisation au bout de 3 ans.
03:05 Donc on a une direction qui a volontairement menti sur un statut qu'elle n'a pas
03:10 pour amener des personnes désespérées à accepter des conditions de travail
03:15 qui sont quasi escravagistes.
03:17 On est stupéfaits, parce que s'il n'y avait même que 2 ou 3%
03:36 des allégations qui sont transmises qui étaient vraies,
03:40 moi en tant que président de la Halte Saint-Jean,
03:43 j'aurais fermé la Halte Saint-Jean depuis longtemps.
03:46 Et si elle continue, c'est que ça n'est pas vrai.
03:49 Parce que la Halte Saint-Jean n'est pas un lieu d'exploitation,
03:52 n'est pas un lieu d'esclavagisme.
03:54 La Halte Saint-Jean est un lieu d'accueil, d'accompagnement des personnes.
04:00 Mais on n'a jamais promis quoi que ce soit, et certainement pas,
04:05 de dire "vous venez ici et dans 3 ans, vous serez régularisé".
04:09 Ce serait stupide de ne pas le faire, et ce serait une tromperie.
04:13 Et on n'a jamais pratiqué ça.
04:15 Moi, je cherche parti de ces jours.
04:22 Je veux que le monde entier connaisse comment on travaille à la Halte.
04:29 Comment on fait de fausses promesses aux gens qui viennent.
04:33 Parce que s'il n'y a pas de fausses promesses,
04:35 je ne pense pas qu'il y a quelqu'un qui va accepter de rester là-bas 10 ans
04:39 pour faire 8 heures par jour pour 150 euros par mois.
04:42 [Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org]

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