Zoom - Laurent Richier : Le scandale de la viande en barquette

  • l’année dernière
Laurent Richier est devenu boucher par accident. Issu d’une famille très modeste, il sait que ses parents ne sont pas du genre à le laisser chômer. Après une scolarité difficile et un certain mépris du corps professoral, il se résout à suivre un cursus de CAP en boucherie. Très vite, les images qu’il doit côtoyer chaque jour le heurtent. Plus encore que la cohabitation avec les animaux morts, Laurent Richier doit avant tout affronter des pratiques frauduleuses et dangereuses pour les consommateurs. Les viandes périmées sont reconditionnées, souvent plusieurs fois. Les laboratoires de préparation sont parfois partagés avec les rats, les bacs, les outils et les broches sont sales, la viande diffuse une odeur nauséabonde. Une seule obsession, limiter les pertes au maximum, et tant pis si le client s’intoxique. A cela s’ajoute bien sûr, les très grandes failles de traçabilité qui ont souvent pu donner lieu à des scandales d’ampleur à l’image de l’affaire des lasagnes de cheval. Dans tout cela, les autorités sanitaires apparaissent bien timides, et c’est aussi ce que dénonce Laurent Richier dans son ouvrage "Viande : Et si vous saviez..." (VA Editions). Un entretien qui vous fera mieux choisir où vous achetez votre steak !

Category

🗞
News
Transcript
00:00 Chaque don compte pour nous aider à franchir avec succès cette période difficile.
00:09 Financez TVL maintenant !
00:11 Financez TVL, c'est essentiel !
00:14 Face aux médias mainstream subventionnés, ayez de la vraie information, faites des dons
00:19 à TVL.
00:20 C'est essentiel !
00:21 Rendez-vous sur le site TVL.fr, cliquez sur la rubrique « Dons » on a besoin de vous
00:26 pour la liberté d'expression.
00:28 Bonjour à tous, pour le Zoom aujourd'hui, je reçois Laurent Richier.
00:53 Bonjour monsieur.
00:54 Bonjour.
00:55 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:56 C'est moi qui vous remercie.
00:57 Je vais vous présenter cet ouvrage dont les téléspectateurs ont déjà peut-être pris
01:00 connaissance puisque vous avez fait une belle promo.
01:02 Cet ouvrage qui s'intitule « Viande et si vous saviez, un boucher de la grande distribution
01:08 parle ». C'était aux éditions VA.
01:10 Un boucher de la grande distribution, bien sûr, on va le comprendre, Laurent Richier,
01:14 c'est vous.
01:15 Vous avez raconté dans cet ouvrage votre enfance, comment vous en êtes arrivé à
01:18 devenir boucher, un métier pas vraiment passion pour vous.
01:23 Comment justement expliqueriez-vous ça aux téléspectateurs ?
01:27 Disons que quand on est gosse et quand on n'aime pas l'école, quand on a des mauvaises
01:31 notes, c'est toujours difficile de vouloir essayer de faire un métier comme le vôtre
01:37 par exemple ou d'être ingénieur ou quoi que ce soit.
01:39 Et si c'est que j'aimais pas l'école et je suis ici d'une famille ouvrière,
01:44 on n'avait pas le sou, mais mes parents, surtout mon père, ne concevaient pas d'avoir
01:48 un train de savate, un fainéant à la maison.
01:51 Donc il a fallu automatiquement que je cherche un travail.
01:55 Alors je suis tombé dans la boucherie, mais j'aurais pu être boulanger, j'aurais
02:00 pu être menuisier, mais c'était dans les années 80 et finalement je me suis retrouvé
02:06 boucher.
02:07 Mais j'en veux quand même à l'éducation nationale, à l'époque, parce que voilà,
02:13 mes années d'ailleurs, je l'écris dans le livre, mes années d'école n'ont
02:16 pas été vraiment formidables.
02:18 J'étais gros, j'ai vécu l'agrossophobie, j'ai vécu des choses abominables.
02:24 Et quand je suis tombé sur cette conseillère d'orientation qui m'a carrément mis plus
02:29 bas de terre en disant à mes parents "de toute façon votre fils il est bon à rien,
02:35 il faut qu'il travaille".
02:37 Alors que voilà, c'est comme ça que je me suis retrouvé dans la boucherie, j'ai
02:41 tapé aux portes et je me suis retrouvé comme boucher.
02:43 Un métier que je ne voulais pas faire.
02:45 – Et alors c'est assez terrible ce que vous racontez parce que finalement si on envoie
02:48 dans la boucherie les gens comme si c'était une voie de garage, finalement on s'étonne
02:53 assez peu par la suite des dérives que vous allez nous raconter puisque ce ne sont que
02:57 des gens essentiellement qui font cela par dépit.
02:59 – Disons que moi j'ai pas mal d'amis bouchers, il y en a qui sont passionnés par
03:04 leur métier.
03:05 Mais c'est vrai que si je fais un pourcentage, allez sur 100% il y en a 70% qui font ce métier-là
03:12 par dépit.
03:13 Un métier, parce que c'est un métier qui est dur, c'est un métier où il faut se
03:16 lever tôt le matin, où on porte beaucoup de charges.
03:18 Alors on est soit en désosse, bien sûr désosser tous les animaux, après il faut vendre, c'est
03:25 un métier qui est très très très prenant, la boucherie, et qui ne paye pas malheureusement.
03:30 Alors c'est ce que je dis, je dis aujourd'hui, moi j'ai travaillé plus de 20 ans en boucherie
03:36 et le salaire d'un boucher aussi entre, on va dire entre 1350 et 1600 euros.
03:43 Alors bien sûr si vous êtes chef, là vous allez obtenir des primes et vous allez gagner
03:50 beaucoup plus de votre vie, d'accord ? Mais le problème c'est que le boucher aujourd'hui
03:54 ne gagne malheureusement pas sa vie.
03:57 Et aujourd'hui en France, il manque justement des bouchers.
04:01 Aujourd'hui il n'y a plus de boucher parce que les jeunes ne veulent plus faire ce métier-là
04:04 parce que c'est un métier qui est trop dur et qui est trop peu payé.
04:09 Alors ce que vous racontez dans cet ouvrage, c'est votre expérience essentiellement dans
04:12 la grande distribution.
04:14 On reviendra un petit peu après si vous le voulez bien sur les petites boucheries plus
04:18 locales et plus à taille humaine j'allais dire.
04:21 Ce qui choque évidemment dans ce livre en premier lieu, c'est les anecdotes concernant
04:26 l'hygiène épouvantable que vous trouvez dans tous les établissements que vous fréquentez.
04:30 Alors oui, c'est ce que je dis, sur tous les magasins j'ai été bouché en CDI, bien
04:36 évidemment, et j'ai fait beaucoup beaucoup d'intérim.
04:38 Et le problème c'est que partout où je suis passé, il n'y a pas un magasin qui
04:43 n'a pas quelque chose à se reprocher.
04:45 C'est-à-dire qu'il y a des magasins où vous retrouvez une hygiène absolument détestable,
04:48 où vous retrouvez des crottes de souris qui sont carrément dans le laboratoire, ou même
04:53 des… on appelle ça de la viande, des pâtes prêtes à dégouper, qui sont encore dans
04:58 leur sachet mais qui sont grignotées.
05:00 J'ai retrouvé dans un magasin qui est très très connu, une rôtissoire qui n'était
05:05 pas lavée depuis plus de six mois, et c'est le poissonnier à côté, et je lui dis "je
05:11 ne peux pas mettre des poulets dans une rôtissoire aussi dégueulasse".
05:15 Et le poissonnier m'avoue à côté "ben oui, mais elle n'a pas été lavée, personne
05:19 ne l'a lavée, elle n'a pas été lavée depuis plus de six mois".
05:22 Mais je dis "attendez, les gens vont attraper quoi maintenant ? Ils vont attraper l'échiré
05:25 à chargolies, la salmonelle, ils vont attraper la distéria, c'est inadmissible".
05:28 Alors j'ai rencontré ça, puis après il y a la ramballe.
05:31 Justement la ramballe, parlons-en, c'est finalement le fait de reconditionner la viande
05:36 périmée.
05:37 Voilà, tout simplement.
05:38 C'est-à-dire que la ramballe, aujourd'hui, c'est le fonds de commerce de beaucoup beaucoup
05:42 de grandes distributions.
05:43 Parce qu'aujourd'hui, la viande coûte très cher déjà.
05:47 Donc l'acheter c'est un problème.
05:49 Donc il va falloir la retravailler.
05:52 C'est-à-dire que par exemple une viande qu'on met en barquette, elle a une DLC, une date
05:58 de limite de consommation qui est de cinq jours.
06:00 Si au bout de cinq jours elle n'est pas vendue, ce qui va se passer, c'est que nous, on va
06:05 la récupérer, on va ouvrir la barquette, on va la récupérer, on va la parer un petit
06:10 peu, c'est-à-dire parer un peu le noir, et après soit on va la mariner, on peut la mariner,
06:15 ou on va la remettre dans le circuit pendant cinq jours supplémentaires.
06:19 Mais cette viande, quand vous faites ça, est-ce qu'elle est vraiment impropre à la consommation
06:23 ou est-ce qu'elle est… on va comparer avec des yaourts par exemple, des produits laitiers,
06:28 on dit souvent "oui, bon, la date qui est affichée, on peut la dépasser un petit peu,
06:31 on ne craint rien sans être malade", c'est un peu le principe de précaution.
06:34 Est-ce qu'avec la viande c'est pareil ?
06:35 La viande, il faut savoir qu'une viande, elle attrape des bactéries très très rapidement.
06:41 Finalement, la viande c'est quoi ? C'est comme nous, c'est du cadavre.
06:46 Et le fait qu'elle noircit, et le fait qu'elle ait une odeur ou quoi que ce soit, on peut
06:53 imaginer qu'il y a des bactéries dedans et que vous pourriez avoir des problèmes
06:58 d'intestin, des problèmes de bactéries qui sont multiples.
07:03 D'ailleurs on l'a vu avec l'affaire Butany, on l'a vu avec pas mal d'affaires
07:07 aujourd'hui, d'ailleurs l'affaire Butany, c'est grâce à eux que j'ai voulu écrire
07:10 ce livre parce que ce qui s'était passé à Butany, moi je le pratiquais tous les jours.
07:16 Donc une viande, pour revenir à votre question, alors non peut-être, peut-être que non,
07:23 cinq jours après vous ne serez peut-être pas malade, mais quelqu'un qui est plus
07:26 fragile, vous savez le loto, on gagne, voilà.
07:30 À qui le tour oui.
07:31 Voilà, mais il y a des personnes qui sont fragiles et qui malheureusement peuvent tomber
07:35 malades à cause d'une viande avariée.
07:37 Alors justement vous racontez dans ce livre un épisode qui semble vous avoir beaucoup
07:41 marqué avec ce monsieur qui revient alors que son épouse est à l'hôpital avec une
07:46 lourde intoxication visiblement avec la bactérie E. coli.
07:48 Voilà, voilà.
07:49 Alors c'est-à-dire que le monsieur, je le reçois, il me dit comme ça, il me dit "voilà
07:52 j'ai acheté de la viande, j'ai acheté des..."
07:55 Des pavés mexicains.
07:56 Ouais, voilà, ouais, ouais, ouais.
07:57 Et donc je lui dis "mais je savais que c'était moi qui les avais faits, je savais que c'était
08:02 moi".
08:03 Et il me dit "parce que voilà, ma femme est à l'hôpital, etc."
08:06 Et donc après, donc il y a le chef qui est intervenu, d'accord, ils sont montés dans
08:13 les bureaux, je n'ai jamais plus entendu parler de cette affaire.
08:16 Pourtant, sa femme était quand même dans un état relativement assez grave, hein, à
08:21 cause d'une bactérie qui l'avait attrapée.
08:23 Mais quand, je sais avec quoi j'avais travaillé la viande, que ce soit les amincées de poulet,
08:31 pavés mexicains ou quoi, quand vous savez que je travaillais de la viande qui en fait
08:37 sentait, sentait...
08:38 Sentait pas la viande.
08:39 Voilà, elle sentait.
08:40 Et l'épice, elle a comme la magie de cacher le goût, de cacher tout ça.
08:47 Et à ce moment-là, voilà, c'est comme ça que...
08:50 Mais c'était un traumatisme pour moi.
08:52 Et j'ai essayé de rechercher...
08:53 - Mais alors justement, quand il arrive des choses comme ça, c'est très dur parce que
08:57 finalement vous, vous avez exécuté ce qu'on vous a demandé de faire, tout simplement.
09:00 Mais vous êtes responsable aussi.
09:01 - Alors très bonne question.
09:03 C'est-à-dire que...
09:04 - Merci.
09:05 - Très bonne, très excellente question parce que sur les réseaux sociaux, il y a des personnes
09:09 qui acquiescent à me dire.
09:11 Moi, j'étais simple bouché.
09:12 Moi, j'avais des ordres à respecter.
09:15 Et le truc, c'est que oui, je suis coupable, mais pas tant que ça.
09:22 Parce que quand vous avez des crédits, quand vous avez...
09:26 Quand vous n'avez pas le sou, parce que voilà, j'ai jamais été millionnaire, j'ai pas de
09:31 l'argent de côté.
09:32 Si je perds mon emploi, qu'est-ce que je fais ? Je me retrouve où ? À la rue.
09:37 Je me retrouve où ?
09:38 Donc de toute façon, je ne sais faire que ça, que la boucherie, finalement.
09:41 Je ne sais faire que la boucherie.
09:43 Donc c'était dur pour moi de refuser les ordres.
09:45 Mais j'ai essayé de les refuser.
09:47 Comme une fois où je faisais des chipolatas et le chef m'amène trois bacs.
09:53 Dans ces bacs, je commence à prendre le truc, c'est collant, c'est dans le sang qui a tourné,
10:03 dans un lispide vicieux, c'est le sang qui a tourné.
10:06 Je sors ça, ça pue.
10:07 Je ne vais pas mettre ça.
10:11 Je dis au chef, je ne vais pas mettre ça.
10:12 Non, non, non, tu mets ça.
10:14 Je broie, je broie, je broie.
10:16 L'adjoint vient.
10:17 L'adjoint, il dit non, non, non, ça ne passe pas.
10:19 Non, non, non, il faut mettre ça à la poubelle.
10:21 Ils sont allés rechercher les trucs.
10:23 Et à ce moment-là, j'ai dû faire ces chipolatas avec cette viande avariée.
10:27 D'accord, malgré le fait que le responsable ait dit qu'il fallait mettre ça à la poubelle.
10:31 Voilà, voilà.
10:32 C'est-à-dire que moi, au départ, je ne vais pas mettre ça.
10:33 Mais après, tu le mets, le chef.
10:36 Après, l'adjoint, il vient.
10:37 Non, non, on ne va pas.
10:39 Et le chef arrive, reprend les caisses et dit on va broyer ça.
10:43 Et on en a fait des chipolatas.
10:45 Et ces gens qui vous donnent ces ordres,
10:47 est-ce que parfois ils sont inquiétés précisément,
10:49 comme dans des cas avec cette femme qui fait une intoxication alimentaire grave ?
10:52 Ils ne sont jamais inquiétés,
10:53 puisque moi, j'ai averti la direction départementale,
10:57 la protection des personnes plusieurs fois
10:59 pour dénoncer plusieurs magasins où j'ai travaillé.
11:02 Mais il n'y en a qu'un qui s'est fait contrôler.
11:04 Et dans cette société-là, j'ai appris plus tard
11:08 que le chef avait été viré pour faute grave.
11:12 D'accord ?
11:13 Mais ils ne sont jamais inquiétés.
11:15 Et puis, c'est les primes.
11:17 C'est les primes.
11:18 Plus, moins vous avez de pertes, plus vous vendez,
11:22 plus la prime est grosse pour le chef Boucher.
11:24 Donc, à partir du moment-là, tout est dit.
11:26 La messe est dite, quoi.
11:27 Donc, on fait le larbin des gars comme le sacre Boucher,
11:30 des gars comme moi, on leur fait faire de la merde.
11:32 Alors, ces fameux contrôles, on le comprend assez rapidement,
11:35 ils sont assez rares, ils sont assez peu contraignants, finalement.
11:39 Comment vous expliquez ça ?
11:40 Parce que ça, c'est quand même l'État qui doit être garant
11:44 un peu de la santé publique, normalement.
11:46 Oui, mais les contrôles, il y a très peu de contrôles,
11:51 mis à part quand il y a vraiment une dénonciation
11:53 qui est réelle et sérieuse.
11:55 Autrement, alors tous les magasins vont vous dire
11:58 "mais non, mais ce n'est pas possible".
11:59 Nous, on est contrôlés tous les jours.
12:02 On a un service, mais bien sûr…
12:03 C'est le contrôle qualité interne.
12:05 Voilà, interne.
12:06 D'accord ?
12:06 Donc, moi, je les ai connus.
12:08 Ou les traçabilités, on regarde les traçabilités,
12:11 "ouais, ouais, bon, bah, ok, d'accord",
12:13 ou on masque les choses, vous voyez, on masque la traçabilité.
12:16 Comme un exemple, quand vous recevez, par exemple,
12:19 une carcasse dans un frigo et que vous devez faire du fil américain.
12:23 D'accord ? Le fil américain, c'est de la viande de bœuf hachée
12:26 avec une sauce américaine qu'on mange avec des frites.
12:29 C'est le plat typique du Nord.
12:31 Et le fil américain, combien de fois je prenais le numéro de lot
12:36 de la carcasse qui est au frigo qu'on venait de recevoir,
12:39 je le notais, on me faisait noter, ces numéros de lot,
12:43 la date de fabrication, d'accord, J2, J3, voilà,
12:48 et à ce moment-là, alors que c'était fait avec que de la ramballe,
12:51 que de la ramballe, avec de la merde.
12:53 Finalement, les dates qui sont inscrites,
12:54 en plus, c'est à prendre avec des pincettes, alors.
12:56 Ah bah, complètement, complètement.
12:57 Et c'est pour ça que j'ai fait le livre.
12:59 Parce qu'il y a un réel, un vrai problème.
13:01 On peut aujourd'hui empoisonner toute une population avec la nourriture.
13:06 Aujourd'hui, quand on parle des retraites, on parle, je veux pas me...
13:10 Mais je peux vous dire que la nourriture, l'agroalimentaire,
13:13 il y a aujourd'hui un énorme problème.
13:15 Et je ne suis pas le seul à avoir écrit un livre.
13:18 Il y a des autres messieurs qui ont écrit des livres sur l'agroalimentaire
13:23 parce qu'il y a un réel problème, quoi.
13:26 – Et alors, c'est assez rapide, ce passage dans le livre,
13:29 mais on a l'impression que la grande distribution,
13:32 ça range un petit peu avec les dates et avec la matière première.
13:34 Et puis derrière, parfois, il y a des restaurateurs
13:36 qui viennent en bout de chaîne prendre les trucs qui sont un peu les moins chers
13:40 parce qu'en fin de date de consommation,
13:42 et eux, les rhabillent un petit peu aussi à leur condense, quoi.
13:44 – Alors, il y aura un tome 2.
13:46 Il y aura un tome 2, justement, où je vais parler des restos.
13:50 Parce que, voilà, les restaurateurs, ils viennent chercher,
13:53 par exemple, ils vont vous prendre 30 onglets.
13:55 30 onglets qui sont en bout de course.
13:57 Mais comment ce monsieur va vendre 30 onglets ?
14:01 Parce que moi, je leur posais la question.
14:03 Je leur disais, vous êtes à Salé où ?
14:04 Je suis là, tout ça et tout.
14:06 Vous faites combien de couverts ?
14:07 On fait une dizaine de couverts, une dizaine de couverts à midi.
14:10 On fait, allez, une dizaine, une quinzaine de couverts le soir et tout.
14:13 Alors qu'ils prenaient 30 onglets,
14:14 il faudrait que tous les gens mangent de l'onglet.
14:16 – Oui, puis le côté dessus, oui.
14:17 – Voilà.
14:18 Alors je dis, vous inquiétez pas, je vais les congeler.
14:21 – Oui, d'accord, ok.
14:23 Mais quand vous payez une certaine somme dans un restaurant,
14:27 il est normal que vous ayez de la qualité et non pas de la merde.
14:31 – Alors vous dites aussi quelque chose de particulièrement choquant,
14:34 enfin du moins qui m'a choqué.
14:36 Page 143, vous dites que les foyers français
14:39 jettent 570 000 tonnes de viandes fraîches,
14:44 donc d'animaux qui ont été tués, pour être consommés par an.
14:48 C'est absolument dingue.
14:49 – Mais oui, c'est dingue.
14:50 C'est pour ça qu'aujourd'hui, je rigole,
14:52 parce que sur les réseaux sociaux,
14:55 aujourd'hui le pouvoir d'achat se casse la figure, d'accord ?
14:58 On vit une inflation qui est hors normes.
15:00 Et les gens se plaignent tous, mais les gens jettent.
15:03 – Et en plus, dans ce que vous dites aussi, vous le précisez,
15:06 il y a la moitié de ce qui est jeté qui pourrait être consommé.
15:08 – Ah ben complètement.
15:08 – Donc on n'est même pas sur les choses périmées
15:10 dont vous parlez précédemment pour la grande distribution.
15:13 – Oui, la grande distribution et les foyers.
15:15 C'est-à-dire que moi je jetais, par exemple, en grande distribution,
15:20 ça m'arrivait régulièrement de jeter 4 caddies dans une moyenne surface,
15:23 pas une grande, de jeter 4 caddies de viande entières à la poubelle.
15:28 Et tout ce qu'on pouvait récupérer, on récupérait.
15:30 Donc on faisait de la ramballe, ramballe.
15:31 Mais, il y a un moment donné, vous êtes obligés de jeter.
15:34 Parce qu'en cas de contrôle, allez, allez, je veux dire,
15:38 restituez, je veux dire, les chiffres.
15:40 Et le truc, on en est là.
15:41 Et les foyers aussi jettent.
15:44 Et je dis que tant d'animaux sont tués.
15:46 – Alors vous me dites, si vous me permettez de vous interrompre,
15:48 je vais préciser en lisant votre livre,
15:52 cela représente 50 millions de poulets,
15:54 1,5 million de porcs et 100 000 bovins de boucherie.
15:58 – Voilà, voilà.
15:59 – Donc tout ça, tué pour aller à la poubelle.
16:01 – Pour aller à la poubelle, tout simplement.
16:03 Et c'est pour ça que l'élevage intensif,
16:05 je suis absolument, mais alors contre l'élevage intensif,
16:10 et j'ai des frissons quand je vous en parle.
16:12 Parce qu'on n'a pas le droit de tuer des animaux.
16:15 On n'a pas le droit, parce que je l'ai vécu,
16:17 puisque j'ai travaillé un peu en abattoir, on n'a pas le droit.
16:19 On n'a pas le droit de tuer des animaux impunément,
16:23 impunément, pour qu'ils terminent à la poubelle.
16:26 Combien j'ai versé de larmes quand je jetais des langues de bœuf,
16:31 quand je jetais des côtes, parce qu'ils avaient été souvent,
16:34 des fois, les côtes de bœuf c'est quand même un morceau tiennoble,
16:37 donc qui est remballée, bien souvent quand elle n'est pas vendue,
16:40 elle est remballée ou elle est marinée.
16:42 Mais quand elle est en bout de course, elle est en bout de course,
16:44 ou elle termine dans les merguez, d'accord,
16:46 ou elle termine à la poubelle.
16:48 Et quand je jetais ça à la poubelle,
16:50 mais je disais, je voyais l'animal dans le pré,
16:53 en train de respirer, de vivre,
16:57 mais c'est complètement lamentable.
16:59 Et là-dessus, j'accuse la grande distribution de faire n'importe quoi,
17:06 mais de certains ménages français aussi,
17:08 de jeter de la nourriture à la poubelle.
17:11 C'est des animaux qui ont vécu, qui vivaient.
17:15 – Alors dans votre livre, vous le dites,
17:17 aujourd'hui la viande pour vous c'est terminé,
17:19 vous en avez trop vu, vous en avez trop vu sur le plan hygiénique,
17:22 vous avez trop pensé à ces animaux vivants,
17:25 mais pour autant ce n'est pas un plaidoyer
17:26 pour que tout le monde arrête la viande,
17:28 mais vous plaidez davantage pour une forme de flexitarianisme,
17:32 comme disent certains, c'est-à-dire réduire la viande
17:34 pour ne manger que de la bonne viande, à peu près éthique,
17:39 si j'ose ce terme.
17:42 Comment voyez-vous les choses aujourd'hui après avoir vécu tout cela ?
17:45 – Alors, votre question est encore excellente,
17:47 c'est-à-dire que, et c'est vrai,
17:49 en fait, je ne force pas les gens à ne pas manger de la viande,
17:53 je dis simplement, sachez la consommer, intelligemment.
17:57 – Déjà arrêtez de l'acheter.
17:58 – Arrêtez de l'acheter déjà,
17:59 c'est pas acheter de la viande puis l'acheter à la poubelle,
18:02 il faut savoir la consommer intelligemment
18:04 et ne pas en consommer tous les jours, d'accord ?
18:07 Même si je suis végétarien,
18:09 il est hors de question de pousser les gens à ne pas manger de la viande.
18:14 Mais par contre, sachez au moins, je veux dire, la manger, sachez l'acheter.
18:20 – Et l'acheter.
18:21 – Et l'acheter, voilà.
18:23 Mais c'est vrai, il y a un moment donné, il faut…
18:26 et puis il y a la pollution dedans,
18:30 il y a la pollution aussi, toussier en fin de chaîne,
18:33 il y a un gros problème aussi de CO2 là-dedans,
18:37 il y a un gros problème d'eau.
18:38 – Et puis des déchets, comme tu le disais, des déchets, des déchets.
18:41 Comment, quand on dit "il faut bien acheter de la viande",
18:45 qu'est-ce qu'il faut faire ?
18:46 Aujourd'hui, un Français qui veut bien s'alimenter
18:48 et qui ne veut pas participer, j'allais dire,
18:50 à ce grand gâchis considérablement inhumain,
18:54 comment doit-il procéder ?
18:55 Est-ce qu'il faut privilégier les petites boucheries ?
18:58 Est-ce qu'au contraire, ça ne change rien ?
18:59 Parce que quand on vous lit, on sent que vous êtes très dur,
19:02 on a l'impression que tout le secteur est un peu pourri.
19:05 Alors, il y a certainement des boucheries qui font bien leur travail,
19:09 ça j'en suis intimement persuadé.
19:11 – On a l'impression que vous ne les avez pas rencontrées.
19:12 – Mais moi personnellement, en tant qu'intérimaire en CDI,
19:15 je n'en ai rencontré aucun.
19:17 Et quand je dis qu'il n'y a aucun magasin
19:19 qui n'a pas quelque chose à se reprocher, c'est la vérité.
19:22 Par contre, pour acheter de la viande,
19:24 je pense qu'il faut revenir au commerce à l'artisan.
19:27 Il faut aller voir son boucher, en lequel on a confiance,
19:30 qui sera là pour dire "voilà, madame, vous voulez quoi ?
19:34 Un steak ? Oui. Je peux savoir d'où vient la bête ?
19:37 Voilà, c'est une blonde d'Aquitaine.
19:39 – Mais c'est marqué dessus, normalement.
19:40 – Normalement, oui.
19:41 Mais dans la grande distribution,
19:43 combien j'ai vendu de la viande importée,
19:47 de la viande d'Allemagne, de la viande de Nouvelle-Zélande,
19:49 en viande labellisée française ?
19:52 Pareil pour le poulet.
19:53 – Ça, c'est des fraudes.
19:53 – Ah bah oui, mais combien je l'ai fait ?
19:56 Combien on m'a dit "non, non, laisse tomber,
20:00 tu dis que c'est labellisé, c'est français",
20:02 alors que ça venait d'Allemagne.
20:03 – Donc ce que vous êtes en train de dire aussi,
20:04 c'est que les labels, finalement, c'est comme la traçabilité,
20:07 il faut le prendre avec des pincettes.
20:08 – Ah bah complètement, complètement.
20:10 Que chez votre artisan, lui, s'il y a une confiance mutuelle,
20:14 il sera franc avec lui.
20:15 Puis l'artisan, il est là pour, je veux dire,
20:19 il est là pour que vous reveniez chez lui,
20:22 que voilà, il est là pour se dire
20:26 "ben voilà, j'ai envie de l'avoir comme client, comme cliente"
20:28 – Pour fidéliser.
20:28 – Et qu'il revienne.
20:29 Donc lui, son intérêt, c'est pas de vous raconter n'importe quoi.
20:32 – Et de vous rendre malade.
20:33 – Et de vous rendre malade.
20:34 Et surtout, donc, c'est pour ça que je dis,
20:36 il faut privilégier aussi le circuit court,
20:39 c'est-à-dire le circuit court, l'artisan.
20:42 Voilà.
20:42 Et ça, c'est parce que, il y a des artisans qui…
20:48 Moi, j'ai travaillé chez des artisans,
20:50 j'ai travaillé, il y a des gens qui ne sont pas honnêtes,
20:52 aussi, chez des artisans.
20:54 Mais si on a une vraie confiance en son boucher,
20:57 il n'y a pas de problème.
20:58 Il y a une boucherie à Lille, par exemple,
20:59 qui est, je ne citerai pas le nom, à Oisem,
21:02 qui est exceptionnelle, exceptionnelle.
21:05 Le gars, c'est un vrai professionnel, quoi.
21:07 – Non seulement, il faut y aller,
21:08 mais il faut leur faire de la publicité, justement.
21:10 – Comment ?
21:10 – Il faut leur faire de la publicité à ceux qui travaillent bien.
21:12 – Bien sûr, bien sûr.
21:14 Parce que peut-être qu'ils seraient un tout petit peu plus chers.
21:16 Peut-être un tout petit peu plus chers, pas beaucoup.
21:18 – Mais vous en mangerez moins.
21:19 – Voilà, voilà.
21:20 Et vous mangerez de la qualité.
21:21 Et vous ne mangerez pas de la merde,
21:23 comme vous mangez dans les supermarchés.
21:25 J'ai fait une émission, par exemple, dernièrement, sur une chaîne,
21:28 une journaliste qui est venue, qui m'a dit,
21:30 voilà, est-ce que vous savez reconnaître de la viande avariée ?
21:33 Ben oui, oui, je sais reconnaître de la viande avariée, au coup d'œil.
21:37 Voilà, on a pris trois morceaux, c'est au laboratoire, voilà.
21:41 Il y a eu des bactéries mille fois supérieures aux normes européennes,
21:44 la viande était avariée.
21:45 Et pourtant, elle était bien dans un rayon traditionnel de boucherie,
21:48 d'une grande surface.
21:49 – Et alors, justement, toute dernière question, Laurent Richier,
21:52 vous l'avez dit, et on en a parlé rapidement,
21:54 il y a très peu de contrôles, finalement, efficaces
21:57 pour gérer un peu cette grande distribution.
22:00 Et on a le sentiment, quand vous avez voulu dénoncer ces pratiques,
22:04 les gens ne sont pas bousculés au portillon,
22:05 aussi bien du côté des autorités sanitaires que des côtés des médias.
22:09 – Oui, mais tout à fait.
22:11 Je pense que c'est un problème, un vrai problème de société.
22:13 Et c'est vrai que, voilà, rien n'a changé.
22:18 Finalement, rien n'a changé.
22:19 J'ai écrit ce livre, rien n'a changé.
22:21 Moi, je dis, c'est peut-être des gens, moi je m'en fous,
22:23 moi je vends de la viande, je suis un viandeur,
22:25 de toute façon, ça cuit, les bactéries sont…
22:28 Ok, mais rien n'a changé.
22:31 Le problème, il est là.
22:32 Et c'est là qu'est le problème.
22:34 Et je voulais même, à un moment donné,
22:35 monter une association, justement, avec des personnes comme moi
22:39 qui se battent contre ces crapules,
22:42 qui sont là pour vous vendre de la merde,
22:44 et puis à chaque plainte, me déplacer, et voilà,
22:47 et de voir un peu pourquoi ces morceaux de viande
22:50 ont atterri dans des barquettes, en libre-service
22:54 ou dans un rayon de boucherie.
22:56 Et voilà.
22:57 Mais aujourd'hui, c'est un problème, l'agroalimentaire,
23:01 la viande, c'est un problème colossal.
23:03 Mais je suis content parce qu'il y a quand même un supermarché
23:07 qui m'a téléphoné après ce livre, et qui m'a dit,
23:10 "Vous savez, monsieur, j'ai lu votre livre,
23:12 je ne peux pas vous donner tort.
23:14 Mais par contre, si vous voulez venir travailler chez moi,
23:18 venez travailler chez moi."
23:20 Et je lui ai dit, "Pourquoi ?"
23:21 Non, je lui ai dit, "Pourquoi ?"
23:23 Et il m'a dit comme ça, il m'a dit,
23:24 "Au moins, on saura que chez moi, je vends de la qualité."
23:27 Vous voyez ?
23:29 Donc, mis à part ça, il n'y a rien d'autre qu'à changer.
23:33 – Vous avez de l'espoir quand même pour que ça change à l'avenir ?
23:36 – J'y mettrai tout mon cœur, toute ma vie, toute mon âme.
23:39 Vous savez, quand vous êtes lanceur d'alerte,
23:40 vous vivez en préterrité.
23:43 Vous êtes, voilà, aujourd'hui, voilà, je n'ai pas de travail.
23:47 Aujourd'hui, je suis sans emploi.
23:49 Le métier de la viande, ce n'est pas le métier que j'apprécie.
23:53 En plus, je suis végétarien, j'adore les animaux.
23:56 J'en ai à la maison.
23:58 Je ne peux pas concevoir manger un animal à quatre pattes.
24:01 Donc, il y a un vrai traumatisme qui s'est passé dans ma tête.
24:04 On m'a fait faire des choses honteuses, d'accord ?
24:06 Et j'ai un traumatisme par rapport à tout ça.
24:10 Mais aujourd'hui, voilà, je n'ai plus de travail.
24:12 Aujourd'hui.
24:14 – Vous en avez payé fort.
24:15 – Et j'en ai payé le prix.
24:16 Et prie-moi de vous dire que je paye encore aujourd'hui le prix fort.
24:21 Oui, oui.
24:22 – Merci beaucoup, en tout cas, Laurent Richier,
24:24 d'avoir pu nous présenter votre ouvrage.
24:26 Je précise d'ailleurs, je ne l'ai pas dit tout à l'heure,
24:28 l'avant-propos est de Brigitte Bardot.
24:30 – Ah oui, alors là, je remercie Brigitte Bardot.
24:33 Et si je peux lancer un petit message ?
24:34 – Allez-y, bien sûr.
24:36 – Alors, j'ai des frissons parce que j'adore Mylène Farmer.
24:39 Et je sais que Mylène est végétarienne et veillante.
24:43 Je connais l'histoire des crabes.
24:45 Et en fait, si Mylène pouvait me rejoindre dans mon combat.
24:52 – Merci beaucoup, merci beaucoup, monsieur.
24:55 Je rappelle aux téléspectateurs,
24:56 "Viande et si vous saviez", un boucher de la grande distribution "Parle".
24:59 Un ouvrage, bien sûr, disponible sur TVL.fr.
25:03 À bientôt, chers amis, portez-vous bien.
25:04 N'oubliez pas de partager cette vidéo, de la commenter
25:07 et bien sûr de cliquer sur le pouce en l'air
25:09 pour qu'elle soit au maximum diffusée.
25:11 À bientôt.
25:13 [Musique]

Recommandée