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  • il y a 2 ans
Dans "À l'épreuve des faits", notre journaliste Jeanne Daudet tente de démêler le vrai du faux dans l'actualité de la semaine.

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00:00 Lorsqu'on regarde par exemple le bilan de l'accidentologie sur l'année 2021, les chiffres consolidés.
00:05 Il y a eu cette année-là 2 944 personnes tuées sur les routes de France.
00:10 Et parmi ces accidents mortels, dans 28% des cas, l'un des conducteurs était alcoolisé.
00:16 Dans un accident mortel sur 5, un conducteur est positif au stupéfiant.
00:20 Et ce chiffre grimpe à un accident mortel sur 3 la nuit durant les week-ends.
00:24 Donc oui, l'alcool et la drogue restent toujours aujourd'hui des fléaux importants sur les routes.
00:29 Parmi les principales causes d'accidents mortels avec la vitesse.
00:33 En revanche, on ne peut pas parler de phénomène en progression.
00:36 C'est finalement assez stable ces dernières années, voire en baisse en ce qui concerne l'alcool,
00:39 notamment en raison des campagnes de prévention ou encore du durcissement de la législation.
00:44 Pour la déléguée générale de l'association de la prévention routière,
00:47 il faut faire beaucoup plus de prévention en ce qui s'agit des stupéfiants.
00:53 En termes de prévention, les choses sont plus compliquées.
00:56 Même si des associations comme la nôtre, nous menons des actions de prévention au niveau des entreprises,
01:01 ce sujet-là est souvent abordé,
01:03 que théoriquement c'est obligatoire de mener 3 heures de sensibilisation dans les lycées
01:10 et que malheureusement on a à peine un tiers des lycées qui mettent en place ces sessions de sensibilisation.
01:16 Donc il y a sans doute des choses à faire davantage par rapport à ce sujet
01:20 de manière à réexpliquer les effets des drogues par rapport à la conduite.
01:25 Ça altère les réflexes, ça altère la vision, ça altère la capacité de coordonner.
01:30 Bref, ça fait que le conducteur se retrouve incapable d'analyser l'environnement
01:37 et de prendre les bonnes décisions.
01:40 Au-delà des actions de prévention des associations,
01:42 est-ce qu'il y a suffisamment de contrôles sur les routes ?
01:44 En 2021, on compte 7 millions de contrôles d'alcool au volant opérés par la gendarmerie ou la police.
01:50 Confondu, sur ces 7 millions de contrôles, un peu moins de 230 000 se sont avérés positifs.
01:55 Pour ce qui est des stupéfiants, il y a eu 630 000 contrôles en 2021, un peu plus de 100 000 positifs.
02:02 Il y a plus de 11 fois de contrôles d'alcoolémie que de contrôles de stupéfiants.
02:06 Ce qui paraît énorme.
02:07 Ils sont beaucoup plus systématiques.
02:09 Comment on explique ça ?
02:10 Réponse de Frédéric Lessis, chef du service d'information et de communication de la police nationale.
02:16 Vous avez une augmentation extrêmement importante des dépistages de produits stupéfiants pour les conducteurs depuis quelques années.
02:23 C'est tout à la fois l'évolution des techniques, c'est le fait que nos policiers ont davantage de matériel.
02:28 Mais cette différence entre le nombre de dépistages d'alcoolémie, à peu près 7 millions par an,
02:33 contre ceux de dépistages stupéfiants autour de 600 000,
02:36 est aussi liée tout simplement au fait qu'un dépistage d'alcoolémie, ça prend très peu de temps.
02:40 Vous avez un embout, vous avez un matériel, il est réutilisable.
02:43 Vous pouvez avoir entre guillemets du débit dans le contrôle routier et dans le dépistage.
02:48 En matière de stupéfiants, ça va être avec la salive, ça va être avec un révélateur,
02:52 ça va prendre un peu de temps sur la voie publique.
02:55 Ensuite, vous êtes obligé d'amener la personne sur le dépistage positif à l'hôpital pour un prélèvement sanguin,
03:01 pour rétablir le taux de THC dans le sang.
03:04 Donc mécaniquement, c'est assez normal que vous ayez une différence.
03:08 Le test pour les stupéfiants est aussi beaucoup plus récent que le test d'alcoolémie.
03:12 Il faut attendre le début des années 2000 pour commencer,
03:15 aller voir arriver dans l'arsenal des forces de l'ordre.
03:17 Pour autant, ces dernières années, ce nombre de contrôles de stupéfiants est en nette progression
03:21 et ça devrait continuer.
03:24 Cette progression, elle a deux fondements.
03:26 La première, malheureusement, c'est sans doute que les stupéfiants continuent à être trop utilisés.
03:33 Et le fait de banaliser l'usage de cannabis, par exemple au volant, ou d'autres types de produits,
03:39 il faut véritablement le souligner.
03:41 Deuxième aspect, les matériels évoluent.
03:44 De plus importants dispositifs, de plus importants stocks,
03:49 les policiers en disposent tous dans tous les équipages.
03:52 Ils peuvent procéder à des dépistages, quelle que soit la situation.
03:55 C'est aussi une évolution des au moins des cinq, dix dernières années
03:58 et ça nous donne un potentiel pour lutter contre ce fléau beaucoup plus important.
04:02 Celles et ceux qui se font attraper et qui sont positifs, ils risquent quoi ?
04:06 Alors aujourd'hui, un cas de homicide involontaire commis par un conducteur.
04:09 Lorsqu'il y a une circonstance aggravante comme l'alcool ou le stupéfiant,
04:13 la peine peut aller jusqu'à sept ans de prison.
04:15 Et cela monte jusqu'à dix ans de prison et 150 000 euros d'amende,
04:18 avec plusieurs circonstances aggravantes lorsqu'on rajoute par exemple la vitesse.
04:22 Mais le gouvernement veut aller plus loin.
04:24 Déjà au mois de février, juste après l'affaire Palmad, souvenez-vous,
04:27 le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait fait part de plusieurs mesures
04:31 pour durcir la répression.
04:32 Cette semaine, au Sénat, il les a à nouveau défendus.
04:35 Trop de chauffards, trop d'assassins tués sur les routes sous l'emprise de stupéfiants et d'alcool.
04:39 Nous travaillons avec le garde des Sceaux pour, évidemment, pouvoir réussir à limiter ces drames.
04:47 Nous avons proposé le retrait des douze points pour ceux qui consomment ce stupéfiant.
04:51 C'est une mesure réglementaire.
04:52 Le garde des Sceaux a proposé de renommer cet homicide comme un homicide routier.
04:57 C'est attendu.
04:58 Il y a beaucoup de propositions d'ailleurs de votre Assemblée.
05:01 Elle est sur tous les bancs.
05:03 Je peux vous assurer que sous l'autorité de la Première ministre, avec M. le garde des Sceaux,
05:06 et en espérant que d'autres drames soient évités par le travail que font les policiers et les gendarmes
05:10 tous les jours, sous les routes, pour éviter que ces chauffards de continuent à tuer.
05:14 Est-ce qu'on a plus de détails sur ces mesures et sur la façon dont elles pourraient être appliquées ?
05:19 L'intérêt pour le ministre de l'Intérieur serait de passer par la voie réglementaire
05:23 et non pas par la voie législative devant l'Assemblée nationale.
05:26 Vu qu'on parle de termes assez techniques, je me penche vers vous Anne-Charline Bézina.
05:29 Qu'est-ce que la voie réglementaire, déjà si on peut refaire un point ?
05:32 Et est-ce que ce serait possible dans ce cas précis ?
05:34 Alors déjà, c'est vrai qu'on a dans notre Constitution un partage intelligent
05:38 entre des normes plus générales et des normes d'application.
05:40 Les normes générales, c'est les lois, et les normes d'application, ce sont les règlements,
05:43 les décrets, les actes administratifs.
05:45 Alors normalement, la généralité, le plus grave, le plus sensible pour nos libertés,
05:50 est réservée aux lois et l'inverse pour le règlement.
05:54 Alors ici, on est dans une zone un petit peu grise parce qu'en réalité, par exemple,
05:58 tout ce qui concerne les homicides routiers sont de l'ordre du délit.
06:01 Et le délit et le crime, qui sont les choses les plus graves qui peuvent arriver en droit pénal,
06:05 relèvent du domaine de la loi.
06:06 Néanmoins, on parle du permis de conduire,
06:08 et le permis de conduire est généralement régi par le domaine réglementaire.
06:11 Donc on est un petit peu dans un entre-deux,
06:13 même si les peines sont normalement régies par la loi.
06:16 Donc ici, il y aurait tout intérêt à passer par la loi,
06:19 c'est d'ailleurs ce sur quoi travaille le ministre de l'Intérieur,
06:21 puisqu'il y a des propositions de loi dans lesquelles ce délit d'homicide routier pourrait rentrer,
06:26 mais peut-être que les précisions pourraient être apportées par voie réglementaire.
06:29 Voilà en tout cas le partage le plus raisonné des choses qui pourraient être en question aujourd'hui,
06:34 puisque ce délit, il faut le rappeler, sera donc juste une précision,
06:38 mais ne changera a priori pas grand-chose au régime juridique du délit d'homicide involontaire
06:43 qui existe déjà aujourd'hui.
06:44 Et il reste encore quelques incertitudes, vous l'avez dit, concernant ces mesures,
06:47 notamment sur leur possible mise en application.
06:50 C'est ce que m'a expliqué Thomas Soulier du service politique de BFMTV.
06:54 Sur le fond comme sous la forme, les propositions de Gérald Darmanin sont vraiment,
06:57 pour l'instant, assez floues. D'abord sur le fond, ce fameux délit d'homicide routier.
07:03 Alors, on ne voit pas très bien les contours, on n'a pas encore les détails.
07:07 Est-ce qu'il y aura de nouvelles sanctions pénales ou pas ? On ne sait pas.
07:10 Est-ce qu'il y aura de nouvelles sanctions non plus ? On ne sait pas.
07:13 Et puis sur la forme, on sait que le ministre veut retirer les fameux 12 points de permis
07:17 pour les chauffards qui auraient conduit sous l'emprise de la drogue et/ou de l'alcool.
07:24 Eh bien là, on a posé la question à son entourage, quand est-ce que ce sera appliqué ?
07:28 Ça fait quand même trois mois qu'on en parle. Eh bien, pas avant plusieurs semaines,
07:31 car il y aura un comité interministériel à la sécurité routière à Matignon dans les prochaines semaines.
07:36 Donc, pas avant l'été, voire plutôt à la rentrée.
07:39 Des contours donc encore un peu flous, mais malgré tout, ces mesures seraient un début
07:44 pour les défenseurs des victimes d'accidents de la route.
07:46 À l'image de maître Vincent Jullet, parade invité d'Yves Calvis cette semaine,
07:50 il demande tout de même à aller beaucoup plus loin.
07:53 Je pense que c'est un changement de sémantique, qui sans doute apaiserait le vécu des victimes,
07:58 mais encore des victimes d'accidents mortels.
08:01 C'est-à-dire que le même chauffard qui va rouler avec 2 grammes d'alcool dans le sang,
08:05 qui va être sous stupéfiants, lui sera toujours poursuivi pour le délit de blessure involontaire aggravée.
08:11 Donc, on aura toujours ce problème du terme d'involontaire.
08:14 C'est que cette nouvelle qualification, pour moi, oui, si ce n'est pas suivi d'une politique pénale,
08:21 avec des directives claires sur les réquisitions et sur les peines prononcées,
08:26 ça ne changera pas grand-chose.
08:28 Parce qu'aujourd'hui, un chauffard qui encourt 10 ans d'emprisonnement,
08:33 il n'est jamais condamné à cette peine.
08:36 Parfois même, vous êtes à peine au tiers de la peine encore eue.
08:38 Justement, est-ce qu'on a des précisions sur les peines dont parle M. Jullet-Parade ?
08:43 En 2021, dans les dossiers de domicile involontaire par conducteur avec une circonstance aggravante,
08:48 on peut parler d'alcool, de drogue, mais aussi de conduite sans permis, de délit de fuite, par exemple.
08:53 Il y a eu 426 condamnations, donc 421 peines de prison.
08:58 Et dans la majorité des cas, il y a eu de la prison ferme.
09:01 Sur ces 421 peines, il y a eu 45 peines de prison ferme,
09:06 213 peines de prison ferme assorties d'insurcits,
09:09 c'est-à-dire que lorsque la personne sort de prison, elle est toujours en sursit
09:13 et elle doit se tenir encore à carreau,
09:15 et 163 peines de prison avec sursit.
09:18 Et en moyenne, cette année-là, la durée de la peine prononcée pour ce type d'homicide involontaire
09:22 a été de, pour être très précis, 23,2 mois ferme, c'est-à-dire près de deux ans.

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