Afghanistan -  Kunduz un après, colère intacte
  • il y a 8 ans
AFGHANISTAN
Le 3 octobre 2015, les forces américaines bombardaient l’hôpital de Médecins sans frontières à Kunduz, en Afghanistan, faisant 42 morts parmi les patients et les soignants
Ce bombardement a été traité par l’armée américaine comme une bavure regrettable.
Faizullah: « Il n’y a plus rien »

Archiviste à l’hôpital de Kunduz, Faizullah se souvient de cette nuit de cauchemar où il a cru mourir sous le déluge de bombes
Il revoit les patients et des collègues décapités par les obus, brûlés vifs dans leur lit, frappés directement quand ils ont tenté de fuir les bâtiments en flamme
Lui, s’est réfugié dans ce coin avec un médecin qui est mort quelques minutes plus tard

Faizullah, responsable des archives de l’hôpital de MSF à Kunduz (en anglais)
« J’ai essayé de transporter son corps à l’extérieur pour l’empêcher de brûler. C’est ça qui me fait vraiment mal : qu’il soit mort et qu’il ait brûlé. Tout le monde a brûlé. »

Très vite, l’armée américaine reconnaît être responsable de l’attaque et le président des Etats-Unis présente ses excuses à Médecins Sans Frontières.

Françoise Bouchet-Saulnier, directrice juridique de MSF France (en français)
La première réaction de MSF a été de garder la porte ouverte en demandant une enquête pour savoir comment il était possible qu’un avion américain pendant plus d’une heure bombarde un hôpital MSF, fasse 42 morts.

En avril 2016, l’armée américaine publie les résultats de sa propre enquête qui conclut que l’attaque sur l’hôpital de Kunduz est le résultat d’une série d’erreurs.
On y apprend que les troupes américaines considéraient que tous les civils avaient fui Kunduz et qu’il ne restait que des Talibans, transformant de fait la ville entière en entité hostile. L’hôpital aurait été confondu avec une cible militaire, confusion dûe à un ensemble de défaillances humaines et techniques.
L’hôpital de Kunduz aurait donc été bombardé par erreur. Une version contestée par MSF pour qui il ne s’agit pas d’une cascade d’erreurs mais d’une cascade de décisions délibérées qui ont conduit au sacrifice de l’hôpital.
Françoise Bouchet-Saulnier, directrice juridique de MSF France (en français)
Ce concept de légitime défense préventive appliquée à toute une partie d’une ville dont on a décidé d’opérer la reconquête militaire conduit à une guerre totale sur cette partie de la ville. Et c’est bien ça qui nous est arrivé. (..) La présomption qu’on est dans un champ de bataille ouvert et que les civils qui sont restés, c’est forcément qu’ils ne sont pas civils mais qu’ils sont combattants, ils sont militants et que tout ce qui tourne encore, c’est forcément du soutien matériel direct aux combattants.

Au moment des faits, la ville de Kunduz venait d’être prise par les Talibans, déclenchant une contre-offensive des forces afghanes, soutenues par les forces américaines.
Le jour de l’attaque, l’hôpital soignait 105 patients parmi lesquels se trouvaient des combattants désarmés.
Début octobre, la présidente internationale de Médecins Sans Frontières s’adressait aux membres du conseil de sécurité de l’ONU , cinq mois après l’adoption de de la résolution censée garantir la protection des civils et des services médicaux en temps de guerre.

Dr Joanne Liu, présidente internationale de MSF (en anglais)
«A une époque où le contre-terrorisme structure la guerre, un permis de tuer a été délivré.

Nous vous demandons – encore une fois – d’annuler ce permis de tuer. Annulez-le, même s’il s’agit d’attaquer vos ennemis qui sont en train d’être soignés.

Parce que bafouer la neutralité des hôpitaux est en train de devenir la nouvelle norme dans la conduite de la guerre.
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