1966. Dans une petite ville chinoise, au début de la Révolution Culturelle, un nouvel ennemi du peuple est démasqué. Nom du criminel : Tian Ben Surnom : Petit Binoclard Age : 13 ans Crime : Insulte au Parti Instrument du crime : Un vieux disque "O mon bien aimé, toi et moi ne formons qu'un seul coeur..."
Un tel crime devant être puni, l'enfant est expédié dans un lieu de rééducation par le travail, dans la montagne de la Vie Eternelle, une vraie cour des miracles, peuplée de grands criminels comme lui, où personne ne songe à revendiquer son innocence. Chacun arbore son crime sur la tête, comme une évidence, inscrite sur des carozas, grotesques chapeaux de papier qu'ils doivent porter tous les jours. Affolé, Petit Binoclard fait une tentative d'évasion, mais il échoue. Dès lors, il se rapproche de deux personnes qui ont su préserver leur identité dans cette résignation collective. Le premier, un adolescent de quinze ans, pickpocket, est animé d'un désir de vivre aussi fort que ses doigts sont lestes. Le deuxième, un vieux moine taoïste sourd et muet, reste toujours à l'écart sur un rocher, entouré de pigeons sauvages. Il n'a qu'un seul pied chaussé. L'autre est nu : il a refusé de récupérer une de ses bottes que le chef avait un jour jeté dans le feu par défi. Une nuit, une troupe d'acrobates égarés va bouleverser leur routine en leur donnant par erreur un spectacle destiné aux paysans de la commune voisine. Il y a des danseuses qui frétillent devant eux, privés de femmes depuis si longtemps, mais surtout il y a des canards laqués... qui voltigent au-dessus de leur nez affamé, au bout d'une frêle baguette.