Attention ce témoignage parle de violences sexuelles, il peut heurter la sensibilité de certains spectateurs.
Lectrice : Stéphanie Pasterkamp
Réalisation : Catherine Zavlav et Cécile Nicouleaud Image : Vincent Tulli Assistante mise en scène : Sandra Moreno Montage : Louis Beaugé de La Roque Musique : Malik Ati Mixage : VTP Maquillage Marine Girondeau Photos : Jérôme Godgrand Régie : Tanya Artioli Infographie : Christine Bruneteau Etalonnage Yann Tribolle
texte du témoignage : Témoignage n°2, lu par Stéphanie Pasterkamp
Je suis un petit garçon de 8 ans, ma mère, la vieille sorcière, comme je l’appelle depuis que je sais, utilise mes doigts, ma bouche pour son plaisir dans son lit depuis plusieurs années déjà. Ça dure depuis très longtemps. J’ai 11 ans, et ce dimanche, elle m’a violée avec un objet. Elle m’a laissé pour mort après m’avoir étranglé avec ses mains.
Je suis seul dans la pièce. Couché, par terre, contre la table. J’ai mal aux fesses, j’ai du mal à respirer. Quand elle me serrait le cou, ça anesthésiait la douleur. Surtout ne pas pleurer.
Dans la pièce d’à côté elle est là, de dos, l’air pèse des tonnes, je vais dans un coin, elle se retourne. Dans son regard il y a encore la fureur, la folie, la mort et puis la menace. De toute façon il ne s’est rien passé, l’enfant que je suis est mort. Demain l’enfant aura tout oublié. Amnésie post traumatique.
L’homme a 50 ans, depuis que l’enfant est mort. Il vit en dehors de sa vie. Depuis qu’il fait un travail sur lui, il pressent des choses qu’il ne veut surtout pas connaitre, des choses qui poignardent le cœur, vous saisissent l’âme et vous détruisent physiquement. La vérité remonte, malgré moi.
Quand l’amnésie a disparu cela a été terrible : Je n’imaginais plus la vie. Combien de fois sans jamais oser, j’ai voulu demander à mon thérapeute de me faire interner. Et puis peu à peu, les morceaux se sont recollés, la force est venue. Il faut choisir entre l’amour ou le néant, l’espoir ou l’ennui, la passion de la vie ou le rien. J’ai choisi la vie, l’amour et l’espérance.
Ce n’est pas une vie paisible mais elle a du goût. Ce n’est pas l’amour d’un cœur simple, non. Tout est compliqué et fragile. Et l’espoir là-dedans ? C’est souvent de la désespérance, mais elle est vécue comme un bonheur… Celui de vivre malgré tout ! Sans vous tous, qui œuvrez par votre écoute pour la libération de notre prison intime, sans vous tous qui nous écoutez, sans un changement d’état d’esprit de la société face à ces violences intimes, notre vie de victime restera une vieille boule de neige sale et noircie qui saignera au soleil. La parole des victimes n’existe qu’écoutée. Et là, enfin, douloureuse elle devient riche de promesses.
Je suis Stéphanie Pasterkamp, comédienne, et je soutiens la campagne Stop au Déni. (En regardant la caméra)