Marine Le Pen : la réalité d’un discours d’extrême-droite

  • il y a 11 ans
Les tentatives de Mme Le Pen de banaliser le Front national en le rebadigeonnant aux couleurs de la République ne résistent pas à l’examen de son discours de clôture devant l’université d’été de son parti. Sa description détaillée de ce qu’elle ferait si elle était au pouvoir renvoie directement aux traditions de l’extrême-droite. Extraits

L’antiparlementarisme

« La souveraineté, c’est aussi la reconnaissance d’un souverain, au dessus duquel rien ni personne ne porte. En France le pouvoir souverain, c’est le peuple ! Or l’histoire a montré que son autorité n’était pas absolue quand de serviles parlementaires (sic) sont autorisés à bafouer sa volonté, commettant une faute si lourde qu’ils n’en paieront jamais le prix (…) En conséquence de cette trahison, je retirerai au Parlement son pouvoir constituant qui sera désormais l’apanage exclusif du peuple.»

Dénonciation classique dans la tradition fasciste de la trahison de la volonté populaire par les parlementaires. Entre le chef et le peuple, il ne doit plus rien y avoir et surtout pas le Parlement qui se voit dépouillée de son pouvoir constituant. Le référendum décide de toutes les grandes questions. Une constante dans l’histoire des régimes d’extrême-droite en Europe ou en Amérique latine qui ont tous marginalisé leur Parlement et leur opposition par cet appel direct au peuple savamment encadré par le parti au pouvoir.

L’anti-France

« Le projet est connu, mais ses auteurs se cachent : détruire la France son identité et son pouvoir, pour lui substituer une autorité supranationale et illégitime, au service exclusif du Marché et des puissances d’argent. Nous évoluons dans un monde pernicieux, dominé par le mensonge, par la communication où le pouvoir, subrepticement est passé des mains du peuple à celle d’individus non-élus. Des gens parfaitement étrangers au destin de la France et qui ont pu compter sur l’extraordinaire servitude d’une élite française indifférente au sort de la patrie. »

Référence obsessionnelle de l’extrême-droite à un complot imaginaire de forces occultes contre la Nation. C’est la rhétorique de l’anti-France venue tout droit des écrits de Maurras et du pétainisme. Pour souder artificiellement la Nation, on lui présente des ennemis de l’intérieur et de l’extérieur. A l’époque, la figure diabolisée était le cosmopolitisme et la ploutocratie. Respectabilité oblige, ces références ont disparu mais reste la diabolisation des élites et des forces de l’argent accusées d’œuvrer contre la France et son peuple. Cette désignation d’un ennemi intérieur et extérieur est une constante du discours fasciste.

La préférence nationale

« Je demande que les prestations familiales soient réservées aux Français, quelle que soit leur religion, quelques soient leurs origines ethniques ou la couleur de la peau, mais aux seuls Français, aux seuls qui ont la nationalité française ! »

Le thème fétiche de l’extrême-droite depuis toujours. Les Français d’abord ! Les étrangers (comprendre les immigrés) sont considérés comme des sous-citoyens. C’est le principe premier appliqué par tous les pouvoirs d’extrême-droite. Marine Le Pen croit s’en distinguer en ne faisant pas de différences pas entre les Français. Le pétainisme a commencé de la même manière. On sait ce qu’il advint. Il a fini par faire le tri entre bons et mauvais Français.

La trahison des élites

« Nous sommes ce pays qui peut compter sur un peuple de bon sens quand ses élites ont trahi(…)Je vous demande, mes chers compatriotes, de ne pas laisser vos pseudo-élites salir votre pays et de vous battre avec la première énergie pour faire respecter votre droit à la fierté. Ce n’est pas le peuple français qui est faible, ce sont nos élites qui l’affaiblissent (…). Ce n’est pas le peuple français qui manque de courage, ce sont nos élites qui nous font peur. »

La trahison des élites est la constante du discours d’extrême-droite depuis Alfred de Maistre. Sous le régime de Vichy, elle a servi de base à l’acte d’accusation contre les dirigeants du Front populaire et de la IIIè République. Jamais n’est précisé qui sont ces élites. Fourre-tout commode qui permet d’ostraciser toutes les formes d’opposition.

Le rejet des corps intermédiaires

« Oui je serai dure avec certaines revendications illégitimes (…) Je serai dure avec les minorités autoproclamées qui veulent faire plier l’ordre républicain contre la sécurité de tous (…) Je serai dure avec ceux qui ne jouent pas le jeu, parce que je veux que la volonté du peuple soit enfin entendue et respectée ».

Dureté et autoritarisme, les deux mamelles de l’extrême-droite. Les corps intermédiaires sont rejetés dans l’enfer des revendications illégitimes à qui l’ont ne doit rien céder. Quant aux oppositions, elles sont averties de leur rôle : jouer docilement le jeu du pouvoir ou être combattue.