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  • il y a 12 ans
Cycle de conférence de l'Institut d'Etudes Avancées de Nantes : "Ondes et particules de vie" par Pierre Sonigo, biologiste, virologue, directeur scientifique de Bio-Rad et résident associé de l'IEA de Nantes.

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Transcription
00:00Merci Samuel, merci à vous tous.
00:12Donc c'est vrai que j'ai l'honneur d'être un biologiste régulièrement présent à l'IEA depuis le début.
00:22Et c'est vrai que c'était pour moi d'une grande richesse cette interaction et c'est pas facile non plus.
00:28Parce que le métier du biologiste aujourd'hui, et c'est mon métier, c'est surtout de mener des expériences pour répondre à des questions.
00:39Donc on est plutôt des cuisiniers que des gens qui réellement réfléchissent.
00:45Et puis c'est vrai qu'on répond à ces questions toujours par rapport à un cadre, par rapport à ce qu'on a appris.
00:50Et en l'occurrence, moi ce que j'ai appris et qui me permettait de répondre aux questions que je me posais en tant que chercheur, que je me pose encore,
01:03c'est ce cadre en question, c'est celui qui est fourni par la biologie moléculaire.
01:07Alors, c'est vrai que quand j'étais étudiant, on voulait tous faire de la biologie moléculaire.
01:13On savait pas trop ce que c'était, mais on avait vraiment envie d'en faire.
01:18Et comme disait le regretté François Jacob, qui avait eu le prix Nobel dans les années 60 en biologie,
01:24il disait, le problème avec la biologie moléculaire, c'est qu'avant notre prix Nobel,
01:29le sien avec Jacques Monod et André Le Wolf, personne ne voulait en faire.
01:34Et après notre prix Nobel, tout le monde n'a fait que ça.
01:38Alors, pourquoi on voulait faire que ça ?
01:39Et tous les étudiants de l'époque, j'étais étudiant à Pasteur dans les années 80,
01:45pourquoi on voulait faire de la biologie moléculaire ?
01:47Et c'est vrai que c'était un rêve.
01:49Cette biologie qui avait été ouverte par les technologies d'accès à l'ADN,
01:53elle faisait rêver parce que d'abord, elle représentait ce que Isabelle Stengers,
02:00avec qui j'ai eu l'occasion de travailler, appelle une économie de pensée.
02:04C'est-à-dire que les réponses étaient nécessairement simples,
02:07tout était écrit dans l'ADN, et il suffisait d'être capable,
02:11et les technologies le permettaient d'aller chercher.
02:12Donc au lieu de se poser des grandes questions impossibles,
02:17il suffisait d'avoir accès à l'ADN et d'effectuer le séquençage,
02:21et on aurait enfin la lecture du livre de vie.
02:24Donc il y avait une sorte de rêve de la biologie enfin devenue simple et technologique,
02:29surtout pour des gens qui avaient une culture de la cuisine expérimentale.
02:33Ça leur simplifiait la vie.
02:34Ça nous donnait aussi une certaine arrogance,
02:36parce qu'on n'avait plus besoin de personnes que de nos machines à étudier l'ADN.
02:42D'ailleurs, moi, quand je suis arrivé en thèse dans mon labo à l'Institut Pasteur,
02:46on travaillait sur les virus, à l'époque c'était l'hépatite,
02:49puis le sida, je vous en parlerai.
02:51Mon directeur de thèse, Pierre Thiolet,
02:54qui était vraiment quelqu'un que je respecte beaucoup,
02:57il me disait, tu sais, c'est pas la peine si tu veux progresser dans ta carrière,
03:00dès qu'il y a une question, il faut cloner le gène et le séquencer.
03:04Et effectivement, c'est ce que son labo faisait à l'époque,
03:07avec beaucoup de succès,
03:08ça permettait, selon les critères de succès en recherche,
03:12beaucoup de publications de haut niveau, pionnières et tout.
03:17Puis bon, disons qu'il y avait le rêve de la simplicité,
03:19de l'économie de pensée, et puis il y avait aussi cette sorte de magie
03:23à enfin opérer la jonction entre le vivant et une sorte de physico-chimie au niveau moléculaire.
03:30Donc ça nous faisait vraiment rêver à l'époque,
03:32et puis ça m'a guidé pendant des années,
03:36et puis quand même, il y a eu un événement marquant,
03:39je dirais que ça a été le début de la fin,
03:42enfin, le début d'un changement nécessaire, en tout cas,
03:44c'était en 85, c'était un des points culminants de ma carrière de biologiste moléculaire,
03:50on a publié début 85 à l'Institut Pasteur la séquence complète du virus du sida.
03:57Alors c'était vraiment un événement à la fois scientifique et médiatique,
04:02vu l'importance du sida dans les esprits à l'époque,
04:06et les journalistes nous ont dit,
04:08alors vous avez la séquence du virus du sida ?
04:10On dit oui.
04:11La séquence complète ?
04:12Oui, complète, on était très fiers.
04:14Et il a dit, bon, alors si vous avez la séquence complète,
04:17c'est que vous avez tout compris au sida,
04:19et que le sida sera bientôt vaincu.
04:22Et là, on était un peu gênés par la question,
04:25mais le plus âgé d'entre nous a eu un coup de génie,
04:29il a répondu en anglais, en français,
04:32en parlant du virus, nous avons effectué le séquençage,
04:38grâce à cela, nous connaissons son visage,
04:41mais nous ne connaissons pas son cœur.
04:44Alors là, les journalistes ont noté,
04:46fiévreusement, ça a fait le tour du monde,
04:48la formule était très belle, c'est vrai.
04:49Mais quand même, moi je suis rentré au laboratoire,
04:51je lui ai dit, dis donc, c'est quoi cette histoire ?
04:54C'est le cœur du virus, où il est, on a presque l'impression
04:58que tu parlais de son âme, et le visage du virus,
05:02c'est quoi dans les gènes et tout.
05:04Et puis bon, ça c'était en 1985,
05:07et je dirais que le point qu'il avait soulevé,
05:10enfin là, dans cette interview,
05:12c'est qu'on peut avoir la séquence complète d'un virus,
05:14comme le virus du sida,
05:16et au fond, pas comprendre grand-chose à ce qui se passe.
05:19Donc, face à ça, que faire ?
05:25Alors moi déjà, ce que j'ai fait,
05:26c'est que j'ai continué à séquencer,
05:29j'ai passé dix ans le nez dans l'ADN,
05:32et à essayer de construire des gènes,
05:35et à essayer de comprendre, grâce au contenu génétique,
05:38le fonctionnement du vivant.
05:40Et on n'y est pas...
05:44Bien sûr, les portes sont toujours à moitié ouvertes,
05:47à moitié fermées, mais en gros, quand même,
05:49on n'est pas arrivé à comprendre,
05:51à répondre à des questions comme
05:54de quoi les personnes infectées par le virus du sida vont mourir,
05:59quel est le mécanisme qui les tue
06:00à partir d'une infection virale.
06:02Pourtant, on avait le contenu génétique complet.
06:05Alors, face à cette difficulté,
06:07il y avait deux attitudes.
06:08La première, c'était de se dire,
06:13les explications sont bien écrites
06:15dans le contenu des gènes viraux,
06:20mais nous n'en avons pas la grammaire,
06:24autrement dit, c'est bien écrit là,
06:26mais ce qui nous manque, c'est quelqu'un pour nous,
06:29pour faire la traduction,
06:30pour traduire ce contenu génétique.
06:32Alors, vous voyez, autrement dit,
06:35il fallait continuer à fouiller dans les séquences
06:38en attendant le champollion de l'ADN
06:42qui allait enfin comprendre le sens qui était caché là.
06:45Ça, c'était la première possibilité.
06:49Et puis, c'est vrai que, normalement,
06:51si c'était ça, ça aurait dû marcher vite,
06:53parce que, ce qu'il faut voir,
06:54c'est qu'un génome viral,
06:57on parle en unité de longueur,
06:59c'est 10 000 nucléotides.
07:01Nucléotides, c'est l'unité chimique de base de l'ADN.
07:06C'est 10 000.
07:06Vous voyez qu'un génome, comme un génome humain,
07:09c'est 3 milliards.
07:11Donc, vous voyez que s'il y avait une grammaire déchiffrée,
07:14c'était pas mal de commencer avec des phrases
07:16un peu courtes, de 10 000,
07:18avant d'attaquer les grands génomes.
07:21Et c'est sans doute pour ça aussi que je pense
07:23que les virologues,
07:24évidemment, je suis virologue,
07:25on est un peu en avance.
07:26C'est-à-dire que, comme on avait des sujets plus simples,
07:30ça permettait d'aller plus vite aux séquences
07:32et aussi de percevoir les problèmes.
07:35Parce que, en fait, vous voyez que là,
07:39ce que je vous parle, c'est dans les années 80,
07:42près de 30 ans plus tard,
07:46qu'est-ce qu'on en a fait de ces séquences ?
07:50On les a décortiquées, mais comme vous pouvez imaginer,
07:52dans tous les sens possibles,
07:54avec les technologies très puissantes dont on dispose,
07:57aujourd'hui, on a décidé qu'il y avait une douzaine de...
08:02que cet ADN permettait la synthèse d'une douzaine de protéines.
08:05et sur ces douzaines de protéines,
08:08encore la moitié, on n'est pas certain de à quoi elles servent.
08:12Alors, je vous laisse imaginer la situation face au génome humain
08:16avec 3 milliards de bases et des situations.
08:20C'est-à-dire qu'avant de réaliser qu'ils ont tout exploré,
08:24il peut se passer pas mal de temps.
08:25Donc, vous voyez, soit on croit à l'idée de la grammaire cachée,
08:30soit on se dit, après tout, c'est pas là que c'est écrit.
08:32Et très vite, moi, je me suis dit, on a suivi une fausse piste.
08:38J'ai quand même passé 10 ans dans l'ADN à me dire,
08:40non, c'est pas possible, c'est pas écrit là, il faut aller chercher ailleurs.
08:43Mais alors, ailleurs, mais où ?
08:46Vous voyez que là, on était soit en recherche,
08:49quand on bute, on a soit ce que j'appellerais une solution de surface,
08:53vous voyez, on reste dans le paradigme,
08:55on reste dans ce qu'on a appris,
08:56et puis on gratte plus profond, plus efficacement.
08:59Soit on va chercher des solutions de profondeur,
09:03c'est-à-dire qu'on se dit, après tout,
09:04peut-être que le problème était mal posé.
09:07Et là, j'ai commencé à gratter un peu,
09:09et puis vous voyez ce qui s'est passé,
09:10vous allez voir qu'on s'aperçoit qu'il faut gratter
09:14jusque dans les fondements épistémologiques,
09:17jusqu'au sens des mots qu'on utilise.
09:19Et c'est vrai qu'en cela, le séjour à l'IEA,
09:22où il y a une équipe de gratteurs très performants,
09:26m'a permis d'avancer.
09:28C'est-à-dire qu'au début, j'avais un petit bout,
09:29et tout le mur a fini par partir, comme vous allez voir.
09:32Alors, merci beaucoup à Alain Supio,
09:36avec qui j'ai travaillé depuis longtemps,
09:38à l'équipe de l'IEA,
09:39et puis aussi beaucoup à tous les résidents,
09:42au cours, là, ça fait trois ans que je viens régulièrement,
09:45avec qui j'ai eu l'occasion d'interagir.
09:49Alors, qu'est-ce que c'est que...
09:52Déjà, peut-être avant...
09:55Déjà, je voudrais un peu vous dire
09:58qu'est-ce que c'est que ce titre-là,
09:59d'ailleurs, ondes et particules de vie,
10:02Life, Waves and Particles.
10:05Bon, je pense que c'est un titre qui fait un peu peur,
10:07alors je ne sais pas si je l'ai fait exprès,
10:08mais c'est vrai qu'on se demande bien
10:10de quoi ça va vouloir parler.
10:13Et puis j'ai réalisé aussi, en le relisant,
10:15qu'il y a des phrases incompréhensibles,
10:17il y en a peut-être plus.
10:18J'essaie de faire mieux à l'oral qu'à l'écrit.
10:21Par exemple, quand...
10:22Le texte en français commence par...
10:26Chaque humain perçoit l'évidence de son individualité.
10:30Alors, individualité, ça veut pouvoir dire tellement de choses
10:33que personne n'a très bien perçu de où ça voulait aller.
10:37En fait, c'est l'idée qu'on est une entité,
10:41un individu au sens d'une entité autonome.
10:45Alors, ondes et particules de vie,
10:47ça veut dire que, souvent en science,
10:49il y a des modèles qu'on appelle discrets.
10:52Dans le cas de la physique, c'est les particules,
10:54c'est-à-dire que c'est des objets indépendants
10:57les uns des autres,
10:58et qu'on peut monter des modèles explicatifs
11:00à partir de ces objets indépendants.
11:03Et les ondes, c'est un modèle continu et mobile.
11:05Alors, avant de revenir sur ça,
11:10je voudrais aussi faire un peu le lien avec le travail à l'IEA
11:14et notamment la conférence de la semaine dernière.
11:18Pour ceux qui étaient là, c'était Augustin Heyman
11:20qui parlait de Schweitzer.
11:23Et puis, bien sûr, à la suite de sa conférence,
11:26on a eu un débat sur la question de la race,
11:30surtout qu'il y avait un article dans Le Monde
11:33où il y a toujours le même débat.
11:37Les biologistes disent que les races n'existent pas.
11:41Et en face, il y a quelqu'un qui répond
11:43« Ouais, mais vous ne pouvez quand même pas dire
11:44qu'on ne les reconnaît pas les uns des autres. »
11:48Et, si vous voulez, il y a toujours en biologie,
11:53la biologie, elle est complètement envahie
11:56par cette question des classifications,
11:59depuis toujours.
12:00Je me demande d'ailleurs si c'est que la biologie
12:02ou si c'est une question scientifique de manière générale.
12:06Si on reprend le cas de la race,
12:10ce n'est pas parce qu'on ne peut observer des différences
12:13qu'on peut créer sans ambiguïté
12:16et sans une grande part de décision arbitraire
12:19une catégorie qui a une réalité objective.
12:24C'est-à-dire qu'on peut prendre tout un tas de critères,
12:28que ce soit la couleur de la peau ou d'autres,
12:29mais il faut quand même bien choisir les critères.
12:32Augustin et Mann en ont parlé la semaine dernière,
12:34on peut prendre la couleur,
12:35mais on peut prendre le pays d'origine,
12:38on peut prendre l'activité,
12:39enfin, on peut créer des catégories avec tout ce qu'on veut.
12:42Et quand on crée des classifications comme ça,
12:44il faut déjà s'entendre sur les critères de classification,
12:47puis même il y a des critères qui ne sont pas évidents,
12:49sur lesquels il faudra poser des seuils.
12:51la couleur de la peau, par exemple,
12:53où est le seuil, où est la frontière ?
12:56Et je pense que c'est quelque chose,
12:59cette question des classifications,
13:01elle est très présente dans la pensée occidentale,
13:04je pense depuis les Grecs, depuis Platon,
13:06est-ce que ces catégories sur lesquelles on place des mots
13:09ont une existence en dehors du monde des idées ?
13:13Et en biologie, on a du mal à y renoncer.
13:15La grande révolution par rapport à ça,
13:18ça a été Darwin.
13:21Darwin, il a écrit un livre qui s'appelait
13:24L'origine des espèces,
13:26dont quand même l'objet était de montrer
13:28que l'espèce n'existait pas.
13:31De la même façon que les races n'existent pas,
13:33l'espèce n'existe pas.
13:35Qu'est-ce que ça veut dire ?
13:37Ça veut dire que ça n'est pas une catégorie objective
13:40qui a une réalité en dehors de l'esprit du classificateur.
13:50L'espèce, il a montré que c'était,
13:54dans le fixisme créationniste,
13:59avant Darwin, de façon schématique,
14:01l'espèce existait,
14:02elle traduisait le mécanisme de création.
14:05C'est-à-dire que Dieu avait créé les espèces
14:07de façon indépendante,
14:08donc, quelque part,
14:09elle traduisait le mécanisme de leur création
14:11et elle était le reflet d'une réalité,
14:14c'est-à-dire du mécanisme
14:15par lequel elle avait été créée.
14:17À partir du moment où Darwin,
14:19en gros, je schématise un peu,
14:23crée l'idée d'une dynamique
14:25et d'un arbre généalogique,
14:29vous voyez, avec un buissonnement comme ça,
14:32bien sûr, vous pouvez décider que
14:36tous les individus qui partagent cet ancêtre commun
14:40forment une espèce,
14:41mais vous pouvez tout aussi bien prendre celui d'avant
14:43ou celui d'après,
14:44c'est une question de...
14:45c'est votre choix.
14:47Si aujourd'hui, vous demandez aux biologistes
14:49qu'est-ce qu'une espèce,
14:50il n'y en a pas deux qui vous diront la même chose.
14:52Même s'il y a eu un peu de succès
14:53sur des définitions qui ont été réintroduites tardivement
14:57avec des idées de barrières reproductives,
15:01les biologistes n'arrivent pas à s'entendre.
15:03C'est-à-dire que vous voyez bien
15:04qu'il n'y a pas de réalité à la classification
15:07si ce n'est que ce phénomène de bourgeonnement.
15:09Et même si l'espèce,
15:11on peut la définir en faisant une tranche,
15:14vous voyez, là, on peut dire
15:15OK, on regroupe cela, c'est l'espèce,
15:17on fait une tranche de temps.
15:19Si on accepte de regarder le mécanisme
15:21ou si on accepte de regarder vers le passé
15:24et peut-être vers le futur,
15:26s'il y a encore des possibilités de mélange,
15:28vous voyez que l'espèce se dissout en temps.
15:31Et c'est vrai pour toutes les autres formes de catégories.
15:35Alors, il y a une autre catégorie
15:38qui est aussi très difficile
15:43et qui complique la biologie,
15:46mais aussi, par exemple, la sociologie.
15:48C'est l'histoire du tout
15:49et le tout et les parties.
15:52Alors ça, la question du tout et des parties,
15:54c'est assez rigolo comme catégorie.
15:58Parce que, vous voyez, en biologie,
16:02l'idée du tout et des parties,
16:06c'est de faire des règles pour les parties
16:08et des règles pour le tout.
16:10Mais en biologie, tout est emboîté.
16:13Alors, vous voyez, vous avez l'espèce généalogique,
16:17on va dire, vous voyez que c'est aussi le langage
16:19qui nous force à bien les désigner d'une façon ou d'une autre.
16:22Vous avez les individus au sens classique,
16:25vous et moi,
16:27mais à l'intérieur, vous avez les cellules.
16:29Et dans les cellules, vous avez...
16:30Donc, ce qui est intéressant, c'est que tout est emboîté
16:34et la cellule, ma cellule va être un tout
16:38par rapport aux molécules,
16:40mais ça va être une partie par rapport à moi.
16:43Donc, vous voyez que comment faire
16:45des règles pour les touts et des règles pour les parties
16:48si le tout est aussi une partie ?
16:51La règle va changer en fonction de quoi ?
16:54Et vous voyez que là, il y a des paradoxes logiques
16:56avec cette classification,
16:59cette notion de tout et partie.
17:03En fait, vous voyez que c'est aussi une distinction
17:07entre les touts et les parties
17:09qu'on ne peut pas suivre.
17:12Ou alors, il va falloir créer des touts
17:14qui ont une valeur de tout
17:15et des touts qui n'ont pas cette valeur.
17:19Donc, c'est aussi une classification qui est impossible.
17:21Moi, à la fin, j'avais dit
17:22le tout est une partie comme les autres.
17:24Alors, pour rentrer un peu dans les conséquences
17:29sur la biologie moderne
17:31de ces questions de la classification,
17:33de ces questions du tout et des parties,
17:36c'est qu'aujourd'hui, la biologie moderne,
17:38elle est construite sur deux ensembles théoriques,
17:42sur deux jambes.
17:43La première jambe, c'est la théorie de l'évolution
17:46et la deuxième, c'est la génétique.
17:50Et dans les deux cas, sur ces deux aspects,
17:53vous voyez que même si la théorie de l'évolution,
17:55on aurait pu dire Darwin a réussi à dépasser
17:58la question des classifications
18:00en ce qui concerne l'espèce,
18:02il y a une catégorie sur laquelle il est retombé,
18:06c'est celle de l'individu entier.
18:09Et ça, je vais y revenir.
18:11Alors, sur la génétique,
18:12pour vous montrer comme ces histoires
18:14sont très structurantes
18:17et compliquent la génétique,
18:20prendre une histoire,
18:21c'est...
18:22Où est le piège de la génétique ?
18:27C'est...
18:28Imaginons un extraterrestre,
18:30un extraterrestre qui...
18:36qui arrive...
18:37En fait, il est à la recherche de...
18:39C'est un extraterrestre,
18:42il est à la recherche de formes de vie,
18:44il arrive sur Terre,
18:46et puis il débarque sur la plage,
18:49il regarde l'océan,
18:51et puis en regardant l'océan,
18:53il s'aperçoit que les vagues se suivent,
18:57qu'elles sont mobiles,
19:00et puis qu'en plus,
19:01elles meurent,
19:02elles ont une durée de vie limitée dans le temps,
19:04puisqu'il y en a une qui meurt sur le sable,
19:06et que la suivante arrive,
19:09et bon,
19:10il se dit quand même,
19:11donc les vagues,
19:15et puis donc qu'elles meurent sur le sable.
19:20Bon, une fois qu'il a décidé que c'était vivant,
19:23que c'était fort en tout cas,
19:24très probablement vivant,
19:26la question est,
19:28quel est l'individu biologique là-dedans,
19:32et vous voyez que quand il regarde,
19:34il y a comme un peu comme chez nous,
19:36il y a des cellules emboîtées dans des organes,
19:38qui sont emboîtées dans des corps,
19:39qui sont emboîtées dans des groupes,
19:41ou dans des familles,
19:42et il y a un peu le même phénomène avec les vagues,
19:44il voit,
19:46les vaguelettes font les vagues,
19:47et puis il y a une sorte de périodicité
19:50dans les vagues de plus haut niveau,
19:52donc il finit par décider que l'individu vague,
19:59vivant,
20:00donc l'unité de vie,
20:04et c'est la vague,
20:06la vague individuelle,
20:08celle-là,
20:08donc là,
20:10vous voyez sur ce dessin,
20:11il y aurait un individu en train de mourir,
20:14la génération d'après qui arrive,
20:16et puis il y en a un troisième.
20:17Mais vous voyez qu'une fois qu'il a décidé que c'était des individus autonomes,
20:25ça soulève une question,
20:27c'est pourquoi ils se ressemblent autant ?
20:29Donc à partir du moment où il a déterminé ces individus,
20:35il y a une nouvelle question qui apparaît,
20:36c'est la question de la ressemblance,
20:38que quand celui-là meurt,
20:39celui-là arrive et lui ressemble,
20:41donc pourquoi ces vagues se ressemblent autant ?
20:44Donc quelque part,
20:46il est obligé d'inventer une génétique des vagues
20:48qui va faire passer quelque chose
20:51de cette vague vers celle-ci.
20:54D'accord ?
20:55Mais ce quelque chose,
20:58s'il fait passer de l'eau
20:59d'une vague à l'autre,
21:02il renonce au découpage qu'il vient d'opérer,
21:05il les reconnecte,
21:06il vient de les couper,
21:07c'est pas pour dire il y a de l'eau qui passe
21:09et c'est pour ça qu'elles se ressemblent,
21:11il les a découpées.
21:12Donc à partir du moment où il les a découpées,
21:14il est obligé de faire passer quelque chose
21:16entre les vagues
21:17qui n'est pas la vague elle-même,
21:20qui n'est pas un composant
21:21qui viserait à reconnecter
21:24le découpage qui vient d'opérer,
21:26il est obligé d'inventer une génétique des vagues.
21:28Et qu'est-ce que ça va être ça ?
21:29Ça va être de l'information de vagues.
21:33Et on retrouve la notion d'information
21:35qu'on a beaucoup en génétique,
21:36et on est obligé de faire passer de l'information
21:40parce que si on fait passer de la matière
21:42trop,
21:44eh bien on annule le découpage qu'on a opéré.
21:48Alors, pour vous...
21:51Donc, voyez que quelque part,
21:54la génétique est rendue indispensable
21:57par le découpage qu'on opère,
22:00et je dis exprès,
22:02on opère entre les individus.
22:06Pour vous donner un exemple de ça,
22:11vous voyez que si vous prenez un bâton,
22:13vous le cassez en deux,
22:15les deux moitiés, elles se ressemblent.
22:17Vous n'avez pas besoin d'inventer une génétique
22:19entre les deux morceaux,
22:21qui fait passer la ressemblance
22:22d'une moitié du bâton à l'autre
22:24parce que vous avez bien perçu
22:26la continuité matérielle
22:28qu'il y avait entre les deux parties.
22:30Donc, à partir du moment
22:32où il y avait une continuité matérielle,
22:34il n'est pas nécessaire
22:35d'inventer un passage d'information,
22:39quelle qu'elle soit.
22:42Alors, vous voyez que
22:44la génétique est rendue nécessaire
22:48par un découpage,
22:49et ce découpage, c'est une classification.
22:51J'ai construit une catégorie ici,
22:53un tout ici,
22:54et comme je l'ai fait,
22:56je dois inventer la génétique.
22:58Alors, la théorie de l'évolution,
23:03ça va ou il y a des questions à ce stade ?
23:07La théorie de l'évolution,
23:11c'est un peu plus subtile
23:13à quel point elle est encore
23:15bloquée par le problème
23:17des classifications,
23:19puisque, comme on l'a dit,
23:20l'arbre généalogique darwinien
23:22mettait fin à cette réalité
23:24de la classification des espèces.
23:27On a inventé, bien sûr,
23:29d'autres classifications,
23:30mais elles n'avaient pas
23:31du tout la même valeur.
23:33C'était des classifications opérationnelles
23:36qui suivaient l'arbre.
23:38Il y a toutes...
23:39Je ne vais peut-être pas rentrer là-dedans,
23:40c'est assez technique.
23:41Mais la théorie de l'évolution,
23:45qu'est-ce que c'est ?
23:45Comment ça marche ?
23:46La théorie de l'évolution,
23:47c'est une théorie de...
23:50Bon, alors, il y a plusieurs éléments.
23:52Il y a l'arbre phylogénétique,
23:53que je vous ai montré,
23:54qui donne la différence.
23:56Et puis, il y a le principe
23:57de sélection naturelle,
23:59qui est un principe
23:59de reproduction différentielle.
24:03Alors, le problème,
24:05c'est que...
24:06Donc, voyez, par exemple,
24:08il y a des oiseaux blancs,
24:10il y a des oiseaux noirs.
24:11Les oiseaux noirs se cachent mieux,
24:14du coup, ils vont mieux se reproduire,
24:16et c'est ceux-là qui vont survivre
24:17et qui vont donner naissance
24:19aux oiseaux noirs.
24:22C'est un principe de reproduction différentielle
24:25par rapport à certaines caractéristiques.
24:29Mais le problème,
24:30c'est une reproduction différentielle,
24:33oui, mais de quoi ?
24:35Parce que, d'un exemple,
24:37le cancer,
24:39ce sont des cellules
24:40qui se reproduisent très vite,
24:42plus vite que leurs voisines.
24:44Donc, vous voyez que
24:47la reproduction différentielle
24:49des cellules cancéreuses,
24:51qui est supérieure
24:52à la reproduction de ses voisines,
24:54devrait être favorisée
24:56par la sélection naturelle.
24:58D'accord ?
24:58Donc, si on considère,
25:00on applique la sélection naturelle
25:02aux cellules,
25:03eh bien, il n'y aura que des cancers
25:05partout,
25:06et ça, c'est heureusement
25:08pas ce qu'on observe.
25:09Donc, vous voyez qu'on ne peut pas
25:10appliquer la théorie de l'évolution
25:12par sélection naturelle aux cellules.
25:14Il faut l'appliquer
25:15à l'entité du dessus.
25:18Mais on est dans ce qu'on appelle
25:19une situation de conflit.
25:21Vous voyez que,
25:22dans le cas des cellules
25:23et de nous-mêmes,
25:24on peut se dire,
25:25le choix est facile,
25:26on va choisir nous-mêmes.
25:27Vous verrez,
25:28je développerai qu'en fait,
25:30c'est là qu'est le début du problème.
25:32Vous voyez que pour la fourmi
25:33et la fourmilière,
25:34est-ce qu'on doit choisir
25:35la fourmilière ou la fourmi ?
25:37Et c'est ce qu'on appelle
25:38en théorie de l'évolution
25:40une situation de conflit.
25:43Vous voyez que,
25:46en fait,
25:47il y a un conflit
25:47entre les parties et le tout.
25:50C'est-à-dire que là,
25:51vous voyez dans l'exemple
25:52sur lequel il y a eu
25:53beaucoup de littérature,
25:55dans l'exemple du concert,
25:56la théorie de l'évolution
25:59ne peut pas s'appliquer
26:00aux cellules individuelles
26:02parce que sinon,
26:03ça favoriserait le cancer.
26:04Donc, la théorie de l'évolution,
26:06elle s'applique
26:06à l'ensemble de ces cellules.
26:09Et là, vous voyez
26:10qu'on est dans une situation
26:11très particulière.
26:12C'est-à-dire que
26:13si ça, c'est l'entité, nous,
26:16à laquelle s'applique
26:17la théorie de l'évolution
26:19par sélection naturelle,
26:21elle ne s'applique pas
26:21à l'intérieur,
26:23aux cellules.
26:25Donc, il y a une sorte
26:25de frontière.
26:27Ça, c'est une théorie
26:28qui s'applique
26:29à l'intérieur
26:31et pas à l'extérieur.
26:32De façon schématique,
26:33à l'intérieur,
26:34on est dans le domaine
26:35de la collaboration,
26:37voire du sacrifice
26:38des entités
26:39les unes par rapport
26:39aux autres,
26:41alors qu'à l'extérieur,
26:42on est dans le domaine
26:42de la compétition
26:43et de la course
26:44à la reproduction.
26:44cette théorie des conflits,
26:48elle a fait couler
26:49beaucoup d'encre
26:50sur la question
26:51de est-ce qu'il peut y avoir
26:52ici, il y aurait
26:53de l'altruisme,
26:54vous voyez,
26:54les cellules ont intérêt
26:55à céder les unes
26:56les autres.
26:57Et puis surtout,
26:59vous voyez que
26:59l'idée
27:00qu'il faille
27:01une sorte d'unité
27:02en théorie de l'évolution,
27:04il faut une unité,
27:06on appelle ça
27:06une unité de sélection
27:07qui est une sorte
27:08d'unité de référence,
27:09comme par hasard,
27:10c'est nous.
27:10Et vous voyez que
27:13ça crée
27:14les frontières
27:16de notre corps
27:17soit aussi
27:18les frontières
27:18qui font basculer
27:20la théorie.
27:21Vous voyez,
27:21c'est une théorie
27:22qui n'est pas valide ici
27:24et qui est valide ici.
27:26Et là,
27:27d'un seul coup,
27:28elle s'inverse.
27:29Ici,
27:29c'est on collabore,
27:30ici,
27:31on court,
27:32les uns contre les autres.
27:33Alors,
27:34qu'en plus,
27:34vous voyez que
27:35au nom de quoi
27:38on n'adopterait pas
27:39le point de vue
27:40de nos cellules ?
27:41Vous voyez que
27:42c'est vraiment
27:42encore une question
27:43de point de vue
27:44et de catégorie.
27:46Et là,
27:46la catégorie
27:46dont on parle,
27:47qui est très structurante
27:48sur la théorie,
27:49c'est la question
27:50de l'intérieur
27:51et de l'extérieur.
27:52Et vous voyez que
27:53l'idée de l'intérieur
27:54et de l'extérieur,
27:55c'est quelque chose
27:56qui est,
27:57comme le dirait
27:58les physiciens,
27:59ce n'est pas très relativiste.
28:00Ça dépend vraiment
28:01de où on se positionne.
28:02Si on se positionne
28:03là,
28:05dans la cellule,
28:07là,
28:07c'est l'extérieur.
28:08Alors,
28:08pourquoi
28:08cet extérieur-là
28:10aurait une valeur
28:11différente
28:12de cet extérieur-là ?
28:14Et vous voyez
28:14qu'on est vraiment
28:15dans une question
28:16encore de classification
28:18et de catégorisation.
28:19en pratique,
28:23si vous voulez,
28:23ce qui fait que,
28:26comme par hasard,
28:27là,
28:27l'entité de référence,
28:28c'est nous.
28:30Et je pense que
28:32ça résonne d'abord
28:36avec notre perception
28:36de nous-mêmes,
28:38qui fait que
28:38nous sommes là.
28:40Et aussi,
28:42ça résonne
28:44avec une vision
28:45un peu
28:45machine,
28:47du vivant-machine,
28:49qui est aussi
28:50une vieille histoire.
28:51Vous voyez que
28:51sur une machine,
28:53par construction,
28:55il y a un intérieur
28:55et un extérieur
28:56de la machine.
28:57Je dirais
28:57sur des machines
28:58classiques,
28:59les machines
29:00qu'on a toujours connues,
29:01il y a un extérieur
29:02et un extérieur.
29:03Et puis,
29:04il y a une vraie
29:04différence
29:07entre le tout
29:09de la machine
29:09qui possède
29:11la fonction,
29:12qui est
29:13l'objectif
29:13final de la construction,
29:15et les pièces détachées.
29:16Vous voyez,
29:17les pièces détachées
29:18dans une machine,
29:19elles ont un statut
29:20bien différent
29:21de la machine
29:21dans son ensemble.
29:23Elles n'ont pas
29:23la fonctionnalité
29:24voulue.
29:27Et là,
29:28on est un peu
29:29dans la même situation.
29:30Vous voyez que
29:31nos cellules,
29:32elles sont
29:33conçues,
29:35théorisées,
29:36comme étant
29:36au service
29:37de la machine
29:38globale
29:38que nous sommes.
29:40Elles n'ont pas
29:40de sens en elles-mêmes.
29:41Elles sont là
29:42pour nous.
29:43Elles sont là
29:43pour servir
29:44la fonction.
29:44la fonction
29:45est tenue
29:46par l'ensemble.
29:48Les cellules
29:49toutes seules,
29:50c'est un peu
29:50comme un piston
29:52d'automobile
29:53qui se promènerait
29:54et le piston
29:56ne peut être compris
29:57que dans le cadre
29:58de la machine complète.
29:59Nos cellules,
30:00on leur a donné
30:00ce statut
30:01de pièce détachée.
30:03En fait,
30:05ce statut
30:05de pièce détachée
30:06explique,
30:08et vous voyez,
30:09c'est pas...
30:09la biologie
30:11est très finaliste
30:12au fond,
30:12mais elle est finaliste.
30:15On n'a pas envie
30:16d'être finaliste.
30:17Mais à partir du moment
30:18où on ne renonce
30:19pas à cette distinction
30:22entre le tout
30:23et les parties,
30:25le tout qui a une existence
30:26de vie,
30:27qui est soumise
30:27à la sélection naturelle,
30:29et les parties
30:29qui sont là
30:30juste pour le faire marcher,
30:31on est nécessairement
30:32finaliste.
30:32Pourquoi ?
30:33Parce que vous voyez
30:34que ça pose un problème.
30:35Si les parties,
30:37les pièces détachées,
30:37nos cellules
30:38à l'intérieur de nous-mêmes,
30:39elles ne sont construites
30:40que dans l'objectif
30:42que nous,
30:43on existe,
30:45il faut quand même
30:45toujours faire
30:46les pièces détachées
30:47avant la machine.
30:48Vous voyez,
30:49quand on construit
30:49une automobile,
30:50on fabrique
30:50les pièces détachées
30:51et puis on l'assemble.
30:53Là,
30:55s'il n'y a pas de plan,
30:56s'il n'y a pas de finalité,
30:58qu'est-ce qui fait
30:59que les pièces détachées
31:00se construisent
31:01et s'assemblent
31:04s'il n'y a pas
31:05quelque part un plan,
31:07donc un finalisme.
31:08Et vous voyez
31:08qu'en fait,
31:10on a une connexion
31:11entre l'idée
31:12que cette sorte
31:13de distinction
31:14entre le tout
31:16et ses caractéristiques,
31:17les parties
31:17et ses caractéristiques,
31:19et dès qu'on a fait ça,
31:21on est obligé
31:21d'être finaliste
31:22pour expliquer
31:23que les pièces détachées
31:24sont faites
31:25avant le tout
31:26mais elles vont s'assembler.
31:27Donc quelque part,
31:27on a déjà l'idée
31:28de là où on va
31:29et on est anthropocentrique
31:32parce que,
31:32comme par hasard,
31:33le tout,
31:33c'est nous.
31:34dans l'idionhygiène,
31:36ça remonte à un moment,
31:38j'avais écrit
31:39une petite fable
31:42au sujet
31:43de cet anthropocentrisme
31:46qui s'est réfugié
31:47dans notre monde intérieur.
31:49C'était un dialogue,
31:51donc moi,
31:51j'ai travaillé
31:52en immunologie,
31:53vous savez,
31:53c'est l'étude des vaccins,
31:55de la réponse immune,
31:55de la défense
31:56contre les infections
31:57et on ne comprend pas
32:01grand-chose
32:02en immunologie,
32:03ce n'est pas facile
32:05mais le rêve
32:06de l'immunologie,
32:07c'est bien sûr
32:08de pouvoir parler
32:09à ses cellules
32:10et de lui demander
32:12comment elle fait ça,
32:15comment elle reconnaît
32:16les microbes,
32:17tout ça.
32:18et donc là,
32:19j'avais imaginé
32:20qu'un immunologiste,
32:21c'était un peu moi,
32:22mon rêve.
32:23J'avais enfin une machine
32:24pour parler
32:24à mes globules blancs
32:26et puis enfin,
32:27ça marchait.
32:28Allô,
32:29globules blancs,
32:30est-ce que tu m'entends ?
32:30Oui,
32:31je t'entends.
32:33Je peux te poser une question ?
32:36Oui.
32:38Bon,
32:39voilà.
32:40Comment est-ce que tu fais
32:41pour préserver
32:43ma santé,
32:45reconnaître
32:46mes
32:47mes organes,
32:49des
32:49bactéries
32:52ou des microbes
32:52qui m'envahissent ?
32:54Comment tu fais
32:54pour reconnaître
32:55mon moi
32:56de mon non-moi
32:57et défendre
32:58ma santé
32:59contre mes envahisseurs ?
33:00Et il répond,
33:03tais-toi,
33:03je mange.
33:06En fait,
33:07c'était,
33:08si vous voulez,
33:09c'était la différence
33:10des points de vue.
33:10nous,
33:11on voit le lymphocyte
33:12dans une mission
33:14de sauvegarde
33:14de nous-mêmes,
33:16mais lui,
33:16il ne peut
33:17en aucun cas
33:18avoir une perception
33:18de ça.
33:20Et j'avais montré
33:21à la suite
33:21de cette fable
33:22qu'en concevant
33:23des compétitions
33:25entre les globules blancs
33:27pour les ressources
33:28qui, à leur échelle,
33:29sont les microbes,
33:30on avait des phénomènes
33:31très proches
33:32de ce qu'on observe
33:33en immunologie,
33:34sans pour autant
33:35que le globule blanc,
33:37il ait une perception
33:38de ce que nous sommes
33:39et de ce qu'il doit défendre.
33:41Vous voyez,
33:42dans une vision un peu,
33:44je dirais,
33:44ce que j'appelle
33:45un transfert immédiat,
33:47notre observation
33:48est que les globules blancs
33:49nous défendent.
33:51Mécanisme,
33:52le globule blanc
33:53me défend
33:53de mes infections.
33:55Or que,
33:56l'idée,
33:57c'est de se demander
33:58qu'est-ce qui fait lui
33:59à son niveau
34:00qui fait qu'à mon niveau
34:01j'ai l'impression
34:02qu'il me défend.
34:04Et vous voyez,
34:04cette capacité
34:05qu'on a à transposer
34:06gérer nos pensées,
34:08notre vision
34:09de notre monde
34:10sur nos propres cellules
34:12sous prétexte
34:12qu'elles sont là
34:13pour nous servir.
34:14Je pense que c'est
34:15une grosse erreur
34:16anthropocentrique
34:17dont la biologie
34:18doit se débarrasser rapidement.
34:21Alors,
34:21pourquoi finalement
34:22on ne s'en débarrasse
34:25jamais en biologie ?
34:26Enfin,
34:26pourquoi on ne s'en est
34:27pas débarrassé ?
34:28Je pense qu'en physique,
34:29on a parlé
34:30des révolutions
34:31coperniciennes,
34:33de la relativité
34:35des points de vue,
34:36et en biologie,
34:41on a du mal
34:42et ça m'a amené
34:46à poser la question
34:47de la vie.
34:49Donc,
34:50c'est un grand sujet
34:51qu'est-ce que la vie ?
34:52C'était le titre aussi
34:54d'un ouvrage
34:55de Schrödinger
34:56qui était fondateur
34:58sur la biologie moléculaire
34:59où justement
35:00il opérait
35:00cette connexion
35:01entre la biologie
35:03et la physique.
35:04Mais qu'est-ce que la vie
35:06en fait ?
35:07Si on regarde
35:07les...
35:10Il y a eu plein de gens
35:11qui ont posé
35:11cette question.
35:15Un des critères
35:16de la classification
35:17vivant,
35:19je fais exprès
35:20d'utiliser ces mots,
35:22c'est la question
35:22de reproduction.
35:24Il y a eu
35:25beaucoup de débats,
35:26il y a beaucoup de variations
35:26selon les auteurs,
35:28mais il y a une chose
35:28sur laquelle
35:28beaucoup s'entendent
35:29et la plupart,
35:31c'est que
35:31l'idée de vie
35:33elle apparaît
35:33avec l'idée de reproduction.
35:35Notamment,
35:36vous voyez que si
35:36la théorie de l'évolution
35:38est un principe
35:39de reproduction
35:40différentiel,
35:42la vie apparaît
35:43avec la possibilité
35:44de se reproduire.
35:47Et je pense que même
35:48dans les définitions
35:49un peu modernes,
35:49un peu plus moléculaires,
35:51l'idée de vie
35:52elle est liée
35:54à l'idée de reproduction.
35:55Alors, Alain dirait
35:58ou procréation,
36:00c'est vrai que c'est,
36:01ça revient un peu au même,
36:03même s'il y a des nuances
36:03dans le champ juridique.
36:06Donc,
36:07on pourrait écrire ça.
36:09Alors,
36:09c'est un signe égal
36:10de biologiste,
36:11je ne sais pas
36:12ce que ça veut dire.
36:17Donc,
36:17la vie,
36:18c'est un des critères
36:19essentiels de la vie,
36:20c'est la reproduction.
36:23Et qu'est-ce que c'est
36:24que la reproduction?
36:25Alors,
36:27je me suis posé la question.
36:28Parce que,
36:29est-ce que ça existe vraiment?
36:30Ou est-ce que
36:31l'idée de reproduction
36:32n'est pas elle-même
36:34une invention
36:35liée à un découpage
36:37que l'on opère
36:38exactement comme
36:38l'extraterrestre
36:39avec les vagues?
36:41Je vous donne un exemple.
36:42Prenez une forêt.
36:45Forêt.
36:47Vous avez vu de dessus.
36:49C'est bien vivant.
36:51Dans une forêt,
36:52les arbres,
36:53les animaux,
36:53tout ça,
36:54c'est vivant.
36:56On ne parle pas
36:57de reproduction
36:57de la forêt.
36:58On va peut-être
36:58parler de reproduction
37:00des animaux
37:01et des plantes
37:01qui sont à l'intérieur
37:02de la forêt,
37:03mais on ne va pas
37:04parler de reproduction,
37:05on va parler
37:05de croissance.
37:06par contre,
37:11si je décide,
37:12comme l'extraterrestre
37:13avec les vagues,
37:14si je décide
37:15de découper
37:15la forêt
37:16en carrés
37:17de 1 mètre
37:21de côté,
37:25vous voyez que là,
37:27je ne vais plus parler
37:28de croissance,
37:29je vais parler
37:29de reproduction
37:30des carrés.
37:31c'est-à-dire
37:33que j'ai exactement
37:34le même phénomène,
37:35si je décide
37:35de découper,
37:37je parle de reproduction,
37:39si je ne décide
37:40pas de découper,
37:41le même phénomène,
37:42je l'appellerai croissance.
37:43Ce qui est intéressant,
37:44c'est que croissance,
37:46ce n'est pas vivant.
37:48Si vous entendez
37:49les gens,
37:49ils vous diront
37:49« Ah oui,
37:50les cristaux,
37:50ce n'est pas vivant
37:51parce que c'est
37:52de la croissance,
37:53alors que la vie,
37:54c'est de la reproduction. »
37:56Mais il n'y a aucune différence
37:57si ce n'est que
37:58j'ai décidé
37:58de faire un découpage.
38:02Alors,
38:04là où c'est intéressant
38:06et là où ça m'a fait
38:07un peu réfléchir,
38:10c'est que donc
38:10reproduction égale
38:12découpage,
38:14parce que sinon
38:14on ne peut pas parler
38:15de reproduction
38:16ni de vie.
38:17Mais c'est quoi ce découpage
38:18dont il s'agit ?
38:19Ben c'est nous.
38:22Donc vous voyez que nous,
38:23vous, moi,
38:26c'est une catégorie,
38:28c'est un découpage,
38:29parce que si vous regardez
38:31le long de l'axe du temps,
38:34ben si on écrase
38:35l'axe du temps,
38:35si vous regardez la vie,
38:36ça va ressembler
38:37à un truc bourgeonnant
38:39comme ça.
38:41Je vous fous peut-être
38:42enfin là,
38:43ce n'est pas évident
38:43d'imaginer l'axe du temps,
38:45c'est l'œuf primitif
38:46avec toutes les bulles
38:48que nous sommes
38:49qui ont bourgeonné
38:51à partir d'entités préexistantes.
38:53Je vous ferai le dessin
38:54avec l'homme tout à l'heure,
38:55mais vous voyez que
38:57finalement,
38:59cet individu,
39:02c'est nous,
39:02et vous voyez que l'individu,
39:04c'est un découpage,
39:05mais c'est le pire
39:06des découpages,
39:07parce que,
39:08le pire,
39:09je ne sais pas,
39:10ce qu'entendons-nous,
39:11sur le plan théorique,
39:13c'est le plus trompeur,
39:15parce que vous voyez
39:15que déjà,
39:17on en avait discuté,
39:19Gustin est arrivé
39:20avec la question
39:21des races
39:22et des classes,
39:24les gens ont déjà
39:24du mal
39:25à ne pas prendre
39:28les classifications
39:31qu'ils opèrent
39:32pour des réalités
39:33absolues.
39:34C'est déjà pas facile.
39:37Alors,
39:38imaginez la situation
39:40d'après,
39:41c'est que,
39:42non seulement,
39:43ils prennent la catégorie
39:44pour une réalité,
39:45mais ils n'ont même pas réalisé
39:46que c'était qu'une catégorie.
39:47Donc là,
39:48il y a un échelle de plus.
39:50Et on se retrouve
39:50un peu dans la situation,
39:52j'aimais bien,
39:53une histoire d'Ibrahima,
39:54Tube,
39:55à propos de ces catégories
39:57qu'on crée,
39:59et après,
40:01une fois qu'on les a créées,
40:02elles existent,
40:03parce que,
40:04il y a une sorte
40:04d'aller-retour,
40:05vous voyez,
40:05pour faire une classification,
40:07il faut des critères.
40:08Et les critères
40:09définissent la classification,
40:10mais la classification,
40:11elle permet de définir
40:13les critères aussi,
40:14le groupe qu'on a fait
40:15de façon plus ou moins inconsciente.
40:17Vous voyez,
40:17racontez l'histoire,
40:18j'aime bien l'histoire,
40:19je la raconte,
40:20même si elle est un peu hors sujet.
40:22C'est quelqu'un
40:23qui est sous un arbre,
40:25et puis,
40:26il y a un lion qui arrive,
40:27et il lui crie,
40:27il y a de la viande
40:28de l'autre côté de la montagne.
40:30Le lion,
40:31il court à toute vitesse
40:32de l'autre côté de la montagne,
40:33chercher la viande,
40:34et puis le gars
40:35est très content de sa blague.
40:36Et puis,
40:36il y a un deuxième lion
40:37qui arrive,
40:38alors il lui refait le coup.
40:40Puis,
40:41à la fin,
40:42il y a trois,
40:44quatre lions,
40:45et puis les autres lions,
40:46tout le monde y va.
40:47Donc,
40:47il y a toute la jungle
40:48qui est en train de courir
40:49chercher la viande
40:50de l'autre côté de la montagne.
40:51Et le gars qui a fait la blague,
40:52au début,
40:53il les regarde,
40:54il voit,
40:54mais c'est pas possible.
40:55Il doit y en avoir.
40:56Ils sont tellement nombreux à y aller
40:57qu'il doit y en avoir vraiment,
40:59et ils courent après.
41:00Ils courent aussi.
41:01Donc,
41:01vous voyez que,
41:02à partir de quelque chose
41:03qu'on a inventé,
41:04on peut tellement
41:05construire notre vie,
41:07il y a tellement de conséquences
41:08derrière
41:09de ces choix,
41:09de découpage qu'on peut faire,
41:11que derrière,
41:12on va finir par y croire.
41:13Et je vous dis,
41:14dans le cas de l'individu,
41:15vous, moi,
41:16l'individu au sens courant,
41:17ça n'est qu'une classification.
41:19Mais premièrement,
41:20déjà,
41:21je vous dis,
41:21on a du mal
41:22à ne pas prendre
41:23les classifications
41:24sur lesquelles
41:24toute notre vie sociale,
41:26notre droit,
41:28certaines conséquences,
41:31on parlait de la race,
41:32toute l'organisation d'un pays,
41:34la façon dont la vie des gens
41:36est réglée,
41:37sont construites sur ça.
41:38Donc,
41:38à la fin,
41:39même si ça n'était
41:40qu'une invention humaine,
41:41on finit par croire
41:42que c'est vrai.
41:43Exactement comme
41:44l'autre qui croit
41:44après,
41:45disons.
41:46Alors,
41:47je vous dis,
41:48l'individu,
41:49une fois qu'on y réfléchit,
41:50vous, moi,
41:51c'est vrai qu'on a
41:52une telle perception
41:53que c'est vrai,
41:54que,
41:55imaginez que c'est une catégorie,
41:57que ça n'est qu'un découpage
41:58possible parmi d'autres,
42:00et c'est pas facile
42:00à avaler,
42:02mais,
42:03si vous regardez,
42:06pour des grandes,
42:07moi,
42:08je parle en biologie,
42:09après,
42:09c'était un grand débat
42:10qu'on avait avec
42:11Alain Supio aussi,
42:12sur l'idée que l'individu,
42:14le droit en a besoin,
42:15la société en a besoin,
42:17et que peut-être que les biologistes
42:18peuvent arriver à travailler sans,
42:19mais que pour un juriste,
42:21ça allait être très difficile.
42:22Mais,
42:23ceci dit,
42:26si vous voulez,
42:26sur cette classification en biologie,
42:29prenez les grandes fonctions
42:30de la biologie.
42:31on parle de la reproduction.
42:35Vous voyez que,
42:36pour la reproduction,
42:37il faut un couple.
42:38L'individu,
42:38c'est un couple.
42:40Vous prenez la nutrition,
42:41et il y a beaucoup,
42:42beaucoup de littérature
42:43très récente sur cette question.
42:45Vous voyez que je ne peux pas
42:45me nourrir de façon autonome
42:47sans les plantes
42:48qui capent la lumière du soleil
42:50et sans les bactéries
42:51qui sont à l'intérieur de moi.
42:53Aujourd'hui,
42:54il y a des grands débats
42:54parce qu'on a réalisé
42:55que la composition
42:57de notre flore intestinale
43:00influait énormément
43:02sur tout un tas de maladies
43:03et sur beaucoup,
43:06beaucoup de paramètres physiologiques.
43:08Donc,
43:08faut-il intégrer
43:09les bactéries à l'individu ?
43:10Vous voyez que,
43:11pour notre pensée,
43:15on a l'impression
43:16que l'individu tient la route.
43:17Quoique,
43:17même pour parler,
43:19si je parle tout seul
43:20trop longtemps,
43:20ça ne va quand même pas
43:21être très, très, très bien.
43:23Donc,
43:23là même là,
43:24on est connecté les uns aux autres.
43:25On est un groupe.
43:26Pour la reproduction,
43:28on est au moins un couple.
43:29Pour la digestion,
43:31il faut les bactéries.
43:32Donc,
43:32c'est quoi cet individu autonome,
43:34cette entité
43:35qui nous semble aussi évidente ?
43:37Existe-t-elle réellement ?
43:38Alors,
43:39quelles sont...
43:40Quelle est-elle ?
43:41Peut-être,
43:41je vais vous laisser un peu...
43:43Pour finir un peu,
43:45examiner quelques conséquences
43:46de ça.
43:48Est-ce qu'on peut
43:49créer une sorte de...
43:52Vous voyez,
43:52des vagues de vie
43:53où tout est connecté
43:54et où ces découpages
43:56qu'on opère
43:56soit...
43:59Surtout,
43:59la question que me poseront
44:01les biologistes,
44:01ils disent,
44:01bon,
44:02ça c'est bien,
44:02c'est très philosophique,
44:04c'est bien pour l'IoA,
44:05mais nous,
44:06en pratique,
44:07est-ce que ça va nous aider
44:09à avancer
44:10dans nos grandes questions
44:10en biologie ?
44:12Alors,
44:13pour un exemple,
44:14vous voyez,
44:14tout à l'heure,
44:15je disais,
44:16vous prenez un bâton,
44:18la génétique,
44:19ça a l'air,
44:20c'est un peu comme
44:21la viande
44:22de l'autre côté
44:22de la montagne.
44:23On en a tellement parlé
44:24que tout le monde pense
44:25que c'est une réalité,
44:27que les gènes existent,
44:28enfin,
44:29à chaque fois que je fais
44:29des théories
44:30centrées sur la génétique
44:32et le fait que les gènes
44:33n'existent pas,
44:34je suis sûr que
44:35je ne vais pas me faire bien voir
44:38par des gens
44:39qui ne sont pas du tout généticiens.
44:43Ça a pris une existence réelle.
44:45Mais les gènes,
44:46c'est vraiment
44:46un pur montage théorique.
44:49Alors,
44:49on y est tellement habitué,
44:50on trempe de dents
44:51depuis toujours
44:51qu'on ne réalise pas
44:53que ça n'est qu'une
44:54explication,
44:55qu'une possibilité théorique.
44:57Mais je vous donne un exemple.
44:57Tout à l'heure,
44:58je disais,
44:58voilà,
44:59prenez un bâton,
45:01vous le cassez en deux,
45:03vous avez deux moitiés
45:04qui se ressemblent,
45:05et vous voyez d'ailleurs,
45:06là,
45:06vous réintroduisez la croissance.
45:08Vous voyez que le bâton,
45:09il n'est pas produit
45:11par reproduction
45:11des moitiés de bâton,
45:13il est produit
45:13par une croissance
45:15qui maintient
45:16une certaine symétrie
45:18entre les deux moitiés,
45:19qui fait que lorsqu'elles se séparent,
45:20on a deux moitiés
45:21qui se ressemblent,
45:22on n'est pas obligé
45:23d'inventer une génétique.
45:25Vous voyez que là,
45:26tous les problèmes théoriques
45:27que je ne vais pas développer
45:28aujourd'hui
45:29sur la nature du gène,
45:31quelle est l'information,
45:32comment elle marche,
45:34ben,
45:35si on parle,
45:35on réalise
45:36qu'ils étaient connectés
45:37ensemble avant,
45:38on n'a plus besoin.
45:39La question est celle
45:40de la croissance
45:41d'une certaine structure
45:43avec le maintien
45:45de certaines propriétés
45:46de symétrie.
45:47Alors on va se dire,
45:47bon ok,
45:48mais ça c'est un bâton.
45:49Je vous fais maintenant
45:50une bactérie.
45:52Une bactérie,
45:53comment elle se reproduit,
45:54elle grandit,
45:57et puis elle finit
45:58par se couper en deux.
46:00Une cellule aussi
46:00fait ça.
46:02Ça s'appelle
46:02la mitose.
46:05Pareil,
46:05vous voyez que,
46:06a priori,
46:07on n'a pas besoin
46:09de transmettre
46:09de l'information génétique.
46:11Il y a bien sûr
46:11quelque chose
46:12dans l'ADN
46:12qui est resté là,
46:14mais ça a été,
46:15si vous voulez,
46:16l'explication
46:16de la ressemblance,
46:18elle n'est pas
46:18dans la transmission
46:19de quelque chose.
46:20Elle est dans le fait
46:21que cet objet
46:22n'en faisait qu'un
46:23auparavant.
46:24Et que ça a bien
46:26communiqué ici,
46:27ça a maintenu
46:27une sorte de croissance
46:28avec symétrie.
46:30Alors ce que vous voulez
46:31me dire,
46:31quand même,
46:32sur une cellule ça va,
46:33sur un bâton ça va,
46:34mais sur ce qu'on appelle
46:37un multicellulaire
46:38comme l'homme,
46:39est-ce que ça marche ?
46:39Je vous fais le dessin.
46:41Alors la symétrie
46:42est moins évidente,
46:44mais voilà,
46:44la maman,
46:45je n'ai pas mis
46:48le papa,
46:48mais ce n'est pas grave.
46:51Alors l'étape d'après
46:52c'est ça,
46:53c'est une façon
46:54de bourgeonner
46:55un peu particulière.
46:56Vous voyez que là,
47:06ça commence à bourgeonner
47:07pas exactement comme là,
47:09mais il y a quand même
47:10une symétrie.
47:11Elle est moins évidente,
47:12mais elle existe quand même.
47:13Et puis à la fin,
47:14le bourgeon se sépare.
47:17Je ne vais pas vous faire
47:18tout le dessin,
47:19vous avez compris.
47:20on a la mère et l'enfant
47:23qui sont bien issus
47:23d'une mythose
47:24de la maman
47:25en deux moitiés
47:26qui se ressemblent
47:27comme le bâton,
47:28comme la bactérie.
47:29Dans ce cas-là,
47:30est-ce qu'on a vraiment
47:31besoin d'une génétique ?
47:32Je ferai le cas du père
47:33un autre jour
47:34parce que c'est un peu
47:34compliqué,
47:36mais vous voyez que
47:37dans un modèle comme ça,
47:39on n'a pas besoin
47:40de génétique.
47:40Ce qui reste à expliquer
47:42sur les phénomènes
47:42de ressemblance,
47:44c'est comment s'opère
47:47la croissance de ces formes.
47:48Mais vous voyez
47:49que ce n'est plus
47:50la question d'un programme
47:52qui est transmis,
47:53qui est écrit dans l'ADN,
47:55c'est la question
47:55d'un processus
47:56physico-chimique
47:57assez complexe
47:59de croissance,
48:00comme tout à l'heure
48:01je parlais de croissance,
48:02qui maintient des propriétés
48:04de symétrie
48:04et qui se séparent.
48:05Et vous voyez
48:05que l'explication
48:07de la ressemblance,
48:09elle n'est pas
48:09dans la situation
48:11où ils sont déjà séparés,
48:12la situation
48:14de la ressemblance,
48:15elle nécessite
48:16de remonter
48:16dans le temps
48:17au moment
48:18où ils étaient connectés.
48:20Et vous voyez
48:20qu'il y a un peu
48:21dans toutes ces questions
48:22où on expose
48:23les catégories
48:24un peu comme
48:24on fait les physiciens
48:25pour leur relativité
48:28à eux aussi,
48:30ça nécessite
48:31de recréer
48:32une vision du temps
48:34qui est bien différente.
48:35Vous voyez
48:35que là,
48:36l'explication
48:36elle est dans
48:37la temporalité
48:38et expliquer
48:39ce qu'on voit
48:40aujourd'hui
48:40nécessite de remonter
48:41à l'histoire.
48:42Et là,
48:42on a un seul objet.
48:44Ce n'est pas parce que
48:45les objets
48:45se sont séparés
48:46dans le temps
48:47qu'ils n'en font pas
48:49pour autant
48:49un seul objet
48:50et que l'explication
48:51de leur ressemblance
48:52elle est dans le fait
48:53qu'ils sont
48:54un seul système.
48:54Alors peut-être pour finir
48:59je pense que c'est là
49:00pour finir
49:04je peux vous donner
49:05un exemple
49:07un peu concret
49:07un peu pratique
49:08je vous assure
49:09qu'il y en a
49:10parce que
49:11quelque part
49:12le programme
49:14de recherche
49:14vous voyez
49:15là même
49:16sur cet exemple
49:16qui est très
49:17philosophique
49:18et très global
49:19vous voyez que
49:21si on veut expliquer
49:22la construction
49:23du bébé
49:24dans l'ancienne vision
49:26qui passe par la reproduction
49:27donc découpage en individus
49:29transmission
49:30d'une information
49:31tout le programme
49:33de recherche
49:34va être celui
49:35que je vous ai expliqué
49:36c'est à dire
49:36si c'est ce programme
49:38qui construit le bébé
49:40le programme
49:41va être centré
49:42sur l'analyse génétique
49:44et la compréhension
49:46du fonctionnement génétique
49:48tout le programme
49:49de recherche
49:49va être centré
49:50sur le séquençage
49:52des gènes
49:52le déchiffrage
49:53des gènes
49:54et le champollion
49:55des gènes
49:55comme je vous expliquais
49:57tout à l'heure
49:58si c'est ça
49:59la vision
50:00qu'on en a
50:00à ce moment là
50:02le projet
50:03c'est un projet
50:04de
50:04j'appellerais ça
50:06de physique
50:06des fluides
50:07et de la croissance
50:08c'est à dire
50:09de la mise en place
50:10de structures
50:10au cours d'un phénomène
50:12de croissance
50:12de la matière
50:13et vous voyez que l'approche
50:15va être très différente
50:16là on va vraiment
50:17observer le développement
50:18le lien entre la mère
50:20et l'enfant
50:20au cours du développement
50:21et c'est la compréhension
50:23de ces structures
50:23développementales
50:24sans référence
50:25à une information génétique
50:27qui va être le programme
50:28on va faire beaucoup plus
50:29de la mécanique
50:30des fluides
50:30pour simplifier
50:31alors je peux vous donner
50:34l'autre exemple
50:35on peut prendre un cas
50:36ô combien douloureux
50:39et important
50:39c'est le cas du cancer
50:40vous voyez que dans
50:41vous avez fait le dessin
50:43tout à l'heure
50:44en expliquant
50:44les problèmes
50:46de l'évolution
50:48vous voyez que
50:49l'idée c'est que
50:51les cellules sont à l'intérieur
50:53le cancer
50:55elles se mettent
50:56à se multiplier
50:57mais la sélection
51:00naturelle
51:01qui devrait favoriser
51:04le cancer
51:05ne s'applique pas
51:11aux cellules
51:12donc qu'est-ce qui s'applique
51:14aux cellules ?
51:15ce qui s'applique
51:16aux cellules
51:16c'est
51:17l'autorité du tout
51:19sur les pièces détachées
51:20c'est-à-dire que
51:21les cellules
51:22elles obéissent
51:23au programme génétique
51:25qui leur dit
51:27de construire
51:28l'organisme
51:29et pas
51:30d'en en faire
51:31qu'à leur tête
51:31et de répondre
51:33de se multiplier
51:34le plus vite possible
51:35j'irais
51:36capacité
51:39qu'on accorde
51:40à certaines entités
51:42biologiques
51:42au tout
51:43mais pas au parti
51:44les partis
51:45obéissent à la loi du tout
51:46en l'occurrence
51:47la loi du génome
51:48la loi du tout
51:50qui interdit
51:51aux cellules
51:51de se multiplier
51:52passe par le génome
51:54qui contrôle
51:55la multiplication
51:55cellulaire
51:56en biologie
51:58tout est contrôlé
51:59par le génome
52:00là en l'occurrence
52:02les cellules
52:02se multiplient pas
52:04à la vitesse
52:04ou ce qu'on ferait
52:06se multiplient pas
52:08comme elles veulent
52:08elles obéissent
52:09au génome
52:10du coup
52:10pourquoi il y a un cancer
52:14dans cette situation
52:15c'est qu'elles ont échappé
52:16au génome
52:16elles ont échappé
52:18à la loi du tout
52:18elles ont repris
52:19leur liberté individuelle
52:20et du coup
52:22pour échapper au génome
52:23l'idée c'est
52:24qu'elles ont muté
52:24donc
52:25dans le cadre
52:27de la génétique
52:28et du découpage
52:29en individus
52:31et de la génétique
52:32qui en est
52:33je dirais
52:34la conséquence
52:35théorique
52:35le cancer
52:38est une maladie génétique
52:39puisque les cellules
52:40sont supposées
52:41être contrôlées
52:42par le génome
52:42s'il y a des cancers
52:43c'est que
52:44le génome
52:46a un problème
52:46et aujourd'hui
52:47la grande majorité
52:50de la recherche
52:51je dirais
52:51fondamentale
52:52en cancérologie
52:53consiste à
52:54séquencer
52:55des cellules cancéreuses
52:56et à étudier
52:56leur contenu génétique
52:57à la recherche
52:58des mutations
52:59alors maintenant
53:01imaginons
53:01qu'est-ce qu'on fait
53:03dans l'autre schéma théorique
53:04on renonce
53:04à ces découpages
53:06à l'idée
53:06des touts
53:07et des parties
53:08et où
53:08les cellules
53:09comme mon lymphocyte
53:10à qui je parlais
53:11c'est un animal
53:12comme moi
53:13je lui accorde
53:14le même statut
53:15de liberté
53:16que moi
53:16en fait
53:17il ne sait pas
53:18que j'existe
53:19il s'en fout
53:19complètement
53:20il obéit
53:21à son environnement
53:22local et immédiat
53:23il n'a pas
53:24quelque part
53:25en lui
53:26écrit
53:27mon existence
53:27et ce qu'il doit faire
53:29pour moi
53:29donc dans ce cas là
53:31la cellule
53:32elle se comporte
53:34comme
53:34un lapin
53:35dans la forêt
53:36vous voyez que
53:37si vous avez
53:38dans la forêt
53:39on change d'échelle
53:40si vous avez
53:42dans la forêt
53:43un petit lapin
53:44qui se met
53:45à se multiplier
53:46très très vite
53:47c'est comme
53:48un cancer du lapin
53:49et il va détruire
53:51la forêt
53:51s'il se multiplie
53:52trop vite
53:53exactement comme
53:54un cancer
53:54mais ce qui est intéressant
53:56c'est que dans le cadre
53:57du lapin
53:57on ne va pas dire
53:58que si d'habitude
53:59il ne le fait pas
54:00puisque quand même
54:02tous les lapins
54:03ne détruisent pas
54:03toutes les forêts
54:04c'est que
54:06on ne va pas dire
54:07pour le lapin
54:07il a une sorte
54:09de contrôle du tout
54:10il sait
54:11il a quelque part
54:12des instructions cachées
54:13il a un génome
54:14qui dit au lapin
54:15attention
54:15tu ne dois te multiplier
54:17que à la vitesse
54:18nécessaire
54:19à ton ensemble
54:20vous voyez que
54:21ce qu'on fait
54:22ce qui serait ridicule
54:23pour le lapin
54:24d'imaginer
54:25qu'il y ait un contrôle
54:26de sa multiplication
54:27au nom de la forêt
54:29et bien on le fait
54:30sur les cellules
54:31alors ce qu'il faut ajouter
54:33c'est que
54:34les prêts d'Arwiniens
54:35l'auraient fait comme ça
54:36c'est à dire que
54:37les prêts d'Arwiniens
54:38auraient dit
54:38il y avait la police
54:42de la nature
54:42qui vérifiait
54:44qu'il y avait
54:45assez de branches
54:47pour les oiseaux
54:48que les lapins
54:50se multipliaient
54:50à la bonne vitesse
54:51il y avait
54:51et c'est pour ça
54:52que mon livre
54:53de 2000
54:54avec Jean-Jacques Kupiec
54:54s'appelait
54:55Ni Dieu Ni Gène
54:56c'est que le gène
54:57a pris ce rôle
54:59de police
55:00de l'organisme
55:01le rôle que
55:02Dieu avait
55:03dans la nature globale
55:04l'anthropocentrisme
55:07finaliste
55:07s'est introduit
55:08à l'intérieur du corps
55:10sous la forme du gène
55:11et donc en pratique
55:12si vous voulez
55:13si on adhère
55:13au modèle du lapin
55:15qu'est-ce qu'on fait
55:16pour les cellules
55:16si elles se multiplient trop
55:18faisons la même chose
55:19que les lapins
55:19si les lapins
55:21se multiplient trop
55:22c'est que
55:23il y a une saison
55:24riche en carottes
55:26ou que les renards
55:27ont un peu
55:27disparu cette année
55:28c'est-à-dire qu'on va
55:29s'intéresser
55:30aux équilibres matériels
55:31qui régissent
55:34les populations
55:34de lapins
55:35exactement comme
55:36on le ferait
55:36en économie moderne
55:37faisons ça
55:38pour les cellules
55:39alors bien sûr
55:40vous savez
55:41quelle préférence
55:41j'ai
55:42entre le programme
55:43de recherche
55:43qui va consister
55:44à trouver
55:45la mutation
55:46de la cellule
55:47cancéreuse
55:48et celui qui va
55:49s'intéresser
55:49aux équilibres
55:52métaboliques
55:53pourquoi les cellules
55:55se ralentissent
55:56où est-ce qu'elles vont
55:57chercher leurs ressources
55:58est-ce que
55:58le métabolisme
55:59du cancer
55:59va changer
56:00vous voyez que
56:01en tout cas
56:01même si moi
56:02je préfère la seconde partie
56:04ce qui est intéressant
56:04de voir
56:05c'est qu'en partant
56:05de philosophie
56:07et de concepts
56:08assez différents
56:09on arrive
56:10en tout cas
56:10à des programmes
56:11de recherche
56:12qui sont bien divergents
56:13l'un de l'autre
56:14merci beaucoup
56:15de votre attention
56:16merci
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